14 Juillet, la République sans cesse recommencée

Aujourd’hui 14 juillet 2021, nous célébrons la fête nationale de la République Française.

En ce jour, nous commémorons la fête de la Fédération, le 14 juillet 1790, qui marque l’unité de la Nation, ainsi que la prise de la Bastille le 14 juillet 1789, qui symbolise dans la mémoire collective le début de la Révolution Française. Les deux projets essentiels de la République sont rassemblés dans une seule et même date.

Le 14 juillet, c’est la République une et indivisible. Dans tous les départements, dans toutes les villes, dans toute la France, nous célébrons notre pays et son unité. Henri Martin rapportait ainsi pour le Sénat à propos de la proposition de loi du député Benjamin Raspail visant à instituer le 14 juillet comme Fête Nationale : « Cette seconde journée du 14 juillet, qui n’a coûté ni une goutte de sang ni une larme, cette journée de la Grande Fédération, nous espérons qu’aucun de vous ne refusera de se joindre à nous pour la renouveler et la perpétuer, comme le symbole de l’union fraternelle de toutes les parties de la France et de tous les citoyens français dans la liberté et l’égalité. Le 14 juillet 1790 est le plus beau jour de l’histoire de France, et peut-être de toute l’histoire. C’est en ce jour qu’a été enfin accomplie l’unité nationale, préparée par les efforts de tant de générations et de tant de grands hommes, auxquels la postérité garde un souvenir reconnaissant. Fédération, ce jour-là, a signifié unité volontaire. » 

Mais le 14 juillet, c’est aussi la prise de la Bastille, c’est la lutte contre la tyrannie, pour la liberté, l’égalité et la fraternité. C’est le souvenir du peuple français révolutionnaire renversant les injustices, triomphant des tyrans et de leurs armées coalisées. 

La République est non seulement un régime politique d’unité des citoyens égaux en droit, sans qu’il ne soit fait de différence entre eux, mais c’est aussi un projet politique, celui de sa devise, liberté, égalité, fraternité.

Les bals populaires du 14 juillet, les feux d’artifice, la Marseillaise, le drapeau tricolore sont autant de célébrations, mythes et symboles de notre République Française. Ils ne sont pas les souvenirs aseptisés d’une époque révolue, mais ce qui donne corps à l’esprit républicain, ce qui nous fédère en tant que peuple.

Sans cesse renouvelée, la République, pour être elle-même, doit être conquérante. L’émancipation individuelle et collective en est l’aboutissement. C’est par l’entremise de la laïcité, de la sécurité sociale, du droit de manifester, dusuffrage universel, de la politique sociale du logement, de l’hôpital public, des monopoles d’Etat, des ateliers nationaux, que nous progressons vers cet idéal. La République sociale ne se satisfait pas de l’égalité des droits. Elle est une aspiration à la réduction des inégalités sociales pour gagner l’égalité républicaine.

Unité de la Nation, conquête de l’émancipation, voilà la République que nous chérissons et que nous défendons. La Gauche Républicaine et Socialiste souhaite à tous les citoyens de la République Française une joyeuse fête nationale. Vive la République, vive la France !

Les archives publiques sont un patrimoine commun à défendre

Le gouvernement, dans le cadre du projet de loi relatif à la prévention des actes terroristes et au renseignement, met en péril l’accès démocratique aux archives du renseignement.
Le droit d’accéder aux archives n’est pas un sujet anecdotique. C’est une composante majeure de la réalisation du travail scientifique et historique. C’est par la consultation des archives nationales, locales, militaires, que les historiens parviennent à produire des travaux documentés et légitimes. Ce travail est indispensable pour participer à l’élaboration d’une Histoire commune, donc au sentiment d’appartenance à la communauté nationale. À l’ère du relativisme généralisé, où la distinction entre faits établis et opinions arrangeantes semble avoir été abolie, la nécessité de disposer de sources fiables n’a jamais été si importante.
La pente des restrictions des libertés publiques est glissante. Fermer les archives du renseignement sans limite de durée, ainsi que le prévoit le projet gouvernemental, est un recul inacceptable de l’État de droit. La transparence de la République sur les missions qu’elle mène pour la défense des citoyens est un élément essentiel de notre démocratie. Il garantit le contrôle citoyen des opérations de défense en permettant d’avoir les moyens de les évaluer a posteriori.
La lutte contre le terrorisme est une priorité politique. Les ennemis de la France, de la République et de la démocratie doivent être combattus par l’État, au nom de la défense des libertés publiques et de la sécurité de nos concitoyens. Il est donc impensable que la lutte contre le terrorisme aboutisse au recul de celles-ci.
Alors que le Conseil d’État a jugé le 2 juillet dernier illégale la classification automatique de ces archives en catégorie « secret défense » pour plus de 50 ans, le gouvernement a l’obligation morale et politique de revenir sur l’article 19 de ce projet de loi.
De la politique répressive des manifestations au fiasco lors de l’organisation des élections locales, en passant par certaines mesures de l’état d’urgence sanitaire (notamment les moyens donnés à l’exécutif pour se débarrasser d’un contrôle parlementaire sérieux), la présidence d’Emmanuel Macron a été un moment de recul inédit de recul des libertés publiques en période démocratique. Du fait de ces lois dangereuses, des répressions inacceptables et de l’incompétence généralisée des ministres de l’intérieur successifs, la confiance des Français envers nos institutions républicaines est plus faible que jamais. Il est urgent de la reconstruire.
La Gauche Républicaine et Socialiste appelle donc le Parlement à rejeter l’article 19 du projet de loi terrorisme-renseignement. Nous rappelons notre attachement sans faille à l’accessibilité universelle des archives, nécessité scientifique et démocratique.

La GRS soutient le référendum d’initiative partagée (RIP) pour sauver l’hôpital public et appelle à la constitution de collectifs citoyens

Le 7 juillet, le RIP pour sauver l’hôpital public a été déposé au Conseil constitutionnel par les parlementaires signataires. Les parlementaires de la GRS, Caroline Fiat (députée) et Marie-Noëlle Lienemann (sénatrice) l’ont signé. Ce RIP lancé par le collectif « Notre Hôpital c’est vous » entend être un des moyens pour garantir une offre de soins universelle de qualité, également accessible à tous. L’égalité d’accès à des soins de qualité est en effet un des fondements de notre république sociale et de l’État providence.

