Le Secteur médico-social à nouveau en deuil

Ce mercredi 13 mai une assistante sociale a été assassinée par une personne qu’elle accompagnait dans le cadre de ses missions de service public.

Les drames dans le milieu du travail social ne sont pas isolés : Jacques en 2015 à Nantes, ou encore un directeur de CADA à Agen en début d année 2021. Les travailleurs sociaux sont souvent menacés durant l’exercice de leurs fonctions par les personnes qu’ils aident ou tentent d’aider. Au-delà des menaces, on dénombre plusieurs agressions de professionnels chaque année, dans le silence presque total des médias et de certaines hiérarchies. Parfois c’est même leurs propres familles qui peuvent se trouver en danger.

Les travailleurs sociaux méritent plus de reconnaissances et plus de moyens pour intervenir auprès de publics de plus en plus fragilisés par la situation sociale du pays. Les risques qu’ils prennent dans leurs travail doivent obtenir la reconnaissance qu’ils méritent.
La Gauche Républicaine et Socialiste adresse toutes ses condoléances à la famille de cette jeune femme et s’associe à la peine et la colère qui émane du secteur médico-social.

Elections consulaires : l’Etat doit être impartial

Après avoir constaté de graves manquements en matière de de neutralité dans l’organisation des élections consulaires de 2021, les organisations de gauche des Français de l’Etranger ont solennellement écrit au Ministre des Affaires étrangères pour exiger qu’il garantisse des conditions correctes et impartiales pour ce scrutin qui conditionne par la suite l’élection de six sénateurs en septembre prochain.

Nous publions ici ce courrier.

“La gauche est-elle en voie de disparition en Europe ?”, La faute à l’Europe, 11 mai 2021

Emmanuel Maurel, député européen et animateur national de la Gauche Républicaine et Socialiste, était l’invité de “La Faute à l’Europe” le 11 mai 2021 sur France Infos. Il a réaffirmé sa conviction, que nous ne désespérons pas, malgré le calamiteux quinquennat Hollande qui a achevé le PS, de revoir le socialisme refleurir en France sous d’autres formes.

L’Europe ne prend malheureusement pas le chemin du social ; le sommet européen hier au Portugal illustre bien l’expression de Jacques Delors à propos des sommets sociaux européens “des grandes messes sans foi”, sauf que là il n’y avait ni messe ni foi, avec des déclarations d’intention sans que rien n’avance alors même que nous sommes confrontés à une crise inédite.

La mission historique de la gauche, c’est d’abord la redistribution des richesses, une transformation de l’équilibre entre Capital et Travail au profit de ce dernier ; or sous l’effet des politiques de droite et sociales-libérales, la part des salaires dans la valeur ajoutée ne cesse de décroître au profit du Capital. C’est aussi l’approfondissement de la démocratie dans tous les domaines, notamment de la démocratie sociale et on en est loin en Europe.

L’effritement, ou même l’effondrement dans certains pays, des partis de gauche est indéniable : la social-démocratie a profité pendant des décennies de la peur capitaliste du bloc soviétique pour obtenir des compromis offensifs sur le Capital au profit des travailleurs. Mais ensuite sous l’impulsion de Blair et Schröder, une partie de la gauche s’est coulée dans le néolibéralisme et une autre a capitulé ou s’est résigné devant un capitalisme en pleine transformation accélérée.

Cela est d’autant plus déroutant que les réponses traditionnelles de la gauche et du socialisme sont redevenues “à la mode” aux Etats-Unis face à la crise pandémique et ses conséquences avec le début de la présidence Biden. Le message de la gauche socialiste reste donc d’une actualité absolue : le problème ce sont les émetteurs européens, ces partis de gauche qui pour certains ont trahi leurs principes, leurs électeurs et leur base sociale !

Aux préoccupations prioritaires des Européens – l’écologie, l’immigration mais aussi et surtout l’emploi (contrairement à ce que disent les commentateurs) -, il existe des réponses de gauche. La gauche s’est aussi élevée pour défendre les libertés menacées, pour dénoncer la tendance à corseter la démocratie ou à mettre en place une société de surveillance. La réalité est que ces prises de positions sont peu relayées par les médias, alors que les risques – notamment en France – sont croissants même avec de soi-disant Libéraux qui versent dans une dangereuse dérive autoritaire, comme Emmanuel Macron. Sur les questions de société, la gauche est aussi bien plus claire et rationnelle que la droite et les “Libéraux”, la seule à défendre un point de vue réellement progressiste, contrairement à ce que disent les journalistes.

Élections départementales, régionales et consulaires : amateurisme ou entrave à la démocratie ?

Alors que de multiples alertes remontent de la part de candidates et candidats de toute sensibilité politique, la Gauche Républicaine et Socialiste exprime sa consternation et sa plus vive inquiétude quant à l’organisation des élections départementales, régionales et consulaires 2021. Délais intenables, règles inédites qui laissent les imprimeurs consternés, informations communiquées au dernier moment, tout semble être fait pour empêcher l’exercice démocratique de la candidature aux élections.

Compte tenu de la situation politique mouvante, alors même que l’incertitude planait voici encore quelques semaines sur le maintien des élections locales au mois de juin, les discussions permettant d’établir les listes régionales et les tickets départementaux n’ont pu être menées qu’au dernier moment. Cela n’est pas forcément à prendre en compte par les pouvoirs publics nous direz-vous, mais il est évident que le gouvernement a créé une situation particulièrement instable. Or il semble qu’une fois faite l’annonce du maintien des élections, avec un report supplémentaire de deux semaines, rien n’ait été mis en place par l’exécutif pour que les candidat(e)s potentiel(le)s avancent dans un cadre précis et serein. Ainsi, les délais pour valider les éléments de campagne essentiels – professions de foi et bulletins de vote – ont été fixés quelques jours à peine avant la fin des candidatures. Cela a contraint les candidats à travailler en urgence à la confection des maquettes de bulletins de vote et de professions de foi. De nombreux candidats n’ont pas été en mesure de les fournir aux préfectures le jour-dit, et celle-ci ne pourra donc pas certifier la validité de leurs bulletins de vote, entraînant un risque d’invalidation de leurs suffrages le jour de l’élection.

Cette situation implique que seuls les appareils politiques disposant d’une infrastructure suffisante pour aider leurs militants et sympathisants à conduire des candidatures en bonne et due forme peuvent mener campagne sereinement. Les règles encadrant une campagne électorale changent d’une élection à l’autre et sont d’une complexité parfois absurde. En 2015, plusieurs binômes de candidats aux élections départementales se sont vus invalider leurs bulletins car les noms n’étaient pas présentés dans l’ordre alphabétique. Nous nous posons toujours la question de l’intérêt de considérations aussi bureaucratiques qu’inutiles.

Passée l’étape de la validation en urgence du matériel électoral vient celle de l’impression et de la livraison. Prétextant des mesures sanitaires, les préfectures les réclament plus d’un mois et demi avant les élections, parfois moins d’une semaine après validation des bulletins de vote et des professions de foi. Cela contraint les imprimeurs et leurs salariés à travailler dans l’urgence. Le pont de l’Ascension du 13 au 16 mai et la disponibilité professionnelle moindre qui en résulte ont été délibérément ignorés par les préfectures ; les capacités des candidats qui n’ont pas d’appareil pour les soutenir ont donc été d’autant plus rognées.

Une des grandes nouveautés de ces élections est la livraison du matériel électoral. Ici aussi, les règles élémentaires de « bon sens » ont été tout bonnement ignorées, laissant place à des décisions absurdes dénuées de toute logique élémentaires.

Certains départements souffrent d’une pénurie de papier à 80 g, format exigé pour les « professions de foi » ; les imprimeurs, faute de mieux, ont annoncé qu’ils ne pourraient imprimer qu’avec du 70 g. Les préfectures ont expliqué qu’elles n’autoriseraient aucune dérogation : les professions de foi ne seront donc pas mises sous pli et adressées aux électeurs. Quand on considère que c’est quasiment le seul support d’information sur les candidats et leurs propositions que recevront les électeurs, c’est une entrave évidente à un choix équitable et informé.

