Élections municipales en Turquie : défaite symbolique pour Erdogan.

Pour la première fois depuis vingt-cinq ans, le Parti républicain du peuple (CHP), kémaliste, allié à cette occasion à la droite laïque du Bon parti (IYI), reprennent des couleurs dans les grandes villes. Lors des élections municipales la coalition a gagné dans la capitale politique Ankara, dans son fief historique d’Izmir et, à nouveau ce dimanche, à Istanbul malgré la remise en cause du premier scrutin par la Haute Commission Electorale suite à une requête du parti islamo-conservateur (AKP) d’Erdogan.

De même pour le Parti démocratique des peuples (HDP), historiquement lié à la cause kurde, qui a réussi à reconquérir des villes, comme Diyarbakir, dans lesquelles le gouvernement avait remplacé les maires élus par des administrateurs nommés par l’Etat.

S’il faut, en tant que social-républicains, se féliciter de ces résultats obtenus dans un contexte difficile pour l’opposition avec un temps de parole durant la campagne très inégalitaire, il est inadéquat de parler de défaite cuisante ou de gifle pour le pouvoir en place comme l’ont fait certains médias. L’AKP et ses alliés recueillent encore 51% des voix au plan national. Il tient la majorité des régions, contrôle assez de districts au sein des deux grandes villes du pays pour en perturber la gestion et reste la principale force politique du pays.

Néanmoins, il s’agit d’une défaite symbolique importante pour le régime et pour Erdogan qui fut maire d’Istanbul. Elle illustre une double déception.

Une déception économique d’abord, la Turquie connait une baisse de sa croissance sans précédent depuis une décennie avec une inflation dépassant les 20% par an et un taux de chômage atteignant les 13,5%. Avec cette crise et la fin de ses bons résultats économiques, l’AKP perd son principal argument face à ses opposants.

Une déception politique ensuite face au tournant encore plus autoritaire que prend le pouvoir depuis l’échec du coup d’Etat de 2016. Erdogan a tout fait durant cette campagne pour nationaliser ces élections locales en multipliant les meetings partout dans le pays. Cette stratégie de l’hyper personnalisation s’est retournée contre lui : la défaite de son ancien premier ministre à Istanbul en est aujourd’hui le point d’orgue.

Quelles conséquences peut-on donc espérer de ces résultats ?

La Turquie sort d’un long cycle électoral. Les prochaines élections ne sont prévues que pour 2023, cela peut laisser le temps à l’opposition de continuer et d’approfondir cette stratégie d’union, le CHP et le Bon Parti s’étant alliés et le HDP n’ayant pas investi de candidat à Istanbul et Ankara.

Si le régime n’arrive pas à résoudre la crise économique qui frappe le pays, ne remet pas en cause la conception d’inspiration néo-ottomane de la nation Turque qui l’isole sur la scène international, et si les partis d’opposition arrivent se mettre d’accord sur la question kurde, une nouvelle ère pourrait s’ouvrir pour une Turquie sociale, républicaine et laïque.

Etats-Unis / Iran : ne pas sous-estimer le risque de guerre

Les bruits de bottes retentissent de plus en plus fort au Moyen Orient : à peine un drone américain avait été abattu par l’armée Iranienne, celui-ci ayant, selon l’État-major Iranien, survolé le territoire sans autorisation, que nous apprenions qu’une attaque américaine contre différentes cibles stratégiques Iraniennes était annulée de la main de Donald Trump. A la place, celui-ci adressait une proposition de négociation, via Oman, aux dirigeants de la République Islamique. Ce matin même, deux jours après l’affaire du drone, l’échec d’une cyberattaque contre leurs réseaux de défense était annoncé par les autorités Iraniennes qui accusent les Américains, tendant un peu plus encore la situation. Donald Trump continue donc de souffler le chaud et le froid sur une région qui n’a plus connu la paix depuis 2003 et l’invasion de l’Irak par les Américains.

Cette stratégie de la carotte (la négociation) et du bâton (la menace d’une guerre) poursuit deux objectifs, national et international. 