Pourtant l’hôpital public connaît trois crises profondes : une crise de financement, une crise humaine et une crise démocratique.

Une crise de financement causée par une logique gouvernementale de diminution des dépenses publiques et d’austérité. Depuis sa création par ordonnance en 1996, l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) pour l’hôpital a été voté tous les ans en dessous des dépenses et des charges nécessaires pour assurer les soins. Cela conduit les hôpitaux soit à s’endetter, soit à diminuer le nombre ou la qualité des soins et c’est inacceptable ! De plus, nous assistons à une privatisation à bas bruit d’activités médicales considérées comme lucratives par les chaines de cliniques privées dont la chirurgie : cela doit cesser !

Une crise humaine aggravée par la gestion erratique de la pandémie. Les pressions à l’économie sur les soins, les difficultés de recrutement, le faible niveau de rémunération, les objectifs de performance imposés par les directions administratives conduisent au développement d’un crise humaine chez les personnels qu’il nous faut régler pour eux et pour les soignés.

Une crise démocratique les différentes cartes sanitaires, les redéploiements de spécialités, les conséquences des numerus clausus dans les diverses formations créent des déserts médicaux ou hospitaliers. Ces décisions prises dans une logique d’économie d’échelle prennent peu ou pas en considération les besoins sanitaires des populations. Il est indispensable de procéder à une définition loyale, partagée, concertée et territoriale des besoins. L’organisation hospitalière doit avant tout, répondre aux besoins en santé des populations.

La crise sanitaire du Covid-19 a amplifié ces phénomènes et le gouvernement n’en a pas tiré de conséquences, pire il a continué sa politique de fermeture de lits- ce qui est une faute !

L’objectif de ce RIP est de répondre à ces trois crises. C’est pourquoi la GRS participera activement aux mobilisations en faveur de ce RIP et appelle à la constitution de collectifs locaux pour faire signer nos concitoyens.

Pour lire la proposition de loi du RIP : https://www.notrehopital.org/la-proposition-de-loi

Réaction suite à l’assassinat du Président de la République d’Haïti

La Gauche Républicaine et Socialiste condamne l’assassinat du président haïtien Jovenel Moïse, qui a eu lieu aux petites heures du matin, dans sa résidence, par un commando. Cet acte arrive dans un contexte où des bandes armées contrôlent une majeure partie de la capitale, Port-au-Prince, et alors qu’Haïti est le pays est le plus pauvre du continent américain et de la Caraïbes.

Investi en 2017 et vivement contesté par la population Haïtienne depuis plusieurs mois, le Président Moïse avait déjà échappé à une précédente tentative d’assassinat en février dernier. Il lui était d’ailleurs reproché de ne pas agir face à la crise que connait le pays et de gouverner seul, sans parlement, et par décret depuis le début de l’année 2020.

Ce pays voisin de la France connaissait déjà de graves problématiques sécuritaires, structurelles, économiques, sociales et politiques depuis plusieurs années, notamment depuis le séisme de 2010.

Nous espérons vivement que cet assassinat ne viendra pas amplifier le climat de violence qui y règne déjà et créer une éventuelle déstabilisation dans le bassin caribéen avec des conséquences néfastes pour nos territoires ultramarins.

Climat : Jeu de dupes entre le Président, le Sénat et la « convention citoyenne »

Comme prévu, le premier ministre, Jean Castex, a annoncé mardi 6 juillet 2021 l’abandon du projet de loi visant à inscrire à l’article 1er de la Constitution la préservation de l’environnement et la lutte contre le dérèglement climatique. En effet, la veille, la majorité sénatoriale conservatrice avait rejeté pour la seconde fois la formulation du texte proposée par l’Assemblée nationale et « issue » des 149 propositions de la convention citoyenne pour le climat. L’utilisation du terme « garantir » était le principal point d’achoppement entre les deux Chambres. Tout cela était mis en musique dès le départ car l’exécutif connaissait dès l’origine, et dès l’annonce par Emmanuel Macron lui-même aux « conventionnels » de la reprise de cette proposition, que les sénateurs LR et centristes bloqueraient le processus. C’est donc de manière théâtrale que Jean Castex a exposé la situation créée de toute pièce devant sa majorité de droite libérale à l’Assemblée nationale : « Cette main tendue en faveur de la protection du climat n’a pas été saisie par le Sénat. Ce vote met hélas un terme au processus de révision constitutionnelle ».

Évidemment, la navette sur cette procédure aurait pu continuer indéfiniment entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Emmanuel Macron a choisi d’y mettre un terme car la démonstration qu’il attendait était faite : la méchante droite conservatrice avait bloqué la concession « sublime » que la gentille droite libérale avait accordé aux membres de la convention citoyenne pour le climat. Démonstration faite alors que le débat parlementaire sur le projet de loi climat-résilience avait mis en évidence le mépris politique de l’exécutif à l’égard des rares propositions de la convention reprises dans ce texte ; mais démonstration faite alors que l’ouest canadien, le nord-ouest états-uniens, l’Arctique et la Scandinavie subissent des températures caniculaires… l’équation politique voulue par Emmanuel Macron lui paraît ainsi suffisante : alors que le dérèglement climatique nous saute à la figure, j’ai fait ce que j’ai pu pour agir, mais l’archaïque Sénat m’en a empêché. Le Président peut aller se laver les mains.

