Grève des travailleurs sociaux

Face à la perte de sens des métiers du social, pourtant exercés avec sérieux par les professionnels en présence,  face au manque de moyens humains et financiers, face  à la paupérisation des usagers mais également des professionnels, face à la crise de la vocation alors que les départs à la retraite s’accélèrent, les travailleurs sociaux en lutte demandent expressément : 

● L’attribution immédiate et SANS EXCEPTION des 183 euros pour tous les oubliés du SEGUR et de LAFORCADE ;

● Une convention collective commune de haut niveau, y compris pour la branche de l’aide à domicile et sans individualisation des salaires ;

● Dans le public comme dans le privé, l’embauche de professionnels formés en nombre suffisant et des conditions de travail qui préservent le sens de leurs interventions ;

● L’abandon de SERAFIN-PH et de toute forme de tarification à l’acte du secteur de l’action sociale ;

● La création d’un véritable statut pour les étudiants en travail social.

La Gauche Républicaine et Socialiste, consciente des enjeux à venir en terme de prise en charge sociale, en opposition totale aux politiques de précarisation générale engagée par les gouvernements successifs d’Emmanuel Macron, soutient la lutte des travailleurs sociaux qui ont déposé un nouveau préavis de grève et de mobilisation pour ce mardi 29 novembre et se tiendra aux cotés des salariés et agents partout où cela sera possible.

Retour sur notre beau congrès de Pantin

Notre Congrès de Pantin, les samedi 19 et dimanche 20 novembre derniers, a été une réussite et un beau moment de débat et de fraternité militante. Notre parti a réaffirmé notre volonté déterminée de construire le front populaire qui doit permettre le rassemblement de toute la Gauche et de rétablir le lien civique et politique avec toutes les catégories populaires qui sont la majorité de nos concitoyens. C’est le chemin pour redonner à la gauche sa vocation majoritaire.

Dès samedi matin, nous avons étudié les contributions que vous trouverez dans les liens ci-joints (une contribution très intéressante sur les Océans servira de base pour un travail de réflexion collective qui sera ensuite publié). Le samedi après-midi et le dimanche matin, nous avons examiné la trentaine d’amendements reçus. Par les moments passés ensemble dans la convivialité et la camaraderie, le constat fait à Rochefort en septembre dernier est toujours aussi vivace, après plusieurs séquences d’éloignement forcé, nous avons plus que jamais besoin de moments forts pour nous retrouver ensemble.

un des très nombreux moments de vote qui sanctionnent chacun de nos débats

Nous avons eu le plaisir de recevoir plusieurs invités de toute la gauche : les représentants d’EELV 93 sont venus nous saluer, le Maire PS Bertrand Kern nous a témoigné son amitié et ses encouragements à ce que nous poussions pour un élargissement à vocation majoritaire de la gauche, Christian Picquet de la direction nationale du PCF nous a fait le plaisir de sa présence et Fabien Roussel a envoyé un message fraternel très argumenté. Deux députés NUPES de Seine-Saint-Denis, Stéphane Peu (PCF) et Raquel Garrido (LFI) sont également intervenus pour saluer la qualité de notre texte et de notre réflexion sur la situation politique. Nos amis de la Fédération de la Gauche Républicaine et Socialiste était tous présents : NGS, L’Engagement, LRDG et MRC ont réaffirmé leur volonté d’approfondir notre collaboration.

Emmanuel Maurel, réélu Animateur national (à l’unanimité), et Marie-Noëlle Lienemann, qui restera notre coordinatrice nationale, ont défendu la nécessité de travailler à une grande bifurcation afin d’éviter un grand basculement vers l’inconnu et le déclin. Nos priorités sont connues : travail et salaires, production et relocalisation, éducation et universalisme, transition énergétique avec le soutien au nucléaire et aux énergies renouvelables pour une transformation écologique de nos sociétés. Notre parti prendra à bras le corps l’enjeu des élections européennes : la construction européenne est à la croisée des chemins et doit sortir de ses contradictions internes mortifères.

La GRS est également un parti internationaliste : nous avons été particulièrement heureux de l’intervention devant nos délégués de M. Mohand Arezki Hamdous, Secrétaire National aux Institutions et à la communauté algérienne établie à l’étranger du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie, parti progressiste et laïque algérien en lutte contre un pouvoir corrompu. Le pouvoir algérien tourne le dos à son peuple et nous adressons aux Algériens notre solidarité et notre fraternité. Nous aurons d’autres occasions de travail en commun. Plaisir aussi de rencontrer et d’écouter le témoignage de Chahla Chafiq, sociologue et écrivaine Iranienne (réfugiée en France suite à l’arrivée des islamistes au pouvoir, après la révolution de 1979 à laquelle elle participa activement, la contraignant à l’exil), venue nous parler de la Révolution en cours dans son pays. Le mouvement des femmes a impulsé le mouvement de tout le peuple iranien, c’est une force grandissante malgré la répression sanglante du régime théocratique.

Avant de conclure, rappelons que six résolutions fortes ont été adoptées pour adresser au pays des messages d’actualité de la GRS en plus de notre texte d’orientation :
👉 indexations des salaires sur les prix
👉 sortie du marché européen de l’énergie
👉 réindustrialisation de la France
👉 soutien au mouvement des femmes et du peuple iranien
👉 Hôpital public : urgence vitale !
👉 adhésion pleine au Parti de la Gauche Européenne

Vous trouverez ci le texte d’orientation définitif, les contributions thématiques et les résolutions du congrès.

