En octobre 2023, l’alliance polonaise des Libéraux, des démocrates-chrétiens et de la gauche mettait fin dans les urnes à neuf années de domination sans partage du parti ultra-conservateur et réactionnaire des frères Kaczyński, le PiS. Progressivement, les droits des femmes et des minorités sexuelles, particulièrement mis à mal depuis une décennie, devraient retrouver le chemin du progrès.
Une semaine avant, le Hamas et le Djihad islamique avaient provoqué le pire massacre collectif de Juifs depuis 1945, à l’intérieur des frontières de l’État d’Israël, démontrant ainsi la faillite de la politique sécuritaire de la coalition d’extrême droite au pouvoir avec Benyamin Netanyahu… Indépendamment du droit de l’État d’Israël à se défendre et de la disproportion hallucinante des opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza (dont nous n’avons cessé de dénoncer les conséquences horribles sur les populations civiles), cet événement traumatique semble avoir provoqué un sursaut civique contre l’alliance de la droite sécuritaire et des suprémacistes religieux qui dominent le cabinet : les manifestations des familles des otages sont venues s’ajouter à celles déjà massives contre la réforme de la Cour suprême… il n’aura échappé à personne que la majorité des victimes de la tuerie du 7 octobre sont issues des kibboutzim de la gauche laïque du nord du Néguev ou de la jeunesse cosmopolite des grandes agglomération côtières … comme une alliance objective des « fous de dieu » pour provoquer la mort tout azimut. Or la Cour suprême vient de lever l’exemption militaire dont bénéficiaient les Haredim, cette part de la communauté israélienne ultra-orthodoxe qui prétend n’avoir à se consacrer qu’à la prière et à « l’étude » ; voilà une décision qui est susceptible de faire sauter le « cabinet d’union nationale » (les centristes de Beni Gantz avaient rejoint Netanyahu pour riposter au Hamas) qui se divise violemment sur le sujet : la faillite morale de l’opération militaire ne l’avait pas provoqué, peut-être que la fin de l’hypocrisie des passe-droits accordés au « messianiques » l’amènera enfin. À partir de là, la gauche et les centristes laïques devront s’organiser pour offrir une alternative aux Israéliens.
Aux États-Unis d’Amérique, malgré les sondages encourageants pour Donald J. Trump, ça tangue très fort dans le parti républicain où radicaux-religieux et conservateurs s’affrontent : à nouveau, la droite radicale a déposé une motion de censure contre le Speaker qu’elle avait elle-même imposé suite à un autre motion de censure… une nouvelle guerre parlementaire qui pourrait permettre le déblocage de l’aide à l’Ukraine et qui redonne à Joe Biden des marges de manœuvres pour imposer un peu de raison à son allié israélien et dans la campagne électorale intérieure.
Enfin, dimanche 31 mars, Recep Tayyip Erdoḡan et son parti l’AKP viennent d’essuyer leur première véritable défaite électorale à l’échelle nationale depuis 2022 à l’occasion des élections municipales qui ont conduit à une victoire large du parti kemaliste, républicain et laïque, le CHP qui renforce ses positions. Forcé de reconnaître, pour une fois, sa défaite, le pouvoir islamiste a cependant cherché à frapper l’autre parti démocratique d’opposition en invalidant de manière illégale l’élection du maire de Van au Kurdistan, membre du DEM parti de gauche et principale force politique turque représentant les Kurdes. Une réaction de fauve blessé avant d’annoncer le chant du cygne ?
Ce panorama des combats internationaux entre les forces de la réaction et celles qui défendent une société sécularisée devrait nous convaincre de la nécessité d’un sursaut en France. Au moment où le proviseur du Lycée Maurice-Ravel à Paris, menacé de mort pour avoir fait appliquer la loi de 2004, n’a pas trouvé d’autre alternative que la démission, au moment où une collégienne a été passée à tabac devant son établissement à Montpellier, après avoir été harcelée un an et demi durant parce qu’elle se maquillait et refusait de se voiler, nous enverrions en baissant les bras un signal désastreux au monde alors que les universalistes relèvent la tête. Non seulement il temps de prendre la mesure des ravages causés par la radicalisation confessionnelle chez nos concitoyens et d’y apporter une réponse culturelle et politique, mais notre République dispose de la légitimité pour relancer le combat universel pour la Laïcité dans le sens de l’appel lancé le 11 décembre dernier par des militants laïques du monde entier.