Pour les élections régionales en Bourgogne/Franche-Comté, les bulletins de vote devront être délivrés dans 6 lieux différents, tous en dehors de la région. Pour les élections départementales, les bulletins de vote du nord de l’Île-de-France doivent être envoyés dans l’Eure (Normandie) … et enfin pour le département normand de l’Orne, ils doivent être envoyés en région parisienne … Logique ! Cette subtilité a été annoncée à la dernière minute, le plus souvent dans les commissions de validation du matériel électoral. Compte tenu du délai ridicule entre cette commission et la date limite de livraison, de nombreux candidats ne pourront pas délivrer en temps et en heure et au bon endroit leur matériel électoral. Les électeurs seront ainsi privés du choix démocratique, car ils ne se verront pas proposer ces bulletins dans le bureau de vote, en raison de tracasseries administratives qui limitent les candidatures à des professionnels de la politique ou à des gros appareils partisans. C’est une entrave grave à la démocratie.

Les imprimeurs eux-mêmes semblent découvrir ces nouvelles règles. Habituellement, la livraison et la mise sous pli se faisait en préfecture ou en mairie, à proximité des candidats, permettant de fonctionner en circuit court et de ne pas émettre inutilement des gaz à effet de serre en transportant la propagande électorale d’un bout à l’autre de la France.

Malheureusement, décision a été prise d’externaliser cette mission de service public et de la confier à un acteur privé. C’est encore une fois un fiasco, qui va mener à une gabegie démocratique. Le passage au tout numérique a laissé de nombreux candidats sur le carreau, empêchant de fait nos concitoyens ne possédant pas internet ou un ordinateur de présenter leur candidature. Pour déposer une candidature en préfecture, il fallait obligatoirement prendre rendez-vous auprès d’un numéro de téléphone portable. Cela n’a pas été communiqué par voie officielle dans tous les départements, et le numéro de téléphone n’a été transmis qu’à certains contacts privilégiés de la préfecture qui ont été chargés de les transmettre et de les faire circuler. Ces manœuvres obscures concourent à faire perdre toute confiance en l’égalité de traitement des candidats.

Pour les élections des Français de l’étranger, déjà repoussées de plus d’un an, et qui conditionnent le renouvellement de six sénateurs, le gouvernement, incapable de planifier la sécurité sanitaire de ses personnels en poste à l’étranger, envisage aujourd’hui de reporter encore la date du scrutin … mais pas partout. Il semblerait qu’il souhaite maintenir juste assez d’élections pour garantir les élections des sénateurs, et met le paquet, à coup d’engagement des ministres et de favoritisme des services de l’État au profit des futurs grands électeurs qui lui seraient favorables. Ce scrutin était déjà en soi une mascarade démocratique : la campagne officielle est limitée à 12 jours seulement pendant lesquels les Français voteront électroniquement. Aucune liste d’opposition n’a eu le temps de faire campagne, alors que les députés marchistes sillonnent les endroits où aucun report n’est prévu, et font campagne sans le dire. Les services de l’État à l’étranger relayent même sur les réseaux sociaux les prises de positions des élus et candidats favorables au « président de la République ». Loin de l’amateurisme, on reconnaît ici un esprit de système, de mépris des Français à l’étranger : peu leur importe que ces élections soient en l’état mûres pour une annulation en Conseil d’État, ils veulent entre temps accumuler des postes de sénateurs. Ces méthodes démontrent un mépris profond pour le débat démocratique, une poltronnerie devant le contradicteur, une culture détestable qui rappelle les pires heures d’avant l’alternance de 1981.

La crise sanitaire met ainsi en lumière nombre de dispositions tout à la fois inéquitables et absurdes du code électoral, qui plonge les candidats dans des tracasseries administratives sans fin, sans garantir l’exercice équitable de ses droits civiques dans un cadre juridiquement stable. La République en Marche se présentait comme le champion de la simplification administrative pour le secteur privé. Ces beaux principes n’ont pas été appliqués à la démocratie, qui souffre d’une rigidité inutile et contre-productive.

La Gauche Républicaine et Socialiste tient à souligner l’inconséquence lamentable du gouvernement dans l’organisation de ces élections. À plus d’un mois et demi du scrutin, le libre exercice de la démocratie est entaché de ces manquements au principe d’égalité entre les candidats. Cela se paiera par l’abstention, et à long terme par la perte de confiance en la démocratie. Le gouvernement en porte toute la responsabilité.

Écosse : vers un deuxième référendum ?

Le 18 septembre 2014, les électeurs écossais, qui avaient donné 3 ans plus tôt une majorité absolue aux indépendantistes de gauche du Scottish National Party (SNP), rejetaient par référendum à une large majorité (55,3 vs 44,7) l’indépendance proposée par le gouvernement régional SNP dirigé par Alex Salmond. Pour le Premier ministre britannique de l’époque, le conservateur David Cameron, l’affaire était donc entendue pour au moins une génération sans modification manifeste du contexte politique. Seulement voilà : le contexte politique, Cameron l’a violemment bouleversé deux ans plus tard avec le référendum sur le Brexit. Les cartes sont aujourd’hui clairement rebattues.

Le précédent parlement écossais avait été élu en mai 2016 ; encore sous le choc de la défaite au référendum de 2014 et de la démission de son leader historique Alex Salmond, le SNP, ses élus et son gouvernement dirigé par Nicola Sturgeon n’avaient pas pour mandat d’exiger à brève échéance un nouveau référendum. David Cameron pensait donc être tranquille pour un long moment : il allait remporter le référendum sur le maintien du Royaume Uni dans l’Union européenne et la génération à venir pourrait être mise à profit pour les forces coalisées du Parti travailliste, des Libéraux démocrates1 et des Tories pour reprendre peu à peu l’Écosse au SNP.

Patatras ! Un mois et demi après les élections régionales écossaise, les électeurs britanniques faisaient le choix de quitter l’Union européenne, expulsant du même coup David Cameron qui s’était cru plus malin que ses concitoyens. Enfin, à proprement parler, ce sont plus exactement les électeurs anglais qui ont voté en faveur du Brexit avec des motivations diverses, dont un fort mécontentement des électeurs populaires traditionnellement travaillistes qui y ont eu vu une occasion de sanctionner Downing Street, mais également l’expression d’un rejet de l’immigration européenne et musulmane et d’un nationalisme spécifiquement anglais. Car, dans les deux provinces les plus « périphériques » du Royaume Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord, les électeurs ont choisi majoritairement le vote Remain ; et en Écosse, c’est un vote massif en faveur du maintien dans l’UE qui s’est exprimé avec 62 % des suffrages. Le contexte a manifestement été modifié en profondeur.

Pourquoi l’indépendance ?

Les revendications d’indépendance de l’Écosse avancées par le SNP ne sont pas nouvelles. Elles ont commencé à prendre de l’ampleur dans les années 1970. La fin du « règne » de Margareth Thatcher et les affrontements sur la Poll Tax, qui a incarné jusque dans la violence le mépris du gouvernement britannique pour les Écossais ont donné du corps à leur dénonciation. À la fin des années 1990 avec la mise en place de la devolution – transfert partiel du pouvoir du gouvernement britannique au Parlement écossais de Holyrood, à Édimbourg, les indépendantistes écossais ont pu offrir pour la première fois un débouché politique concret au vote en leur faveur. L’objectif du SNP est de créer une Écosse indépendante qui reposerait sur des principes, que l’on qualifiera de sociaux-démocrates, d’égalité et de justice sociale. Les arguments du parti en faveur de l’indépendance sont donc essentiellement socio-politiques et économiques, ce qui le distingue des partis nationalistes centrés sur les questions ethniques ou culturelles.