Nous avons enfin adopté de nouveaux statuts qui nous permettront de renforcer et développer notre parti, en accroissant la participations des militants.

Au travail maintenant : le Collectif d’Animation National va rapidement mettre en place notre organisation et nos actions.

“Un nouvelle étape”, texte d’orientation adopté au congrès 2022

Les samedi 19 et 20 novembre 2022, les délégués des militants de la Gauche Républicaine et Socialiste et les membres du Collectif d’Animation National réunis à Pantin pour le congrès du parti ont débattu des amendements et des contributions thématiques adressés par les militants autour du texte d’orientation proposé par Emmanuel Maurel.

Après adoption des amendements (et des contributions thématiques qui y sont annexées), le congrès a adopté à l’unanimité le texte d’orientation de la GRS pour les trois prochaines années. Découvrez le ci-dessous.

Le congrès s’est également prononcés sur plusieurs résolutions, messages politiques d’actualité de la GRS adoptés le dimanche 20 novembre 2022, qui sont également disponibles ci-dessous.

Statuts de la Gauche Républicaine et Socialiste

Il est formé entre les adhérents aux présents statuts une association régie par la loi du 1er juillet 1901 et le décret du 16 août 1901 ainsi que par la loi n°88-227 du 11 mars 1988 modifiée, dénommée « Gauche Républicaine et Socialiste ».

Les présent statuts, adoptés lors de la convention nationale de Pantin le dimanche 20 novembre 2022, remplacent les statuts précédemment adoptés par les rencontres fondatrices de Valence les 2 et 3 février 2019.

Il faut se préoccuper de l’intelligence artificielle avant qu’il ne soit trop tard

Tribune d’Emmanuel Maurel (député européen GRS), Pierre Ouzoulias (sénateur et conseiller départemental communiste des Hauts-de Seine) et Cédric Villani (mathématicien et ancien député) publiée dans Le Huffington Post le 16 novembre 2022

« Quelles institutions, quelles règles pour faire le bon tri, en régulant tout en permettant les progrès permis par l’IA ? Du travail a été fourni, du travail reste à fournir », estiment Pierre Ouzoulias, Emmanuel Maurel et Cédric Villani.

Que diriez-vous d’un monde dans lequel un article de journal ou le scénario d’un film serait intégralement rédigé par une intelligence artificielle ? Que penseriez-vous d’une société dans laquelle une décision de justice serait rendue par un algorithme ? D’une chaîne de musique qui vous ferait entendre un nouveau morceau composé de A à Z, paroles, instruments et arrangement, par un réseau de neurones ? Accepteriez-vous de travailler dans une entreprise qui laisserait à une machine le soin d’examiner votre CV et à une autre le droit de vous accorder une pause ?

Ces exemples ne sont pas issus du Meilleur des mondes ou de 1984, référence incontournable de la littérature dystopique. Ils ne sont qu’une infime partie de ce qui est déjà rendu possible par l’intelligence artificielle. Ils ont déjà tous été mis en œuvre ici ou là, suscitant des débats légitimes, dans la foulée du célèbre ouvrage de l’informaticienne Cathy O’Neil : Algorithmes, la Bombe à retardement.

La question n’est désormais plus de savoir si nous devons approuver ces bouleversements. Il est trop tard pour cela, et les rejeter, ce serait oublier les côtés plus sympathiques. L’algorithmique, experte en diagnostics à partir de données médicales, a déjà sauvé des vies. À Singapour, elle recale en temps réel les feux de circulation pour laisser la voie libre à une ambulance appelée pour une urgence vitale. Elle apporte un peu de confort plus que bienvenu à des agriculteurs. Elle donne chaque jour à des millions d’usagers les instructions pour trouver un itinéraire rapide, aller à la rencontre du bon arrêt de bus dans une ville inconnue. Elle améliore des consommations d’électricité à l’échelle de ménages ou de communes, aide à optimiser les positions des éoliennes, fouille les entrailles des grandes bases de données médicales pour mettre au point de nouveaux traitements.

La question n’est désormais plus de savoir si nous devons approuver ces bouleversements. Il est trop tard pour cela, et les rejeter, ce serait oublier les côtés plus sympathiques.

Quelles institutions, quelles règles pour faire le bon tri, ou le bon compromis, régulant tout en permettant les progrès permis par l’IA ? Du travail a été fourni, du travail reste à fournir. Les interrogations liées à l’IA passent souvent sous les radars politique et médiatique. Sans doute est-ce dû, pêle-mêle, à l’ésotérisme du jargon de la « tech » et au lobbying des grandes compagnies internationales qui présentent l’IA comme un progrès à accepter d’un bloc, incorporée dans des solutions démesurées par leur complexité technologique, leur dilapidation de matière et d’énergie et parfois les conditions inhumaines dans lesquelles travaillent sous-traitants et fournisseurs. La compagnie Tesla est emblématique de ce travestissement de progrès. Son fondateur n’hésite d’ailleurs pas à évoquer l’IA comme une menace existentielle pour l’humanité, bien conscient de l’efficacité d’une telle provocation pour séduire les investisseurs.