Au plan national, il s’agit d’une part de donner un os à ronger aux farouches défenseurs de la guerre préventive dont le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, John R. Bolton, est le principal porte-voix. D’autre part, cela offre, si ce n’est un motif de satisfaction, du moins une raison d’espérer aux contempteurs de l’engagement militaire tous azimuts qui militent pour un retrait des troupes américaines de la zone, conformément à la promesse du Président pendant la précédente campagne. Dernier bénéfice politique : installer Donald Trump dans le rôle de chef de guerre, rôle qu’il n’a jusqu’ici pas endossé, face à un Rogue state (« Etat voyou »), adversaire de longue date des États-Unis.

Au plan international, il s’agit d’accentuer la pression sur l’Iran après l’échec de la politique de sanctions qui avaient accompagné le retrait des États-Unis du traité de Vienne (traité dit « P5+1 » sur le nucléaire Iranien). Politique de la « pression maximale » visant à asphyxier l’économie Iranienne pour pousser la population à se révolter et in fine forcer le changement de régime. Cette technique de « siège » économique se révèle jusqu’à présent inefficace, poussant le régime Iranien à radicaliser ses positions anti-américaines alors même que le traité sur le nucléaire Iranien avait eu pour effet d’ouvrir économiquement le pays à l’Occident. Depuis, les entreprises européennes commerçant avec les États-Unis sont interdites de commercer avec l’Iran sous peine de sanctions. Effet de la désormais fameuse autant qu’inacceptable extra-territorialité des lois américaines, nos entreprises Françaises comme Renault et PSA ont dû plier bagage. 

La grande inconnue à l’heure actuelle demeure le rôle que la Russie est, ou non, prête à jouer pour empêcher son principal allié dans la région de se lancer dans un dangereux face-à-face avec les États-Unis.

Le silence des chancelleries occidentales nous alerte sur le degré de vassalisation de l’Europe vis-à-vis des États-Unis : face à un Président qui ne tient pas parole, d’un Etat prompt à déclencher inconsidérément une guerre dans un territoire déjà explosif, nous nous laissons imposer une politique belliqueuse qui nuit à nos intérêts. Nous refusons de remettre en cause notre appartenance à l’OTAN qui nous oblige pourtant à nous aligner sur la politique étrangère américaine. 

La France et plus largement l’Union Européenne doivent se rendre à cette douloureuse évidence : les intérêts américains et les intérêts européens ne sont pas superposables. Nous ne pouvons soutenir par un silence coupable une politique qui compromet le mince espoir d’un retour de la stabilité dans cette région clé, déjà ravagée par presque 20 ans de guerres ininterrompues.

« Libra » de Facebook ou l’hubris dévoilé des GAFAM

Facebook, géant américain de la captation des données numériques et de l’évasion fiscale, premier réseau social sur internet de la planète avec plus de 2 milliards d’utilisateurs déclarés, a présenté le 18 juin sa « crypto-monnaie » Libra. Cette monnaie numérique privé ayant recours à la technologie « block chain » devrait être accessible en ligne en 2020. S’il est permis de douter de la prospérité de ce projet qui recèle ses propres limites économiques et politiques, la multinationale s’attaque cependant à une prérogative exclusive des États et à travers eux à la souveraineté des peuples. Cette concentration accrue de services par les GAFAM témoigne de leur stratégie mondiale visant à installer sur le moyen-long terme des monopoles non seulement sur leurs marchés respectifs, mais aussi et dans nos sociétés.

Cette annonce d’une extension majeure de la captation des données personnelles et financières par la multinationale au pouce bleu intervient malgré l’Affaire Cambridge Analytica (la vente des données personnelles de 80 millions d’usagers Facebook à une entreprise politique) qui a pourtant levé le voile sur les pratiques pour le moins controversées de l’entreprise, s’agissant du respect de la vie privée et de la protection des données personnelles.

Les intérêts de la multinationale sont de plusieurs ordres. Tout d’abord poursuivre et étendre la collecte et l’exploitation de données (notamment économiques) et garantir la pérennité de son business model dans une volonté marchande totalisante assez effrayante. Si Facebook veut nous convaincre que Calibra, sa filiale dédiée aux transactions, assure la garantie de la séparation des données sociales et financières, rien ne permet de le vérifier de façon certaine. Ni d’être assuré que cette politique ne changera pas à l’avenir.

