Protéger l’Europe et soutenir l’Ukraine ne justifie pas d’accélérer son adhésion à l’UE !

communiqué de presse d’Emmanuel Maurel, député et animateur national de la Gauche Républicaine et Socialiste – mercredi 12 mars 2025

Je me suis abstenu sur la résolution débattue ce jour à l’Assemblée nationale pour renforcer notre soutien à l’Ukraine. 

La guerre déclenchée il y a trois ans par les armées de Vladimir Poutine a semé la mort et la destruction dans un pays qui n’aspire qu’à la liberté, la démocratie et l’indépendance.

La France a raison d’entreprendre une action résolue en faveur d’une paix juste et durable en Ukraine, assortie de garanties de sécurité suffisantes pour dissuader la Russie de jamais reprendre les hostilités.

A cet égard, la proposition conjointe des États-Unis et de l’Ukraine pour un cessez-le-feu est un pas dans la bonne direction. A présent, la balle est dans le camp de la Russie.

Mais la sécurité collective du continent européen nécessitera des efforts au long cours de la part des pays européens et de la France, dans le strict respect de son pacte social.

Nos compatriotes rejettent l’impérialisme meurtrier du Kremlin et souhaitent que l’Union européenne, enfin émancipée de la tutelle américaine, soit forte contre cette menace.

Mais ils ne souscrivent pas à l’idée que pour ce faire, l’Ukraine doive adhérer à l’UE, a fortiori de façon accélérée ! Une telle adhésion provoquerait des déséquilibres financiers et économiques insolubles, particulièrement pour nos agriculteurs.

Ces derniers ne sauraient être la variable d’ajustement d’un mouvement irréfléchi qui mettrait en danger notre souveraineté alimentaire et au-delà, l’idée même de la construction européenne.

Les Français soutiennent la volonté exprimée par la majorité des forces politiques pour soutenir l’Ukraine contre son agresseur. Mais toute volonté d’accélérer l’histoire sans les consulter serait vouée à l’échec.

intervention d’Emmanuel Maurel en séance le mercredi 12 mars 2025 à l’Assemblée nationale

Emmanuel Macron : la drôle de dramatisation

Dans son allocution du 5 mars 2025, le Président de la République a appelé les Français à faire face à la « menace russe ». « Les temps de l’insouciance sont terminés » et « la patrie a besoin de vous », a-t-il affirmé. 

Sans contester la gravité du moment, céder aux facilités de la surenchère guerrière serait contre-productif. Les Français soutiennent majoritairement le combat des Ukrainiens, mais ne s’en estiment pas proches au point d’approuver une escalade militaire. La vérité est que nous ne sommes pas en guerre et l’évocation permanente de l’Histoire (« faut-il mourir pour Dantzig ? ») n’y changera rien.

Le message que nos compatriotes sont prêts à entendre, c’est qu’il faut dimensionner correctement notre armée. Ils comprennent qu’un budget militaire à moins de 2% du PIB relève de l’exception historique. Sous les septennats de François Mitterrand, la France consacrait plus de 3% de son PIB à la défense, et sous de Gaulle, près de 5%. Face à une Russie plus agressive que jamais, en « économie de guerre » depuis trois ans et qui augmente ses capacités, mais aussi face aux menaces diverses dans un monde chaotique et violent, il est logique de poser la question des moyens alloués à notre défense.

Il ne serait ni prudent ni responsable de faire comme si le Kremlin allait s’arrêter à 20% du territoire ukrainien, puis redevenir subitement pacifique à la faveur d’un simple cessez-le-feu. En Russie, le bourrage de crâne contre « l’Occident collectif » fonctionne à plein régime et entretient la paranoïa de la base au sommet. Le révisionnisme historique n’y est pas non plus en reste, qui conteste aux anciennes républiques soviétiques leur droit à l’autodétermination et l’indépendance. La peur des Baltes, des Polonais et même des Finlandais, sujets du Tsar jusqu’en 1917, n’est pas imaginaire. Ils ont tous payé pour voir l’impérialisme russe à l’œuvre.