À raison, l’impact sur le travail et l’emploi nourrit les plus grandes inquiétudes, tout autant que les plus grandes incertitudes. Emploi massif de travailleurs pauvres pour consolider des bases de données toujours plus importantes : ce prolétariat d’un nouveau genre, à défaut d’être remplacé par une armée de robots, ne doit-il pas être considéré comme tel ? L’esclavage d’employés d’Amazon soumis aux ordres d’algorithmes, tant dans leurs actions que dans la gestion de leurs pauses, les « optimisations » d’horaires devenus parfaitement ingérables et décrits dans le rapport de O’Neil, donnent finalement raison à Marx lorsque celui-ci affirmait que « le temps est tout, l’homme n’est plus rien ; il est tout au plus une carcasse du temps. ».

Qu’avons-nous à dire sur les implications philosophiques, juridiques et politiques de l’intelligence artificielle ? La Chine nous démontre comment elle peut être utilisée pour la surveillance massive et l’anéantissement de la vie privée. Aux États-Unis, elle s’est sournoisement infiltrée dans les procédures judiciaires accentuant le plus souvent les jugements à caractère raciste, ainsi que des associations ont pu le prouver.

Qu’avons-nous à dire sur les implications philosophiques, juridiques et politiques de l’intelligence artificielle ?

Le gouvernement français, suivant l’avis du rapport du Conseil d’État sur l’intelligence artificielle, a décidé de continuer le déploiement d’une stratégie initiée en 2018 : en témoignent les dispositions prévues dans le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur (LOPMI), qui est actuellement discuté au Parlement. Ce doit être l’occasion de poser encore et toujours les mêmes questions : comment instaurer un contrôle démocratique dans l’utilisation des algorithmes ? Comment l’articuler avec notre souveraineté numérique ? Quel sens politique accorder à l’usage croissant des nouvelles technologies ? Où trouver l’équilibre entre l’usage de l’algorithme et la protection des données ? Qui est responsable juridiquement de l’algorithme en cas de défaillance ?

Le temps presse, car les grands groupes disposent d’une avance considérable sur les États. Sans réaction de notre part, nous serons dans l’incapacité de construire une politique humaniste et opérante de l’intelligence artificielle. Le Parlement européen a déjà porté le fer sur le sujet, mais sans la couverture médiatique nécessaire à un débat fécond dans l’opinion publique.

L’objet de ce texte est précisément de contribuer à ouvrir la discussion pour les semaines et les mois à venir. Nous devons, selon le concept de Michel Callon et du regretté Bruno Latour, opérer un véritable travail de traduction autour de ces questions fondamentales, afin que les citoyennes et les citoyens appréhendent cette matière, qui, un jour ou l’autre, finira par les toucher. Il est essentiel que nos organisations politiques, les syndicats, les associations et les universitaires agissent de concert pour que demain, nous soyons tous capables de répondre à cet immense défi.

“Mascotte des JO fabriquée en Chine : et en plus c’est la France qui finance !”

Billet d’Emmanuel Maurel, député européen et animateur national de la GRS dans Marianne, le mercredi 16 novembre 2022

La peluche de la mascotte « Phryge » des Jeux Olympiques 2024 à Paris sera fabriquée… en Chine. Emmanuel Maurel, député européen de Gauche Républicaine & Socialiste, ne voit dans cette affaire qu’incohérence et indécence.

Tony Estanguet, président du Comité Paris 2024, n’aurait pas pu mieux dire : la mascotte « Phryge » représente « un idéal choisi pour faire porter un message ». Que les Français ont reçu 5 sur 5. Non seulement 92 % de ces peluches seront fabriquées en Chine, mais elles rapporteront au Comité d’Organisation 16 euros de bénéfice sur un prix unitaire de 35 euros ! Une belle illustration de la mondialisation capitaliste, pas forcément raccord avec la symbolique révolutionnaire du bonnet phrygien.

Au lendemain du Salon du Made in France, où 1 000 exposants ont présenté des produits de très haute qualité, dans leur grande majorité à la portée de toutes les bourses, le « business » est reparti « as usual ». Les Jeux Olympiques de Pierre de Coubertin se sont noyés dans les eaux glacées du calcul égoïste. Certes, personne n’ignorait l’habitude du CIO de transformer le sport et les sportifs en marchandises. Mais il était difficile d’imaginer que l’écart entre le réel et « l’idéal » soit poussé si loin.

INCOHÉRENCE ET INDÉCENCE

Dans cette affaire des Phryges, il n’y a qu’incohérence et indécence. On ne peut pas se gargariser de « l’esprit français », arborer fièrement nos « valeurs », vanter nos « savoir-faire » et recourir à de tels expédients. L’industrie du jouet en Chine est en effet l’un des secteurs où les salaires sont les plus bas et les conditions de travail les pires. Dans son rapport de novembre 2019, l’ONG « China Labor Watch » nous apprenait que les rémunérations y sont sous le minimum vital, que les ouvriers sont à presque 100 % des ouvrières, souvent mineures, et que le temps de travail peut être quasiment doublé du jour au lendemain pour faire face aux pics de production. Après leur journée de huit heures (+ 6 heures supplémentaires), les travailleuses sont envoyées « dans des dortoirs collectifs bondés, infestés de punaises, sans eau chaude ni endroit où ranger leurs effets personnels ».

Il est pourtant possible d’échapper à la fatalité du low-cost et, quoiqu’en disent les cadres des entreprises prestataires Gipsy et Doudou & Cie, de fabriquer en France une part beaucoup plus importante des deux millions de Phryges commercialisées lors des JO. À condition bien sûr de prévoir, planifier et investir dans les capacités de production, d’élever un peu le prix et surtout de rogner sur les marges. Est-il vraiment indispensable à l’équilibre financier de Paris 2024 de réaliser 32 millions de bénéfices sur la vente des mascottes ? Vu son budget prévisionnel de 4 milliards, la réponse est dans la question.