Libra est pensé pour séduire et rendre captif ses utilisateurs, en ciblant d’abord la jeune génération. La promesse de la simplicité des paiements en ligne à l’aide des messageries Messenger et de Facebook agit comme un puissant charme dans une époque où tout doit être rapide, fluide et virtuel. La crypto monnaie de Facebook s’inspirerait de WeChat, une application globale massivement utilisée en Chine qui permet à la fois de commander un billet de train, d’échanger via messagerie ou encore d’effectuer des paiements pour un concert. Lorsque l’on sait quelles utilisations policières sont faites de cette application par le régime chinois à partir des données de ses citoyens, la plus grande méfiance quant au développement d’une telle technologie totalisante à l’ensemble de la planète est autorisée.

 

Il est désormais indispensable que le G7 s’empare de cette question, au-delà des déclarations creuses de Bruno Le Maire. Il est temps que les États et gouvernements européens réagissent à la hauteur du défi posé par Facebook. Une régulation vigoureuse fondée sur un authentique rapport de force doit être proposée au plus vite afin de ne pas laisser s’installer un transfert de souveraineté définitif des peuples à travers leurs États vers les multinationales peu scrupuleuses de la Silicon Valley.

Politique générale : Le Gouvernement maintient le cap … à droite toute !

Devant la représentation nationale Edouard Philippe a livré un discours poussif et technocratique qui, au-delà de l’esbroufe, ne vise qu’à mener à son terme le détricotage des fondamentaux de notre République pour lui préférer le social-libéralisme bon teint à l’anglo-saxonne.

« Justice sociale » ; « écologie » ; « services publics » ; « démocratie »… Les mots utilisés sont malmenés, dévoyés pour servir de paravent à une orientation politique bien ancrée à droite.

Si l’écologie y a tenu une bonne place ce n’est pas tant pour mener une transformation profonde de nos modes de production et de consommation que pour mieux divertir l’immense attente de nos concitoyens et l’urgence écologique par quelques annonces à la marge du système productiviste. Ne rêvons pas, la croyance béate dans l’efficacité du marché, de la libre concurrence et du progrès technique fait partie de l’ADN de ce Gouvernement : la crise écologique n’est pour eux qu’une externalité négative que le marché se chargera de corriger.

Concernant la demande de justice sociale de nos concitoyens : rien n’a été véritablement annoncé et les grands mots ne constituent que de piètres remèdes en ce domaine. Pas sûr que la méthode Coué ne constitue une thérapie efficace, à même de répondre aux attentes des Français.
Après un mouvement social de grande ampleur inédit dans notre histoire récente contre l’injustice fiscale et salariale, l’assurance chômage est fragilisée et les retraites par répartition mises en cause par ce gouvernement. Où est la justice dans l’allongement de la durée de travail ? Le Premier Ministre est resté sourd également aux demandes des personnels hospitaliers alors que ceux-ci tirent une nouvelle fois la sonnette d’alarme dans tout le pays face à la pénurie de moyens.

En lieu et place de la justice fiscale il n’est question que de supprimer les impôts des Français sans penser un seul instant à favoriser un plus grand équilibre selon les facultés contributives en restaurant pour commencer l’impôt de solidarité sur la fortune et en réformant l’impôt sur le revenu.

Par ailleurs les services publics de proximité sont appelés à se renforcer mais avec toujours moins d’agents et de moyens… Tout cela n’est pas sérieux.            

Enfin la réforme constitutionnelle annoncée consacre d’emblée la réduction toujours plus importante du rôle du Parlement et de sa capacité à s’opposer à l’exécutif, comme nous le redoutions. Le déséquilibre entre législateur et exécutif risque de s’accroître davantage, mettant en péril la vie démocratique de notre pays. Et le nouvel acte de décentralisation proposé, aux contours encore flous, mais qui semble s’orienter vers l’exercice d’un droit à la différenciation entre territoires n’est pas pour rassurer les républicains attachés à l’égalité territoriale.

En fin de compte les illusions du « en même temps » se sont dissipés dans l’esprit des Français et le Gouvernement assume désormais ses positions droitières. Et si c’était cela le véritable sens de l’acte 2 du quinquennat ?

Au Parlement, dans nos collectivités et dans la rue nous répondrons avec détermination face aux attaques et à la politique injuste du Président Macron et de son Gouvernement.