Évidemment, la majorité de droite sénatoriale a rejeté le projet de loi référendaire pour de mauvaises raisons. Elle a cherché un prétexte « idéologique » pour asseoir son argumentation politique, justifier son rejet et envoyer un message à son électorat : les sénateurs LR rejetaient ainsi la formulation selon laquelle la République française « garantit la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et agit contre le dérèglement climatique » ; par là, ils prétendaient infliger un échec aux « tenants de la décroissance ». S’il est effectivement juridiquement hasardeux d’insérer le verbe « garantir » sur un tel sujet, la réalité des conséquences juridiques et constitutionnelles étaient peu mesurables et vraisemblablement faibles. L’important pour la droite conservatrice était de démontrer qu’elle s’opposait à une décroissance fantasmée ; l’important pour le macronisme était de donner des gages aux électeurs écologistes centristes et de démontrer que LR était conservateur.

Peu de gens rappellent les faits : cette réforme constitutionnelle morte-née était inutile. Depuis le second mandat présidentiel de Jacques Chirac, la Charte de l’environnement est annexée à la constitution de la République ; elle a valeur constitutionnelle et porte les mêmes effets que ceux qu’espéraient les membres de la convention citoyenne sur le climat. Et c’est là qu’il faut tordre le coup à un autre jeu de dupe : l’idée selon laquelle le tirage au sort des citoyens – jusqu’à utiliser cette méthode pour remplacer les chambres représentatives (proposition de Thomas Guénolé à nouveau ce mercredi 7 juillet 2021) – serait l’avenir et la renaissance de notre démocratie. Selon le « politologue », une assemblée tirée au sort aurait adopté le projet de loi référendaire contrairement à la chambre haute actuelle. Peut-être… mais est-ce bien le sujet ? En réalité, le fait que les « conventionnels » tirés au sort aient fait de cette proposition constitutionnelle un des axes marquant du débouché de leurs débats démontre malheureusement que – malgré des heures et des semaines de travail, malgré l’audition forcenée d’experts variés – ces « citoyens » remplis de bons sentiments ont éludé la réalité juridique et constitutionnelle du pays pour aboutir à une proposition inutile. Pire, ils sont tombés dans le piège de la manipulation et de l’instrumentalisation voulu par le Prince Président qui dispose de pouvoirs excessifs dans le régime actuel. Le tirage au sort n’est pas préférable à la démocratie représentative. Sachons nous en souvenir !

Rupture d’égalité ou revalorisation : le contrôle continu menace-t-il le bac ?

Entretien croisé accordé à Marianne par Emmanuel Maurel, député européen GRS, et Pierre Mathiot, politologue – Propos recueillis par Hadrien Brachet – Publié le 03/07/2021

Jean-Michel Blanquer souhaite renforcer la part dans le bac du contrôle continu issu du bulletin scolaire. Menace sur l’égalité républicaine ou outil pour revaloriser l’examen totem ? « Marianne » en débat avec le politologue Pierre Mathiot et le député européen Emmanuel Maurel.

Un pas de plus vers la fin d’un monument national ? Ou la voie du salut pour lui redonner du sens ? Jean-Michel Blanquer a annoncé son intention de renforcer le contrôle continu issu du bulletin scolaire au baccalauréat. Si l’équilibre du nouveau bac entre épreuves terminales (60 %) et contrôle continu (40 %) serait préservé, les évaluations communes mises en place en 2018 pour les matières du tronc commun seraient supprimées, au profit d’un « seul paquet de contrôle continu ». Et la proposition, qui doit encore être débattue avec les syndicats, divise.

Le contrôle continu « permet de faire travailler toute l’année les élèves » et « le caractère national et fort du baccalauréat sort renforcé de cette réforme » a soutenu le ministre de l’Éducation nationale à l’Assemblée. Quand d’autres se sont inquiétés des inégalités que susciteraient les nouvelles modalités du bac, du fait de l’hétérogénéité de la notation d’un établissement à l’autre. « L’égalité républicaine ? À terre », a lancé la députée Clémentine Autain sur Twitter. « Jean-Michel Blanquer est en train d’enterrer le baccalauréat » s’est insurgé l’eurodéputé François-Xavier Bellamy sur Sud Radio.

Alors, faut-il craindre le contrôle continu ? Marianne en débat avec Pierre Mathiot, politologue, auteur du rapport commandé par Jean-Michel Blanquer qui a inspiré la réforme du bac, et Emmanuel Maurel, député européen, vivement opposé au renforcement du contrôle continu.

Marianne : Renforcer le contrôle continu, est-ce abandonner une promesse d’égalité républicaine à travers un examen national, commun à tous quelle que soit son origine sociale ?

Emmanuel Maurel : C’est évident. Jean-Michel Blanquer accomplit un travail de sape. Il y a déjà eu le fiasco de Parcoursup et la réforme des filières du lycée que personne ne comprend. Le voilà qui entreprend désormais d’enterrer le bac, et de le remplacer par un diplôme local. Ce ministre n’a eu de cesse de s’autoproclamer le premier des républicains mais il piétine ici le principe sacré d’égalité. La réforme du bac, c’est la fin de l’égalité. L’entrée dans l’enseignement supérieur se fera en fonction du lycée d’origine.

Pierre Mathiot : D’abord, il y avait dans le bac précédent des conditions qui faisaient que cette égalité républicaine n’était pas autant respectée que ça. Le sport était évalué en contrôle continu et les langues étrangères à l’oral de manière non anonyme. La notation n’était également pas équivalente d’une académie à l’autre. Les mêmes qui ont vivement critiqué le bac organisé jusqu’en 2019 lui trouvent maintenant des vertus formidables.

Ensuite, le poids accordé au contrôle continu depuis le lancement de ce nouveau bac ne change pas. Il reste à 40 %. Il s’agit simplement de faire évoluer la manière dont ces 40 % sont constitués en renforçant le contrôle continu issu de la notation au sein de l’établissement mais bien entendu sur la base d’un cadrage national et de consignes de notation. Il n’est pas question de laisser les enseignants livrés à eux-mêmes. Nous supprimons les épreuves communes qui étaient des sortes de partiels nationaux et remettaient dans le système de la lourdeur alors même que l’objectif de la réforme était d’alléger le fonctionnement des lycées.

Le contrôle continu est-il source d’inégalités ?