« FRANCE RELANCE » ? OÙ ÇA ?

La relocalisation des industries est un enjeu auquel les Français sont très attachés, particulièrement concernant les jouets. Et cela n’avait pas échappé au Gouvernement : dans un communiqué du 9 novembre dernier, le ministre délégué à l’industrie Roland Lescure se félicitait d’un apport public de 4,4 millions d’euros dans le cadre de « France Relance », afin de soutenir 19 projets représentant 15 millions d’euros. Ironie de l’histoire, les projets retenus portaient sur la création de jeux fabriqués à partir de matériaux recyclés et de… jouets en peluches ! Le groupe Doudou & Cie fait d’ailleurs partie des heureux élus.

L’ampleur – justifiée – de la polémique nécessite une action rapide pour corriger le tir. La responsabilité que confère l’organisation des Jeux Olympiques implique de faire le maximum pour que le rayonnement soit à la hauteur de l’évènement. Le Comité d’Organisation peut donner un coup de pouce aux entreprises lauréates, qui pourront produire les Phryges en France et faire ainsi correspondre les discours, les symboles et les actes.

L’Europe risque la marginalisation

Lundi 14 novembre 2022 à 19h30, Emmanuel Maurel, député européen et animateur national de la Gauche Républicaine et Socialistes, débattait lors de l’émission “Votre instant politique” (animée par Gilles Bornstein sur France Info) avec Chloé Ridel, directrice adjointe de l’Institut Rousseau, et Alexandre Holroyd, député Renaissance (LREM) de la 3e circonscription des Français de l’étranger.

Mise en scène des puissants de ce monde au G20 et de la domination Chine-USA, crise de l’Europe, guerre en Ukraine, Emmanuel Maurel a rappelé, au moment où le modèle allemand de développement et de puissance commence à connaître de profonde difficulté, qu’il était temps que la France comprenne enfin que le “couple franco-allemand” était un mythe et qu’il fallait penser avant tout à défendre les intérêts de notre pays. Malheureusement en plus de 60 ans, la construction européenne n’a pas débouché sur l’émergence d’un intérêt général européen ; il faut être conscient de ses limites et en tenir pour construire les coopérations qui nous permettront de ne pas être marginalisés par l’émergence ou la résurgence de nouveaux impérialismes.

Amendements et contributions pour le texte d’orientation “une nouvelle étape” – congrès de la GRS 2022

Élections de mi-mandat aux États-Unis, un sursaut anti-trumpiste

Mardi se tenaient les élections de mi-mandat américaine, lors desquelles un tiers des sièges du Sénat, la moitié des postes de gouverneurs et la totalité de la Chambre des représentants étaient mis aux voix. À plusieurs raisons, ces élections étaient cruciales dans le rapport que tiennent les Américains à la démocratie.

En effet, deux ans après le déni démocratique de M. Donald Trump, qui n’a jamais reconnu sa défaite à l’élection présidentielle de 2020, le retour au pouvoir législatif du camp radicalisé et fanatisé était largement envisagé et prédit par les sondages. Pour la première fois depuis 2008, les démocrates contrôlaient les deux chambres et la présidence. L’inflation galopante et la montée de l’insécurité leur étaient ainsi reprochées, et la popularité de Joe Biden, qui apparaît affaibli physiquement et politiquement, était loin d’être reluisante. En temps politique normal, tout annonçait un raz-de-marée républicain.

Et pourtant, les démocrates semblent avoir bien résisté, et le contrôle de l’une et l’autre chambre est encore incertain. On se rappellera qu’en 2010 et en 2018, passages respectifs de la Chambre aux républicains et aux démocrates, l’information était connue le soir même.

C’est que le contexte politique de cette élection, qui en temps normal mobilise bien plus l’électorat d’opposition que l’électorat du camp présidentiel, est tout sauf habituel. La polarisation de la société américaine en deux camps idéologiques et même culturels est plus forte que jamais.

Le camp républicain, nous l’avons dit, est à la fois radicalisé et fanatisé. Lors des élections primaires, les partisans de Trump, ceux qui nient la défaite républicaine de 2020, les complotistes ultrareligieux et maximalistes, l’ont emporté quasiment partout sur des candidats plus modérés (quoiqu’un républicain modéré soit, en France, l’équivalent de la droite radicale). Or, si la popularité de Joe Biden n’est guère reluisante, celle de Donald Trump est encore plus faible. Le rejet, en dehors du cercle très soudé et très organisés des conservateurs tendance maxi, de ses outrances et de sa négation de la défaite est encore très puissant. Les démocrates ont ainsi pu compter sur l’électorat centriste, qui a encore une fois pu faire la différence dans des États et circonscriptions-clefs.

En outre, le partage des pouvoirs, en apparence clairement en faveur des démocrates, n’est pas si net. Les États-Unis sont un pays fortement décentralisé, avec un système judiciaire indépendant aux compétences très larges. Chaque État (hormis le Nebraska) dispose de son propre Sénat et de sa propre Chambre des représentants, qui ont une latitude politique très large. Dans les États-clefs, Michigan, Wisconsin, Pennsylvanie, etc., les républicains dominent les législatures locales depuis plus d’une décennie. La Cour suprême est dominée par des juges conservateurs anti-avortement depuis le mandat Trump. Ainsi, la décision récente de ne plus protéger l’avortement au niveau fédéral, en donnant aux États le pouvoir en la matière, entraînant des lois immédiates de limitation du droit à l’avortement dans les États à législature républicaine, a pu donner l’impression d’un fort contrôle républicain et conservateur sur la politique locale comme nationale.

