En cette année 2025 où nous fêtons les 120 ans de la loi de 1905 portant séparation des Églises et de l’État et, en son sein, le principe de laïcité, quelle mauvaise surprise faite à l’enseignement public avec la disparition de la formation des professeurs d’école dans le Morbihan ! Et, à la veille de Noël, quelle joie pour l’enseignement privé religieux de se voir dans ce département en monopole de formation de professeurs des écoles avec l’ouverture d’une Licence « Professorat des écoles » dans son établissement d’Arradon.
On nous objectera que l’enseignement privé n’a pas vocation à former des enseignants du secteur public. Toutefois, cela signifie que les futurs professeurs des écoles du privé auront la possibilité de suivre une licence dans le Morbihan, sur place, alors que les futurs professeurs des écoles publiques devront, eux, traverser la Bretagne vers le nord (120 km pour aller à Saint-Brieuc), vers l’est (110 km pour aller à Rennes) ou vers l’ouest (185 km pour aller à Brest). Quelqu’un a dit proximité ?
Tout cela parce que Madame la Rectrice, sans concertation ni prise en compte des personnels, ne veut pas ouvrir plus de 50 places à Rennes, 30 à Brest et, à titre expérimental, 20 à Saint-Brieuc avant la probable fermeture du site, après celle tout aussi probable de celui de Quimper en 2027. Logique purement comptable qui menace la formation en Bretagne : cette région verra à court terme une réduction de moitié de ses lieux de formation d’enseignants.
Souvent se trouve évoqué le maillage universitaire de proximité garant de l’égalité des chances, de soutien à porter aux vocations locales. Or, à Vannes, c’est l’inverse qui est réalisé, ce qui porte un coup certain au dynamisme universitaire de la ville si la suppression de la formation des professeurs des écoles y préfigure la fermeture du site de l’Institut National Supérieurs du Professorat et de l’Éducation (INSPÉ) en Bretagne. Fermeture incompréhensible d’autant que la formation des « maîtres et maîtresses d’écoles » est une tradition de longue date dans la ville-préfecture du Morbihan.
Et gageons qu’à la seule logique comptable du gouvernement et de ses soutiens locaux, la réponse comptable de beaucoup de postulants à une fonction d’enseignant sera de choisir la proximité. Il y a donc bien une facilitation pour le privé au détriment du public.
Pour terminer : comment juge-t-on de l’efficacité d’une réforme du point de vue du libéralisme ? Réponse : de sa capacité à diminuer les moyens pour mettre en concurrence les différentes structures de façon à ce qu’elles se battent pour récupérer quelques miettes et, par la paupérisation des moyens des services publics, pour pouvoir dire, le mal étant fait, que le privé est plus efficace.
Le précepte républicain voulant que « la seule école libre, c’est l’école publique » est écorné !
Alain Fabre-Pujol et Céline Piot