Daniel Cordier est mort.
Avec lui disparaît un des grands témoins de la Résistance et de l’évolution de notre pays au cours du siècle écoulé.
En 1940, l’armée française, vainqueur des Allemands en 1918, s’effondre en quelques semaines ; tout un peuple est hébété par cette défaite fulgurante qui met en péril l’existence même de la France.
La volonté de ne pas se résigner à la victoire du nazisme dépasse les obédiences politiques, et des hommes de droite comme de gauche s’engageront dans une Résistance aux multiples facettes pour le même motif : assurer l’avenir d’une France indépendante et la défaite d’une idéologie infâme.
Daniel Cordier a 20 ans en 1940. Il est royaliste et maurassien, et par conséquent il appartient à une extrême-droite qui, si elle a manifesté une certaine admiration pour le Reich d’Hitler et l’ordre illusoire qui y règne, n’a jamais été à l’aise avec son matérialisme et ses inclinations révolutionnaires.
Mais cette fascination ne pouvait survivre à la défaite du pays, et pour un homme tel que Cordier l’engagement, réel et concret, qui implique que l’on risque sa vie pour une cause, était une nécessité.
Alors Cordier rejoint très vite le général de Gaulle, puis entre au service de Jean Moulin, le grand organisateur de la Résistance sur le territoire national. De cette activité aux implications considérables, qui a coûté la vie à son chef, Daniel Cordier entretiendra le souvenir en s’efforçant de ne pas tomber dans la grandiloquence et en respectant un véritable devoir d’histoire pour les générations futures.
L’influence de Jean Moulin sur la vie de Cordier n’était pas que politique et morale, mais aussi artistique. De sa rencontre avec le grand homme, Daniel Cordier avait acquis une connaissance très fine de l’art moderne, qu’il s’efforça de défendre, non sans difficulté croissante dans une France de moins en moins soucieuse de promouvoir sa vie artistique.
La vie de Daniel Cordier ne mérite pas seulement notre hommage pour son engagement courageux dans la Résistance : l’évolution de ses idées politiques est à nos yeux l’expression d’une réflexion conséquente et pleine de bon sens, au cours de laquelle il renoncera à ses attachements maurassiens pour défendre la République contre l’extrême-droite.
Daniel Cordier aimait son pays, mais il n’était que trop conscient de la menace que le nationalisme exacerbé et la haine de l’autre pouvait représenter pour voir dans le fascisme et l’autoritarisme des moyens de régler les problèmes de notre société, et son engagement pour le progressisme a été sans faille dans les dernières années de sa vie.
Pour Daniel Cordier, la République était non seulement l’avenir de la France, à la fois comme grande idée et comme réalité concrète, mais aussi celui de toutes celles et ceux qui constituent son peuple.
Ce soir la Gauche Républicaine et Socialiste rend hommage à Daniel Cordier, à l’homme qu’il a été, à son engagement dans la Résistance et à son cheminement politique.