Ainsi, deux campagnes ont été menées en parallèle, presque hermétiquement l’une par rapport à l’autre. Les républicains expliquaient que les démocrates au pouvoir aggravaient l’inflation et l’insécurité. Leur frange radicale ajoutait qu’ils avaient volé l’élection de 2020. Les démocrates expliquaient de leur côté que les républicains menaçaient la démocratie et les libertés individuelles. Sur ce dernier registre, la désignation des secrétaires d’État des États fédérés représentait cette année un enjeu déterminant : cette fonction est stratégique car les titulaires du poste sont chargés de l’organisation des scrutins (notamment les limitations possibles au droit de vote ou du vote par correspondance) et de leur contrôle. Selon les États, une partie est désignée par les gouverneurs et les autres sont élus directement par les électeurs. Or plusieurs candidats républicains appartenaient au camp des « négateurs », c’est-à-dire cette branche radicalisée des républicains qui prétend encore que l’élection de Joe Biden à la présidence des États-Unis d’Amérique est frauduleuse : donner le contrôle des élections par ce courant politique (soit en élisant un gouverneur négateur, soit en élisant un secrétaire d’État négateur) aurait pu avoir des conséquences désastreuses pour le prochain scrutin présidentiel, et l’on a vu dans les débats nombre d’électeurs ou de candidats républicains expliquer tranquillement qu’ils n’accepteraient pas le verdict des urnes, prétendant qu’un résultat défavorable ne pourrait qu’être le signe d’une manipulation du scrutin. Dans les grandes lignes, l’outrance des positions politiques de ces candidats leur a été défavorable ce qui est en soi une bonne nouvelle.

Force est de constater que les démocrates ont échappé au triomphe républicain annoncé. Dans plusieurs États, des référendums se tenaient soit pour interdire l’avortement, soit pour le protéger dans la constitution locale. Partout où les votes avaient lieu, même dans le très conservateur Kentucky, les anti-avortement ont perdu.

Au Sénat, tout semble indiquer que les démocrates garderont le contrôle de la chambre haute. Ils ont remporté le siège très contesté et jusqu’alors républicain de Pennsylvanie, et ont sauvé leur poste en Arizona. Au Nevada, les républicains n’ont plus que 800 voix d’avance, et les derniers bulletins à dépouiller viennent de bureaux de vote très démocrates. En Géorgie, où un second tour devra se tenir, le sortant démocrate est en ballottage favorable. Cela donne un Sénat avec 49 démocrates et 49 républicains, en attente de ces deux résultats. Les démocrates n’ont besoin que d’une victoire pour conserver leur majorité, les républicains ont besoin de l’emporter dans les deux États, car en cas d’égalité de vote, c’est le vice-président, en l’occurrence la démocrate Kamala Harris, qui départage le scrutin.

consolidation des résultats pour le Sénat selon l’Associated Press ce matin à 5h52

À la Chambre des représentants, une victoire républicaine reste plus probable, mais n’est pas encore acquise. En l’état actuel du dépouillement, les républicains ont une avance de quatre sièges, mais 21 circonscriptions sont encore incertaines, et parmi elles, il n’est pas exclu que les démocrates repassent devant les républicains dans quatre d’entre elles. Les démocrates l’ont emporté dans des circonscriptions difficiles, qui parfois ont voté pour Donald Trump aux élections présidentielles.

consolidation des résultats pour la Chambre des représentants selon l’Associated Press ce matin à 5h52

Si les résultats nationaux semblent ainsi montrer une résistance démocrate nationale plus importante que prévue, il ne faut pas perdre de vue le caractère essentiellement local de l’élection de mi-mandat dans certains États. En effet, le système électoral américain fait que l’on vote en même temps pour tous les scrutins, quand il y en a plusieurs. La majorité des États élisaient ainsi le même jour leur gouverneur et leur législature locale. Avec la remise en cause du droit à l’avortement au niveau fédéral, et le transfert de cette compétence au niveau local, ce sujet a mené de nombreux électeurs démocrates aux urnes pour défendre, localement, le droit à l’avortement, leur permettant par la même occasion de voter démocrate à l’élection du sénateur fédéral et du représentant. Ainsi, en Arizona et en Pennsylvanie, où l’élection du gouverneur a déchaîné les passions, voyant l’affrontement entre républicains trumpistes radicalisés et démocrates battant campagne sur le thème de la défense du droit à l’avortement et de la démocratie, la victoire, assez nette, des démocrates, a eu un effet levier sur les autres élections. A l’inverse, la forte performance des républicains en Floride pour la réélection du gouverneur entraîne le basculement de 4 circonscriptions de représentants dans le camp républicain. Dans l’État de New York, la campagne catastrophique de la gouverneure démocrate sortante, qui ne l’emporte que de 5 points sur son opposant républicain, fait perdre aux démocrates 4 représentants, et peut-être un cinquième, le dépouillement n’étant pas encore achevé.

