Grève à la raffinerie de Grandpuits : récit d’une journée de mouvement social

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Ce dimanche 7 février 2021, deux militants de la Gauche Républicaine et Socialiste de Seine-et-Marne – Nathalie Moine, co-référente départementale GRS77 et Gurvan Judas – se sont rendus à la raffinerie de Grandpuits dans le sud du département où les salariés sont maintenant en grève depuis le 4 janvier. Plus de 40 jours. 40 jours de combats. Gurvan nous raconte cet après-midi auprès des salariés et de leurs soutiens.

« La raffinerie, alimentée depuis des pipelines venants du Havre et remontants,la Seine est vétuste. Elle est en réalité « délaissée » au nom d’une politique écologique fondée sur la production de biocarburants et de bioplastiques et l’exploitation de deux centrales solaires photovoltaïques : Total cherche ainsi à se repeindre en vert pour l’occasion. Un plan de licenciement est prévu. La raffinerie doit faire l’objet d’une reconversio, et arrêter toutes ses activités d’ici 2023.

Une procédure de plan de sauvegarde de l’emploi prévu va entraîner la disparition de 150 postes. Mais d’après les syndicats, ce sont 700 salariés, sous-traitants compris, qui seront touchés. Des chiffres que conteste la direction de Total qui assure que 250 postes seront maintenus et 15 autres créés. Malgré cela, la colère des salariés de la raffinerie de Grandpuits monte, encore et toujours, en témoigne ce que nous avons vu ce dimanche.

Arrivés aux alentours de midi, nous avons dans un premier temps vu peu de monde : des Gilets Jaunes, des membres de la CGT et d’organisations politiques comme Le Mouvement Révolutionnaire (issu d’une scission du NPA), ainsi que des membres d’écoles d’art étaient déjà présent sur place, autour d’un feu. S’organisait alors progressivement la journée dans une ambiance festive ainsi que le repas : merguez, barbecue, sandwich. Des panneaux “En Grève” et des drapeaux de la CGT recouvrent le parking, une table, des caisses de grèves et même un sapin de Noël avec un gant faisant un doigt d’honneur en guise d’étoile ( certainement adressé au PDG de Total). Progressivement, de plus en plus de monde arrive, plusieurs dizaines, avant que le spectacle ne commence. Car ce dimanche se tenait une journée spéciale sur le parking de la raffinerie où a été installé un chapiteau pour l’occasion. À proximité du piquet de grève, des artistes, un chanteur, défendant d’une voix grave, accompagné d’une guitare et d’un accordéon, le sort des salariés. S’y ajoutent bientôt une troupe de cirque, des numéros de jonglage et d’acrobaties pour rythmer cette journée festive. Des numéros impressionnants remplis d’humour et de dérision face à la situation des salariés, les jongleurs, jonglant avec de fausses bouteilles de Champagne amenées « pour le PDG de Total ». « On est là, on est là, pour l’honneur des raffineurs et pour un monde meilleur, même si Macron ne veut pas nous on est là », cette adaptation de l’antienne des Gilets Jaunes ponctue l’après-midi Tout cela malgré un froid glacial et la neige par moment. Enfin, pour finir un numéro de Stand Up, Audrey Vernon, venue jouer son spectacle « Billion dollar baby » pour clôturer cette journée de fête.

Avant le spectacle, les raffineurs s’étaient réunis ; ils n’étaient que quelques uns à être présents, la majorité de cette petite foule joyeuse – malgré la situation – est constituée des familles des raffineurs et de différents soutiens. Ces soutiens, ces présences sont essentielles pour les raffineurs comme l’a rappelé Adrien Cornet délégué CGT de Grandpuits, organisateur de cette journée, dans un discours magnifique, où il était ému aux larmes.

Nous avons pris le temps de le rencontrer ensuite lui, ainsi que plusieurs autres raffineurs et organisateurs de cette journée, pour échanger sur la lutte qu’ils conduisent. Leur discours est intelligent, censé ; ils sont conscients de la crise écologique, de la nécessité d’engager cette transition, que le pétrole pollue. Ils demandent cependant que cette transition écologique se fasse en amont : elle doit être programmée, engagée de manière intelligente, préparée. Et non se faire au détriment de centaines d’emplois, l’écologie servant ici d’excuse à Total pour fermer un site vétuste dans lequel elle a cessé d’investir. C’est ce que que nous a dit l’un des organisateurs.

D’autres journée de ce type et actions sont prévues, notamment une manifestation ce mardi 9 février à La Défense au pied de la Tour Total. Les soutiens sont nombreux, les syndicalistes affirment qu’« une dizaine de milliers d’euros » a déjà été récoltée pour soutenir le mouvement.

Comment ne pas être ému devant ces gens conscients de la réalité, dont le discours est lucide. Ils se battent pour leur avenir et leurs emplois, dans le rire et la joie ; ils font peuvent d’une force et d’une résilience formidable, d’une solidarité sans faille. Des gens qui se battent pour leur emplois face au géant Total, pour l’honneur des raffineurs et pour un monde meilleur, oui ils sont là…et le resteront jusqu’à ce qu’ils soient enfin entendus … et il serait bon que ce ne soit pas que par Total ! »

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