« Transferts de nos données personnelles aux États-Unis : pourquoi la Commission est-elle si laxiste ? »

Sans sourciller, comme ça, presque entre deux portes, la Commission de Bruxelles vient d’autoriser le transfert des données personnelles des Européens vers les États-Unis. Qui a bien négocié ? Et qui a fermé les yeux ? Et, surtout, est-il trop tard pour faire machine arrière ? Marianne fait le point sur le dossier, alors que la Commission européenne a lancé en décembre dernier un processus d’adoption de la décision d’adéquation* concernant le cadre de protection des données entre l’Europe et les USA. Emmanuel Maurel y revient longuement sur ce dossier.

Qu’est-ce qui a poussé Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, à passer un accord avec Joe Biden, en septembre, pour que les données personnelles de tous les Européens soient transférées aux États-Unis ? « Cela fait partie des choses que l’on ne s’explique pas, assure Emmanuel Maurel, député européen rattaché au groupe de gauche. Cet accord ne respecte pas le RGPD [Règlement général sur la protection des données] et nous pensions que les Allemands, qui sont très tatillons en matière de droit, s’y opposeraient. Ne mentionnons pas la France, qui parlait d' »autonomie stratégique », d' »indépendance industrielle » et de “cloud européen”. »

Côté américain, l’appropriation de ces données, de tous les éléments se rapportant à notre vie publique comme privée, fait sens. Les Gafam comme les sociétés d’Elon Musk réclament – pour bâtir le nouveau monde de l’intelligence artificielle, qui doit prédire les besoins des individus et, parfois même, les inventer – de disposer des données personnelles d’un maximum d’individus. « C’est l’or noir de ces sociétés : sans lui, Musk ne peut pas construire son rêve poursuit notre eurodéputé. Joe Biden a considéré – c’est tout à fait certain – que les intérêts économiques des Gafam prévalaient sur tout le reste. Il y a forcément un lien entre cet accord et le lancement de cette “intelligence artificielle”. »

Côté européen, l’abandon de cette souveraineté numérique ne répond à aucune logique, au regard des engagements pris, sauf si l’on applique la nouvelle clé de compréhension issue de la guerre russo-ukrainienne. « La Commission européenne, dans sa très grande majorité, considère que l’on a besoin du soutien des États-Unis non seulement pour aider les Ukrainiens, mais aussi pour nous protéger, estime Emmanuel Maurel. Il convient, dès lors, d’être solidaire de leur politique dans tous les domaines. Quitte à prendre des dispositions irréversibles en remettant les questions de fond à plus tard ! » Les pays scandinaves, les pays de l’Est, proches géographiquement de la Russie, sont sur cette ligne, comme l’Italie de Giorgia Meloni, qui se fait d’autant plus atlantiste qu’elle veut légitimer son gouvernement, dominé par l’extrême droite. « N’oublions pas non plus que ce pays – comme l’Allemagne – compte sur les États-Unis pour suppléer ses besoins en gaz » renchérit Philippe Latombe, député MoDem.

ADIEU LE CLOUD EUROPÉEN

Les entreprises européennes participent également de ce soutien à la politique économique américaine. La SAP SE, société allemande en pointe dans le domaine du progiciel, veut développer ses relations avec les sociétés américaines dont elle est le fournisseur. « Elle pèse d’autant plus fort sur son gouvernement que l’Allemagne fonctionne en écosystème ouvert avec ses entreprises, à la différence du système français, où tout cela est plus feutré » considère Philippe Latombe. Et le français Thales, qui vient de racheter OneWelcome, un logiciel de gestion des identités et des accès clients, outil essentiel dans le monde de la cybersécurité, serait aussi favorable à l’accord Biden-von der Leyen. Une société de cyber­sécurité doit théoriquement exploiter le plus de données personnelles possible pour être efficace. Si l’on sait que 42 % des entreprises françaises sont dotées aujourd’hui d’un système de protection cyber et que 72 % le seront dans dix ans, la position de Thales s’explique mieux. « N’oublions pas non plus que Thales a passé un partenariat avec Google pour créer un cloud de confiance, ce qui condamne la naissance d’un cloud européen pourtant appelé de ses vœux par Emmanuel Macron. Le mal était déjà fait » tranche Emmanuel Maurel. Cap Gemini et Orange, qui ont également passé un accord avec Microsoft en vue de créer un cloud de confiance, ne sont pas non plus hostiles à cet arran­gement. Pour leur défense, ces sociétés françaises assurent qu’elles conserveront la maîtrise de la clé d’accès à nos données.