Les républicains, s’ils l’emportent à la Chambre des représentants, ne devront peut-être leur victoire qu’à un phénomène déjà observé depuis 2020, le basculement d’une partie des hispanophones dans le camp républicain. La Floride, jadis un Etat pivot votant alternativement démocrate et républicain, est désormais clairement passée dans le camp républicain. Le sud du Texas, une des rares zones rurales votant traditionnellement pour les démocrates, a élu cette année un représentant républicain, et le gouverneur démocrate sortant du Nevada a été battu par un républicain. Ce basculement, pas encore pris en compte par les démocrates mais au cœur de la stratégie républicaine, on se souvient des pubs de campagnes en espagnol diffusée par Donald Trump la dernière semaine de campagne en 2020, doit nous interroger. Un électorat populaire, issu des minorités et de l’immigration, très conservateur sur les questions de société, bascule à droite malgré un camp progressiste qui ne parle que d’intégration des minorités.

Six ans après le retour de la question sociale dans la vie politique américaine, avec la campagne très suivie de Bernie Sanders, quatre ans après les victoires tonitruantes de « democratic socialists » comme Alexandria Ocasio-Cortez à la chambre des représentants, la gauche du parti démocrate semble faire grise mine. Elle n’est plus au centre de l’attention, et ne progresse plus, l’électorat modéré passé au parti démocrate influençant plus qu’avant le résultat des primaires, et empêchant à la gauche progressiste de l’emporter dans de nouvelles circonscriptions.

Le bipartisme américain cache en effet de véritables factions organisées au sein des démocrates et des républicains. Le caucus progressiste, organisation de l’aile gauche démocrate à la Chambre des représentants, était le plus nombreux à la chambre en 2020, devant les New Democrats, au centre du parti, et les Blue Dogs, incarnant l’aile droite, centriste et ultra-libérale. La première moitié du mandat Biden a été marquée par l’obstruction politique constante de la droite du parti démocrate, menaçant de voter avec les républicains au Sénat et à la Chambre des représentants si les réformes sociales étaient poussées « trop loin ». La radicalité républicaine a ainsi renforcé les démocrates modérés, paralysant l’action politique, empêchant Joe Biden, pourtant New Democrat, de mener à bien certaines de ses réformes. Même en cas de victoire démocrate à la Chambre des représentants, il est peu probable que cela se traduise par des avancées politiques, les Blue dogs étant prêts à tout bloquer si les intérêts financiers de leurs riches sponsors sont mis en danger. Dans l’État de l’Oregon, le fondateur de Nike a créé de toutes pièces une candidature démocrate dissidente au poste de gouverneur, car la vainqueure des primaires était issue de l’aile gauche, et avait un programme social développé d’augmentation des salaires. Cette dissidence a failli faire passer cet État, un des plus démocrates du pays, sous un mandat républicain.

Chez les républicains, le problème Trump commence à être évoqué. Les opposants à Trump, décimés dans les primaires, manquent cependant de leaders pour incarner cette contestation. Ron DeSantis, galvanisé par sa réélection écrasante comme gouverneur de Floride, apparaît comme un recours pour les républicains trumposceptiques (bien que pas moins à droite). Reste à savoir s’il osera affronter l’ancien président, toute opposition interne à Donald Trump ayant été synonyme de fin de carrière politique depuis 2016. La prise en main du parti par l’extrême droite ultrareligieuse est un sable mouvant dont les républicains ne peuvent pas sortir et qui cause leur perte à répétition. La question de l’avortement, qui dépasse d’ailleurs le camp Trump et est combattu par l’ensemble du parti, ne cesse de les marginaliser, les Américains montrant sans relâche leur attachement à cette liberté fondamentale, combattu par une minorité cléricale très organisée.

Le cycle électoral de 2022 n’est pas encore terminé, on ne sait pas encore qui aura la majorité à la Chambre, et comment ces majorités seront utilisées. Les réformes sociales, tant attendues, n’auront probablement pas lieu, même en cas de victoire démocrate. La coalition démocrate, alliant catégories populaires, électorat féminin, minorités sexuelles et ethniques, et riches centristes modérés effrayés par les excès républicains, risque fort de se déliter. Elle n’est soudée que par la détestation commune de Donald Trump et la défense du droit à l’avortement. En cas de remise en cause du primat trumpiste au parti républicain, les contradictions démocrates risquent fort de s’ouvrir à vif. Un choix devra être fait, entre les catégories populaires et les intérêts financiers. Les uns comme les autres pourraient basculer dans le camp républicain. Reste à espérer que les intérêts populaires primeront.

Un Budget 2023 (partie recettes) contre les collectivités locales

Le projet de loi de finances pour 2023 arrive au Sénat après avoir été adopté sans vote de l’Assemblée Nationale. Dans un article récent, nous avons analysé la situation politique qui avait conduit à ce « 49.3 sans surprise » et ses conséquences. Il convient aujourd’hui d’en étudier le fond, sachant que le texte présenté à la Haute Assemblée par le gouvernement diffère très peu en réalité de son projet initial, la fable de son enrichissement par l’intégration d’amendements issus du débat parlementaire étant, comme nous l’avions expliqué, digne d’un Sganarelle.

Il faut cependant rajouter avant d’aller au fond que la méthode du gouvernement pour organiser les débats budgétaires a été particulièrement nébuleuse. En effet, la discussion commune entre le projet de loi de finances 2023 et le projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027 a généré de la confusion dans et en dehors de l’hémicycle. Les oppositions étaient amenées à procéder aux motions de rejet sur l’un et l’autre texte à la suite, avant même que la discussion générale n’ait été ouverte sur le projet de loi de programmation. D’autre part, le Gouvernement s’est à nouveau exonéré d’études d’impact en confiant à sa majorité des amendements pour donner l’illusion d’une majorité qui propose, et d’opposition cantonnées à un rôle d’opposant.

