De la prévention au climat : un plan d’investissement isolation & ventilation pour un air plus sain et des bâtiments plus sobres

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COVID19 : de la pandémie à l’endémie

Depuis son apparition au début 2020 la pandémie COVID19 a causé en France près de 120 000 morts, (l’équivalent de 10 % des décès sur la période 2020-2021) ; un nombre au moins équivalent de patients sont passés par les services de soin intensif et y ont subi des soins lourds entraînant séquelles et/ou congés maladie de longue durée, d’autres, affectés de manière moins aiguë ont à subir les effets invalidants d’un COVID « long » encore mal compris. En décembre 2020 nous subissons la 5e vague de cette pandémie. Même si la vaccination en France n’est pas aussi complète qu’en Espagne ou au Portugal (qui ont réussi à vacciner plus de 98 % des personnes de plus de 70 ans alors qu’environ 10 % de cette population reste à vacciner en France) le taux de vaccination français dans la population adulte est suffisamment élevé pour qu’avec la généralisation du rappel (3e dose), on puisse espérer voir notre système de santé tenir (une fois de plus) face à cette 5e vague.

La nécessité d’une politique de prévention

Même si la vaccination se généralise, même si des traitements curatifs devraient devenir progressivement disponibles, il est à craindre que le COVID19 ne devienne une maladie endémique, i.e. qu’elle devienne comme la grippe (10 000 morts par an en France) une affection annuelle. Dans ce contexte, il est certes indispensable de remettre à remettre à flot le système de santé et tout particulièrement l’hôpital public. Mais s’il faut se donner les moyens de soigner, il convient également de se donner les moyens de prévenir, de façon à limiter en amont la propagation de l’épidémie.

L’exemple de la sécurité routière

Avant d’aborder le cas spécifique du COVID, revenons rapidement sur un exemple de prévention réussie : la sécurité routière. Entre 1972 (le pic de mortalité) et 2019 (avant la pandémie), le nombre de morts sur la route est passé de 18034 à 3244 (une baisse de plus d’un facteur 5) alors même que le trafic a lui augmenté d’un facteur presque 3. Le nombre de tués par milliard de voiture-kilomètres parcourus est ainsi passé de 77 à 5.2. Ce succès historique tient à la mise en place progressive d’un ensemble de mesures complémentaires qui ont porté sur : l’encadrement des comportements individuels (limitations de vitesse, du taux d’alcoolémie, interdiction des stupéfiants, port de la ceinture des sécurité ; un travail normatif sur la sécurité des véhicules (résistance aux crash-test, airbag, pare-brises feuilletés) ; un travail de sécurisation des infrastructures routières (identification et sécurisation des points les plus dangereux, diminution des passages à niveau, etc.). C’est la combinaison de l’ensemble de ces mesures qui a permis de faire de la route un endroit plus sûr1.

1 chiffres extraits du site de l’observatoire national interministérielle de la sécurité routière: https://www.onisr.securite-routiere.gouv.fr

La prévention du COVID ne saurait s’appuyer sur la seule stratégie vaccinale

Aussi efficaces soient les vaccins, leur couverture ne saurait être totale, ni leur protection parfaite. On constate d’ailleurs dans le cas du variant delta l’importance de la différence entre l’efficacité (préservée) de la protection vaccinale vis-à-vis de la gravité de la maladie et l’efficacité (altérée) vis-à-vis de la transmission. Du fait de son manque d’efficacité vis-à-vis de la transmission, ces vaccins initialement conçus pour le variant alpha demeurent un outil de prévention (de protection) individuelle mais ont pour partie perdu leur statut d’outil de prévention collective : ils permettent de diminuer l’afflux de patients à l’hôpital mais pas de juguler la propagation de l’épidémie.

Responsabilisation individuelle et coercition

Jusqu’ici la politique de prévention s’est essentiellement appuyée sur l’encadrement des comportements individuels (port du masque, distanciation sociale), une stratégie vaccinale fondée sur le seul concept de l’offre (pas d’obligation vaccinale non plus que de convocations individuelles comme le pratiquent avec succès l’Espagne et le Portugal), la mise en place de restriction des libertés individuelles (confinement, couvre-feux, pass sanitaire), la facilitation/massification de l’accès au dépistage (gratuit jusqu’à octobre dernier) et une politique (assez inefficace) de traçage : solutionnisme technologique via le développement de l’application stop-covid devenue ensuite tous-anti-covid ; manque d’investissement humain pour constituer des brigades de traçage1.

1https://www.mediapart.fr/journal/france/041221/sous-effectif-precarite-regles-obsoletes-le-tracing-est-deborde-par-le-coronavirus

Transmission aérosol

La difficulté et l’échec relatif des politiques de traçage tiennent notamment à une caractéristique du COVID19. A l’instar d’autres maladies respiratoires (grippe, tuberculose), sa transmission est essentiellement aéroportée : le virus SARS-COV2 est transporté dans l’air via l’émission des micro-gouttelettes (de tailles inférieure à 50-100 microns, le diamètre d’un cheveu) que nous émettons en respirant ou en parlant. A l’inverse des postillons, celles-ci sont suffisamment petites pour rester très longtemps (plusieurs heures) en suspension dans l’air et contaminer des personnes distantes de l’émetteur, même après que celui-ci a quitté la salle. Afin de diminuer les risques de transmission, il est donc crucial d’aérer, de ventiler et de contrôler l’atmosphère intérieure des logements, lieux de travail et autres bâtiments recevant du public.