Isolée sur la question, la France reste donc bien silencieuse sur ce dossier crucial. Thierry Breton, commissaire au Marché intérieur, que l’on a vu plus bavard sur le sujet, n’a pas fait connaître sa position. On sait seulement qu’il ne veut pas participer aux négociations informelles menées par Valdis Dombrovskis, commissaire en charge de l’Économie et du Commerce, et par la vice-présidente chargée du Numérique, Margrethe Vestager, avec les Américains Antony Blinken, secrétaire d’État, et Gina Raimondo, secrétaire au Commerce. Breton ne cautionnerait pas ces rencontres, qui se déroulent en dehors de tout mandat délivré par les États membres. Un peu de courage politique ne nuirait pas. Il est tout de même question de commerce mondial, de normes technologiques et d’administration des données. Rien ne semble donc contrarier l’adoption, au début de 2023, d’un accord dit « d’adéquation » sur le transfert des données. Celui-ci sera d’autant plus facile à mettre en œuvre qu’il ne répond pas, contrairement à un accord commercial, à la règle de l’unanimité.

Le terme « adéquation » prête d’ailleurs à sourire, car il suggère qu’il puisse y avoir convergence entre le droit américain et le droit européen. Ce qui n’est pas le cas. Cela provoque donc des réactions. Ainsi, Maximilian Schrems, l’avocat autrichien qui a fait invalider par la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) deux accords précédents ­passés avec les États-Unis sur le même thème, le « Safe Harbor », en 2015, et le « Privacy Shield », en 2020, déclare : « On a vraiment l’impression que la Commission européenne prend sans cesse des décisions identiques sur la question, en violation de nos droits fondamentaux s’emporte le défenseur européen de la vie privée, fondateur de l’association None of Your Business (« Ce n’est pas votre affaire »). Je ne vois pas comment tout cela pourrait survivre à l’examen de la Cour de Justice. C’est un peu comme si les banques suisses vous disaient : “Donnez-nous votre or”, et que, une fois que vous leur auriez transféré, elles vous informeraient que vous n’avez plus aucun droit dessus car vous êtes étranger. » Me Schrems précise en guise d’explication : « Nous avons un conflit de juridictions : l’une, européenne, qui demande la protection de la vie privée ; et l’autre, américaine, qui prône la surveillance. Les sociétés qui gèrent les centres de données sont broyées entre les deux systèmes. » Et le député européen Emmanuel Maurel de renchérir : « Depuis l’adoption du Patriot Act, nous ne sommes plus certains que nos droits fondamentaux soient respectés par les États-Unis. Nous n’avons pas, avec les Américains, la même notion de ce que l’on appelle la sécurité. Nous n’avons pas, en conséquence, assez de garanties sur les protections et les droits de recours. Aux États-Unis, quand vous saisissez la justice sur ces problèmes de protection de données, vous devez saisir au préalable un médiateur, qui est un fonctionnaire des services des renseignements. » Me Schrems prédit : « La surveillance de masse va continuer, mais, à la fin, l’opinion de la CJUE l’emportera et tuera une nouvelle fois cet accord. »

LE PIÈGE PARFAIT

Le temps de la justice n’étant pas, et de très loin, aligné sur celui des technologies, 90 % des données personnelles des Européens auront été transférées aux États-Unis quand la Cour rendra son verdict. C’est le piège parfait, celui qui ne laisse aucune échappatoire, mais donne l’impression qu’on nous a donnés, à nous, les Européens, notre chance. Il sera alors certain que les entreprises du Vieux Continent ne voudront plus changer leurs modes de fonctionnement, leurs codes sources, investir du temps et de l’argent pour rapatrier et gérer les données personnelles. « C’est pourquoi je demande que des préconisations soient prises au moment où nous saisirons la Cour afin d’empêcher que le transfert des données soit irréversible, souhaite Emmanuel Maurel. À écouter les députés, aussi longtemps que le conflit russo-ukrainien perdurera, cela ne pourra pas être le cas. »