En réalité, seuls 24 amendements ont été débattus en séance publique, et parmi ceux adoptés en commission 72 ont été rayés d’un trait de plume par le gouvernement ; aucun débat sur les superprofits ; aucun débat sur les mesures énergétiques de plafonnement des prix de ventes sur le marché et les mesures exceptionnelles sur les bénéfices des raffineries.

La descente aux enfers de la fiscalité locale

Le projet de loi de finances du gouvernement Borne propose à l’article 5 la suppression en deux années de la Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE) : c’est un contresens économique, fiscal et politique. Quant à la Contribution économique territoriale (CET), elle sera plafonnée à 1,62% en 2023 puis 1,25% en 2024 soit une baisse de 2 points.

Une part de TVA serait fléchée pour compenser en l’affectant en deux parts :

  • La part fixe correspondant à la moyenne de leurs recettes de CVAE des années 2020, 2021, 2022 et 2023 (grâce à un ajout du rapporteur) majorée des exonérations de la moyenne des exonérations de CVAE perçue ou qui aurait été perçue par les communes ou les intercommunalités ;
  • Une part dynamique, si la TVA l’est, verra la différence affectée à un « Fonds national de l’attractivité économique des territoire ». Ce fonds sera réparti « afin de tenir compte du dynamise de leurs territoires respectifs », selon des modalités définies par décret.

En réalité, le budget Borne marque une disparition brutale des recettes fiscales économiques des collectivités, synonyme de subordination à l’État et de grave déconnexion avec l’activité économique des territoires. En 2008, les recettes issues de la taxe professionnelle (TP) s’élevaient à 29,14 Mds €. La suppression de la TP a été suivie par une baisse immédiate de plus 5 Mds €, avec la mise en place de la contribution économique territoriale (CET), composée de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la CVAE. En conséquence, la fiscalité économique locale, qui constitue aussi une incitation à faire venir des entreprises sur le territoire de la collectivité qui la maîtrisait, a été ainsi fortement réduite depuis 2011, passant de 26 % des produits de la fiscalité en 2008 à 13,3 % en 2021.

Le coût brut de la suppression progressive de la CVAE pour l’État est estimé à 8,9 Mds € à compter de 2024, pour un coût net de 7,2 Mds € espéré à terme. L’écart se justifiant par l’espoir qu’une partie des crédits de compensation versés aux collectivités (auxquelles on aura supprimé la CVAE) soit récupérée par un rendement croissant de l’impôt sur les sociétés (IS), la CVAE étant déductible l’IS.

Pourtant, au-delà du financement des collectivités locales, la CVAE, jouait également le rôle d’un rempart à l’optimisation fiscale1 en faveur de l’ancrage de l’impôt sur un territoire qu’il aurait convenu de renforcer. D’autant plus qu’à nouveau le macronisme a choisi de satisfaire parmi les entreprises les plus importantes d’entre elles : pour rappel, seules les entreprises au-dessus de 500 000€ de chiffre d’affaires acquittent réellement la CVAE.

Autre absurdité, la TVA devient la première ressource fiscale des collectivités locales, au détriment de l’État ; or ce jeu de transfert vers la TVA est un invariant de la politique fiscale d’Emmanuel Macron et ce dès le départ de son premier quinquennat. L’injustice fiscale est renforcée à chaque nouvelle affectation de TVA en compensation de fiscalité. Dans les faits, en considérant que la TVA est essentiellement payée par les ménages, l’imposition des ménages a donc progressé de 19,8% là où la fiscalité économique a reculé de 31,9% entre 2020 et 2021.

Les Collectivités dans l’incertitude face à l’inflation

Comparé à ces bouleversements fiscaux, le soutien réel de l’État aux collectivités est particulièrement nébuleux. Le projet de loi de finances propose bien un nouveau dispositif de soutien des collectivités territoriales « confrontées à une situation de forte inflation de leurs dépenses d’énergie » baptisé « filet de sécurité » et qui atteindra 1,5 Md € ; ce dispositif concernera cette fois-ci toutes les catégories de collectivités, et non plus les seules communes et intercommunalités comme le filet de sécurité mis en place dans le budget rectificatif pour 2022 (LFR2022) et voté l’été dernier pour faire face à la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires et la hausse des prix de l’énergie et des produits alimentaires.

Mais les conditions sont plus restrictives, car les collectivités doivent cumulativement avoir subi une baisse de leur épargne brute d’au moins 25 % (le ratio d’épargne brute à 22% des recettes réelles de fonctionnement disparaît) ; subi une augmentation des dépenses d’énergies d’au moins 60% par rapport à 2022, alors que les augmentations ont déjà eu lieu en 2022 ; et enfin ne seraient concernés pour les communes et les intercommunalités, que les collectivités dont le potentiel financier est inférieur à 2 fois le potentiel financier moyen par habitant des collectivités de la même strate. Pour ces collectivités bénéficiaires, la dotation prend en charge 50% de l’augmentation des dépenses d’approvisionnement en énergie, électricité et chauffage urbain par rapport à 2022 et 60% de l’augmentation des recettes réelles de fonctionnement par rapport à 2022.

