Non à la privatisation des routes nationales!

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Un décret lié à la LOM ouvre la possibilité de privatiser les Routes nationales : pour nous c’est non !

La presse a relevé le 18 septembre dernier qu’un décret relatif à la Loi d’organisation des mobilités (LOM) avait été publié le 15 août, en plein été pour échapper à l’attention, qui ouvre la possibilité de privatiser les routes nationales.

Le gouvernement poursuit l’extension du marché et cède à la rente privée un investissement public payé par les Français. Il répond ainsi à l’appétit des grands groupes privés qui profitent déjà de la privatisation des concessions autoroutières.

Ainsi l’État macroniste n’a pas la volonté de s’embarrasser de l’entretien correct de nombreuses portions de routes nationales, et pour parvenir à ses fins explique qu’il n’en a pas les moyens. Cette stratégie est poursuivie depuis plus de 15 ans par tous les gouvernements qui se sont succédés : lorsqu’il ne transfère pas tout simplement aux départements certaines routes nationales (qui n’ont pas les moyens suffisants pour un entretien convenable), l’État choisit de négliger dramatiquement les milliers de kilomètres qui restent de sa responsabilité, qui souffrent ainsi d’un sous-investissement chronique et finissent par se dégrader.

L’État macroniste veut ainsi nous faire croire aux sirènes des sociétés concessionnaires privées d’autoroutes qui susurrent : « si vous nous confiez certaines portions, les derniers kilomètres avant l’autoroute, par exemple, nous les entretenons, nous investissons, et, en échange, vous prorogez nos contrats autoroutiers ».

Aucune leçon tirée du scandale des autoroutes

Or, l’allongement des durées de concession, c’est justement ce qu’il faut éviter, comme le démontre le rapport de la commission d’enquête du Sénat rendu public également ce vendredi 18 septembre, après 8 mois de travaux intensifs. Selon les estimations de ce rapport, au moins deux des trois sociétés concessionnaires auront rentabilisé leurs investissements dès la fin de l’année 2022, alors que les contrats courent pour encore au moins dix ans. Prolonger la durée des concessions reviendrait à priver l’État de nouvelles recettes, car plus une concession est vieille, plus elle est rentable. Les dividendes versés aux actionnaires de ces sociétés privées sont d’ores-et-déjà conséquents, nourris par une gestion opaque des tarifs et des péages au détriment des usagers, qui n’ont aucun moyen de pression – pas plus que l’État qui s’en est volontairement privé. En effet, les contrats de concession accordés à ces grands groupes (Eiffage, Vinci, Abertis, pour les plus importants) ont été négociés de dans un sens qui leur était particulièrement favorable et toute tentative pour remettre de l’ordre a été ajournée sine die, comme le démontre le scandale du fiasco de la mission d’information de 2014, dont le rapporteur socialiste Jean-Paul Chanteguet fut mis sur la touche pour avoir trop vertement critiqué les conditions dans lesquelles le gouvernement Hollande avait renouvelé en 2013 les concessions. La commission d’enquête sénatoriale a ainsi auditionné plusieurs ministres qui ont reconnu l’opacité de la gestion de ces contrats de concession, indiquant avoir été même écartés de certaines négociations.

Tout le monde s’accorde aujourd’hui à reconnaître que la privatisation des concessions autoroutières en 2005, décidée par le gouvernement de Dominique de Villepin, a été une gigantesque erreur. Pourtant la droite sénatoriale comme le gouvernement Macron et sa majorité refusent aujourd’hui de réparer cette erreur, invoquant le même argument (et le seul) qui avait justifié la privatisation en 2005 et le renouvellement des concessions en 2013 : « la dette » ! Ainsi Bruno Le Maire annonce sans examen au fond du coût réel des concessions un prix de 45-50 Mds €, ce qui serait selon lui trop cher pour la puissance publique. Ce prix doit être interrogé, au regard de l’opacité du dispositif et des pratiques des sociétés privées. Or nous l’avons tous constaté, l’argent n’est pas cher aujourd’hui pour la puissance publique : l’État vient d’emprunter plusieurs centaines de milliards d’euros sur les marchés et parfois à des taux négatifs. Ainsi investir pour racheter les concessions autoroutières, ce serait à la fois mettre fin à une rente indue pour des sociétés privées qui n’apporte aucun avantage pour les usagers et créer demain des recettes importantes pour la puissance publique ! Même la commission d’enquête sénatoriale pourtant largement orientée à droite estime qu’il est temps de “partager équitablement les profits futurs avec l’État et les usagers” et pour ce fait suggère de ne pas renouveler certaines concessions autoroutières.