 

De l’urgence sociale de la protection de l’enfance

Les agents du service de protection de l’enfance du Bas-Rhin se sont mis en grève au mois de mai.  Ils réclament plus de moyens pour faire face à la hausse du nombre de jeunes qu’ils doivent prendre en charge. En effet le service a vu une augmentation du nombre de mineurs qui leur sont confiés : 130 enfants de plus que l’an passé.

Les travailleurs sociaux du Bas-Rhin ne constituent pas une exception. Le 16 octobre 2018, les travailleurs sociaux de la protection de l’enfance du Nord se mobilisaient également pour dénoncer le manque de moyens, rendant leurs conditions de travail intenables.

La protection de l’enfance mérite des choix politiques ambitieux de la part du Gouvernement. Pourtant en février dernier Adrien Taquet, secrétaire d’État à la protection de l’enfance, indiquait à la presse que le gouvernement ne soutiendrait pas la proposition de loi visant à rendre obligatoire l’accompagnement des jeunes majeurs sortant de l’ASE (aide sociale à l’enfance) jusqu’à 21 ans. Elle avait pourtant été adoptée le 11 juillet 2018 en commission des affaires sociales. Cette décision montre clairement le choix politique fait par le Gouvernement en matière de protection de l’enfance : choix comptable du renoncement. 

Les travailleurs sociaux qui sont en première ligne eux n’en peuvent plus, au-delà de la fatigue, leur responsabilité est pointée du doigt dans des affaires qui ne sont pas de leur ressort. Par exemple lorsqu’un cas de maltraitance est surmédiatisé, ce sont bien souvent les services sociaux qui sont incriminés alors même que leur mission ne s’étend pas au-delà de la prévention / signalement.

L’absence d’un nombre suffisant de places en MECS (maison de l’enfance à caractère social), ni en familles d’accueil constituent l’autre aspect d’un problème à ce jour non traité : les enfants sont bien souvent laissés dans des situations de danger, et les travailleurs sociaux se sentent inefficaces. 

 Face à cette situation de détresse d’enfants en danger et la fatigue de travailleurs sociaux devenus spectateurs de leur impuissance, l’État continue de faire la sourde oreille. La Gauche République et Socialiste demande que d’avantage de moyens soient alloués à la protection de l’enfance, et qu’il soit désormais obligatoire aux juges d’être formés aux questions spécifiques liées à la protection de l’enfance, afin que les signalements des travailleurs sociaux soient d’avantage pris en considération. Sans quoi l’urgence sociale pourrait bien s’aggraver du côté des enfants, comme du côté des professionnels.

 

Le fléau des violences intra-familiales

 France Inter a récemment relayé une étude de l’Inspection générale des affaires sociales (1)  : en ressort un chiffre glaçant : 1 enfant meurt tous les 5 jours sous les coups de ses parents !

Avec les violences domestiques, ce sont en moyenne 72 enfants par an qui décèdent sous les coups de l’un ou de plusieurs parents. Face à cela, on se demande que fait la justice, que font les forces de l’ordre, que font les services sociaux et les associations ? On pourrait répondre qu’ils font « ce qu’ils peuvent ».

En effet, régulièrement, plusieurs services sociaux sont en grève, comme les travailleurs sociaux du Maine et Loire, mobilisés depuis 2 ans suite aux décisions comptables du président du conseil départemental qui les empêchent de mener à bien leur action. En effet l’insuffisance du nombre de travailleurs sociaux, le manque de places en établissement et la difficulté à repérer les maltraitances empêche une intervention rapide et efficace des services de protection de l’enfance.

Associée à la maltraitance infantile, souvent indissociable, la violence conjugale est également un véritable fléau. Ainsi, rappelons que selon Libération (2) qui tient le macabre décompte depuis depuis plusieurs années du nombre de femmes tuées par leur conjoint, il y aurait 62 femmes décédées depuis le 1er janvier dans le cadre de violences conjugales. 

L’intervention des services publics auprès des personnes victimes de violences intrafamiliales est considérable. En effet, ce sont à chaque fois les collectivités territoriales, les services de l’Éducation nationale, de la justice et de l’hôpital qui interviennent auprès de ces personnes

Il est absolument impératif de soutenir tous les services publics qui agissent pour la protection des femmes et des enfants maltraités et qui sont empêchés de mener à bien leur mission, asphyxiés par le manque de moyens humains et financiers.