Emmanuel Maurel : Bien sûr. D’abord car tout le monde sait qu’une note de 15/20 dans un lycée lambda ou dans un lycée prestigieux, ce n’est pas la même chose. En renforçant le contrôle continu, on renforce la position du lycée prestigieux et on enfonce un peu plus le lycée lambda. On suscite aussi du stress pour tout le monde, à partir du moment où le contrôle continu compte pour avoir son bac. On instaure une tension toute l’année entre professeurs, élèves et parents.

« Même quand on n’était pas un très bon élève, on avait sa chance à l’examen et on avait la garantie que la notation au bac serait de la pure égalité. »

J’étais aussi attaché à la formule « doit faire ses preuves à l’examen ». Même quand on n’était pas un très bon élève, on avait sa chance à l’examen et on avait la garantie que la notation au bac serait de la pure égalité. Cela me paraissait très important dans sa dimension symbolique.

Pierre Mathiot : Toute notation, toute manière de noter est source d’inégalités. Toute évaluation qu’elle soit locale ou nationale, anonyme ou pas, est source d’inégalités. Il ne s’agit pas d’opposer de manière caricaturale des manières de noter qui seraient totalement égalitaires et d’autres inégalitaires. Une part minoritaire de contrôle continu a du sens dans la mesure où cela permet d’évaluer le travail sur la longueur.

Le contrôle continu n’est-il pas un moyen de mieux refléter le niveau des élèves pour leur entrée dans l’enseignement supérieur, qu’un bac fait après les candidatures sur Parcoursup et très largement accordé ?

Emmanuel Maurel : On entérine ce que Parcoursup était déjà en train d’entériner, c’est-à-dire le fait qu’il faut absolument protéger les enfants de bourgeois en les mettant dans des lycées bourgeois. S’agissant de refléter le niveau, rien n’empêche de faire des contrôles tout au long de l’année. Et rappelons que la notation au bac prend en compte le niveau général à travers les consignes de correction, le livret scolaire, le jury qui décide ou non d’accorder les mentions. L’examen final était déjà un reflet du niveau.

Pierre Mathiot : Pour faire en sorte que les élèves soient mieux préparés à l’enseignement supérieur, il me semble que prendre en compte une grande diversité de types d’exercices et de conditions de passage, en mixant des épreuves terminales et du contrôle continu, a du sens.

La simplification du bac voulue par Jean-Michel Blanquer obéit-elle à une logique marchande et économique ?

Emmanuel Maurel : Évidemment. C’est la gestion par le stress comme dans des entreprises classiques. Au lieu de placer l’élève dans une logique de préparation de l’épreuve, on le soumet à un stress permanent, de type managérial. On présente Jean-Michel Blanquer comme héros du républicanisme, mais en fait il se comporte comme un manager. Son modèle, ce ne sont pas les hussards noirs mais le fonctionnement anglo-saxon.

Pierre Mathiot : Dans la lettre de mission qui avait été la mienne en novembre 2017, il y avait cet impératif de simplification pour alléger le fonctionnement des établissements. On était arrivés en 2019 à une situation d’embolisation du lycée. Or, les épreuves communes avaient pour conséquence paradoxale de remettre une couche de complexité organisationnelle : il fallait neutraliser le fonctionnement des établissements, convoquer les surveillants., etc.

« Qu’il y ait quelques effets pervers, je ne le nie pas. Mais ce qui est en jeu est que tout cela soit plus facile à organiser. »

Simplifier ne veut pas dire individualiser. C’est trop facile dans ces débats de dire que c’est une réforme néolibérale. Qu’il y ait quelques effets pervers, je ne le nie pas. Mais ce qui est en jeu est que tout cela soit plus facile à organiser.

Le bac doit-il être un certificat de fin d’études ou le premier grade de l’enseignement supérieur ? Ou les deux comme il l’est officiellement actuellement ?

Emmanuel Maurel : Les deux, évidemment. Surtout, il fait partie de ces rites de passage de la nation. On concluait à la fois un cycle d’études et en même temps, on permettait d’accéder à l’enseignement supérieur. Il ne faut pas négliger l’impact symbolique de ce qui est en train de se passer. On substitue à ce rite une logique de stress. Et à la fin, ce sont les classes aisées qui sont gagnantes.

Pierre Mathiot : La manière que l’on a de réorganiser le bac qui a commencé en 2018 est justement le moyen de combiner ces deux exigences, notamment par rapport au calendrier de Parcoursup qui s’impose à nous. Pour qu’au 20 juillet, la quasi-intégralité des jeunes ait une place dans l’enseignement supérieur, il faut du temps pour faire tourner Parcoursup et avant, examiner les dossiers. Cela suppose au moins dix semaines. Si vous faites des épreuves en juin comme avant et que vous voulez prendre en compte les notes du bac, vous ne pouvez enclencher Parcoursup qu’en août voire en septembre. On ne peut donc pas faire autrement, me semble-t-il, que de faire une combinaison de contrôle continu et d’épreuves terminales.

« L’objectif est de tourner le lycée et le bac vers l’enseignement supérieur. »

On recherche un équilibre entre les contraintes calendaires de Parcoursup et la nécessité de continuer à organiser un bac qui joue une place importante. Bien entendu, il sera essentiel d’accompagner les enseignants dans ce travail. Des pressions peuvent s’exercer de la part des familles mais en réalité elles existent déjà du fait de Parcoursup. Cette décision initie une évolution historique, le fait que la communauté s’interroge sur les façons de noter et définisse une stratégie collégiale par le contrôle continu.

Au-delà du bac, la véritable problématique n’est-elle pas celle du lien entre le lycée et l’enseignement supérieur ? Concentrer ses critiques sur la forme du bac, n’est-ce pas hypocrite alors que depuis longtemps on sélectionne déjà sur le contrôle continu ?

Emmanuel Maurel : La situation s’est dégradée réformes après réformes, en particulier avec Parcoursup. Je vois bien que dès la fin du collège, les jeunes commencent à être flippés. On leur demande de plus en plus tôt de savoir qu’ils veulent faire plus tard.