Le projet de budget ne lève par contre pas l’incertitude introduite dans la LFR2022 de l’été : l’État s’était engagé à verser aux communes et aux intercommunalités une compensation équivalente à l’addition de 70% de la hausse des dépenses 2022 (énergie, électricité, chauffage urbain, produits alimentaires) et 50% la revalorisation du point d’indice. C’était alors un soutien budgétaire estimé à 430 M€ ; un décret du 13 octobre 2022 est venu préciser le fonctionnement de la dotation, qui sera attribuée automatiquement aux communes en 2023, en pouvant cependant demander un acompte de 50% sur son montant avant le 15 novembre 2022, pour un versement en décembre (dans quelques jours donc). Mais tout cela dépendra en définitive de l’évolution effective de l’épargne brute des communes et de leurs intercos en 2022 : RDV donc lors de la validation des comptes administratifs à l’automne 2023, certaines communes pourraient alors se voir réclamer une partie de l’acompte. Ce dispositif crée une forme d’insécurité budgétaire pour les collectivités ce qui risque fortement d’aggraver la chute des investissements locaux.

Or les communes ont consommé au 31 juillet dernier la totalité de leur budget énergie pour 2022 ; le PLF prévoit déjà la reconduction en 2023 du bouclier tarifaire qui bénéficie aux 30.000 plus petites communes, qui bénéficient encore des tarifs réglementés de vente d’énergie. Mais au regard de la difficulté rencontrées par l’ensemble des collectivités, il convient aujourd’hui d’interroger sur le retour à une logique de monopole public sur l’énergie qui permettrait une politique tarifaire protectrice pour l’ensemble des acteurs, entreprises, particuliers et collectivités. Il est bien évidemment que cela implique une révision radicale du marché européen de l’énergie dont l’organisation actuelle a démontré son niveau d’aberration, débat qui en est à peine à son commencement aujourd’hui.

Le gouvernement continue sa politique de gribouille : une semaine après avoir dégainé son premier 49.3 suspendant ainsi de fait les débats budgétaires, la Première ministre a présenté jeudi 27 octobre, un « amortisseur électricité », visant à réduire les factures électriques des collectivités ne bénéficiant pas des tarifs réglementés de vente (TRV). Une aide qui devrait donc s’appliquer en 2023, mais qu’il est difficile pour le moment d’évaluer, même si les sommes annoncées se situent autour de 10 Mds € dont 2 pour les collectivités territoriales, partiellement financées par la taxation des profits des énergéticiens, décidée par les Européens … que l’exécutif français s’acharne pourtant à décrédibiliser au niveau national, avant d’intégrer a minima la décision européenne en catastrophe par amendement à son projet de budget (à hauteur de 33% pour les entreprises pétrolières dont le résultat dépasserait de 20% la moyenne des quatre dernières années). On voit bien qu’on marche sur la tête. Si on peut momentanément se satisfaire qu’une réponse soit apportée à des centaines de collectivités qui étaient jusqu’ici exclues du « bouclier tarifaire », on peut s’étonner qu’elle ne couvre pas la question du gaz (alors que les TRV gaz auront disparu au 1er juillet 2023 même pour les petites communes) et qu’elle ne soit pas pérenne. Précisons également qu’il est encore trop tôt pour se réjouir : Les associations d’élus attendent encore de pouvoir lire le projet de décret avec les critères précis pour l’évaluer ; par le passé, on a eu l’habitude d’annonces pas toujours suivies d’effets avec des dispositifs illisibles (on l’a vu plus haut sur le « filet de sécurité »).

Quelques miettes pour le logement

La mise en scène de l’intégration par le gouvernement d’amendements dans le texte faisant l’objet du 49.3 a donné lieu à l’introduction de quelques miettes qui aideront les collectivités. C’est le cas de l’élargissement des critères pour définir en matière de logement les « zones tendues » aux communes d’aires urbaines de moins de 50 000 habitants sous conditions. Aujourd’hui, il y a plus de 1135 communes qui sont considérées comme des zones tendues conformément à la liste des villes annexées au décret n°2013-392 en date du 10 mai 2013.

L’avantage de cet élargissement est de permettre aux communes concernées d’appliquer la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaire (la seule TH qui survivra au massacre macronien de la fiscalité locale), soit une majoration comprise entre 5 et 60% sur délibération du conseil municipal. Il faudra pour cela démontrer « un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant » qui se caractérise par :

  • le niveau élevé des loyers ;
  • le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ;
  • la proportion élevée de logements affectés à l’habitation autres que ceux affectés à l’habitation principale par rapport au nombre total de logements.

Un décret recensera les communes éligibles. Les premières estimations dans la presse concerneraient quelques 4 000 communes supplémentaires.

Il est également proposer d’augmenter d’un tiers les taux de la taxe sur les logements vacants. Même si nous portons le quadruplement de cette taxe sur les logements vacants pour lutter contre ce fléau, soit 50% la première année, et 100% à partir de la seconde, nous pouvons nous réjouir de cette avancée. Les taux fixés par le rapporteur majorent de 12,5 à 17% la première année et de 25% à 34% pour la seconde.

1 Suite à une censure constitutionnelle, l’article 7 du PLF pour 2018 a prévu de consolider les chiffres d’affaires à l’échelle du groupe en additionnant les chiffres d’affaires, en cas d’intégration fiscale (détention d’au moins 95% du capital). Or, la consolidation ne s’applique que si la sommes des chiffres d’affaires est supérieure à 7,63 M€ et la condition de détention est extrêmement restrictive bien que retenue pour le régime d’intégration fiscale. Une autre limite réside dans la possibilité de filialiser les résultats et donc de contourner l’imposition ou de « déterritorialiser » la valeur ajoutée.

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