L’attachement écossais à l’Union européenne – réaffirmé dernièrement dans une pétition adressée à tous les citoyens européens https://europeforscotland.com/ dans l’espoir de faire pression sur les institutions de Bruxelles pour hâter la (ré)adhésion de l’Écosse à l’Union en cas d’indépendance – ne peut pas se concevoir selon les critères politiques des autres États européens, où des forces politiques peuvent dénoncer l’ordo-libéralisme et la perte de souveraineté populaire que la construction européenne implique aujourd’hui. L’Écosse ne dispose plus d’élément de souveraineté monétaire, financière, budgétaire et diplomatique depuis les XVIIème et XVIIIème siècles ; vues d’Édimbourg ou de Glasgow, l’accession à l’indépendance combinée à l’intégration comme État membre dans l’Union Européenne représenterait à tout point de vue une progression certaine en matière de souveraineté par rapport à la situation actuelle. De même, les garanties sociales offertes par le cadre européen – qui nous paraissent terriblement insuffisantes voire régressives en France – sont une protection non négligeable dans un pays qui a subi violemment la vague ultralibérale du thatchérisme sans que les travaillistes ne rétablissent entre 1997 et 2010 les protections collectives antérieures. Enfin si l’immigration européenne est relativement rejetée en Angleterre, où les patrons font jouer la concurrence sans aucun scrupules, l’Écosse connaît, elle, une situation démographique et territoriale qui fait de l’immigration européenne une nécessité et une condition de son développement.

Il y a donc entre l’Angleterre et l’Écosse une double fracture : gauche/droite – le SNP mène sur le logement et la santé des politiques parmi les plus progressistes d’Europe – et sur l’Europe. Les élections européennes de 2019 ont renforcé cette fracture avec, d’une part, une Angleterre pro-Brexit aux couleurs du Brexit Party et du parti conservateur et, d’autre part, une Écosse pro-européenne aux couleurs du SNP, confirmant par la même occasion les résultats du référendum sur le Brexit trois ans plus tôt. Le référendum de 2016 et les élections européennes de 2019 semblent ainsi légitimer le fait que le SNP réclame la tenue d’un second référendum d’indépendance. En effet, ces deux événements semblent avoir mis en évidence le manque de poids de l’Écosse dans les décisions prises à Westminster, comme cela est dénoncé par le SNP depuis de nombreuses années.

L’indépendance et le pari des jeunes

Face à ces deux rendez-vous majeurs qui ont souligné les divergences entre l’Écosse et le reste du Royaume-Uni, Nicola Sturgeon et le SNP en ont appelé à la jeunesse. La Première ministre écossaise est très présente sur les réseaux sociaux. Elle se montre particulièrement proche de la jeunesse de son pays. En outre, elle multiplie les publications à destination des jeunes afin de les sensibiliser sur la question de l’avenir constitutionnel de leur nation. Stratégie politique ou véritable intérêt pour la jeunesse écossaise ? Toujours est-il que le message semble être relativement bien entendu au vu du nombre toujours croissant de nouveaux membres dans les branches jeunes et étudiantes du SNP.

La jeunesse est clairement un enjeu politique. Alors qu’ils sont souvent réputés pour être distants de la vie politique, notamment lors des élections, le référendum d’indépendance de 2014 avait déjà mobilisé une grande proportion d’entre eux. Le taux de participation des 16-34 ans s’est élevé à 69%. Celui des 16-17 ans, qui avaient le droit de voter lors du référendum, s’est quant à lui envolé à 75%. Les partis politiques ont également vu leurs effectifs augmenter grâce à l’adhésion de nombreux jeunes. Cela a été particulièrement le cas du SNP et des Verts, tous deux pro-indépendance. Concernant les résultats du référendum, 54,3% des 16-19 ans et 54,1% des 20-24 ans ont voté en faveur du maintien de l’Écosse au sein du Royaume-Uni, tandis que 62,2% des 25-29 ans ont voté en faveur de l’indépendance.

En parallèle, depuis 2016, les partis politiques n’ont cessé de voir augmenter leur taux de jeunes adhérents. C’est notamment le cas du SNP et des Verts, tous deux défavorables au Brexit. En cas de second référendum, ces jeunes Écossais, toujours plus engagés en politique, pourraient jouer un rôle clé en faveur de la victoire de l’indépendance. Du moins, cette mobilisation de la jeunesse devrait se poursuivre tant que le sort de l’Écosse en tant que partie prenante ou non du Royaume-Uni ne sera pas fixé.

Le 6 mai, un scrutin à enjeux multiples

Rappelons le cadre : Le Parlement écossais est élu pour cinq ans selon un système mixte. Chaque électeur2 dispose de deux voix : la première voix sert à élire un député au scrutin uninominal majoritaire à un tour dans l’une des 73 circonscriptions, la seconde voix est pour une liste dans le cadre d’une région. Le nombre de sièges pour chaque parti est attribué à la proportionnelle en prenant en compte les sièges déjà attribués dans les circonscriptions.

La première ministre écossaise conduit donc depuis l’été 2016 une offensive déterminée pour un deuxième référendum. Dans le long calvaire de Theresa May sur les négociations de sortie de l’UE, ce sont les députés du SNP à Westminster qui ont souvent été les plus percutants et efficaces pour déstabiliser celle qui avait succédé en catastrophe à David Cameron. Ce scrutin était donc évidemment un référendum en faveur d’un deuxième référendum. Afin d’accentuer la pression sur Boris Johnson qui s’oppose au principe même du renouvellement d’une telle consultation, une majorité indépendantiste claire et un mandat incontestable étaient nécessaires. Le pari est rempli : la participation au scrutin a progressé de 7,2 points à 63 % et le SNP a recueilli plus de suffrages qu’il ne l’avait jamais fait, même sous Alex Salmond, avec presque 1 100 000 votes en leur faveur pour le scrutin proportionnel (40,3 %, -1,4 points) et presque 1 300 000 au scrutin majoritaire (47,7 %, +1,2 points) ; un grain de 150 000 voix dans les deux cas. Le SNP gagne un siège, avec 64 députés en tout.

Les Verts écossais, eux aussi en faveur de l’indépendance, gagnent 2 sièges avec huit députés ; faiblement représentés au scrutin majoritaire, ils progressent substantiellement sur le vote proportionnel avec 8,12 % (+1,5 point) et 220 000 voix (+70 000). Pour compléter le tableau indépendantiste, il faut intégrer Alba (qui signifie Écosse en gaélique), récemment créé par Alex Salmond devenu l’adversaire de Nicola Sturgeon. N’ayant pas présenté de candidats au scrutin majoritaire, il espérait faire son trou au vote proportionnel : c’est un échec car il ne recueille que 45 000 voix (1,66%) et n’aura aucun élu.

C’était un des matchs dans le match : Alex Salmond, après avoir été le leader historique du SNP, est devenu l’adversaire acharné de Nicola Sturgeon. Cette dernière représentant la continuité de la ligne social-démocrate du SNP que Salmond lui avait donnée, Alba prétendait représenter un indépendantisme plus centriste. En réalité, il s’agit d’abord d’un règlement de compte personnel : Alex Salmond est convaincu que le cabinet Sturgeon et les hauts dirigeants du SNP sont derrière les accusations de harcèlement sexuel dont il a fait l’objet et pour lesquelles il a été acquitté depuis ; ou en tout cas, que sa successeur n’a rien fait pour empêcher la procédure, ce qui est difficilement défendable quand on veut promouvoir une justice indépendante. Le match est donc plié : l’indépendantisme écossais continuera d’être ancré à gauche.

