Le volet judiciaire de la pollution de la Martinique et de la Guadeloupe par la chlordécone a été lancé voici 15 ans. Et pourtant le week-end du 27 février 2021, de nombreux compatriotes ultramarins ont manifesté leur colère, à Paris et dans leurs départements, face l’éventualité d’une prescription de ce dossier.
Pour rappel, ce pesticide, intensivement utilisé pendant plus de 20 ans dans les bananeraies de Guadeloupe et de Martinique, a empoisonné durablement les sols, les rivières et les espaces marins de ces territoires. Selon plusieurs études, ce produit phytosanitaire, qui a contaminé 90 % des populations concernées, a engendré des cancers de la prostate – la Guadeloupe et la Martinique affichent les taux les plus élevés au monde –, des naissances prématurées avec des malformations et bien d’autres maladies.
Hormis quelques travaux parlementaires, l’État n’avait pas avancé sur ce dossier jusqu’en septembre 2018. Lors d’une visite en Martinique, le Président de la République avait fait un pas historique en affirmant qu’il fallait « aller sur les chemins de la réparation ». Cependant, comme avec toutes ses autres promesses, c’est la déception et la frustration qui ont laissé place à l’espoir dans l’esprit des populations antillaises.
En effet, le Gouvernement et sa majorité n’ont cessé de freiner les travaux législatifs qui proposaient de réparer cette catastrophe notamment concernant :
une proposition de loi pour la mise en place d’un fonds d’indemnisation des victimes de la chlordécone qui a été vidée de sa substance par la majorité LREM de l’Assemblée nationale ;
seules quelques mesures d’une commission d’enquête sur le sujet – dont le rapport et les propositions avaient pourtant été salués sur tous les bancs – ont été intégrées au 4ème Plan Chlordécone (après ceux de 2008, 2011 et 2014) ; celles-ci sont largement insuffisantes au regard des impératifs sanitaires et environnementales.
Loin de vouloir commenter une décision de justice, la probabilité que la procédure engagée par plusieurs associations se solde par un non-lieu (du fait de la disparition de pièces du dossier et du délai de prescription des faits) va alimenter un climat social de plus en plus explosif au niveau local : de multiples manifestations et actes de violence qui avaient secoué la Martinique et la Guadeloupe en 2020. Une grande partie des revendications convergeaient alors pour dénoncer l’incapacité de l’État à apporter des solutions sur le dossier chlordécone et, selon des manifestants, la « continuité de la colonisation » dans les Antilles.
Quelle qu’en soit l’issue, il est nécessaire que l’État tienne ses promesses et fasse le nécessaire pour reconnaître et apporter des solutions à ce drame qui a empoisonné les sols de la Martinique et de la Guadeloupe pour 600 ans. Il en va du respect de principes et des valeurs de notre République.
La Gauche Républicaine et Socialiste apporte son entier soutien à nos concitoyens de la Martinique et de la Guadeloupe.