On ne compte plus les opérations russes de « guerre hybride » sur le territoire européen. Tentatives de déstabilisation politique, meurtres, attaques cyber, propagande téléguidée depuis Moscou sur les réseaux sociaux… tout y passe. Les services de renseignements européens alertent de longue date sur ce déploiement de grands moyens. Ils n’inventent rien et nous devons nous fier à leur expertise, mais en gardant la tête froide. Les services et officines russes seraient ravis que nous cédions à la panique ; ils en profiteraient même pour jeter encore plus d’huile sur le feu.

Ce qui a radicalement changé en revanche, c’est le revirement américain. Depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, les Etats-Unis adoptent une position « pacifiste pro-russe » qui reprend quasi intégralement le narratif du Kremlin, osant même accuser l’Ukraine d’avoir déclenché la guerre ! Le discours de Trump révèle une trahison assumée de ses alliés européens, qui sert plusieurs buts : affaiblir nos économies, rafler le Groenland et détacher la Russie de la Chine. Pour nous Européens, ce changement radical comporte un vrai risque, auquel nous sommes bien obligés de faire face.

Et pour nous Français, ce n’est pas faute d’avoir prévenu ! Tous ceux qui méprisaient nos propositions pour un approfondissement de la coordination européenne en matière de défense en sont pour leurs frais. L’Otan est vraiment « en état de mort cérébrale », nous sommes vraiment seuls, et il faut vraiment mettre en place des mécanismes pour rattraper notre retard. Il est assez piquant de voir les plus fervents atlantistes historiques se rallier en convertis fervents à « l’Europe de la défense ». 

Mais les affichages budgétaires ne suffiront pas. Pour être efficients, ils devront s’inscrire dans une politique de croissance et de relance, qui seule est en mesure de conforter l’autonomie stratégique européenne. Cela implique d’investir en commun et surtout d’acheter européen en commun. Cela implique aussi d’en finir avec l’austérité gravée dans le marbre des traités budgétaires.

La validation de la (vieille) proposition française de sortir les dépenses militaires du calcul des déficits n’est qu’un premier pas. La conjoncture comateuse de l’Union européenne exige que la politique macroéconomique dans son ensemble, budgétaire et monétaire, soit entièrement revue.

Macron a donc tort d’envisager la montée en puissance de notre effort militaire d’une manière étroitement libérale, où sa politique de l’offre devrait impérativement être préservée. Au nom de quel principe fondamental, ou d’efficacité, devrait-on exonérer les plus riches et les multinationales de cet effort collectif ? Ce n’est pas aux Français des classes populaires et moyennes, et encore moins aux plus vulnérables, de payer intégralement le prix de notre sécurité ! Aucune nécessité n’impose de compenser 30 milliards annuels de plus pour l’armée par 30 milliards annuels en moins pour la protection sociale. Il n’est pas de notre intérêt de procéder à de tels arbitrages, qu’il s’agisse du social ou de tous autres investissements publics utiles à la collectivité.

Quoiqu’il en soit, le Président de la République n’a pas la prérogative pour en décider seul, ni la majorité parlementaire pour trancher sans débat préalable ! 

Le Parlement vote le budget, les impôts, et il se prononce sur les grands choix économiques et sociaux. Il serait temps qu’Emmanuel Macron comprenne que tout le pouvoir n’est pas concentré à l’Elysée.