ON NE BADINE PAS AVEC LE CONSENTEMENT

Accepter de partager ses données personnelles, c’est permettre à des entreprises de connaître l’intégralité de sa vie. Famille, réseau d’amis, déplacements, loisirs, situation médicale, maritale, tout peut être connu à partir de la géolocalisation, de l’historique de recherche, de la lecture des courriels comme des messages postés sur les réseaux sociaux. Sur le marché mondial des données personnelles, ces informations ont un prix. Les sociétés qui les achètent les utilisent pour vendre de la publicité, des produits ou pour influencer des choix culturels et politiques. En acceptant l’installation de cookies, c’est-à-dire de fichiers espions, l’internaute autorise que sa personnalité, sa vie dans toutes ses composantes, soit vendue aux enchères à des sociétés qui vont la monnayer. L’obtention du consentement exigé par le Règlement européen sur la protection des données est la seule garantie dont l’internaute dispose. Google avait installé sur les 310 millions de téléphones Android un identifiant unique facilitant l’envoi de publicités ciblées sans que les internautes puissent s’y opposer, mais la firme de Mountain View a dû renoncer à l’exploiter pour respecter le droit européen, suffisamment exigeant en la matière. En janvier 2022, la Commission de la protection de la vie privée, autorité belge de protection des données, dont la décision s’impose à toutes les Cnil en vertu du principe du « guichet unique », a exigé que le consentement de l’internaute ne soit pas obtenu par défaut, sans que celui-ci soit clairement informé. Si tel est le cas, toutes les données recueillies à son insu doivent être supprimées.

Boulangerie, artisanat et énergie

C’est la nouvelle année, le temps des « bonnes résolutions » et le gouvernement vient donc de découvrir que les boulangeries françaises étaient au bord de l’asphyxie. Pourtant, depuis plusieurs semaines et même plusieurs mois, il n’était pas bien compliqué de s’en rendre compte pour qui va lui-même acheter son « pain quotidien » : les prix flambaient (au rythme de plusieurs augmentations pour un même produit en quelques mois), certaines boutiques choisissaient de fermer leur devanture une journée supplémentaire par semaine quand d’autres mettaient tout simplement la clef sous la porte… après les « déserts médicaux », les pénuries de médicaments, nous voici à l’orée de créer des « déserts boulangers ».

Le prix du pain est rentré dans l’imaginaire des Français comme ce qui a déclenché la Révolution (la grande et aussi les suivantes) – et on se souvient du slogan du Front Populaire « Pain, Paix, Liberté » –, tous les exécutifs sont conscients que ce sujet est à la fois symbolique et terriblement concret : le pain doit rester accessible, et pas trop cher. Quand la baguette ne coûte plus 1€, mais 1,10€ ou 1,20€, les Français le voient tout de suite ; souvent la boulangerie est le dernier commerce ouvert dans un village, sa disparition provoque automatiquement un sentiment d’abandon, sentiment d’abandon (et perte de pouvoir d’achat) qui voici un peu moins de 5 ans avait nourri le mouvement des « Gilets Jaunes ».

Panique gouvernementale

Voici pourquoi en catastrophe, Bruno Le Maire a mis en scène mardi 3 janvier 2023 sa mobilisation au secours des artisans boulangers (il aura donc fallu attendre la rentrée scolaire), dans un point presse qui a suivi un échange avec les représentants du secteur de la boulangerie. Les 33 000 artisans auront donc l’immense plaisir de recevoir « courrier personnalisé » pour « leur préciser les aides auxquelles ils ont droit ».

Rassurez-vous d’autres mesures suivent… Les boulangers pourront « demander le report du paiement de leurs impôts et cotisations sociales » (merci la sécurité sociale) ; ils auront droit à une remise sur l’électricité « pouvant aller jusqu’à 40% de remise sur leur facture » ; ils pourront enfin résilier leurs contrats d’énergie sans frais, lorsque l’évolution des prix pratiqués sera « prohibitive » – les experts comptables des artisans concernés devront faire preuve de talent et de subtilité pour définir le niveau à partir duquel cette évolution sera « prohibitive » (on ne sait toujours pas s’il y aura un décret pour encadrer la mesure). Dominique Anract, le président de la Confédération Nationale de la Boulangerie-Pâtisserie Française, qui avait participé à la réunion du matin s’est évidemment réjoui de ces nouvelles mesures, mais il lui fallait forcément nuancer : « pour une facture (d’énergie) qui va être multipliée par dix ou douze, rien ne sera suffisant »… c’est mieux que si c’était pire, donc.