La vie de nos enfants mérite qu’on lui accorde d’importants de moyens, c’est pourquoi la Gauche Républicaine et Socialiste salue le travail quotidien des agents des services publics et des associations auprès des personnes victimes de violence éducative, intrafamiliale et conjugale.  Néanmoins, nous nous alarmons du manque de moyens et attendons de l’Etat un véritable engagement en renforçant les services plutôt que de supprimer du personnel, et en allouant des budgets plus importants, permettant aux professionnels de travailler dans de bonnes conditions et de mettre des enfants en sécurité. Plus encore que notre modèle social, c’est la conception du rôle de l’Etat qui est ici en jeu, d’un Etat qui agit auprès de ses administrés pour leur protection et ne s’arrête pas à des logiques comptables en coupant systématiquement les budgets de la protections sociale.

(1)  https://www.franceinter.fr/societe/en-france-un-enfant-meurt-tous-les-cinq-jours-sous-les-coups-de-ses-parents

(2)  https://www.liberation.fr/apps/2017/06/220-femmes-tuees-conjointsignorees-societe/

 

 

Renault – Nissan Mitsubishi et maintenant Fiat Chrysler ? Attention danger !

Par le pôle entreprise de la Gauche Républicaine et Socialiste

En dépit de l’annonce de l’abandon par FCA (Fiat- Chrysler) du projet de fusion « entre égaux » avec Renault mercredi 5 juin, l’analyse des conséquences d’une telle fusion reste d’actualité, l’idée d’une fusion entre FCA et Renault n’était pas définitivement écartée.

Renault semble penser qu’une aventure avec Fiat Chrysler pourrait sauver son alliance avec Nissan Mitsubishi qui 20 ans après est dans l’impasse. Est-ce pour autant une raison pour se jeter dans les bras de Fiat Chrysler Automobiles (FCA) ? 

Fiat n’est pas dans une situation confortable et risque de lourdes amendes pour n’avoir pas anticipé les contraintes européennes en termes de CO2.

L’initiative du projet de fusion revient à John Elkann (petit fils de Gianni Agnelli et président de FCA).  Depuis des années, son groupe doté d’une ingénierie aux moyens limités, sans projets d’avenir dans les motorisations électriques et la voiture autonome, trop concentré sur les marchés américain et européen, cherche désespérément à se marier.  Après avoir été écarté par PSA, Elkann tente de profiter de la situation troublée chez Renault depuis l’arrestation de Carlos Ghosn, en présentant une fusion dite « à 50/50 ». Or la réussite des mariages entre égaux est rare, de surcroît alors que le probable futur Directeur Général va devoir céder son siège prochainement. Il n’est pas exclu que Renault puisse être englouti dans le nouvel ensemble.      

Si l’on voit bien l’intérêt que pourrait représenter cette opération pour le groupe italo-américain, pour Renault les inconvénients surpassent largement les avantages. Des proches du dossier pointent la naïveté du camp français qui pourrait bien être le dindon de la farce.

Le conseil d’administration et l’Etat français, qui détient 15 % du capital, ont donné leur feu vert pour poursuivre les négociations avec FCA. Mais des questions importantes se posent.

Bénéfices aléatoires pour Renault : 

La capitalisation de Renault est au plus bas depuis l’affaire Ghosn et les 43% que détient Renault dans Nissan sont valorisés quasiment à zéro. Donc en fusionnant avec Renault, FCA prendrait le contrôle du japonais pour presque rien. L’état autoriserait ainsi une véritable braderie. Certains vont jusqu’à parler d’un hold-up des italiens.

Quid de Nissan qui n’a été mis dans la confidence que tardivement ? En se lançant dans une opération complexe, aux bénéfices aléatoires, Renault complique encore une peu plus ses relations avec Nissan. In fine, se profile la perspective que le vrai patron soit le premier actionnaire du nouvel ensemble, c’est-à-dire John Elkann.

Quelles conséquences pour les parts de l’Etat ?

La part de l’Etat tomberait à 7,5 %. Il perdrait du même coup ses droits de vote double et sa minorité de blocage qui lui permet de bloquer une décision d’assemblée générale. Certes Bruno Lemaire a précisé qu’il entendait bien obtenir des garanties en termes de préservation des sites industriels français et des emplois mais nous savons ce qu’il en est de ce genre de promesses. Rappelons-nous les engagements de Général Electric lors du rachat d’Alstom, de créer 1000 emplois qui reviennent comme un boomerang puisque qu’au final ce seront 1000 emplois supprimés.