En définitive, en additionnant les suffrages des trois partis indépendantistes, on obtient 50,12 % pour le vote proportionnel et 49 % pour le scrutin majoritaire, des niveaux jamais atteint précédemment dans les deux catégories. Avec la hausse du taux de participation, et 72 sièges sur 129 (+1 par rapport à 2011), le message politique est d’autant plus clair.

résultats des élections régionales écossaises du 6 mai 2021 par circonscriptions et à la proportionnelle

L’autre enjeu était évidemment domestique. Nicola Sturgeon, qui fut ministre de la Santé de 2007 à 2012, est plébiscitée par deux Écossais sur trois pour sa gestion efficace de l’épidémie. Un contraste par rapport à l’attitude erratique de Boris Johnson qui ne doit sa survie aujourd’hui qu’à une tardive mais massive campagne de vaccination avec Astra Zeneca. L’indépendance écossaise a d’autant plus d’attrait qu’il est servi par une première ministre solide.

La lutte était aussi féroce pour la seconde place. En 2016, les conservateurs l’avaient ravie aux travaillistes. Cette année, le chef conservateur, Douglas Ross, promettait des investissements massifs dans les transports et la santé. Pas forcément le point fort des Conservateurs cependant, ce qui témoigne du niveau de déclin des travaillistes autrefois hégémonique en Écosse. Les Tories se maintiennent au vote uninominal et progresse légèrement au vote proportionnel, conservant l’ensemble de leurs sièges. Les travaillistes, eux, ont encore perdu du terrain, même s’ils regagnent quelques dizaines de milliers de voix, celles-ci ne leur permettent pas de maintenir, dans un contexte de forte hausse de la participation, leurs résultats ; ils perdent encore deux sièges. C’est impressionnant car pendant 70 ans, il suffisait à une vache d’affubler le macaron rouge des travaillistes pour être élue au sud du Mur d’Antonin.

D’une manière générale, les élections locales du 6 mai ont été une déroute pour le Labour en Écosse comme en Angleterre. Pour le chef de l’opposition travailliste Keir Starmer, c’est une humiliation et de mauvais augure pour son objectif de reconstruire le Labour avant les prochaines élections générales de 2024. Avec une ligne plus centriste que son prédécesseur Jeremy Corbyn, il avait promis de remettre le parti sur les rails en prenant la tête de la formation quelques mois après sa débâcle aux législatives. « C’est l’illustration la plus spectaculaire que le parti a jusqu’ici échoué à se rapprocher des électeurs des classes ouvrières ayant voté Leave », a estimé John Curtice, un spécialiste des élections britanniques, sur la BBC. Les appels au changement ont rapidement fusé chez les travaillistes et anciens proches de Corbyn : « Keir Starmer doit réfléchir à deux fois concernant sa stratégie », a tweeté la députée Diane Abbott ; « Nous reculons dans des zones où nous devons gagner. La tête du Labour doit urgemment changer de direction », a abondé son collègue Richard Burgon. Il y a une véritable difficulté stratégique pour les travaillistes : comment reconquérir les électeurs ouvriers qui malgré le thatchérisme n’ont jamais convaincu par les avantages de l’UE, tout en reprenant pied dans une Écosse pro-européenne ? L’échec de la stratégie centriste de Starmer et de Salmond semble apporter une partie de la réponse. Mais une Grande Bretagne unifiée, le Labour ne pourra plus gouverner sans reconquérir l’Écosse. Dans un Royaume restreint à l’Angleterre et au Pays de Galles, ce serait aujourd’hui mission impossible sans reconquérir le Red Wall du Nord de l’Angleterre et même au-delà.

Et maintenant ?

« Il n’y a tout simplement aucune justification démocratique pour Boris Johnson, ou pour quiconque, à chercher à bloquer le droit du peuple écossais de choisir son propre avenir », a assuré Nicola Sturgeon : « C’est la volonté de ce pays ».

Réputée pour sa prudence et son expérience du pouvoir (elle est députée depuis vingt et un ans, ministre ou première ministre depuis quatorze ans), elle sait cependant que son jeu présente de sérieuses faiblesses.

D’abord, le gouvernement conservateur de Londres dispose toujours d’un droit de veto sur un éventuel référendum, et Boris Johnson, dès la veille du scrutin, avait déclaré « irresponsable » une nouvelle consultation populaire écossaise. Il s’accroche à l’affirmation qu’un tel référendum ne peut se produire qu’une fois par génération. Par ailleurs, du fait de la déroute des travaillistes, Boris Johnson est sorti des élections locales du 6 mai relativement confirmé et consolidé. Malgré sa gestion au doigt mouillé du Coronavirus, il surfe sur la levée des mesures sanitaires après la vaccination de la majorité du pays, sur le fait que le Brexit en lui-même pose moins de problèmes que prévus pour l’Angleterre et il flatte le sentiment nationaliste des Anglais dans un bras de fer avec la France sur le partage des eaux territoriales autour des îles anglo-normandes. Pourquoi voudrait-il faire un cadeau à Nicola Sturgeon avec un référendum qui pourrait lui coûter sa carrière politique, alors qu’il est en mesure de gouverner le Royaume Uni sans, voire même contre, les trois autres Nations (Écosse, Irlande-du-Nord, Pays-de-Galles) ?

Le SNP dispose cependant d’un argument : pourquoi Boris Johnson refuserait-il aux Écossais de mettre en pratique le principe qu’il a mis en avant – à savoir « le respect de la volonté populaire » – pour virer Theresa May et devenir Premier ministre ? Nicola Sturgeon a d’ores-et-déjà menacé de voter sans attendre un projet de référendum à Holyrood puis de saisir la Cour suprême britannique si Boris Johnson se mettait en travers de son chemin. Pour le moment, la situation reste figée.

Boris Johnson reçu par Nicola Sturgeon à Bute House (Édimbourg) le 29 juillet 2019

Samedi soir, Boris Johnson a téléphoné à la première ministre écossaise pour la « féliciter » et « l’appeler à coopérer » : l’affrontement est cependant inévitable. BoJo va probablement parier sur le pourrissement, le SNP, au contraire, tenter de mettre à profit son refus pour convaincre un maximum d’Écossais que leur destin est de couper le cordon avec Londres, car si les sondages sont aujourd’hui favorables à l’indépendance, les suffrages de l’élection du 6 mai donne une répartition 50-50 entre partis pro et anti-indépendance. N’oublions pas cependant qu’aujourd’hui qu’une partie de ce qu’il reste de l’électorat travailliste est également favorable à l’indépendance. N’oublions pas non plus que l’aspiration à l’indépendance des Écossais ne saurait être perçu comme un délitement des États-nations mais bien au contraire la construction d’un nouveau : la constitution du Royaume Uni n’a jamais été celle d’un État-nation tel que nous l’entendons en France mais bien plus celle d’un État impérial. Boris Johnson pourrait bien être l’archétype de ces représentants de l’État impérial britannique qui confond les intérêts du Royaume avec ceux de la petite Angleterre. On peut se dire que c’est une bonne chose que la majorité conservatrice de Westminster ne soit plus avec BoJo dépendante des ultra-conservateurs unionistes nord-irlandais comme elle l’était sous Theresa May, mais, comme l’ont montré les émeutes mettant en scène de jeunes « loyalistes » à Derry et Belfast, le sentiment de frustration et de trahison – une frontière coupe de fait le Royaume en deux en Mer d’Irlande – pourrait bien hâter les événements dans l’île voisine. À vouloir gouverner seul contre tous et à jouer le pourrissement, Boris Johnson pourrait aussi se mettre à dos les Gallois où le sentiment national est aussi élevé et ceux des Écossais qui défendent encore l’union par défaut.

1 De 1999 à 2011, l’Écosse a été – à partir de la mise en œuvre de l’acte de « dévolution » – gouvernée par un gouvernement de coalition entre travaillistes et libéraux-démocrates. Après un revers en 2003, dû à l’absence temporaire d’Alex Salmond, le SNP a progressivement grignoté les bastions travaillistes du sud de l’Écosse, au point de l’effacer de la carte tant pour les élections à Westminster qu’Holyrood.

2 Les citoyens du Royaume-Uni, de la République d’Irlande, du Commonwealth et de l’Union européenne âgés de 18 ans et plus disposent du droit de vote.