Pierre Mathiot : Depuis APB puis Parcoursup l’affectation des élèves dans l’enseignement supérieur se faisait absolument sur la base du contrôle continu. L’objectif est de tourner le lycée et le bac vers l’enseignement supérieur. Ce qui n’est pas encore bien mis en place, en partie à cause du Covid, c’est l’enjeu formidable des 54 heures d’orientation en première et terminale pour qu’au moment où ils affrontent Parcoursup, les élèves le fassent de manière informée. Si on n’arrive pas à faire cela, évidemment la réforme va perdre en route sa dimension d’équité. Si on y arrive, je pense que c’est une réforme qui réussira.

La relance est-elle suffisante pour surmonter la crise du COVID ?

Lundi 28 juin 2021, David Cayla, Maître de Conférences en économie à l’université d’Angers, membre des Économistes atterrés et de la GRS, répondait aux question des journalistes du 28 minutes d’arte.

Face à Elie Cohen et Natacha Valla, il explique que le retour a une situation économique équivalente à notre niveau de 2019 ne sera pas atteint fin 2021. Alors que nous faisons face à une augmentation des prix générés par le redémarrage de l’économie et l’achat des matières premières par la Chine et les USA, les plans de relance français et européen sont largement sous-dimensionnés, par comparaison à celui des Etats-Unis d’Amérique. La France par exemple pourraient être amenée à rembourser plus qu’elle reçoit de l’Union européenne, par la garantie qu’elle a accordée, si l’UE ne trouve pas d’autres ressources. Il faut également mesurer si la relocalisation des activités de production et la diminution de notre dépendance économique à l’extérieur vont réellement devenir des priorités.

Premier tour des élections régionales et départementales : Après le « crash démocratique », préparer le sursaut à gauche !

Au soir du dimanche 20 juin 2021, le premier enseignement des deux scrutins c’est que nos concitoyens ont choisi massivement de s’abstenir. Avec 32 % de participation au niveau national, jamais un tel seuil n’avait été atteint. Ce chiffre cache par ailleurs des réalités plus diverses qui traduisent à nouveau que ce sont les catégories populaires qui ont boudé le plus fortement les urnes.
Cette dépression démocratique démontre encore à quel point notre système institutionnel est mal en point et que la confiance entre les citoyens et leurs institutions est profondément atteinte.

Par ailleurs, les départements et les nouvelles régions fusionnées déroutent également nos concitoyens, qui ne savent plus quelles sont les compétences et l’action des exécutifs locaux et s’interrogent sur la pertinence de leur mobilisation pour ces collectivités. Aucune information sur les régionales et départementales n’a été diffusée en amont du scrutin, ce qui est inédit. Il faut également noter que de graves défauts d’organisation, de la distribution des professions de foi à la tenue des bureaux de vote, entachent le déroulement du scrutin et de la campagne.

Dans ce contexte, il serait donc prétentieux de tirer des éléments signifiants sur l’évolution nationale des rapports de force politiques. Si, au soir du premier tour, tous les commentateurs glosent sur le recul du Rassemblement national, c’est sans doute qu’il pâtit au premier chef de l’abstention des catégories populaires : ne nous trompons pas, si nous ne faisons rien d’ici le printemps 2022 les réveils post-électoraux pourraient alors être douloureux. La faiblesse de la base électorale de la majorité présidentielle LREM-MODEM est confirmée ; les sortants ont bénéficié plus que jamais dans ce contexte de leur position leur promettant une perspective de reconduction dans la plupart des régions.

Pour le second tour, la Gauche Républicaine et Socialiste appelle l’ensemble des listes de gauche et des écologistes à se rassembler pour l’emporter dans le plus grand nombre de régions et de départements et pour porter PARTOUT la voix de la Justice sociale, de la République et de l’Écologie.
Nous appelons la gauche et les écologistes à se concentrer sur les priorités de nos concitoyens pour construire une alternative de progrès social et écologique et se mettre enfin au travail pour reconquérir les catégories populaires et moyennes qui se sont massivement abstenues aujourd’hui.

ZFE : la charrue avant les bœufs ?

Depuis quelques semaines, un nombre croissant de Français « découvrent » qu’ils sont ou seront dans les mois et années à venir – en tout cas dans un futur extrêmement proche – dans l’incapacité d’utiliser leur véhicule automobile actuel pour aller travailler ou simplement sortir de chez eux, car ils habitent dans une zone de faibles émissions mobilité (ZFE) ou doivent en traverser une pour rejoindre leur lieu de travail ou d’achat.

C’est alors passé relativement inaperçu – et entre temps, la Crise Sanitaire et ses conséquences économiques et sociales ont écrasé toute autre considération – mais la loi d’orientation des mobilités (votée définitivement par la majorité LREM de l’Assemblée nationale le 19 novembre 2019 puis promulguée le 24 décembre 2019) a rendu obligatoire l’instauration d’une Zone à faibles émissions mobilité dans les collectivités et intercommunalités ne respectant pas les normes de qualité de l’air. Cela concerne toutes les villes incluses dans la ZFE métropolitaine d’Île-de-France, délimitée par le périmètre de l’autoroute A86, dont la Ville de Paris, mais également les agglomérations lyonnaise, marseillaise, grenobloise, nancéienne et rouennaise.

Vous trouverez en fin d’article le calendrier des différentes interdictions.

Accélération du calendrier

En lien avec la Ville de Paris, la Métropole du Grand Paris a décidé en décembre 2020 d’accélérer le calendrier d’interdiction des véhicules au sein de la ZFE métropolitaine, avec une interdiction des véhicules à vignette Crit’Air 4 à partir du 1er juin 2021 : sont donc désormais interdits à la circulation à l’intérieur du périphérique de l’Île-de-France les véhicules automobiles dits « Non classés », « Crit’Air 5 », et Crit’Air 4 ». Cette accélération du calendrier va se poursuivre : ainsi, la Ville de Paris et la Métropole du Grand Paris ont introduit dans leur plan climat-air-énergie respectif des objectifs aux horizons 2022, 2024 et 2030 : la restriction de circulation aux véhicules Crit’air 3 au 1er juillet 2022 ; la restriction de circulation aux véhicules Crit’air 2 (c’est-à-dire notamment aux véhicules diesel) au 1er janvier 2024 et plus aucun Parisien exposé à des dépassements des valeurs limites européennes ; 100% de véhicules propres d’ici 2030 et le respect des valeurs guides de l’OMS pour tous les polluants.

