Le fantasme du complot américain pour remplacer le gaz russe en Europe

Les Américains avaient-ils intérêt à “couper le gaz russe pour exporter leur gaz de schiste en Europe ?” Si leur capacité de production et transport pouvait remplacer ce marché, peut-être, mais c’est très loin d’être le cas.

Pourquoi s’exposer à voir une des régions les plus importantes pour le commerce et le système financier américain s’effondrer en récession, avec le risque de crise bancaire capable d’emporter le système financier américain ?

Les capacités actuelles de production et d’exportation de gaz naturel américain, de schiste ou non, c’est l’équivalent d’un dixième de ce que livrait la Russie en 2021.

Il n’y aura pas de capacités de production supplémentaires américaines avant 3 ans pour augmenter massivement de tels apports. Les États Unis ne peuvent pas prendre le relais.

En 2022, le mètre cube de gaz à destination de l’Europe rapporte 40% de plus que vers l’Asie où l’Amérique latine. L’essentiel des augmentations des exportations de gaz liquide américain vers l’Europe s’est faite en détournant des quantités à l’origine contractées par la Chine, le Pakistan, le Brésil. L’augmentation du prix dans ces pays va rééquilibrer les flux de gaz liquide et réduire les quantités disponibles pour l’Europe.

Joe Biden s’était engagé lorsque Poutine avait commencé les chantages aux livraisons de gaz au moment des premières sanctions à faire monter les exportations américaines vers l’Europe à 15 milliards de mètres cubes. La Russie en exportait 155. On voit bien que les États Unis n’ont jamais été en capacité de “remplacer” le gaz russe.

Depuis février 2022, les pays de notre région ayant remplacé le gaz russe par du gaz liquide américain sont dans l’ordre de l’augmentation de leurs importations : Belgique, Espagne, Grèce, Italie, France, Croatie, Turquie.

La France est ici en bonne place parce qu’une bonne partie du transport et de la liquéfaction du gaz américain, de schiste ou pas, est maîtrisé par l’entreprise française TotalÉnergies, qui est également historiquement très impliquée dans le gaz et le pétrole russe.

Les Américains ne voulaient pas de North Stream 2 pour plein de raisons qui leur sont propres. Mais ils n’avaient aucun intérêt à plonger l’Europe en récession par l’inflation des prix de l’énergie contaminant l’ensemble des chaînes de valeurs de l’économie, ni à organiser la pénurie énergétique d’un de leur plus grands marchés.

D’autant que leur gaz liquide était déjà commandé. Comme rappelé au dessus, ce sont les commanditaires non européens qui à l’heure actuelle voient les quantités qu’ils avaient commandés être réorientés vers l’Europe. Il n’y a jamais eu de stocks n’attendant que la fin du gaz russe pour être miraculeusement vendus aux européens.

On le sous estime, mais les États Unis ont des besoins considérables intérieurs en énergie. Le coût du gaz liquide aux États Unis est six fois inférieur à celui payé par l’Europe, donnant un avantage compétitif considérable aux producteurs manufacturés américains, dont l’approvisionnement est garanti par les mécanismes d’encadrement du marché intérieur.

Avant le Covid, les États Unis étaient importateurs net en gaz. Le principal exportateur mondial de gaz liquide, c’est le Qatar, suivi de l’Australie, de la Malaisie. La situation géopolitique et économique actuelle profite d’abord à ces trois pays, qui ont pris l’essentiel de l’augmentation de l’approvisionnement européen.

Si les capacités de gazéification du gaz liquide existaient suffisamment, et le nombre de bateaux – la flotte compte 641 navires en tout capables de transporter du gaz liquide – augmentait, le Qatar pourrait compenser le gaz russe en Europe.

Lorsque l’Allemagne, confrontée à l’effondrement de la stratégie énergétique d’Angela Merkel, doit réagir, elle n’a pas couru à Washington, mais vers le golfe. C’est au Qatar que l’Allemagne s’approvisionne aujourd’hui, et compte sur ses deux terminaux flottants provisoires avec des capacités modiques mais nouvelles de gazéification, ouverture prévue début 2023, pour se passer et du gaz russe, et d’un gaz américain qui de toute façon n’existe pas dans les quantités nécessaires…

Exportation de Gaz naturel liquéfié par les USA

17 octobre 1961 : regarder le passé en face

Le 17 octobre 1961, le Préfet de Police Maurice Papon organisait et ordonnait la répression sanglante contre des dizaines de milliers de manifestants pacifiques qui défendaient l’indépendance de l’Algérie et leur liberté de circulation.

Des centaines d’Algériens de toute la région parisienne furent ainsi tués, sous les coups de la police, noyés dans la Seine, à Paris et en banlieue parfois jusqu’à plus de 15 km des lieux de la manifestation.

Maurice Papon ne fut pas seulement leur assassin, il flétrissait durablement la République au nom de laquelle il agissait en commettant ce crime irréparable.

Depuis de nombreuses années, nous participons aux hommages aux victimes algériennes qui subirent cette violence intolérable et pour certains y laissèrent la vie. C’est un devoir de réaffirmer ainsi qu’il n’est plus possible de commettre au nom de la République qui nous rassemble des actes aussi contraires à ses principes, que plus jamais la France ne tombera dans la faute de la colonisation.

Si François Hollande avait publié un communiqué élyséen fort le 17 octobre 2012 « Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l’indépendance ont été tués lors d’une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits. Cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes. », il ne disait pas qui avait commis la « sanglante répression », en l’occurrence la police parisienne, agissant sous les ordres du préfet de police, lui-même sous l’autorité du gouvernement du général de Gaulle. Le communiqué restait donc malheureusement muet sur le déroulement de la manifestation comme sur le nombre de victimes et, alors que sur la plaque du pont Saint-Michel la manifestation est dite « pacifique », François Hollande ne la qualifiait toujours pas. Il a fallu attendre l’année dernière pour que le Président de la République Emmanuel Macron affirme enfin sur le pont de Bezons, lors de la première commémoration officielle au plus haut niveau de ce massacre, la reconnaissance des « crimes inexcusables pour la République ».

La France est engagée depuis quelques années dans un travail important de retour sur son passé colonial ; il est nécessaire pour l’ensemble de nos concitoyens français, il est nécessaire pour assurer entre le Peuple français et le Peuple algérien une relation nouvelle et sincère. Il semble que le pouvoir algérien souhaite aujourd’hui répondre à la main tendue de la France. C’est une bonne chose : nous espérons de tout notre cœur que cette tendance aboutira.

Ensemble portons haut les valeurs d’humanité et de fraternité entre les Peuples.

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