Tout savoir sur les élections régionales et départementales en juin 2021

Quelles sont les compétences du conseil régional ? et celles du conseil départemental ?

Comment savoir si vous êtes inscrit sur les listes électorales ?

Appel pour faire du 22 mai une journée d’actions pour la sécu. Pour que vive la Sécurité sociale ! Plus que jamais !

Réunis, à Saint-Étienne, à l’occasion du 75e anniversaire de l’ordonnance du 4 octobre 1945 créant la Sécurité sociale, nous lancions un appel pour défendre et reconquérir la Sécurité sociale, notre bien commun. Nous décidions aussi d’ouvrir le chantier de son développement pour un nouveau progrès de société.

Malgré les conditions difficiles imposées par la crise sanitaire, de nombreuses réunions d’échanges et d’éducation populaire se sont tenues par nos propres organisations ou en commun dans le cadre de la Convergence nationale des services publics. Des initiatives symboliques, comme nommer des rues « Ambroise-Croizat » ou pétitionner pour son entrée au Panthéon, ont été initiées. Ces dernières semaines, alors que la campagne de vaccination reste toujours à la traîne, de nombreuses initiatives ont eu lieu pour faire du vaccin un bien public mondial, pour créer un pôle public du médicament et prendre la main sur le brevet et sa production : initiative citoyenne européenne « Pas de profit sur la pandémie », pétition « Brevets sur les vaccins anti-Covid, stop. Réquisition ! »…

Il y a urgence aujourd’hui à se mobiliser pour sauver notre Sécurité sociale mise en péril par les réformes libérales successives. La menace de laisser à la charge de la Sécurité sociale les milliards de dettes contractées durant cette crise sanitaire n’est pas acceptable. Nous devons créer les conditions d’un débat public et de mobilisation de nos concitoyens pour revendiquer une véritable Sécurité sociale du XXIe siècle pour toutes et tous. Nous avons toutes et tous droit à la sécurité pour notre santé, notre logement, notre famille, nos retraites.

La Sécurité sociale a, avant tout, été pensée comme une protection socialisée, une « assurance » collective contre les aléas de la vie. Elle n’est ni un simple filet de sécurité pour les plus modestes ni un saucissonnage de différents risques individuels sur le modèle des assurances privées. Nous devons continuer à réfléchir collectivement pour une Sécurité sociale intégrant le remboursement à 100 % des soins et de la prévention ainsi qu’à l’incorporation de la 5e branche au sein de l’assurance-maladie.

La Sécurité sociale doit devenir une protection solidaire de haut niveau pour toutes et tous de la naissance à la mort. Avec les services publics, elle doit répondre aux besoins de notre siècle. Convergeons pour l’étendre, la renforcer, la réorienter sur ses principes fondateurs : unicité, universalité, solidarité et démocratie. La Sécurité sociale appartient aux salariés et doit donc dépendre d’eux comme cela fut le cas à sa création. Les élections aux caisses instituées le 24 avril 1947 doivent être remises à l’ordre du jour.

Mais, pour que le rôle des administrateurs élus ne se résume pas à gérer une pénurie organisée par le gouvernement, simultanément la pérennité des ressources doit être garantie en les faisant reposer de façon prépondérante sur les cotisations. D’autre part, de nouveaux financements doivent être débattus. Tout nous invite à trouver les ressorts d’une nouvelle dynamique convergente. À l’occasion des 75 ans de la loi portant généralisation du « régime général » de la Sécurité sociale, faisons du 22 mai une journée d’actions pour exiger le renforcement, le développement et la démocratisation de la Sécurité sociale. La Sécurité sociale est notre bien commun.

La République n’a rien à attendre de généraux réactionnaires

La tribune intitulée « Pour un retour de lhonneur de nos gouvernants » signée par une vingtaine de généraux, une centaine de hauts-gradés et plus d’un millier d’autres militaires est sortie dans Valeurs Actuelles le mercredi 21 avril 2021 à 7 heures du matin. Le symbole est significatif et ne saurait être pris à la légère, 60 ans jour pour jour après le « putsch des généraux » du 21 avril 1961, quand certains militaires avaient prétendu prendre le pouvoir en réaction au retrait français d’Algérie. Au-delà de la date anniversaire, la réthorique est assez similaire.

Ces officiers ont pris la grave responsabilité d’entâcher de déloyauté et de menace de sédition notre armée. L’armée française dans ses profondeurs ne peut être représentée par ces individus qui rompent leurs engagements. Mais si l’armée française n’est pas partie pour faire sécession d’une République qui cultive avec soin le lien entre l’armée et la nation, il y a de quoi s’inquiéter de l’ampleur de ces dérives individuelles, portées par des cadres dont l’attachement à la République n’est que de circonstance à la signature du contrat.

Le texte est court, mais il enchaîne les poncifs et les passages obligés de tout manifeste national-réactionnaire*.

Il invoque la gravité exceptionnelle de la situation pour justifier une sortie du devoir de réserve qui serait « appelée par les événements ». C’est une façon de jouer sur ce qui peut leur servir : le crédit de fidélité et de respect de l’ordre que l’on accorde aux militaires. Ils expliquent ensuite leur sortie par la transcendance du devoir, alors même qu’ils s’en écartent. Après avoir ainsi « capté » son lectorat, le texte peut dérouler une analyse de la situation peu originale, qui énumère les obsessions classiques de l’extrême-droite traditionnelle, réchauffées à l’ambiance d’insécurité des années 2020.

Le premier péril serait l’antiracisme. Pourtant le racisme cause plus de mal et de morts que tout antiracisme (même dévoyé). Si certains militants ou éditorialistes s’égarent, cela justifie-t-il une intervention armée ? Le ridicule ne tue pas, heureusement ! Ces débats qui ont agité les médias font mal à la gauche en l’écartant de la question sociale ; ils suscitent l’indifférence ou la consternation chez la très grande majorité des Français… Mais gageons que la préoccupation des signataires n’est pas de remettre de l’ordre à gauche.

Le deuxième péril viendrait de « l’islamisme et des hordes de banlieue ». L’islamisme est un danger d’ampleur et tangible contre notre société et nos valeurs républicaines. Les réseaux criminels pourrissent la vie de trop de nos concitoyens. Pour éradiquer ces deux dangers, l’intervention militaire n’apporterait rien d’utile, bien au contraire ; c’est à la délibération et au débat démocratiques de départager les solutions à mettre en œuvre (comme celle que nous proposons https://g-r-s.fr/macron-en-campagne-la-securite-vaut-mieux-quun-plan-comm/) et non les fantasmes de « généraux » qui n’ont jamais mis les pieds dans les quartiers populaires et semblent considérer que leurs habitants sont des complices irrécupérables.

Enfin, le dernier péril serait « la haine » qui « prend le pas sur la fraternité lors des manifestations où le pouvoir utilise les forces de l’ordre comme agents supplétifs et boucs émissaires face à des Français en gilets jaunes exprimant leurs désespoirs ». Voilà l’attaque la plus dangereuse, car le pouvoir macroniste a effectivement usé d’une violence inutile et disproportionnée contre des citoyens français. C’est un détournement odieux, car jamais ce mouvement social inédit n’a émis la moindre sympathie pour les thèses de Valeurs Actuelles et de l’extrême droite. Pour autant, à force de mépriser les Français et les aspirations des catégories populaires et moyennes, à force de leur nier toute possibilité de débouchés économiques et sociaux, une partie d’entre eux désespérant de l’égalité pourrait finir par croire en un sursaut possible grâce à un « nouvel ordre viril ».

Le fait qu’une telle analyse puisse être assumée explicitement et publiquement par plus de mille militaires est en soi un fait politique grave. La conséquence de cette analyse est au moins tout aussi grave : ces mille soldats font-ils courir le risque d’une insurrection ? Ils l’appellent de leurs vœux. Depuis aujourd’hui, certains signataires font marche arrière, expliquant désormais que c’est le pouvoir civil qui sera bientôt contraint de faire appel à l’intervention armée au cœur du pays… Réaction pathétique aux menaces de sanctions disciplinaires absolument nécessaires dont ils sont enfin menacés par leur hiérarchie militaire et gouvernementale.