Nous avons également eu droit à une nouvelle saison de #BrunoDemande : « Aujourd’hui, je le dis clairement : les fournisseurs n’aident pas suffisamment les boulangers et les PME » avant de rencontrer les « énergéticiens » dont Engie, EDF ou TotalEnergies. Il leur « demande » de « faire plus, de faire mieux, et de le faire tout de suite ». Alors même que début octobre 2022, ils ont signé une charte les engageant à protéger les entreprises de la hausse des pris de l’énergie, « un certain nombre de fournisseurs ne respectent absolument pas les engagements qu’ils ont pris », selon l’aveu du ministre de l’économie lui-même. S’ils ne « corrigent » pas le tir, Bruno promet de prendre « les mesures nécessaires pour faire respecter ces engagements et nous assurer que les fournisseurs jouent aussi le jeu » : « On peut toujours prélever davantage sur les fournisseurs d’énergie que ce que nous faisons aujourd’hui ». Dans le budget pour 2023, le gouvernement a mis en place un mécanisme qui doit lui permettre de collecter une partie des bénéfices des énergéticiens et lui rapporter, selon ses estimations, 11 milliards d’euros. Pourquoi ne pas agir maintenant alors que les défaillances sont ouvertement constatés ? Sans doute pour la même raison que les super-profits d’un certain nombre d’entre eux ne sont pas taxés, car ils n’existeraient pas.

Enfin, « dans chaque département, dans chaque préfecture, un point d’accueil des boulangers, avec des équipes dédiées, qui non seulement accueilleront tous les boulangers qui ont des questions et qui se demandent comment bénéficier des aides mais qui viendront aussi à la rencontre des boulangers » a souhaité préciser le même jour sur France Info, la première ministre Élisabeth Borne. Sauf que son ministre déplorait quelques minutes plus tard « nous avons à peine une cinquantaine de PME par jour seulement, je ne parle même pas des boulangers, qui viennent solliciter une aide à laquelle ils ont droit » : dans des préfectures et sous préfectures qui ne disposent déjà pas des moyens nécessaires pour effectuer correctement leurs missions habituelles, on doute que les boulangers se précipitent, alors qu’ils se plaignent déjà du caractère ubuesque des procédures à respecter pour obtenir ces aides – une dépense d’« énergie supérieure aux quelques centaines d’euros obtenues en bout de course » (sans jeu de mots).

Concours Lépine du faux-nez politique

Les boulangers vont-ils marcher sur Paris ? Certains en rêvent. Le 23 janvier, un Collectif pour la survie de la boulangerie et de l’artisanat appelle à manifester dans la capitale. Un autre collectif, La boulangerie à poil, va participer. Ces professionnels invitent d’autres artisans à les rejoindre et accusent l’État de ne pas les soutenir suffisamment. Ils affirment qu’ils veulent « changer le cours de l’histoire », rien de moins. On sent la reprise des codes du mouvement des « Gilets Jaunes » que nous évoquions plus haut.

Or, Frédéric Roy, le boulanger niçois qui a créé le premier de ces collectifs, est ouvertement engagé en politique. Dans ses interviews, il ne se contente pas de montrer ses factures. Il a tout un discours sur l’échec de l’Europe dans le domaine de l’énergie, et sur la souveraineté française qu’il faudrait retrouver. Qui le soutient ? Localement, Eric Ciotti, le député des Alpes-Maritimes, qui est aussi… président de LR. Il est particulièrement savoureux de voir LR – qui a accompagné toutes les décisions néolibérales et technocratiques décidées par le Conseil et la Commission européennes (donc le gouvernement français) – se révolter aujourd’hui… si quelques-uns peuvent parfois (difficilement) se prévaloir d’une lointaine filiation gaulliste ou séguiniste, pour la plupart on se vautre dans la caricature.