Les débats sur les graves insuffisances du projet de loi Climat-Résilience et la « trahison » de la « parole donnée » à la Convention Citoyenne vont bon train à l’occasion de l’examen du texte au Parlement et des manifestations qui continuent d’avoir lieu. Ce contexte et « l’exemple francilien » pourraient encourager plusieurs agglomérations à elles-aussi accélérer le processus.

Logique de santé publique…

Il ne fait aucun doute que la nécessité de réduire la pollution atmosphérique dans ces agglomérations et dans notre pays en général est indéniable. Selon une étude de Santé publique France publiée en avril dernier, près de 40.000 décès sont liés chaque année à une trop forte exposition aux particules fines et 7.000 au dioxyde d’azote. La précédente étude de ce type (2016) arrivait à une estimation de 48.000 décès anticipés chaque année.

Ceux qui voudraient arguer qu’il y a là une baisse passerait à côté du sujet car à ces échelles elle n’est en rien significative. La perte d’espérance de vie moyenne pour les personnes concernées atteint 8 mois. La lutte contre la pollution de l’air et notamment la pollution aux particules fines doit absolument être perçue comme une priorité de santé publique.

La France est régulièrement taclée par l’Union Européenne pour les niveaux de pollution dans ses grandes villes, et en réponse le gouvernement a décidé de généraliser le principe de ces zones à circulation restreinte avec le projet de loi climat-résilience dont nous parlions plus haut.

Cependant, pour améliorer la qualité de l’air, il ne faut pas se limiter à la mobilité. L’approche doit être systémique et concerner d’autres leviers d’actions : le chauffage domestique est par exemple responsable respectivement de 49% et 33% des émissions de particules fines PM10 et PM2,5 ; ce n’est pas un hasard si les collectivités financent le renouvellement des appareils de chauffage au bois. Et d’autres secteurs responsables (bâtiment, agriculture) dont la réduction des émissions est plus lente doivent être ciblés.

mais pas de logique sociale

Comme l’âge des véhicules n’est pas sans conséquence sur les émissions, les restrictions ont pour effet de rendre la ville inaccessible aux véhicules plus anciens. Or, les véhicules dédiés à la logistique se caractérisent par un âge plus élevé que la moyenne. La ZFE induit donc un rajeunissement « forcé » de ce parc de véhicules. Or les entreprises de logistique sont de taille très diverse et n’ont pas la même capacité pour s’adapter. Les plus petites (souvent des indépendants) qui possèdent aussi les vieux véhicules sont plus vulnérables pour répondre à l’obligation de changer de véhicule ou de payer une taxe pour circuler. Le risque d’une diminution de 15 à 30% du nombre d’entreprises dédiées à la logistique urbaine circulant en ville est réel et s’appuie sur d’autres expériences européennes. Pour ne pas faire de la ZFE un instrument portant atteinte au tissu économique le plus vulnérable, l’enjeu de la transition et de l’accompagnement est donc essentiel. Le raisonnement pourrait s’appliquer d’ailleurs à des professions indépendantes aussi diverses que des artisans ou des infirmières libérales.

Quel sera donc l’impact d’une ZFE sur le déplacement des personnes. Sur ce sujet, les études sont plus rares. Évidemment, et c’est l’objectif recherché, le dispositif agit sur le renouvellement du parc automobile et la réduction du nombre de véhicules en circulation à moyen et long termes … avec des conséquences différentes suivant les ménages. Comme pour les entreprises, ils sont incités à changer de véhicules pour en acheter un autorisé … ou se reporter vers d’autres modes de transport (vélo, transports en commun, etc.). Sinon, les automobilistes peuvent prendre le risque de payer une amende. Pour les poids lourds, bus et autocars, 135 euros d’amende. Et pour les autres véhicules, 68 euros forfaitaires ; mais elle peut monter jusqu’à 450€. Ce n’est donc évidemment pas une solution durable.

Cette marche accélérée au renouvellement des véhicules impose de fait entendu un surcoût avec des impacts différenciés : la nécessité est plus forte pour les ménages utilisant souvent l’automobile pour se déplacer (en particulier pour le travail). Ainsi, si dans les communes denses et sur de courtes distances, la part de l’automobile est plus faible qu’ailleurs (grâce à la présence de transports en commun, au développement des modes actifs tels que le vélo, la marche à pied), la situation est différente dans les communes populaires et périphériques des métropoles. Or, ce sont les ménages les plus modestes qui habitent dans ces communes. La difficulté de renouvellement va donc avoir pour conséquence de plonger nombre de nos concitoyens à braver les infractions, puis à renoncer à des déplacements et à des possibilités de formation, d’emploi ou de loisir. Cet effet sur les inégalités socio-économiques n’est pas tenable.

D’après l’association « 40 millions d’automobilistes », les restrictions de circulation toucheront à terme 68% des automobilistes, si on s’appuie sur les chiffres publiés par le ministère de la Transition écologique. D’après le ministère, les vignettes Crit’Air 3, 4 et 5 représentent 16,3 millions de voitures, alors que les Crit’Air 2, interdites en 2024, touchent presque 10 millions de voitures.

Le nécessité contrainte de renouvellement n’a pas pris en compte la capacité des catégories populaires et moyennes à y faire face. Une petite twingo mise en circulation en 2010 est aujourd’hui cotée à 3000 ou 4000€, mais elle ne pourra plus circuler dans l’agglomération parisienne dès janvier 2024. Pour pouvoir circuler entre 2024 et 2030, il faudrait compter pour un véhicule comparable mais immatriculé à partir de 2011, dans les 4000 ou 5000€. La twingo est un petit véhicule qui ne peut satisfaire une famille relativement nombreuse. Et encore ces prix ne concernent que des voitures d’occasion à motorisation essence… pour une taille comparable la Zoé électrique de Renault atteint des prix autour de 30 000 €, qu’on pourrait baisser théoriquement à 15 000 € à condition d’additionner toutes les aides possibles.