Il est effrayant que l’exécutif ait mis plus d’une semaine pour réagir enfin à la mesure de la provocation. Il est tout aussi effarant qu’il ait confondu les priorités : s’il fallait dénoncer l’opportunisme et le soutien de Marine Le Pen, qui démontre ainsi que la « dédiabolisation » du RN n’est rien d’autre qu’une façade, c’est en priorité l’autorité républicaine qu’il fallait rétablir contre ces militaires minoritaires.

Nous ne pouvons rester sans réponse face à un pouvoir qui détruit l’espoir dans notre peuple, en réduisant la promesse d’égalité républicaine et les libertés publiques. Et nous ne pouvons laisser non plus s’installer l’idée que l’unique alternative restante serait l’extrême droite. Les difficultés de notre pays et la déconnexion macroniste de la réalité appellent un sursaut politique et démocratique, pour éviter que ne s’installe l’espérance d’un mouvement autoritaire, soutenu ou non par des cadres de l’armée ou de la police. Remettant au goût du jour l’idée selon laquelle la Nation existerait indépendamment de la République, une telle rhétorique laisse bien peu de doute sur la nature du projet politique réactionnaire qui la sous-tend. La gauche doit mettre de côté les disputes accessoires, faire des propositions qui répondent aux aspirations concrètes de nos concitoyens et construire une stratégie de reconquête de l’hégémonie culturelle perdue.

La République Française est une et indivisible ; le pouvoir s’y prend par les urnes et non par les armes. L’armée est au service de la République, elle tire sa légitimité de la défense de cette dernière. Les ennemis de l’intérieur, il en existe et il en a toujours existé ; c’est aux Français et à leurs représentants de les faire reculer avec les moyens qui conviennent dans une démocratie républicaine.

Méditons enfin ce qui a sans doute été une des pires « fausses bonnes idées » des dernières décennies, avec la suppression de la conscription. Nous devons rétablir les conditions d’un encadrement militaire absolument républicain et sanctionner ceux qui ont juré de mettre en danger la communauté nationale en se dressant contre elle parce qu’ils en sont déconnectés. L’armée française doit être l’armée des Français et il convient de réexaminer les conditions dans lesquels ils y reprennent pieds. Relisons L’Armée nouvelle de Jean Jaurès et regardons ensemble comment nous pouvons en appliquer les idées les plus lumineuses aujourd’hui.

* Le pedigree politique des 20 “généraux” en 2e section signataires de cette tribune et mis en avant laisse peu de doute… quelques exemples en photo : Antoine Martinez, leader du groupuscule d’extrême droite VPF, Christian Picquemal habitué des manifestations de la “branche française” du mouvement d’extrême droite allemande Pegida, ou François Gaubert, conseiller régional RN d’Occitanie… on pourrait continuer longtemps comme cela…

Macron en campagne : la sécurité vaut mieux qu’un plan comm’

Le plan comm’ se veut parfait. Un entretien « exclusif » dans Le Figaro, pour séduire un lectorat supposé ancré à droite, publié le dimanche 18 avril, un déplacement de terrain à Montpellier le lendemain pour faire de belles images du Président en maraude avec la BAC, quelques phrases chocs et définitives…

Emmanuel Macron a lancé sa campagne électorale et a décidé de placer la sécurité comme point d’entrée,. Il considère que ce thème est idéal pour consolider sa position dans l’électorat de droite et mettre en scène son duel souhaité avec Marine Le Pen. Pourtant, la sécurité qui a toujours été une préoccupation importante de nos concitoyens vaut mieux qu’une mise en scène d’opérette.

Des affirmations contredites par le terrain

Emmanuel Macron affirme « se battre pour le droit à une vie paisible ». Il a donc d’abord tenu à défendre son bilan au moment où la France doit faire face, selon lui, « à une forte augmentation des violences sur les personnes, qui visent tout particulièrement les détenteurs de l’autorité ». Il promet de « faire reculer la délinquance partout ». Voilà qui est bel et bon. Il promet de tenir son objectif de 10 000 policiers et gendarmes supplémentaires avant la fin du quinquennat ; ainsi « chaque circonscription de police aura plus de policiers à la fin du quinquennat qu’au début, sans exception ». Il insiste : « Chaque Français verra plus de bleu sur le terrain en 2022 qu’en 2017. Ça rassure les gens, ça dissuade les délinquants ».

Pourtant la réalité vécue par les élus locaux et nos concitoyens dément chaque jour cette affirmation : nombre d’entre eux pourraient démontrer aisément que les effectifs de policiers nationaux ou de gendarmes ne sont pas au rendez-vous, malgré les recrutements engagés dès le précédent quinquennat. De même, le dispositif “Police de sécurité au quotidien” (appellation technocratique pour ne plus dire “police de proximité”) n’est déployé qu’avec parcimonie… y compris dans des communes populaires pour lesquelles tout justifierait son implantation. Dans les faits, les habitants voient chaque jour les distances croître entre eux et leurs commissariats, alors que pour ces derniers les collectivités locales sont souvent appelées à fournir ramettes de papier et encre pour les imprimantes tant il manque du strict nécessaire administratif quand ce n’est pas tout simplement de matériel d’intervention. Doter les agents de police des moyens de faire leur métier, d’être présents sur le terrain en nombre au quotidien, plutôt que de devoir mettre en œuvre une politique du chiffre qui les éloigne de la population : voilà qui permettrait de prévenir voire d’empêcher les agressions dont ils sont aujourd’hui victimes et d’avoir le soutien et la confiance des habitants, nécessaires pour lutter contre les gangs, trafiquants et ennemis de la République. On en est loin… nous le verrons plus loin, la stratégie impulsée par le gouvernement et la hiérarchie détourne en réalité la police de sa mission essentielle sans lui apporter les effectifs là où ce serait nécessaire.

Expliquant qu’il fallait prendre le temps de former, le chef de l’État veut convaincre « qu’aujourd’hui 4 508 policiers et 1 706 gendarmes ont déjà été recrutés, soit 6 214 membres des forces de l’ordre », auquel il faudrait ajouter 2 000 fonctionnaires supplémentaires en 2021. On voit difficilement en refaisant tous les calculs comment on pourrait atteindre l’objectif des 10 000 postes supplémentaires d’ici la fin de son quinquennat. D’autant plus que lorsque l’on consulte les rapports « performances » des ministères à Bercy, c’est une toute autre réalité qui apparaît : en effet, si les effectifs de police et gendarmerie ont bien progressé de 9 789 postes équivalents temps plein (ETP) entre 2013 et 2017 (avec une légère baisse pour la police nationale sous l’effet du dernier budget Sarkozy), ceux-ci baissent clairement – et de manière plus prononcée pour la police nationale – entre le 31 décembre 2013 et le 31 décembre 2020 pour atteindre un déficit global de 1 109 ETP (voir notre infographie ci-dessous). La communication élyséenne est donc une fois de plus prise en flagrant délit de mensonge. S’appuyant sur le vote de la loi « sécurité globale », dont le cœur vise avant tout à restreindre les libertés publiques plutôt qu’à renforcer la sécurité, il annonce enfin la création d’une réserve de 30 000 hommes dans la police. Emmanuel Macron réitère également sa promesse de renouveler 50% du parc automobile de la police. Promesses, promesses de campagne… On verra si, à ces annonces, il faut appliquer le même ratio que pour les postes claironnés par l’Élysée et ceux qui sont réellement détruits : si c’est le cas, ça pourrait faire mal…

Cécité volontaire et entêtement dans l’erreur

Après avoir reconnu l’existence de violences policières, il revient à l’affirmation que celles-ci n’existeraient pas : « Il n’y a pas de violence systémique de la police, c’est faux ». Cette déclaration est tout autant électoraliste que les précédentes : elle vise uniquement à s’attirer les bonnes grâces d’un syndicat de police radicalisé, Alliance, qui défend l’impunité a priori des fonctionnaires de police. Là encore, il s’agit d’asseoir une connivence politique et non d’assurer l’efficacité de la police française en garantissant sa respectabilité chez nos concitoyens.