Aération-ventilation-Taux de CO2

Malgré les alertes précoces (dès l’été 2020) d’une partie de la communauté scientifique, notamment au travers de l’initiative ProjetCO21 , l’existence de méthodes de mesure de la qualité de l’air (via le taux de CO2 – également émis lorsque nous respirons) et de normes tant sur la ventilation que les taux de CO2 dans les espaces clos, la communication sur l’importance de l’aération et la ventilation est restée jusqu’ici très en retrait vis à vis des autres mesures recommandées pour la prévention.

Pas plus qu’il n’y avait de fatalité à accepter de voir la jeunesse française fauchée par les accidents automobiles, il n’y a de fatalité de voir hôpitaux et établissements scolaires devenir les principaux foyers de contamination de la pandémie au COVID du fait d’une mauvaise ventilation. Comme le souligne l’Académie des Sciences dans son avis du 11 juin 20212, la relation entre la santé des enfants ou des adultes et l’aération des lieux fermés n’est pas une question nouvelle. Qu’il s’agisse d’écoles ou d’universités, de transports en commun, d’ateliers ou d’immeubles de bureaux, ces questions ont fait l’objet d’analyses scientifiques, préconisations légales et incitations multiples. Par ailleurs, au-delà de la crise sanitaire due au COVID19, l’aération et la ventilation des lieux fermé sont des méthodes de prévention déjà connues de la plupart des maladies respiratoires (au premier rang desquelles la grippe), ainsi que de la pollution intérieure (Composés Organiques Volatils, fibres, monoxyde de carbone, moisissures, etc.) connue pour être souvent très supérieure à la pollution atmosphérique3. Enfin le taux de CO2 est également important à contrôler dans le contexte scolaire puisqu’au delà de 1000 ppm, il est connu pour altérer les performances cognitives des élèves.

Si la France est un des rares pays européens à n’avoir pas revu les règles relatives à la ventilation des logements depuis plus de 30 ans4, il reste que des règles existent, généralement fondées sur des travaux de la fin du XIXe siècle. L’arrêté du 20 novembre 1979 portant règlement sanitaire du département de Paris5 stipule ainsi dans son article 64 : « En aucun cas, dans les conditions habituelles d’occupation, la teneur de l’atmosphère en dioxyde de carbone ne doit dépasser 1 pour mille avec tolérance de 1,3 pour 1000 dans les locaux où il est interdit de fumer. » Alors même que depuis près de 2 ans les Français vivent sous un régime d’exception, il ne s’est trouvé personne au gouvernement pour faire simplement appliquer la législation existante.

1https://projetco2.fr/

2 https://www.academie-sciences.fr/pdf/rapport/2021_06_11_Avis_CO2.pdf

3Site de l’Office de la Qualité de l’Air Intérieur: https://www.oqai.fr/fr

4 Le guide technique de la ventilation – Terre vivante 2013

5 https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGITEXT000006070308/2021-05-27/

Propositions

Pour compléter la politique vaccinale et l’indispensable remise à flot de l’hôpital public nous proposons de développer une politique de prévention basée sur la ventilation, la mesure des taux de CO2 dans les locaux fermé, et tout particulièrement dans l’habitat, les établissements scolaires, les hôpitaux et les entreprises.

Travail normatif – il sera entrepris en partenariat avec des partenaires institutionnels, tels que l’Office de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI), le Centre Scientifique et technique du Bâtiment (CSTB) pour mettre à jour la réglementation sanitaire relative à la qualité de l’air intérieur, sa mesure (en particulier le taux de CO2) et à la ventilation.

Commande publique – Un plan de mise aux normes des établissements publics sera lancé pour équiper en capteurs de CO2 et rénover leurs système de ventilation. La priorité sera donnée aux hôpitaux et aux établissements scolaires et universitaires. L’élaboration des éléments techniques associés à cette commande publique sera effectuée en partenariat avec des partenaires tels que l’ADEME en sus du CSTB et de l’OQAI. La ventilation des bâtiments ne saurait en effet être mise en œuvre sans prendre en compte la qualité de leur isolation (intérêt de la ventilation double flux, de la ventilation naturelle assistée).

Développement d’une filière technologique isolation/ventilation – L’isolation des bâtiments comme la mise en place, le contrôle et la maintenance d’un système de ventilation requièrent un savoir faire et des technologies de haut niveau. Si la commande publique peut permettre de viabiliser un réseau de TPE/PME spécialisées dans l’installation, il convient aussi de pouvoir s’assurer du respect de la qualité des travaux, de pouvoir fabriquer les matériaux et les équipements nécessaires et de développer des certifications, des mentions et/ou des diplômes spécifiques à tous les niveaux nécessaires (BEP, Bac, DUT, ingénieur).

-Plan de mise aux normes isolation/ventilation du bâti ancien – La question de l’isolation de l’habitat et du bâti ancien peut sembler dépasser le cadre de cette note motivée par la prévention COVID. Du point de vue technique, isolation et ventilation sont pourtant étroitement liées et requièrent un grand savoir-faire technique. Combiner ces deux approches et ainsi pertinent du point de vue industriel et technologique mais permet également de porter un point de vue original sur un sujet devenu consensuel, la sobriété énergétique via l’isolation. Si l’accord est général sur la nécessité d’isoler le bâti ancien, la question de sa mise en œuvre, est quant à elle beaucoup plus problématique et en fait très politique. Depuis 20 ans au moins, celle-ci repose sur des politiques d’incitations, en particulier via des crédits d’impôt. Ces politiques ont été d’une efficacité médiocre, voire ont généré des escroqueries variées. Par ailleurs la qualité des travaux effectués, et donc les gains énergétiques n’ont pas toujours été au rendez-vous. Sur ce sujet la différenciation politique doit se faire sur la méthode. Il faut sans doute assumer une stratégie de planification beaucoup plus dirigiste, accompagnée de la mise en place d’une filière technologique.

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