Festival d’Avignon : besoin d’un nouveau souffle pour les politiques culturelles !

Aujourd’hui, jeudi 7 juillet, s’ouvre le festival d’Avignon. Après une édition en “mode dégradé” (2021) et une édition annulée (2020), c’est tout le secteur du spectacle vivant qui retient son souffle, désireux de retrouver un peu de normalité dans ses capacités de création, de diffusion ou de liens avec les publics.

Cette saison des festivals (au delà d’Avignon, Montpellier danse vient de s’achever et le Festival international d’art lyrique d’Aix-en-Provence débutera la semaine prochaine, pour n’en citer que quelques uns) est un moment puissant et fédérateur pour le secteur, bien que la 7ème vague du Covid laisse craindre de nouvelles restrictions à la rentrée de septembre.
Vitrine déterminante pour les compagnies, engagement financier considérable, le “off” du festival d’Avignon a un rôle capital pour la diffusion des spectacles de très nombreuses équipes : cette année, ce sont 1570 spectacles qui seront présentés (le triple d’il y a vingt ans) pour des retombées économiques difficiles à quantifier, tant en terme de public que de diffusion ensuite dans le pays, les lieux de création et de diffusion étant aujourd’hui en manque de visibilité sur leurs capacités d’accompagner ces équipes ou même de programmer leurs spectacles, notamment pour les artistes émergents, peu identifiés.

Au delà du Pass Culture, mesure phare du gouvernement pour les politiques culturelles, et sa focalisation sur un soutien à la demande, c’est bien la problématique de l’offre artistique qui sera au cœur des enjeux. Le plan de relance a permis, en 2021 et en 2022, de maintenir à flot un secteur qui n’avait pas été considéré comme essentiel et dont les difficultés engendrées par la crise sont encore pleinement d’actualité. Le gouvernement ne semble pas en avoir conscience, le plan de relance ne sera pas reconduit en 2023 et on peut craindre, comme pour de nombreux secteurs, un budget d’austérité du ministère de la culture, ce qui aura des conséquences sociales dramatiques pour tout le secteur de la création artistique.

La Gauche Républicaine et Socialiste estime donc que certains axes forts doivent immédiatement être mis en chantier, pour assurer un travail de création artistique indispensable à notre société, ce qui nécessitera un engagement financier du gouvernement.

  • Pérenniser la statut d’intermittent (bénéficiaires des annexes 8 et 10 de la convention assurance chômage), fragilisé par la crise sanitaire ;
  • Mettre en place un statut d’artiste-auteur permettant d’améliorer leur rémunération et leur protection sociale ;
  • Améliorer les dispositifs d’accompagnement des artistes et des équipes artistiques, en tenant compte des spécificités disciplinaire et des parcours ;
  • Améliorer la politique partenariale avec les collectivités sur des orientations stratégiques partagées de développement culturel et artistique des territoires ;
  • Déployer, en lien avec les collectivités, un grand plan de diffusion d’œuvres dans des lieux non dédiés, afin de toucher les territoires privés d’offres artistiques et culturelles ;
  • Renforcer l’accompagnement des festivals et faciliter leur mise en réseau ;
  • Mettre en place un grand plan de présence artistique sur tout le territoire national, à travers des résidences établies avec les structures de création et de diffusion des labels et réseaux de l’État ;
  • Mettre en place d’une politique du « temps libre » en lien avec les autres ministères concernés.

Réouverture des lieux culturels

une bonne nouvelle mais sous quelles conditions ?

Nul ne l’ignore : le « secteur culturel » a été particulièrement fragilisé par la période de confinement. Ses structures seront durablement affaiblies et ses artistes et professionnelles risquent d’être durablement précarisés.

Les réouvertures de tous les musées et monuments (le 2 juin), des salles de spectacles (le 2 juin sauf pour l’Île-de-France, le 22 juin) et des salles de cinéma (le 22 juin), qui s’ajoutent aux réouvertures de toutes les librairies semble le signe d’un imminent retour à la normale du secteur culturel.

En réalité, il n’en est rien.

D’abord, parce que la situation personnelle et générale des artistes, des techniciens et de tous les professionnels faisant vivre ce secteur reste dans une grande incertitude. Les inciter à « enfourcher le tigre » ne peut faire oublier l’indigence des réponses de moyen et long terme.

L’annonce des réouvertures ne signifie en aucun cas le retour à une activité normale. Les conditions sanitaires de reprises, précisées dans des vade mecum parfois abscons communiqués par le gouvernement, ne permettront qu’une reprise partielle des activités et imposeront des jauges très réduites et des contraintes fortes pour les publics présents, nécessairement limités. Aux dernières nouvelles, tous les grands festivals de l’été restent annulés, ce qui a des conséquences très lourdes pour les nombreux saisonniers qui en dépendent.

Pour les artistes et techniciens relevant du régime de l’intermittence, la prétendue « année blanche » n’est qu’une réponse partielle car leurs indemnités chômage sont pensées comme un complément de leurs activités ponctuelles rémunérées et ne sont donc pas d’un montant comparable à celles du régime général. Cette réponse n’empêchera donc pas une grande détresse sociale à très court terme, sans oublier tous les professionnels qui n’y sont pas éligibles.

Pour les structures, les contraintes sanitaires vont peser lourd sur l’activité (et nul ne se plaindra d’apporter sa contribution à la lutte contre la pandémie) et la reprise annoncée semble être plus justifiée par une fin du chômage partiel indemnisé par l’Etat que pas une prise de conscience de l’importance de ces lieux et de ce qu’ils y font pour le vivre ensemble.

Car ce gouvernement ne comprend pas ce que sont les arts et la culture et leur importance dans la construction d’un imaginaire qui nous lie. Dès le début du confinement, la principale réponse du ministère de la culture fut de créer un site internet d’agrégation de « contenus culturels » baptisé « culture chez nous », sans que cet oxymore ne frappe les esprits. Non, la culture chez soi, seul, ce n’est déjà plus de la culture, c’est de la consommation … et peu importe pour les marchands de « biens culturels » que cette consommation soit individuelle ou collective.

A contrario, cela nous importe. Durant ces semaines, pour la première fois dans l’histoire de notre civilisation, nous n’avons pu nous retrouver ensemble face à des œuvres, singulièrement celles du spectacle. Aucune pandémie n’avait jamais eu cette conséquence.

L’heure est à l’action pour que la reprise partielle permette à un secteur dévasté de retrouver l’espoir d’une renaissance.

Celle-ci passera nécessairement par un renouveau et un renforcement des politiques culturelles alors que l’on ne peut que craindre que ce gouvernement les abandonne au secteur marchand.

Ce doit être une des feuilles de route pour le monde d’après que nous voulons construire. Sans tarder !

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