Disposer d’une police républicaine c’est disposer de fonctionnaires de police respectant les principes et la loi républicaine : le racisme n’y a pas plus sa place que la violence. C’est parce qu’elle est républicaine que son action doit être publique. Cela passe par dénoncer la responsabilité de la hiérarchie et du gouvernement inspirant la dérive malsaine, parce que si peu républicaine, dans une partie de la police. Lorsque le préfet de police de Paris, Didier Lallement, affirme devant des caméras de télévision qu’il existe dans la société deux « camps », n’inspire-t-il pas là une culture de guerre civile, incitant les policiers à regarder leurs concitoyens comme de possibles ennemis ? Lorsque le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, « s’étouffe » au mot violence policière, n’entretenait-il pas ainsi une culture de l’impunité mettant la police au-dessus des lois, le contraire même de la République ? La police républicaine doit former ses fonctionnaires, les contrôler, les accompagner et garantir leur conformité aux principes républicains. La GRS a toujours affirmé son attachement à une police républicaine. Nous avons rappelé la nécessité de doter la police des moyens humains, des formations, et des contrôles nécessaires. Nous appelons également à un changement de doctrine, refusant la militarisation à l’américaine initiée par la droite il y a 15 ans, mais amplifiée depuis 2015 par les gouvernements successifs de François Hollande et d’Emmanuel Macron.

Durant des décennies, la police française a été considérée comme un modèle d’efficacité et de pondération, formant à l’étranger des centaines de forces de l’ordre à l’encadrement des manifestations et de certains des débordements qui peuvent malheureusement s’y produire. Depuis six ans, aucune manifestation n’a pu se tenir calmement ; la faute à des éléments radicalisés et agressifs qui visent à chaque fois à détourner les mobilisations syndicales et populaires de leur objet ; mais également à une doctrine d’engagement des forces de l’ordre dont l’objet n’est plus la sécurité des manifestations et des manifestants (en lien avec les organisateurs), mais l’affrontement « viril » avec les casseurs et l’amalgame de ces derniers avec les manifestants pacifiques. Loi Travail XXL, 1er mai, « Gilets Jaunes » … la liste est longue où, sous prétexte d’affronter les black blocs et autres casseurs, ce sont des citoyens pacifiques qui ont été « nassés » et visés par les forces de l’ordre, noyés sous les gaz lacrymogènes et gravement blessés, comme nous ne l’avions plus vu depuis les années 1970 ! Il y a une disjonction totale entre les besoins quotidiens de sécurité et tranquillité publiques réclamées par nos concitoyens qui ne sont pas au rendez-vous et la violence exercée avec des moyens disproportionnés contre l’expression démocratique et constitutionnelle des Français. Le choix électoraliste d’Emmanuel Macron est de poursuivre dans l’erreur en faisant de notre police un outil de « maintien de l’ordre » et non un service public de « gardiens de la paix ».

Sémantiquement et juridiquement, si l’on assemble les éléments de discours de ces derniers mois, couronnés par l’adoption de la proposition de loi « Sécurité Globale », « nous sommes en guerre » avec les mesures prises récemment, « couvre feu » « état d’urgence » « confinement », « Drone », « caméra autorisée sans contrôle », « interdictions de filmer la police », les ingrédients sont réunis pour faire basculer la France dans un régime de contrôle et de contrainte et non de liberté, sans garantir la sécurité ! Au-delà des craintes pour les libertés publiques, l’alourdissement de l’arsenal juridique n’a jamais renforcé l’efficacité de la police. La Gauche Républicaine et Socialiste rappelle son opposition farouche à la loi « Sécurité Globale » (nos deux parlementaires – Marie-Noëlle Lienemann et Caroline Fiat ont d’ailleurs signé la saisine du Conseil Constitutionnel sur ce texte). Nous demandons la tenue d’états généraux de la sécurité où seront redéfinis la doctrine d’encadrement des manifestations et de l’ordre public, les moyens nécessaires accordés à la police et son intégration à un projet de société en lien avec la population. Ces états généraux devront déboucher sur une loi de programmation pluriannuelle pour la sécurité intérieure quiprévoira la montée en puissance des moyens humains, matériels, techniques des forces de l’ordre, de renseignement intérieur et de la justice ainsi que leurs missions prioritaires et le déploiement territorial.

Dans cette opération de communication commencée dimanche dernier, le locataire de l’Élysée n’a pas eu un mot pour la Justice et les moyens dont elle manque cruellement et que l’agitation du Garde des Sceaux ne peut (pas plus que du temps de ses prédécesseurs) masquer. Là encore, le gouvernement Macron-Castex reprend les recettes éculées des conservateurs en annonçant la création mardi 20 avril de 15 000 places supplémentaires de prison… sans se soucier le moins du monde des raisons pour lesquelles celles-ci sont combles, sans rien changer à l’indignité des conditions de vie dans les maisons d’arrêts et sans aucune réflexion sur un système qui, plutôt que réhabiliter les détenus, fabrique des récidivistes souvent plus dangereux à l’issue de leur peine qu’ils ne l’étaient avant…

Stupéfiant contre-sens !

Emmanuel Macron semble avoir bénéficié sur la question des drogues d’une illumination soudaine : « La France est devenue un pays de consommation et donc, il faut briser ce tabou, lancer un grand débat national sur la consommation de drogues et ses effets délétères ». On espère que le Président ne découvre pas la situation !? « Ceux qui prennent de la drogue doivent comprendre que non seulement, ils mettent leur santé en danger, mais qu’ils alimentent aussi le plus grand des trafics. On se roule un joint dans son salon et, à la fin, on alimente la plus importante des sources d’insécurité… ». Il ajoute que « 70 000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis septembre. […] Ça veut dire quelque chose de clair : si vous vous faites prendre comme consommateur, vous savez que vous allez devoir payer et que vous n’allez pas y échapper. Ça change le rapport de force. » Il affirme également se fixer comme objectif d’éradiquer le trafic « par tous les moyens, [c’est] devenu la mère des batailles, puisque la drogue innerve certains réseaux séparatistes mais aussi la délinquance du quotidien, y compris dans les petites villes épargnées jusqu’ici. Ne laisser aucun répit aux trafiquants de drogue, c’est faire reculer la délinquance partout ». On n’est pas loin de l’unité de pensée entre un Didier Lallement, qui accusait une partie des Français d’être responsables des morts du COVID, et un Emmanuel Macron qui dénonce une autre partie comme des complices objectifs des terroristes. On imagine l’efficacité de ce type de déclarations…

Cette façon de présenter les choses est en réalité parfaitement inefficace et contre-productif. La lutte contre le trafic de cannabis mobilise des effectifs importants de policiers et de gendarmes pour des résultats contestables. Elle est selon les études la raison principale des contrôles au faciès (ce qui rappelle au demeurant que les préjugés existent malgré les dénégations du président de la République). En effet, les contrôles inopinés d’identité sont justifiés par la hiérarchie policière essentiellement pour détecter des détenteurs de haschisch. Non seulement ce type de contrôles ne débouche que sur l’écume du trafic réel mais provoque rancœur et frustration chez ceux de nos concitoyens qui subissent ce qu’ils vivent souvent à juste titre comme une forme de harcèlement. Les forces de l’ordre se trouvent mobilisées pour des opérations à l’efficacité douteuse et qui ternissent leur image auprès d’une partie de la population, dont ils ont déjà du mal à obtenir une confiance pourtant indispensable. Ainsi il serait légitime d’examiner de manière plus appuyée les arguments qui ont poussé de nombreux parlementaires – et notamment Daniel Vaillant, ancien ministre de l’intérieur – à défendre la dépénalisation de la consommation du cannabis et la réglementation de son commerce : outre qu’il libérerait des effectifs de policiers qui pourraient être affectés à des tâches bien plus utiles pour nos concitoyens et à leur contact quotidien (tout en supprimant une source de friction et des zones grises dans les contrôles d’identité au regard de nos principes républicains), la vente réglementée de cannabis telle qu’elle a été mise en place dans d’autres pays d’Europe et d’Amérique du Nord (sans qu’il y ait d’explosion de la consommation) pourrait sous contrôle de l’État devenir une source de recettes pour les pouvoirs publics (comme le tabac) et tarir les recettes de nombreux réseaux criminels et terroristes, contribuant ainsi à la tranquillité publique. Ainsi en affichant un raidissement intransigeant sur le cannabis, Emmanuel Macron énonce un contresens stupéfiant !

