Voici pourquoi la cérémonie d’ouverture des JO de Paris n’était pas “woke”

Parce que c’était Français : riche, contradictoire, parfois choquant (et nous ne sommes pas tous choqués par les mêmes choses), parfois léger, le sexe et le désir omniprésent, la colère et la révolte également, hermétique parfois (il n’était pas immédiatement compréhensible que le moment de rock métal rendait aussi hommage au Bataclan), docte et arrogant à d’autres moments (bien sûr on adore Louise Michel), picaresque au sens rabelaisien et beau comme un défilé de toutes les modes.

C’était même à certains moments ridicule, parfois hésitant entre hommage et « blasphème », et menaçant de tomber dans les eaux.

Et c’était extrêmement parisien ! Fluctuat nec mergitur, n’est-ce pas !

Alors Paris s’est célébrée et a presque fait oublier l’objet de sa fête, les athlètes parqués sur des bateaux mouches pour ne pas gêner les chorégraphies, jusqu’à ce moment lumineux, le passage de la torche par des gloires passées – la France hésite toujours entre nostalgie et avenir – l’hommage à un grand ancien – nous sommes existentialistes, nous savons que nous allons tous mourir – et la promesse de la lumière !

C’est en France que commence la conquête du ciel. Cette montgolfière ne rappelle pas que le rêve des deux frères inventeurs. Les toiles de la première montgolfière sont travaillées par les ouvriers du faubourg Saint-Antoine dans les ateliers de l’industriel Réveillon. Celui-ci est un adepte du libre échange, mais confronté à la concurrence déloyale anglaise, il veut “baisser le coût du travail”. L’émeute de ses ouvriers révoltés en avril 1789 sert de répétition à la prise de la Bastille, qui partira du même quartier, trois mois plus tard. C est de ce faubourg qu’a été lancé la marche des femmes parisiennes sur Versailles à l’automne. C’est ce faubourg qui popularise le “Ça ira !” et qui se bat contre l’arbitraire bonapartiste. En 1870, les ouvriers du quartier acclament Gambetta quittant Paris encerclé par les troupes germano-prussiennes pour organiser la résistance nationale. Il s’enfuit … en montgolfière. Et c’est avec les ouvriers de ce quartier que Louise Michel combat pendant la Commune.

Enfin, la lumière de la flamme, illuminant la Ville-Lumière, rappelle que nous sommes la Nation enfantée du « Siècle des Lumières ! » C’est-à-dire : Universaliste !

Il n’y a rien d’Américain dans le spectacle proposé vendredi soir – même les stars nord-américaines invitées ont offert un témoignage de culture française et d’hommage à la France. Et la Marseillaise fut magnifiquement chantée par une enfant de cette histoire contradictoire, née aux Amériques françaises, portant à la fois l’esclavage et son abolition. Rappelons le : la République américaine fit la guerre à la République française parce que celle-ci avait osée avoir des députés noirs au sein de son assemblée, qu’elle avait osé abolir l’esclavage. Notre histoire n’est pas celle des Américains : elle les dépasse et les surpasse. Et c’est pourquoi nous n’avons pas besoin de leurs théories sociales.

Tout dans cette cérémonie était Française. Profondément et contradictoirement Française. Si vous êtes dépassés par votre propre Nation, et bien acceptez de lire pour comprendre enfin ce qu’elle raconte au monde et d’elle-même, ou bien, choisissez-vous une Nation plus simple.

Mathias Weidenberg

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