La palme revient sans doute à Valérie Boyer, sénatrice LR des Bouches-du-Rhône qui fut députée pour le même camp de 2007 à 2020, qui citant Loïk Le Floch-Prigent – « Le fait de produire de l’énergie d’origine nucléaire à 40 €, de la vendre à 42, et ensuite de la racheter le 21 juillet à 397 € devrait faire s’interroger tous les Français » – conclue par « Le fiasco énergétique de Hollande-Macron » : pour quelqu’un qui a voté en 2010 la loi NOME (qui introduit le processus aboutissant à l’impasse actuelle) à la demande du président Nicolas Sarkozy, c’est assez gonflé… Or la flambée des prix de l’énergie qui étrangle les boulangers, les TPE et plus généralement les Français, trouve aussi et d’abord son origine ici.

Démondialisation et marché européen

Les boulangeries avaient déjà subi une poussée de fièvre sur les prix fin 2021-début 2022 à cause de l’augmentation des prix du blé. On avait même vu dans certaines boutiques s’afficher des graphiques explicatifs pour justifier une première augmentation de 10 % de la « baguette tradition ». La guerre en Ukraine – qui a évidemment aggravé le phénomène – ne l’explique pourtant pas ou pas totalement. Depuis plus de 20 ans, le blé est une « matière première » hautement spéculative… Or aujourd’hui, si un producteur français voulait vendre à des prix plus accessibles que les cours actuels du marché, il ne pourrait pas car ce marché justement est mondialisé : tout est négocié à … Chicago. La construction d’un marché international régulé des céréales n’est évidemment pas à remettre en cause – c’est un des acquis des grands objectifs de régulation de la communauté internationale construite après la seconde guerre mondiale –, mais justement la « régulation » n’existe plus ou peu car la réglementation a sauté ligne par ligne avec le processus de libéralisation des marchés engagé depuis les années 1990. La « mondialisation heureuse » des néolibéraux aboutit au dysfonctionnement total du marché… Mais là, l’exécutif français reste coi, au niveau international comme au niveau européen.

L’échelle européenne, parlons en justement… car, en pratique, face à la crise, le gouvernement répond avec des aides ciblées en craignant la contagion des revendications. La peur n’ayant jamais écarté le risque, déjà, d’autres professionnels réclament, eux aussi, des aides supplémentaires. Les restaurateurs expliquent qu’ils ont du mal, comme les boulangers, à payer leur facture. Le gouvernement macroniste craint donc d’avoir ouvert la boîte de Pandore, alors que, depuis quelques mois, il essaie de diminuer son soutien à l’économie hérité de la crise sanitaire. Officiellement, la politique du « quoi qu’il en coûte » est derrière nous – l’État n’en aurait plus les moyens au moment où les taux d’intérêts nominaux remontent. Comment soutenir alors ceux qui ont des problèmes, sans faire chaque jour de nouveaux chèques ?

La solution est systémique et c’est celle que le gouvernement et la haute fonction publique de Bercy – aveuglés par le foi néolibérale – se refusent encore à mettre totalement en œuvre : c’est exiger (après avoir défendu l’inverse pendant des décennies) la fin du « marché » européen de l’énergie. La sortie du traité de la charte de l’énergie ne saurait satisfaire les Français avides de solutions concrètes. Pourquoi proposer au TPE et aux artisans de revenir temporairement aux tarifs réglementés (la gauche voudrait y adjoindre les collectivités), quand on sait que c’est le système actuel qui dysfonctionne en soi ?

Nous avons longuement écrit sur le sujet et vous pourrez vous référez à nos articles… l’idée fait son chemin pourtant, et il est un moment où personne ne pourra encore la différer : il fallait écouter le journaliste Jean-Sébastien Ferjou, le mardi 3 janvier au soir dans l’émission Les informés de France Info, expliquer que, tout en se revendiquant libéral et affirmant « croire au marché », lorsqu’il n’existe qu’un seul producteur – EDF en l’occurrence – il n’y a pas de marché et que les dispositifs mis en place par les institutions européennes pour en créer un artificiellement étaient tout simplement absurdes.

Espérons que l’inéluctable ne soit donc pas mis en œuvre trop tard.