Enfin pour Emmanuel Macron, « dire que le haschisch est innocent est plus qu’un mensonge » : « Sur le plan cognitif, les effets sont désastreux. Combien de jeunes, parce qu’ils commencent à fumer au collège, sortent totalement du système scolaire et gâchent leurs chances ? Et je ne parle même pas des effets de glissement vers des drogues plus dures. » Cette toute dernière affirmation n’a aucun fondement scientifique, mais on peut s’attendre à ce que le candidat Macron la répète ad nauseam pour garantir à son propos de l’efficacité. Les effets de la consommation de cannabis n’ont jamais élevé la raison, personne ne dira le le contraire. Ce serait par contre une erreur dramatique de considérer sa consommation excessive – à tous les âges – comme un objet de sécurité et de répression plutôt que comme une priorité de santé publique. Que dire des effets de l’alcool et du tabac qui en vente libre provoquent lorsqu’ils sont consommés à l’excès des dégâts psychologiques, sanitaires et morbides massifs ! Pourtant ici la morale ne se mêle pas du commerce. Les expériences de prohibition ont toujours été des échecs funestes. La vente du tabac est réglementée bien que le produit soit mortel, elle rapporte des recettes importantes à l’État ; la vente d’alcool non seulement continue de faire l’objet de campagnes publicitaires mais le produit en lui-même sous ces diverses formes est présenté comme un élément constitutif de notre mode de vie. Chacun examinera en conscience la contradiction. En réalité, le fait de considérer les consommateurs de drogue, les toxicomanes, comme des délinquants handicape concrètement les opérations de prévention mise en œuvre par tous les organes de santé publique et les associations. Il est nécessaire et urgent de renverser le point de vue des pouvoirs publics sur ce dossier.

Personne ne niera que la violence a progressé dans la société française et que celle qui vise les dépositaires de l’autorité publique, les agents publics en général, a connu une augmentation plus inquiétante encore. Mais sans retomber dans l’excuse sociale de la violence – les faits d’agression contre des policiers ou les attaques de commissariats ne sont pas excusables, leurs auteurs doivent être appréhendés et condamnés –, cette évolution est également corrélée à la progression des inégalités sociales et dans l’accès aux services publics. C’est une situation qui n’est d’ailleurs pas réservée aux seuls quartiers populaires. Ainsi considérer que la restauration d’une plus grande tranquillité publique ne passera que par une logique répressive est une erreur. Nous sommes favorables à ce que l’État fasse un effort de recrutement pour la police nationale et la gendarmerie, encore convient-il comme nous l’avons dit plus haut de veiller à leur formation, à une répartition territoriale répondant aux besoins réels du pays et aux missions précises qu’on assigne à nos forces de l’ordre : nos concitoyens ont besoin de policiers et de gendarmes de proximité qui connaissent les habitants, pas de CRS ou de gendarmes mobiles supplémentaires. D’autre part, comme nous l’avons indiqué plus haut, il serait illusoire d’en rester là… évidemment la question de la justice et de la réponse carcérale (et des alternatives à la prison) ont été trop longtemps négligées et traitées par des opérations « coups de mentons », mais nos concitoyens ont besoin de retrouver confiance dans la promesse sociale et émancipatrice de la République ce qui passe obligatoirement par un New Deal des services publics sur l’école, le logement et la mixité sociale, l’accès au services publics en général, sur la formation, les transports et par une politique volontariste de l’emploi et sur les salaires afin de résorber ghettos sociaux et poches de pauvreté.

Football : un sport dans lequel à la fin les riches gagnent ?

Depuis les années 1980 l’UEFA, l’Union des associations européennes de football,
a mis le doigt dans un engrenage dangereux, cédant par étapes aux clubs les plus riches du football qui voulaient toujours plus de bénéfices, de droits télé, et qui souhaitaient rester dans un entre-soi, écartant le plus possible l’incertitude du sport. Être battu par un plus petit et un plus pauvre que soi ? C’était un « risque industriel » que les nouveaux riches investisseurs du football voulaient de moins en moins prendre.
Dans les années 1980 la coupe des clubs champions était une compétition ouverte qui voyait s’affronter les champions (et uniquement les champions) de chaque pays européen. Ainsi, le champion d’Angleterre ou d’Espagne concourait à égalité avec celui de Belgique ou du Danemark. La création de la ligue des champions dans les années 1990 a déjà mis à mal ce principe d’équité sportive . Dorénavant, en Angleterre ou en Espagne sont qualifiés directement pour la phase de groupes de la ligue des champions non seulement les clubs qui ont gagné le titre de dans leur pays mais encore les équipes classées deuxième, troisième ou même quatrième de leur championnat, tandis que les championnats jugés plus faibles (c’est à dire plus pauvres) doivent se contenter d’un seul qualifié qui doit encore passer par un ou deux tours préliminaires avant d’accéder éventuellement à la phase de groupes, plus médiatisée et surtout plus lucrative.
Les clubs et les pays les plus riches furent donc déjà avantagés. Le fameux arrêt Bosman, décision de la Cour de justice des Communautés européennes rendue en 1995, n’a fait qu’aggraver la chose, mettant fin à la restriction de trois joueurs étrangers maximum dans un même club ressortissants de l’Union européenne . Dorénavant les plus grands clubs avaient le pouvoir de recruter les meilleurs joueurs, issus de clubs moins riches, sans limites, et n’étaient plus obligés de se consacrer à la formation de joueurs locaux.
Mais toutes ces évolutions des années 90 ne suffisaient pas .
La nouvelle réforme de la ligue des champions présentée aujourd’hui par l’UEFA a proposé d’aller encore plus loin dans ce sens.
Cela n’est cependant toujours pas assez pour les présidents de 12 clubs parmi les plus riches (et cupides, n’ayons pas peur des mots) en Europe, à la tête desquels celui du Real Madrid (club surendetté) ou de la Juventus de Turin (Andrea Agnelli, descendant de la puissante famille Agnelli, administrateur par ailleurs de Fiat). Ces derniers passent désormais à la phase finale de leur plan, la création d’une « Super League » européenne fermée, sur le modèle de la NBA américaine, à laquelle on n’accéderait plus en fonction de ses résultats sportifs mais en tant que membre -actionnaire -de la Ligue.
Le projet de Super League de football est un projet de businessmen qui n’aiment ni le foot ni le sport . Il tuerait le football européen qui deviendrait définitivement un club fermé de riches, faisant disparaître toute idée de mérite sportif, de compétition, toute incertitude, toute idée de plaisir devant l’exploit de David contre Goliath, toute idée de sport populaire…que des clubs anglais comme Liverpool ou Manchester, fondés par des ouvriers, clubs du peuple à l’origine , se prêtent à cela est à pleurer…
il est heureux que de nombreuses voix, tant de responsables politiques que de joueurs ou de personnalités du monde du football s’élèvent contre ce projet fou et rappellent ce qui devrait rester au cœur des préoccupations : les valeurs sportives et non l’argent.

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