Il serait temps aussi qu’il comprenne que nous n’avons nul besoin de nous précipiter vers des solutions toutes faites de type « armée européenne », et autres détricotages des souverainetés nationales sur les questions régaliennes. Fidèles à eux-mêmes, les Français ne refusent pas d’approfondir la coopération européenne, y compris en matière de défense. Mais ils ne sont pas prêts à toutes les fuites en avant ; et exigent qu’en tout état de cause, la parole leur soit donnée sur tout choix structurant pour l’avenir de la nation.

pour la Gauche Républicaine et Socialiste
Emmanuel Maurel, député et animateur national

Si la France veut disposer d’une défense nationale souveraine, il faut défendre notre industrie

Mardi 4 mars 2025 dans l’après-midi, Emmanuel Maurel, député et animateur national de la GRS (groupe parlementaire GDR), intervenait à la tribune de l’Assemblée nationale lors du débat sur « La perte de souveraineté industrielle et l’atteinte aux industries stratégiques« . 🔴🏭Parler sérieusement de souveraineté, de défense, cela suppose au minimum de ne pas laisser nos entreprises se faire racheter par l’étranger. Depuis des années les Américains font leurs courses en France et le Gouvernement laisse faire (sauf… 3 fois). Soyons un peu cohérents !

États-Unis : Donald Trump et Elon Musk passent la science à la tronçonneuse

communique de presse d’emmanuel maurel – mercredi 5 mars 2025

Nous pensions savoir à quoi nous en tenir avec Donald Trump, mais le début de son second mandat montre que nous n’avons encore rien vu.

Le Président des États-Unis, qui préconisait de s’injecter de l’eau de javel par intraveineuse pour soigner le COVID, pour qui le réchauffement climatique est un canular inventé par la Chine, qui pense que les sans-papiers sont des criminels et des violeurs qui mangent les chiens et les chats, se livre à une attaque sans précédent contre l’université, la science et la recherche.

Un collectif de chercheurs américains de toutes universités et toutes disciplines, « Stand Up For Science », s’est constitué en réaction aux assauts de la nouvelle administration, et particulièrement de son bras armé d’une tronçonneuse, Elon Musk.

Ce collectif répertorie une incroyable série de suppressions de crédits budgétaires, menées tambour battant par le département de la soi-disant « efficacité gouvernementale ». Désormais, seule la bande de fanatiques obscurantistes au pouvoir à Washington s’estime qualifiée pour dicter ce qui vaut d’être lu, étudié et appris. Voilà le sort que les défenseurs autoproclamés de la « liberté d’expression » réservent aux voix discordantes.

Les sciences humaines font l’objet, dans toute leur diversité, de mises à l’index allant jusqu’à retirer des milliers d’ouvrages des rayons des bibliothèques universitaires. Mais ce n’est qu’un prélude à une attaque en règle contre toutes les sciences.

Nous apprenons avec sidération que le Gouvernement américain a supprimé 20% des financements destinés au télescope spatial James-Webb, fruit d’une coopération associant la Nasa et l’Agence spatiale européenne, et qui a remplacé le célèbre télescope Hubble en 2021.

Nous assistons, médusés, à une foire d’empoigne des trumpistes visant à décourager toute vaccination, au point de mettre même dans l’embarras le ministre de la santé, Robert Kennedy Jr, pourtant considéré comme un vaccino-sceptique de choc.

Nous apprenons enfin qu’il n’y aura plus de mesures satellitaires des gaz à effet de serre et du changement climatique. Cela s’ajoute aux milliards de dollars subitement retirés à d’innombrables laboratoires de recherche, jusqu’aux sciences de la santé et aux neurosciences, et qui laissent sur le carreau des milliers de scientifiques.

J’apporte tout mon soutien au collectif « Stand Up For Science » et aux initiatives des universitaires et chercheurs français pour venir en aide à leurs collègues outre-Atlantique. La journée de mobilisation du 7 mars, à laquelle je prendrai part, marquera la première étape de la résistance contre le bâillonnement de la science par la nouvelle internationale réactionnaire.