Frédéric Faravel

Tensions commerciales Europe États-Unis : la Commission doit riposter

tribune publiée par Emmanuel Maurel dans Libération le 9 décembre 2022

Le «green deal made in USA» constitue une énorme incitation à délocaliser les investissements hors d’Europe. La commission européenne doit sortir de son coma idéologique et protéger ses intérêts, estime le député européen Emmanuel Maurel.

Les relations commerciales entre l’Union européenne et les Etats-Unis se sont subitement tendues, au point d’être portées sur la place publique par la Commission, mais aussi par l’Allemagne et par la France, à l’occasion de la promulgation de l’«Inflation Reduction Act» (IRA). Ce plan d’une ampleur sans précédent prévoit 370 milliards de subventions aux entreprises établies outre-Atlantique pour accélérer la transition énergétique et écologique.

Les Européens ont toutes les raisons de craindre l’IRA. Non seulement ce programme subventionne les entreprises engagées dans la lutte contre le changement climatique, mais il conditionne les aides à la fabrication de composants clés des véhicules électriques et à leur assemblage sur place. Ce «green deal made in USA» constitue donc une énorme incitation à délocaliser les investissements hors d’Europe, au moment précis où elle est frappée de plein fouet par la crise de l’énergie.

L’IRA fera probablement l’objet d’une plainte de l’Union européenne devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Mais cette démarche n’a aucune chance d’aboutir. En effet, les Etats-Unis peuvent bloquer toute décision défavorable en faisant simplement appel, car le mandat des juges américains siégeant à l’OMC est expiré et ils refusent de les remplacer.

Comportement unilatéral et dominateur

La seule riposte logique – et efficace – de l’UE serait de faire la même chose que les Américains. Eux savent se donner les moyens de ne dépendre de personne. Sur les grands enjeux – finance, écologie, numérique, innovation technologique, politique industrielle –, les Etats-Unis mènent la course en tête et entendent ne céder aucun pouce de terrain. Pire : leur comportement unilatéral et dominateur montre qu’aux yeux des élites politiques, économiques et technocratiques américaines, il n’y a rien de mal à conserver leur leadership en affaiblissant jusqu’à ses plus proches alliés.

Pour ma part, je ne reproche pas aux Etats-Unis de protéger leurs intérêts… dès lors que nous protégeons aussi les nôtres ! Mais à Bruxelles, la dévotion de certains dirigeants au libre-échange a franchi toutes les limites du fanatisme. Margrethe Vestager, commissaire chargée d’une concurrence qui n’existe plus depuis le vote de l’IRA, s’est empressée de déclarer son hostilité à toute mesure de réciprocité européenne, dénonçant par avance toute «course aux subventions».

Avec Valdis Dombrovskis, commissaire au commerce, elle dit non au «Buy European Act» prôné par la France et soutenu par le ministre allemand de l’Economie, Robert Habeck ; et non à tout programme de subventions européennes équivalant au programme américain. A leurs yeux, tout peut être sacrifié sur l’autel du libre-échange et de la relation transatlantique, notre industrie, nos emplois, nos compétences et par extension «l’autonomie stratégique européenne» dont on nous rebat sans cesse les oreilles.

Paillasson européen

Les Etats-Unis s’affranchissent du libéralisme mercantile si cher à Margrethe Vestager et Valdis Dombrovskis ? Washington acte brutalement la fin de la mondialisation en s’essuyant sur le paillasson européen ? Qu’à cela ne tienne : coopérons avec les Américains, répondent nos commissaires, et acceptons de nous plier à leurs conditions. Ils ont même inventé un endroit pour ça : le Trade and Technology Council (TTC), lancé à Bruxelles en juin 2021 en présence de Joe Biden, deux semaines avant que l’Union européenne «suspende» la taxe sur les Gafa et avalise ainsi leur impunité fiscale. Le «T» de Trade est l’incubateur d’une relance des négociations en vue d’un accord commercial transatlantique. Et sous couvert de «dialogue» et «d’échanges», le «T» de Technology institutionnalise la prédominance américaine sur le numérique. Tout cela sans validation par le Parlement européen.