Les péages ne doivent plus servir à nourrir les dividendes des actionnaires mais à financer le retour à la gestion publique des autoroutes et à améliorer le réseau et le service, avec trois axes prioritaires : l’aménagement du territoire, la transition écologique et la maîtrise réelle des tarifs et péages (donc la défense du pouvoir d’achat).

Cadeaux et idéologie

On ne peut qu’être consterné par ce refus obstiné de tirer les enseignements du scandale des concessions autoroutières. Pire, le gouvernement Macron est en train aujourd’hui d’engager une aggravation de la situation en étendant à tout ou partie de plusieurs routes nationales le modèle néo-libéral qui s’applique aux autoroutes.

Il s’agit évidemment pour le futur candidat à l’élection présidentielle de favoriser un peu plus quelques sociétés privées et parmi elles leurs principaux actionnaires, dont il pourra récolter le soutien en temps opportun, étant bien entendu qu’Emmanuel Macron sert depuis 2017 les intérêts d’une caste stato-financière et qu’il a vocation à poursuivre dans cette voie.

La rente de situation des sociétés concessionnaires et la récolte de dividendes seront donc dopées par ce nouvel abandon de la puissance publique au détriment des usagers et des citoyens : la mobilisation des gilets jaunes avait ainsi illustré combien l’augmentation coût des transports est insupportable pour les ménages des catégories populaires et même des « professions intermédiaires ». Après l’échec de la privatisation d’ADP (plus du fait de la crise sanitaire que de la mobilisation somme toute remarquable des citoyens contre celle-ci), les routes nationales sont l’un des actifs les plus facilement aliénables pour satisfaire les grands appétits privés.

Au-delà de ces seules considérations vénales, la logique devant nous revient à mettre au clou notre patrimoine pour répondre à une injonction idéologique dangereuse.

La privatisation des routes nationales, après celles des autoroutes, vise à réduire encore un peu l’emprise de l’État – donc notre mandataire collectif – sur la circulation dans notre pays. C’est ni plus ni moins qu’une forme nouvelle de régression sociale : nous revenons aux institutions de l’Ancien Régime, aux logiques d’aménagement de l’espace et aux régimes de circulation qui dominaient notre pays avant la Révolution de 1789 avec les « Fermiers Généraux » et les octrois. Cela implique une forme de transfert de la liberté de circulation des usagers – les citoyens – vers les entreprises – le marché. L’espace politique de notre pays se trouve ainsi un peu plus placé sous l’emprise et le pouvoir des acteurs du marché (oui contrairement à ce que d’aucuns ont pu laisser entendre le marché n’est pas désincarné) et un peu moins sous l’autorité du peuple, fondement de la souveraineté populaire, donc de la démocratie.

Par ailleurs, une fois de plus, le néolibéralisme, présenté comme une forme de modernisation de la vie économique, engage une régression de l’économie d’un pays pour deux raisons :

  • Premièrement, en restreignant l’accès à la circulation dans l’espace public, la privatisation de ces routes réduit l’activité économique en diminuant les échanges. Ce que le néolibéralisme présente comme une forme de modernité est, en réalité, une régression économique qui tend à réduire le volume des échanges soutenant l’activité économique du pays. Même le marché, finalement, se trouve restreint par ce qui nous est « vendu » comme un outil de son développement.
  • La seconde raison est son incidence sur la circulation elle-même et, au-delà, sur l’emprise de la circulation sur l’activité industrielle. En conduisant à une limitation du volume des échanges et donc, de l’intensité de la circulation, la privatisation des routes conduit, à terme, à une diminution de l’usage des moyens de transport. Dans le temps long, cette privatisation pourrait conduire à une réduction de la demande des acteurs des échanges et ainsi, au-delà, à une réduction de l’offre en moyens de transport des acteurs de l’industrie.

En conséquence, la Gauche Républicaine et Socialiste demande le retrait du décret « relatif aux conditions de classement de certaines sections de routes dans la catégorie des autoroutes ». Elle s’oppose radicalement à la privatisation des routes nationales, et réclame le retour de toutes les infrastructures de transport dans le giron public .

la puissance publique doit s’engager dans une logique de non renouvellement des concessions des sociétés autoroutières et préparer une renationalisation de l’ensemble des autoroutes qui permettra le retour à une gestion publique, sous une forme à inventer pour qu’elle puisse associer les usagers.

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