Élections Allemandes : Mathieu Pouydesseau analyse les résultats [PODCAST]

Quel est l’impact des élections législatives allemandes sur l’Europe et ses voisins ?
Dans cet épisode du podcast « 10 minutes, le podcast des Français dans le Monde », Gauthier Seys interrogeait lundi 24 février 2025 Mathieu Pouydesseau sur les répercussions potentielles des récentes élections législatives allemandes.

Alors que l’Allemagne, pilier central de l’Union européenne, traverse une période de bouleversements politiques, quelle influence cela pourrait-il avoir sur ses voisins, notamment la France ? Ce questionnement introduit une discussion captivante qui explore les dynamiques politiques actuelles en Allemagne et leurs implications plus larges.

Me Too : préférer la justice au pilori

Quelques articles de presses, essentiellement des relais de dépêches AFP, nous ont appris le classement sans suite des investigations contre Julien Bayou, ancien député écologiste de Paris. Cette décision de classement est justifiée par l’absence d’infraction susceptible de lui être reprochée.

Alors que les accusations contre Julien Bayou avaient été relayées à la une de nombreux médias, les mêmes n’offrent pas une couverture aussi large à la conclusion de cette affaire : aucune réhabilitation ni en une des journaux ni de leurs sites internet. C’est là la principale injustice pour un homme qui aura dû se battre seul pour défendre non seulement son innocence mais son honneur.

La présomption d’innocence a été constamment ignorée. Des enquêtes à la qualité douteuse ont cherché à dépeindre Julien Bayou comme un monstre sans aucun souci d’équilibre. Son droit au respect de sa vie privée a été bafoué. Des élus et des militants ont propagé des rumeurs, transformant les réseaux sociaux en chambre d’accusation et de jugement, dans lesquelles chacun était sommé de le condamner bruyamment.

MeToo a permis la libération de la parole des victimes. S’il en était besoin d’autres affaires démontrent régulièrement combien cette libération est nécessaire. Chacun sait le scandale que génère la peur de déposer plainte pour viol ou agression sexuelle à cause d’une forme de pression sociale latente ou explicite ; personne ne peut ignorer que les victimes sont encore trop mal reçues, écoutées et accueillies dans les commissariats et les gendarmeries ; personne ne peut ignorer 97% des plaintes pour viol ou agression sexuelle n’aboutissent à rien.

Les siècles de domination masculine ne se rachèteront pas en frappant sans distinction innocents et coupables, mais lorsque la société prendra enfin pleinement conscience de l’absolu impératif de l’égalité et du respect, de la nécessité d’accélérer leur concrétisation, lorsque les comportements seront enfin appropriés dans les commissariats, lorsque des moyens seront donnés à la justice pour que tous les coupables soient punis et que les victimes puissent se reconstruire.

Ne soyons pas aveugles à ceux qu’on a considéré comme un œuf à casser pour faire une omelette : ceux dont les noms ont été jetés en pâture dans les médias puis sur les réseaux sociaux ou condamnés sans autre forme de procès, avant que la justice finisse par rejeter les accusations. Julien Bayou est aujourd’hui concerné, mais d’autres personnes ont aussi été victimes d’accusations dont les fondements ont disparu à l’examen des faits.

La Justice rendue tardivement, mais rendue, peut ici laisser un goût amer tant le mal est fait. Avec toute sa lenteur, ses biais et ses imperfections, il importe de continuer à préférer la justice au pilori, de l’aider à accomplir sa mission, depuis l’instruction jusqu’à la peine ou la réparation. Il revient à la société dans son ensemble de réhabiliter Julien Bayou, et les autres victimes de dénonciations calomnieuses à la hauteur du préjudice qui leur a été infligé. Il nous revient à toutes et à tous de faire changer la société pour que l’égalité et la justice deviennent de réelles priorités, pour que la violence recule toujours plus, pour que l’égalité femmes-hommes se concrétise dans l’intimité comme dans le métro, dans les salaires comme dans les responsabilités.

Auto-entrepreneuriat et illusion technophile : faire entendre raison face aux chimères macronistes

Le mirage de l’auto-entreprenariat est-il en train de se dissiper ?