Dans l’indifférence du public à l’égard du quotidien diplomatique, le TTC avance tranquillement sur des questions essentielles, où l’Europe est en retard : intelligence artificielle, identité numérique, Internet des objets, infrastructures de transmission des données, normes de chargement des voitures électriques, mais aussi contrôle des exportations, etc. Cette instance «supra-supranationale» décide de tout sans que personne n’en sache rien. Le seul dirigeant européen à s’être montré ferme à l’égard de cette anomalie démocratique est Thierry Breton, qui a refusé de participer à la dernière réunion, en protestation contre la politique commerciale américaine. Reste à savoir s’il sera suivi. Cette confusion n’est pas à l’avantage de l’Union européenne, c’est le moins que l’on puisse dire.

Il est grand temps que la Commission mette de l’ordre en son sein, sorte de son coma idéologique et revienne au réel. Accumuler les concessions aux Américains ne nous sera d’aucun secours. Et vouloir à tout prix ressusciter une mondialisation libérale tuée par les Etats-Unis et par la Chine, en s’accrochant désespérément aux règles de l’OMC, se paiera du prix de notre indépendance et de notre liberté.

Intervention de la Gauche Républicaine et Socialiste au congrès du Parti de la Gauche Européenne à Vienne

Vienne 9-11 décembre 2022, Prononcé par Mathieu Pouydesseau

Chers camarades, bonjour.

La Gauche Républicaine et Socialiste est un jeune parti en France, créé il y a un peu plus de trois ans, défendant l’héritage de la grande Révolution française, pour une République sociale et laïque, cadre de l’émancipation de toutes et tous et, par un État fort, de services publics, la protection des biens communs, et un partage équitable.

Le mercantilisme merkellien est au cœur de la construction ordoliberale européenne. Elle est fondée sur trois exploitations :

  • La première, c’est celle des travailleurs européens. La concurrence, c’est la baisse des salaires, la destruction des services publics, des systèmes mutualistes de protection contre les accidents de la vie comme les retraités, l’assurance chômage, l’assurance maladie et la santé publique.
  • La seconde exploitation, c’est celle des travailleurs du monde entier. Que ce soit par l’importation de main d’œuvre formée dans d’autres pays, les privant de leurs talents, dans droit civique ou citoyen puisque étrangers, sans culture syndicale car venant de pays autoritaires, ou que ce soit par l’alliance avec des dictatures! Angela Merkel a toujours privilégiée le “Wandel durch Händel” avec le fascisme russe où les exploitations chinoises de leur travailleurs. Le progrès par le commerce, tu parles d’une bonne fable ! Regardez les dortoirs des usines Apple ou les travailleurs forcés !
  • La troisième exploitation c’est celle du capital naturel, qui paraît gratuite aux capitalistes, et qui nous mène à une crise du vivant, au réchauffement et ses conséquences, aux pénuries de matières premières.

La France ici fut une des cibles principales en Europe, avec la Grèce touchée bien plus durement, pour liquider notre modèle de République Sociale, notre modèle laïque et républicain, nos systèmes issus du consensus de la Résistance au nazisme. L’état de service public à la française devait disparaître sous les coûts du mercantilisme merkellien.

Le couple franco-allemand, quelle autre bonne blague !

Depuis 1972, camarades, le facteur travail a perdu 25 points dans le partage mondial de la valeur ajoutée. Même l’OCDE, depuis 2012, s’en inquiète ! Et depuis, cela s’est accéléré avec la pandémie et l’inflation.

Or, chers amis, le capitalisme porte la guerre comme la nuée porte l’orage, disait Jean Jaurès.

Les contradictions de l’accumulation du capital la plus forte de l’histoire récente combinée à la destruction du vivant entraîne inéluctablement la guerre.

L’impérialisme fasciste russe fut longtemps allié de Merkel et du capitalisme allemand. Même le ministre écologiste Habeck annonçait en octobre 2021 une augmentation des importations de gaz russe pour “assurer la transition énergétique” et accélérer l’arrêt du charbon, énergie toujours utilisée avec l’arrêt du nucléaire.

Or là aussi, Merkel et son mercantilisme voulait non seulement une énergie carbonée pas chère, mais aussi détruire l’avantage compétitif construit par l’investissement public en France avec le nucléaire. Il n’y avait rien d’écologiste dans cette décision, c’était le cynisme du mercantilisme allemand.