Pourquoi orienter les Français vers l’électrique ? Parce que, dès 2030, seuls les véhicules tout électrique ou tout hydrogène resteront autorisés, on ne pourra même plus rouler en hybride (qui sont les stars actuelles des publicités automobiles) ou en véhicules au gaz.

Défi social et industriel

Ainsi près de 68 % des automobilistes vont devoir changer de voitures d’ici 2024, on imagine aisément les difficultés auxquelles vont être confrontées nos concitoyens. On se souvient que l’augmentation de la taxe sur l’essence avait été l’élément déclencheur du mouvement social inédit des « Gilets Jaunes ». Il y a de nombreuses raisons de penser que cette marche non préparée vers la voiture électrique généralisée pourrait conduit à des « Gilets rouges de colère ».

Nous avons subi une crise sanitaire qui – sauf pour les catégories sociales déjà favorisées – a fortement diminué les revenus de nombre de nos concitoyens, qu’ils aient perdu leur emploi, qu’ils aient conservé le leur avec le chômage partiel mais avec une perte de revenus de 20 %… dans de nombreuses familles, les petits bas de laine (quand il y en avait) qui auraient pu servir pour acheter un nouveau véhicule ont disparu avec les 15 derniers mois. Ne comptons pas sur l’épargne des Français pour affronter cette transition : elle est concentrée surtout dans les classes moyennes supérieures et au-delà. Or l’accès à un véhicule autorisé va devenir une condition pour pouvoir continuer à travailler ou pour trouver un emploi, sauf à ce que nous vivions d’ici là une révolution qui augmente magistralement les réseaux de transports en commun efficient dans les agglomérations concernées, dans celles qui vont mettre en place une ZFE, et surtout entre elles et leur périphéries … et ce dans un temps record !

Les annonces des dernières semaines et leur mise en application dès juin 2021 pourraient par ailleurs peser fortement sur la campagne de l’élection présidentielle et sur le scrutin lui-même.

Mais le défi n’est pas que social … il est aussi industriel. Car à ce stade il n’est pas dit que la France ou même l’Europe disposent des capacités industrielles pour produire les véhicules électriques (ou hydrogène) nécessaires pour remplacer le parc actuel. La mutation des chaînes de montage en France est urgente … sauf si nous voulons importer nos voitures, détruire notre industrie et faire exploser leur coût carbone.

Production des véhicules … et production de l’énergie ! La France s’enorgueillit d’une électricité abondante et relativement peu chère (même si c’est de moins en moins vrai), mais c’est sans compter une massification des véhicules électriques. La programmation pluriannuelle de l’énergie a parfaitement sous estimé l’enjeu. En 2017, RTE avait enquêté sur l’impact d’une électrification massive du parc automobile, mise à jour en 2019 ; l’entreprise présentait plusieurs scénarii pour 2035, avec deux évolutions du parc aujourd’hui constitué d’environ 40 millions de voitures :

  • Médian : 11,7 millions de voitures rechargeables (30% du total), dont 4,7 millions d’hybrides rechargeables, plus 112.000 VUL
  • Haut : 15,6 millions de voitures rechargeables, (40% du total), dont 3,4 millions d’hybrides rechargeables, plus 156.000 VUL

La demande en énergie par an serait respectivement de 29 et 40 Twh/an supplémentaire. Mais ça c’était avant la nécessité accélérée de changer de véhicules. Quels seront alors les besoins en production d’énergie, en centrales supplémentaires, en importation d’électricité (produite avec un coût environnemental plus fort) ?

Du côté de l’hydrogène, on sait que sa production coûtera elle-aussi de l’électricité. Des prototypes utilisant l’énergie houlomotrice promettent une production d’hydrogène propre. Mais pour la Direction générale de l’énergie et du climat, au sein du ministère de la Transition écologique, la technologie houlomotrice n’aurait pas atteint sa maturité. Elle n’a pas jugé bon de l’inscrire dans la programmation pluriannuelle de l’Énergie (PEE), qui court de 2028 à 2033. Si elle continue d’être exclue de notre feuille de route pour le développement des énergies renouvelables, l’énergie houlomotrice aura bien du mal à trouver des financements pour se faire un avenir sur notre territoire ; notre pays passerait à nouveau à côté de technologies d’avenir et de la valorisation de notre potentiel d’innovation. Les choix frileux de la haute administration – contredits ensuite par les faits – et l’incapacité des gouvernements à anticiper nous pénalisent trop souvent.

Enfin tout cela ne dit rien des réseaux de distribution…

La charrue n’a-t-elle donc pas été mise avant les bœufs ? Peut-on contraindre toute une société à changer en moins de 9 ans tout le parc automobile sans avoir regardé la question du pouvoir d’achat, de la production industrielle et de l’énergie ? On voit ici tous les dégâts de l’idéologie néolibérale qui a colonisé haute administration, état-majors politiques et chefs d’entreprise (mais aussi une partie des cadres des partis dits écologistes) : l’écologie, la transition écologique relève de la responsabilité individuelle. Si les individus ne sont pas responsables, parce qu’ils sont trop pauvres, on les sanctionnera. Taxer et infliger des amendes aux ménages modestes sera rentable ils sont nombreux, ça évite de demander des efforts aux plus riches et aux grandes entreprises.

La planification écologique paraît plus urgente que jamais : nous ne relèverons pas les défis sans transformer notre organisation de fond en comble et frustrer quelques intérêts privés, et sans passer du mythe de la responsabilité individuelles des ménages à la responsabilité collective et des grosses entités (entreprises et pouvoirs publics). Pour faire une analogie sur un autre sujet écologique, il faut arrêter de dire qu’on résoudra le problème de l’eau en coupant le robinet quand on se brosse les dents et agir enfin pour des régies publiques de l’eau.