On sait l’année 2024 a connu une vague de défaillances d’entreprises, mais elle a été également une record en création d’entreprises. Ainsi selon les données de l’Insee, plus d’1,1 million d’entreprises créées, soit 5,7 % de plus que l’année précédente. Faut-il voir dans ces chiffres des créations un signe encourageant, alors que 64 % de ces nouvelles entreprises sont en fait créées par des « micro-entrepreneurs », ceux que l’on appelle plus communément les auto-entrepreneurs. D’un point de vue légal, depuis 2016, le terme c’est bien micro entrepreneur, un travailleur indépendant qui facture ses prestations.

Le statut a été mis en place en 2009. Il attire de nombreux « candidats », grâce à ces formalités allégées, un régime fiscal dédié avec un mode de calcul des cotisations et de l’impôt sur le revenu simplifiée. Depuis sa création, le nombre de personnes qui s’inscrivent comme micro-entrepreneur augmente quasiment chaque année, et plus que d’autres régimes d’entreprise. En 2024, ils étaient 716 000 à s’être lancé, 50 000 de plus qu’en 2023, mais avec des profils très divers : on distingue ceux qui adoptent ce statut par opportunité économique et ceux dans une situation subie dans un entrepreneuriat dit « de nécessité ». 40 % des gens qui prennent ce statut le font pour créer leur propre emploi, largement parce qu’au départ ils étaient au chômage, sans activité. Pour 60 % d’entre eux, c’est leur activité principale. Mais quand on regarde les chiffres, le revenu tourne sous les 700€/mois de chiffre d’affaires, très loin du smic.

La multiplication de ces micro-entrepreneurs est donc bien plus le symptôme d’une précarisation du marché de l’emploi que d’un dynamisme entrepreneurial français. C’est une forme, une zone grise de l’économie, qui positionnent ces travailleurs comme des sous-traitants. Cela se pratique dans les transports routiers, dans le service à domicile : des entreprises qui employaient, par exemple, des personnels d’entretien ont demandé qu’elles prennent un statut d’auto-entrepreneur. Une réalité qui représente une part importante, très loin de ce qu’on imagine être l’entrepreneur héroïque et de la start-up nation.

Faut-il jeter le bébé avec l’eau du bain ?

Ce statut de micro-entrepreneur n’est pourtant pas qu’une solution choisie faute de mieux, car depuis quinze ans, ce statut de micro-entrepreneur s’inscrit dans les habitudes des Français : ne pas avoir de supérieur hiérarchique ou pour gagner un revenu complémentaire en marge, par exemple, d’un temps partiel (mais là aussi on voit bien l’effet de la précarisation du marché du travail) ; c’est un statut qui peut aussi attirer des jeunes retraités. Il sert parfois d’étape transitoire pour tester une idée avant de la faire croître dans une entreprise plus grosse. Mais pour que cette fonction d’étape transitoire fonctionne, il faudrait renforcer à tout l’accompagnement des micro-entrepreneurs. En moyenne, 40 % des entrepreneurs sont accompagnés, 25 % seulement chez les micro-entrepreneurs ; or les études ont démontré que des entrepreneurs qui ne sont pas accompagnés par des structures ont beaucoup plus de risque d’échouer. Selon une étude publiée par le CREDOC, le centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie, ces structures sont moins pérennes que les entreprises classiques – un tiers seulement sont toujours actives 5 ans après leur création.

Malgré cela, leur nombre augmente. Fin 2023, l’URSSAF en recensait plus de 2,6 millions, soit 200 000 de plus que l’année précédente.