Il n’y a rien de bon à attendre d’un projet basé sur une économie d’échelle et une captation à bon compte d’un savoir-faire dont manque cruellement FCA qui entraînerait la chasse aux doublons, des suppressions d’effectifs et une perte de revenus pour la France. Les coopérations avec d’autres constructeurs doivent être privilégiées sur les prises de participation. Au lieu de brader son industrie l’Etat doit se doter d’une stratégie et soutenir l’investissement dans son industrie automobile qui a permis à Renault l’avance industrielle et en termes d’ingénierie dont elle fait preuve aujourd’hui et que d’autres nous envient. 

Aux dernières nouvelles le groupe Fiat Chrysler Automobiles laisse entendre que son offre de fusion serait à prendre ou à laisser ; de quoi faire capoter le projet. Ce ne sont pas les salariés qui s’en plaindront.

 

Tribune parue dans Marianne : « General Electric : un désastre dont Macron est le nom »

Par Bastien Faudot et Emmanuel Maurel, animateurs nationaux de la GRS ; Jean-Luc Laurent et Marie-Noëlle Lienemann, coordinateurs nationaux de la GRS

« Selon quatre dirigeants fondateurs de « Gauche républicaine et socialiste » (GRS), le Président porte une lourde responsabilité dans la casse sociale et technologique en cours à Belfort. Il a désormais le devoir d’agir pour empêcher la poursuite du démantèlement.

L’ultime épisode du sinistre feuilleton « Alstom – General Electric » est désormais connu : en annonçant mardi 28 mai la suppression de 1050 emplois, pour l’essentiel dans l’entité Gaz de GE, la direction du groupe a confirmé ce que l’intersyndicale du site belfortain redoutait depuis des mois. C’est, pour l’un des principaux bassins industriels français, un séisme d’une ampleur sans précédent, car à ce millier d’emplois, s’ajoute en réalité 750 suppressions de postes qui ont déjà cours, en catimini, notamment dans la sous-traitance interne. Si l’on y ajoute l’ensemble des emplois induits*, c’est au bas mot, 7 à 8.000 familles qui subiront les effets de la restructuration de General Electric, qui signifie en fait une délocalisation massive de la production.

Ce carnage au plan social s’ajoute au gâchis technologique et industriel : la suppression d’activité va demain engendrer une perte de savoir-faire et de métiers pour lesquels la puissance publique a investi en formations, en infrastructures, en recherche. Ce sont des centaines et des centaines d’ingénieurs ou d’ouvriers qualifiés qui vont demain être privés d’emplois, qui vont devoir engager une reconversion, ou déménager pour tenter leur chance ailleurs. C’est une perte de richesse incalculable pour la communauté nationale.

L’affaire Alstom-General Electric vient de loin. Car le discours fataliste des libéraux ne doit pas dissimuler une réalité concrète : la désindustrialisation en France n’est pas une catastrophe naturelle. Elle est le produit de priorités politiques, de choix délibérés en haut lieu qui sont la cause première du désastre social que subissent ceux qui n’ont que leur travail pour vivre. De ce point de vue, le cas Alstom-General Electric est un cas d’école : l’abandon par l’Etat de notre fleuron Alstom a rendu possible la liquidation des emplois chez General Electric.

L’Etat, ici, a un nom : Emmanuel Macron. Car depuis le début de l’affaire, tous les fils mènent à l’actuel président de la République qui a agi avec persévérance… contre nos intérêts nationaux.

Printemps 2014 : le jeune secrétaire général adjoint de l’Elysée s’oppose d’une formule lapidaire à la proposition d’Arnaud Montebourg de nationaliser Alstom pour éviter de brader le groupe au géant américain qui a fait une offre : « On n’est quand même pas au Venezuela ! ». C’est la ligne Macron qui l’emporte à l’Elysée. Cette option satisfait en réalité tous les libéraux, jusqu’au maire LR de Belfort qui applaudit des deux mains.