Le quoi qu’il en coûte doit désormais s’appliquer pour des aides massives à l’achat de nouveaux véhicules durables par les ménages modestes et pour une planification de la production industrielle et d’énergie.

DatesZFE concernéesVéhicules interdits de circulation 
Juin 2021ZFE Grand Paris et Paris ZFE Grand NancyCrit’Air 4 et plus Crit’Air 4 et plus de 6h à 20h*
Juillet 2021ZFE Rouen NormandieVUL et PL Crit’Air 4 et plus**
Janvier 2022ZFE LyonCrit’Air 5 et plus
Juillet 2022ZFE Grand Paris et Paris ZFE GrenobleCrit’Air 3 et plus VUL et PL Crit’Air 3 et plus
Janvier 2023ZFE LyonCrit’Air 4 et plus
Janvier 2024ZFE Grand Paris et ParisCrit’Air 2 et plus
Juillet 2025ZFE GrenobleVUL et PL Crit’Air 2 et plus
2026ZFE LyonCrit’Air 2 et plus
2030ZFE Grand Paris et ParisCrit’Air 1 et plus***
* Cette interdiction ne s’applique qu’à partir du 3eme jour de pic de pollution ; ** VUL = Véhicule utilitaire léger ; PL = Poids lourds ; *** En 2023, à Paris et dans le Grand Paris, seuls les véhicules propres pourront circuler

Mila : brisons le silence !

Le procès de la jeune Mila (18 ans depuis peu), menacée de mort pour avoir vivement critiqué l’islam et « Dieu », vient de débuter. Les menaces à son encontre ont repris de plus belles ces derniers jours. La justice avait débuté son travail après que 100 000 messages à caractère violent, dont 50 000 appels au crime et menaces de mort, lui ont été expédiés.

Bien qu’elle soit sous protection 24h/24 (cas rare), la jeune femme est désormais convaincue qu’elle sera assassinée un jour ou l’autre : « Peut-être que je serai morte dans cinq ans… Je vais forcément ne pas rester en vie ». La jeune femme vie recluse pour ne pas être assassinée comme Samuel Paty, qui fut lui aussi victime d’une campagne de harcèlement numérique.

Pourtant, en République laïque, la critique, moqueuse, acerbe des croyances est un droit. Les propos mêmes vulgaires à l’endroit de ce que certains croient être un Dieu ne sont ni illégaux ni répréhensibles. Seuls la haine, la discrimination et le dénigrement d’un groupe humain, en raison de sa foi, de son origine, de sa couleur, sont punis par la loi … et les tribunaux nous le confirment assez régulièrement.

Notre pays a vu le combat des Lumières prendre une force universelle en dénonçant le supplice subi par le Chevalier de la Barre ; dans la patrie de la République laïque, nul ne devrait pourtant être en danger pour avoir dénigré les religions ou de supposées divinités. Nous regrettons que les organisations et responsables politiques – qui, au premier chef, devraient défendre Mila – brillent aujourd’hui avant tout par leur timidité, laissant à l’extrême droite un boulevard, car donnant à penser à une partie de nos concitoyens qu’elle serait la seule à défendre cette jeune femme. Pourtant l’extrême droite ne la défend en rien !

Chacun sait bien les tombereaux d’injures que Mila recevrait de sa part si elle avait tenu les mêmes propos à l’endroit du catholicisme. Pour l’extrême droite, il ne s’agit pas de défendre la liberté d’expression, mais d’utiliser le drame vécu par Mila pour dénoncer les musulmans de ce pays et camoufler un discours de haine à l’égard d’une communauté de croyants rendus ainsi collectivement complices des agresseurs. L’extrême droite réduit l’affaire Mila à cette seule facette, sans jamais rappeler les insultes homophobes dont Mila est victime. La défense de la liberté de penser a bon dos. Ainsi, le fait que certains, par électoralisme ou par lâcheté, ne défendent pas cette jeune femme attaquée à cause de son orientation sexuelle et de sa liberté de ton, de parole et de pensée, est encore plus grave.

Charb, Cabu, Wolinski, Tignous, Cayat, Paty, et d’autres encore : la liste des victimes que le terrorisme islamiste a fait taire par les armes est amèrement longue. Tout doit être fait pour que le nom de l’adolescente ne s’ajoute pas à cette liste.

Les silencieux, les relativistes, ceux qui trouvent que Mila « exagère », ceux qui mettent sur le même plan agressée et agresseurs sont des lâches. Ils contribuent au harcèlement généralisé dont elle est victime ; ils lui mettent une cible dans le dos en admettant que les harceleurs pourraient avoir une part de vérité ; ils confortent les intolérants, les violents et les assassins.

En France, chacun a le droit d’avoir une religion et d’exercer librement son culte ; chacun a le droit d’être athée. En France, nous avons fait en sorte qu’il n’y ait plus de religion(s) d’État ; le blasphème n’y existe pas (cette catégorie n’a d’ailleurs aucune raison d’être où que ce soit). Nous faisons la différence entre le croyant et la croyance : le croyant a des droits, la croyance n’en a pas. N’importe qui peut critiquer une religion quelle qu’elle soit, bafouer et dénigrer ses dogmes ou ses rites. Le sacré ne regarde que celui qui croit, et cela est une composante non négociable de la liberté d’expression.

La République se fonde sur la primauté de la souveraineté populaire face à aux tentatives d’imposer un « droit divin » : le Peuple a fait la loi, au nom du Peuple on dit le droit et on rend la Justice. Cela seul compte ! Respecter les principes fondamentaux républicains devrait nous protéger tous.

La Gauche Républicaine et Socialiste réaffirme son attachement à la liberté d’expression, à la liberté de conscience, et son soutien plein et entier à la jeune Mila.

Nous avons besoin de vous !

Quelles que soient vos compétences, si vous touchez votre bille en droit, en bricolage, si vous aimez écrire, si vous êtes créatif… vous pouvez prendre part à des actions et ateliers près de chez vous ou encore nous envoyer vos vidéos, vos dessins pour des affiches etc.