Retrouver le lien entre production et entreprenariat

Pendant ce temps, le sort des entreprises « classiques » n’est guère plus enviable que celui des autoentreprises. Aggravées par l’incertitude politique créée par la dissolution, les perspectives du secteur productif français, particulièrement son industrie manufacturière, n’en finissent plus d’être revues à la baisse. La productivité reste toujours en-deçà des années d’avant Covid, les investissements fléchissent dangereusement et les usines ferment (une étude conjointe de l’Usine Nouvelle et du réseau France Bleu a recensé 89 fermetures ou restructurations de sites contre seulement 65 ouvertures), tandis que le budget 2025 procède à des coupes massives dans les investissements d’avenir (recherche publique, transition écologique, industries innovantes, logement…).

Dans de telles conditions, les annonces tonitruantes d’Emmanuel Macron à l’occasion du sommet mondial sur l’Intelligence artificielle sont l’arbre qui cache la forêt, celle d’une industrie française qui va mal et que la politique budgétaire récessive du Gouvernement ne fera qu’affaiblir davantage. Vous pouvez d’ailleurs retrouver ci-dessous l’intervention d’Emmanuel Maurel, député GRS, lors des questions d’actualité au gouvernement du 12 février 2025 à ce propos.

Frédéric Faravel et Laurent Miermont

Que faire quand Trump « inonde la zone » ?

Depuis sa prise de fonction officielle comme 47e président des États-Unis d’Amérique, Donald Trump multiplie les prises de parole provocatrices qui varient du clownesque au répugnant en passant par l’agressif. De l’annexion du Canada et du Groënland à l’explosion des droits de douane, de la remise en cause illégale du droit du sol aux USA aux attaques outrancières contre la Cour Pénale Internationale, de l’abolition de l’impôt sur le revenu à la déportation des Palestiniens pour faire de Gaza une nouvelle Riviera sous occupation américaine…

Il est inutile de répondre ou de chercher à répondre à chacune de ses provocations. Sans mésestimer sa volonté et sa capacité à vouloir mettre en œuvre concrètement certaines d’entre elles, Donald Trump sait parfaitement jouer de la Société du Spectacle dont il est un éminent produit et représentant.

Cette stratégie a été ouvertement assumée pour ce qu’elle est par Steve Bannon, ce « théoricien » de l’AltRight qui reste un de ses proches : il s’agit d' »inonder la zone », une stratégie de la submersion médiatique avec deux objectifs :

  • provoquer indignation et sidération pour incapaciter l’adversaire (enfin l’ennemi) ;
  • donner tellement d’os à ronger à la presse, considérée comme un adversaire politique, qu’elle ne sait plus trop lequel saisir pour tourner en boucle dessus…

Pendant ce temps, Trump, Musk et leurs amis avancent tranquillement dans la mise en œuvre de leur agenda impérialiste, oligarchique et capitaliste autoritaire.

Il ne sert donc à rien de réagir ou sur-réagir : la seule chose à faire est de nous-mêmes fixer une ligne directrice, des principes à rappeler (calmement, fermement et froidement) et un agenda à dérouler. C’est bien là une priorité que devrait se fixer la France – et ses alliés européens – plutôt que de donner le spectacle aujourd’hui de canards sans tête ou de lapins hypnotisés par les phares d’un SUV.

Nos priorités stratégiques et géopolitiques, notre politique commerciale, nos stratégies de défense et nos alliances sont à redéfinir face à l’émergence ou au renouvellement des impérialismes américain, chinois, russe ou turc.

Frédéric Faravel

Le logement n’est pas un privilège, c’est un droit !

Toute l’Europe connaît aujourd’hui une grave crise du logement de l’Irlande à la Grèce, en passant par la France, l’Espagne ou l’Allemagne : elle prend des formes variées selon les pays mais dans chacun d’entre eux, la spéculation foncière et immobilière au profit des intérêts financiers jouent ouvertement contre la nécessité de répondre aux besoins fondamentaux de nos concitoyens.