Avant cela, à l’automne 2013, le même Emmanuel Macron commanditait un rapport secret au cabinet américain A.T. Kearney qui détaille le scénario du démantèlement du groupe français et recommande que Bouygues cède les parts qu’il détient dans Alstom à… General Electric. Devant la commission d’enquête parlementaire, M. Macron ose soutenir pourtant que l’Etat a été « mis devant le fait accompli » ! Dans ce dossier, Alstom et Bouygues ont le même banquier, la maison Rothschild, employeur d’Emmanuel Macron jusqu’en 2012.

4 novembre 2014 : arrivé entretemps à Bercy, Emmanuel Macron signe l’accord du gouvernement pour la cession au groupe américain. La logique du circuit court prévaut : celui qui fut le promoteur de l’opération a eu le privilège de la valider…

28 mai 2015 : le ministre de l’économie se rend à Belfort pour rencontrer les salariés d’Alstom Transport et leur déclare : « Votre activité a une importance stratégique pour la France et sera donc défendue ». Cette déclaration n’empêche pas le volte-face deux ans plus tard : fraichement élu président de la République, Emmanuel Macron soutient la vente du groupe français à l’Allemand Siemens en prétendant bâtir un « airbus du rail ». Mais la commission européenne met un terme à ce projet en février 2019 pour éviter une position monopolistique. L’arroseur arrosé.

Juin 2018 : General Electric, qui avait assorti l’acquisition d’Alstom énergie d’une promesse de création de 1000 emplois en France, annonce finalement que cet engagement ne sera pas honoré. Le gouvernement de M. Macron répond qu’il restera « vigilant » !

Printemps 2019 : Prétextant un effondrement du marché des turbines à gaz, le groupe américain décide d’une restructuration et programme les annonces pour le 30 avril, qu’il repoussera à deux reprises, sous la houlette du nouveau directeur général qui vient d’être nommé et qui n’est autre que l’ancien conseiller d’Emmanuel Macron au ministère des finances, Hugh Bailey… Ultime arrogance, la suppression des 1050 emplois intervient tranquillement 48 heures après un scrutin européen décisif pour le parti du président.

Un tel scénario relève du thriller hollywoodien. Comment un chef d’Etat a pu couvrir, encourager, justifier, organiser un tel désastre ? A chaque étape, à chaque échelon des chaines de décision, Emmanuel Macron n’a pas seulement laissé faire, il a agi de façon délibérée en bradant des technologies décisives (et l’ensemble des brevets) pour notre indépendance nationale : les turbines Arabelle qui équipent nos centrales nucléaires, le propulseur du porte avion Charles de Gaulle ou encore les turbines de nos quatre sous-marins nucléaires sont désormais sous bannière américaine !

Aujourd’hui, le plan de licenciement dans la division Gas Power de GE est assorti de mensonges éhontés. D’une part, GE a enregistré en 2018 le plus grand nombre de commandes de turbines à gaz. D’autre part, la consommation de gaz dans le monde ne cesse d’augmenter. De surcroit, la complémentarité de ces turbines avec les énergies renouvelables est attestée. Enfin et surtout, les activités produites à Belfort ne sont pas, contrairement à la communication officielle du groupe, supprimées, mais relocalisées pour partie aux Etats-Unis et délocalisées en Inde, au Mexique et en Hongrie.

Dans cette affaire, les intérêts des salariés du site et ceux de la Nation se confondent.

Pour les salariés comme pour la Nation toute entière, le président de la République a aujourd’hui le devoir de mobiliser tous les moyens de l’Etat pour réparer les fautes qui procèdent de sa responsabilité personnelle. »

*L’Insee chiffre pour 1 emploi industriel : 1,5 emploi indirect et 3 emplois dans le reste de l’économie.

Construction Européenne, pourquoi il nous faut tout changer !

En vue des élections européennes du 16 mai prochain, la Gauche Républicaine et Socialiste vous présente son livret :

« Construction européenne, pourquoi il nous faut tout changer ? »

 Voilà plus de 70 ans que la construction européenne se fait sans les peuples, quand ce n’est pas contre les peuples que celle-ci s’est faite.

C’est parce que nous croyons dans le projet européen que nous ouvrons un oeil lucide sur la réalité de sa construction et que nous voulons tout changer : l’Europe sociale, l’Europe écologique, l’Europe de la paix, toutes ces promesses resteront lettre morte tant que la construction européenne se fera dans le dos des peuples !