C’est la raison pour laquelle la Gauche Républicaine et Socialiste s’associe à la campagne du Parti de la Gauche Européenne (PGE, European Left) sur logement.
Les différents Etats membres de l’Union Européenne n’ont pas forcément la même définition du logement social et de ses objectifs. En dehors de France, il s’agit avant tout de répondre à une problématique de « mal logement », alors que le logement social en France développe une vision large allant jusqu’aux couches moyennes afin d’agir sur la question de la cohésion et de la mixité sociales dans les différents quartiers et agglomérations. Le « mal logement » et l’habitat insalubre sont évidemment un fléau, ils reçoivent cependant en France une réponse intégrée avec ce que l’on appelle le « logement très social » et l’hébergement d’urgence, ce qui ne signifie pas que les efforts déployés soient suffisants : bien au contraire, on a pu voir ces dernières années un ralentissement de la construction et une difficulté croissante à favoriser l’insertion par le logement et les relogements. Quand les prix de sortie sont trop élevés, alors les propriétaires (y compris les bailleurs sociaux) cherchent avant tout à privilégier les locataires les plus solvables possibles.

Attention également à la vision restrictive qu’induit la définition européenne des Services d’Intérêt Économique Général, qui ne recouvre pas la notion de services publics en France, ni celle de « droit au logement ». Soyons conscients que les « marchés » du logement (y compris leur régulation par une part variable du logement social) sont avant tout nationaux et le resteront vraisemblablement.

Nous sommes radicalement opposés au marché des capitaux européens qui va rendre impossible d’avoir des livrets nationaux dédiés et réservés aux productions locales comme le livret A.

Pour notre part, à l’échelle européenne, il est urgent d’améliorer les critères pour avoir accès au FEDER sur des opérations constructions logements sociaux ou réhabilitation notamment thermique (déjà possible en principe).

Nous exigeons l’inscription du droit à un logement décent et abordable pour tous dans la charte des droits fondamentaux et pas seulement le droit d’aider les plus vulnérables à se loger ; au-delà de l’urgence et de la décence, il faut agir sur la cohésion sociale. Il y a sans doute des équilibres nouveaux à défendre dans les constitutions nationales entre droit à la propriété et droit au logement : en France, alors que le droit au logement est considéré comme constitutionnel, il subit systématiquement un arbitrage constitutionnel défavorable dès qu’entre en jeu le droit à la propriété (également constitutionnel), ce qui ne veut pas dire qu’il faut nier les droits des petits propriétaires. Il faut enfin coordonner les législations européennes pour autoriser les maires à interdire et ou limiter et réguler les plateformes type AirBnB qui détourne l’habitat vers le tourisme de masse au lieu de répondre aux besoins fondamentaux des citoyens européens.

Résultats de la commission mixte paritaire du 31 janvier 2025 sur le projet de loi de finances pour 2025

Emmanuel Maurel siégeait comme suppléant au sein de la commission mixte paritaire au nom du groupe GDR. Il a participé à tous ses débats jusqu’au bout. Il nous fait ici un compte rendu complet et mesuré des échanges et des maigres et peu surprenant résultats.

La Commission Mixte Paritaire conclut à droite

Le projet de budget issu des travaux de la Commission Mixte Paritaire a consolidé la version du Sénat, co-élaborée par LR et le Gouvernement. Ce budget est donc un budget de droite, voté par une majorité de droite, dans une CMP dominée par la droite.

Le budget de l’Etat s’élèvera en 2025 à 484 milliards d’euros. Les crédits affectés aux grandes politiques publiques sont en baisse de 8 milliards supplémentaires par rapport au budget Barnier.

On pourrait penser que c’est peu. Mais si l’on raisonne en euros constants, la seule reconduction à l’identique de la loi de finances 2024 nécessiterait un budget de 501 milliards. Et si l’on applique un taux de progression des dépenses incompressibles (notamment celles liées aux évolutions des rémunérations des fonctionnaires), il devrait s’élever à 508 milliards. De ce point de vue, la réduction des moyens de l’Etat se chiffre donc à 24 milliards d’euros.

Les budgets qui cotisent le plus à ces coupes sont le Travail et l’Emploi (moins 15% par rapport à 2024), l’Enseignement supérieur et la Recherche (moins 8%), l’Ecologie (moins 10%), la politique industrielle (« investir pour la France en 2030 » : moins 30%), tout cela au moment où l’économie est en récession et le chômage augmente.

On déplore aussi la chute des crédits pour l’Aide publique au Développement (moins 25%), dans un contexte international où la France brille par sa discrétion et ses maladresses.

Sur les recettes, le budget Bayrou-CMP recule par rapport au budget Barnier. Les contributions sur les plus hauts revenus et sur l’impôt sur les sociétés des entreprises réalisant plus d’1 milliard de chiffre d’affaires ne s’appliqueront qu’un an, et pas deux comme le proposait Barnier.

En revanche, la taxe sur les transactions financières est portée de 0,3% à 0,4%, ce qui procurera environ 600 millions de recettes supplémentaires.

La nouvelle taxe sur les rachats d’actions (25 milliards ont été distribués sous cette forme aux actionnaires du CAC 40 en 2024) reste assise sur la valeur comptable des actions, et pas sur leur valeur boursière : elle ne rapportera donc que 400 millions au lieu de 2 milliards.

Il n’a pas été possible d’introduire un taux majoré sur la taxe sur les revenus financiers (aujourd’hui à 30% ; nous souhaitions le monter à 35%) car les modifications du texte du Sénat n’étaient recevables qu’à condition que l’impôt en cause figure dans le texte. Or le Sénat a finalement décidé de l’en retirer – et donc de ne pas y toucher. En jargon parlementaire, on appelle ça « l’entonnoir ».

Enfin, parmi les quelques mesquineries fiscales touchant les classes populaires et moyennes, on relèvera une hausse de 2€/MWh des prélèvements sur le gaz de chauffage (35% des ménages se chauffent au gaz), ou le durcissement du malus écologique (sans parler des fortes réductions des aides du type MaPrimeRénov).

Les concessions accordées à la gauche par la majorité Macron-LR en CMP sont extrêmement modiques.

Sur l’éducation, il n’est plus question de supprimer 4000 postes d’enseignants, mais le coût supplémentaire a été compensé par une suppression à due concurrence (50 millions) du budget alloué à… la formation des enseignants.

Sur l’écologie, l’importance des coupes (2,5 milliards) a été atténuée par un abondement de 300 millions d’euros du « fonds vert » (destiné aux actions pour la transition écologique menées par les collectivités locales).

Sur les services publics, d’ultimes ajustements de quelques centaines de millions d’euros ont été opérés à destination du réseau postal et des liaisons ferroviaires régionales.

Ce budget clairement récessif risque d’avoir des conséquences dommageables sur une conjoncture économique en piteux état.

Avant même la CMP, le consensus des économistes avait rabaissé la prévision de croissance 2025 de +0,9% à +0,7%, le chômage est reparti fortement à la hausse (+3,9% au dernier trimestre 2024) et on ne compte plus les annonces de fermetures d’usines et de plans sociaux.

La probabilité que ce budget impacte encore davantage cette tendance est donc élevée, ce qui provoquerait une baisse mécanique des rentrées fiscales et… une augmentation du déficit. Le Haut Conseil des Finances Publiques l’a clairement dit : il sera très difficile de tenir l’objectif de 5,4% de déficit en 2025.

La CMP s’est tenue dans un climat studieux et courtois, bordé de bout en bout par l’accord entre le « bloc central » et la droite sénatoriale. Nous savions dès le départ que la gauche aurait du mal à faire valoir son point de vue et ses revendications. Il en a effectivement été ainsi. Il n’y a pas eu de bonne surprise. Quant aux mauvaises, nous les connaissions à l’avance.

Emmanuel Maurel

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