Retrouvez notre livret ci-dessous

Une autre réforme de l’impôt sur le revenu est possible, pour la justice sociale et fiscale

L’impôt sur le revenu est né en mai 1914 à un moment d’unité nationale face au péril de la guerre, comme un compromis entre la droite, qui l’avait d’abord refusé, et la gauche. L’idée d’alors était de fortifier la Nation et de substituer, à plus forte raison en 1917 quand il devient progressif, aux quatre vieilles (contribution financière, personnelle mobilière, patentes, portes et fenêtres) une imposition réellement assise sur les revenus des citoyens à raison de leur faculté contributive. Il est donc fortement lié à notre construction républicaine, en liant citoyenneté et justice sociale et a permis d’affermir le cadre démocratique de nos institutions étatiques. Si l’on s’en tient aujourd’hui à la définition que nous en donne l’INSEE, » cet impôt direct concerne les revenus, les bénéfices et les gains en capital. Il représente la deuxième recette fiscale pour l’Etat et est acquitté par moins de la moitié des citoyens contrairement à la TVA, première recette mais prélevée sans égard pour les inégalités de revenus des citoyens qui l’acquittent indistinctement à travers leur consommation. La gauche a historiquement promu au contraire l’impôt sur le revenu précisément pour établir une justice fiscale en faisant en sorte que celui-ci soit progressif en fonction des tranches de revenus.

Plus tard dans la seconde partie du 20ème siècle le gouvernement de Michel Rocard créera un nouvel impôt sur le revenu :  la contribution sociale généralisée puis la Contribution au remboursement de la dette sociale. L’objectif étant de garantir le financement de notre modèle social et d’assurer un financement plus large et juste.

Ce n’est qu’à partir de la conversion au social libéralisme au début des années 2000 que la gauche puis la droite ont importé une vision libérale anglo-saxonne de la baisse d’impôt comme réponse aux problèmes de pouvoir d’achat. Cette doctrine parmi les élites dirigeantes n’a malheureusement pas varié d’un gouvernement à l’autre. Il aurait pourtant été utile de s’attacher à résoudre l’inégale répartition de la valeur ajoutée entre le capital et le travail dans la mesure où la part de ce dernier tendait à décroître depuis la fin des années 80 en faveur des revenus patrimoniaux, capitalistiques et financiers.

C’est donc dans ce contexte libéral qui a plus de 20 ans qu’il faut comprendre la fameuse promesse d’Emmanuel Macron de baisse de 5 milliards d’impôt sur le revenu pour les deux premières tranches telles que proposées par le Ministre de l’économie Bruno Le Maire en lieu et place d’un soutien à l’augmentation des salaires. Rien d’innovant dans ces propositions qui consistent à réduire les marges de manœuvre de l’Etat autant que la redistribution fiscale concomitante. Il s’agit à la fois d’une cohérence idéologique, d’un moule de pensée dont Bercy est le parangon et d’une mise en conformité d’une politique économique avec les pressions du grand patronat et de la commission européenne de Bruxelles. Par ailleurs dans un pays où plus de 50% de la population ne paye pas l’impôt sur le revenu ces mesures ne sont d’aucun bénéfice pour les classes populaires.

Il existe cependant une autre réponse possible pour faire droit aux demandes légitimes du mouvement social et citoyen qui traverse en profondeur notre pays. Il s’agit de reformuler un impôt sur le revenu républicain et universel qui permette de donner un second souffle au consentement citoyen au système fiscal. Pour ce faire, nous proposons de rétablir 14 tranches afin de lisser l’effort et de réduire ainsi celui des classes modestes et moyennes et de rétablir une contribution plus forte de ceux qui gagnent le plus en supprimant les effets de tranche couperets que l’on constate logiquement avec seulement 5 tranches. Par ailleurs, cette réforme devrait s’accompagner d’une réforme de la CSG, impôt proportionnel et non progressif qui sert trop souvent de variable d’ajustement aux politiques fiscales des gouvernements qui font le choix contestable d’abaisser la fiscalité pour les plus aisés.

Nous avons besoin de vous !

Quelles que soient vos compétences, si vous touchez votre bille en droit, en bricolage, si vous aimez écrire, si vous êtes créatif… vous pouvez prendre part à des actions et ateliers près de chez vous ou encore nous envoyer vos vidéos, vos dessins pour des affiches etc.