Le besoin d’une alternative est vital au monde et à l’humanité !

Elle doit être construite sur un pacte majoritaire qui n’est pas l’addition de minorités, mais fondée sur la force universelle, internationale, celle qui n’a pas les relais des médias concentrés par les industriels, qui n’a pas les relais des militaires, le Travail !

Car les riches, ils s’en fichent si leurs salariés, les précaires, les gens dépendant de leur travail, soient genrés, racisés, tant qu’il y a des marges à gagner, des dividendes à distribuer.

Salariés modestes, classes moyennes en déshérence, ruraux et urbains, sont en réalité des alliés naturels parce qu’ils ont tous en commun le travail comme source de leur revenu et comme organisation de leur valeur sociale.

Les riches et le libéralisme refusent l’idée de la vie.

Ce sont des forces de mort.

Car ils la refusent pour eux mêmes, leur propre destin inéluctable de leur mort, qu’ils essaient de nier, inventant des châteaux sur Mars, le trans humanisme, les mythes de leur éternité, au prix s’il le faut de la mort de tout le reste, des salaires, des employés, des animaux, des végétaux.

Et c’est pourquoi ils ont besoin du fascisme aujourd’hui! MAGA, AfD, RN en France, Meloni en Italie, en Suède, déjà au pouvoir dans les oligarchies russes ou islamistes: partout ils progressent. Ils ont besoin du bigotisme, et de l’intégrisme religieux, qu’il soit chrétien, islamiste, hindouiste ou bouddhiste, ils ont besoin des haines religieuses et des radicalismes religieux. Ils veulent liquider les lumières et la révolution française de 1792!

En France, les attaques des différents côtés de la séparation des églises et de l’état, les atteintes répétées à la laïcité, l’affaiblissement systémique de l’enseignement public et gratuit servent exactement ce même but : la progression des fascismes religieux. Islamofascisme comme fascisme évangélique, hindou nationalisme genocidaire de Modi en Inde ou haine ethnicoreligieuse contre les Oighour : partout le fascisme utilise les fois et les superstitions.

Il n’y a pas de lutte contre le fascisme sans lutte contre les intégrismes religieux ! Toute lutte antifasciste est une lutte laïque !

Notre rôle est de marteler le message du travail!

Notre rôle est de marteler le message de la juste part de son travail dans le partage des richesses, de la démocratie comme la condition de la médiation et de l’organisation sociale garantissant la paix, et le partage équitable. C’est ce que Marx voulait pour le Royaume Uni des années 1860, c’est ce que Rosa Luxembourg réclamait de maintenir dans sa critique de la révolution bolchevique de 1918.

Pour permettre la démocratie d’agir sur le monde réel, il faut un État fort, de bien commun, nationalisant les monopoles privés, interdisant la concentration des médias par les industriels, s’appuyant sur une fiscalité confiscatoire sur les hauts revenus.

Comment faire, nous demandons nous ici même?

Et bien, il nous faut lancer des campagnes pour remettre le travail au cœur du débat publique. Il faut marteler les pertes de 25 points du travail au profit du capital dans le revenu mondial, y compris en Chine, depuis la fin des trente glorieuses.

Il faut marteler la valeur travail !

Nous proposons de lancer dès maintenant une campagne pour l’indexation de tous les salaires européens sur l’inflation!

C’est la campagne pour montrer l’identité d’intérêt des salariés, modestes ou moyens, ouvriers ou employés, précaires ou indéterminés.

Augmentons les salaires, et protégeons les de la cupidité du capital.

Merci camarades de votre attention.

Raison et liberté de conscience sont nos seules boussoles

Communiqué de la Gauche Républicaine et Socialiste, jeudi 8 décembre 2022

À l’occasion de la Semaine de la Laïcité et de la Journée nationale de la laïcité ce vendredi 9 décembre 2022, la Gauche Républicaine et Socialiste réaffirme son attachement aux principes républicaine nés des Lumières et de la Révolution française, et à la loi de 1905 concrétisant la séparation des Églises et de l’État. C’est pour nous, militants républicains de gauche, un principe intangible et inscrit dans le marbre.

La laïcité est l’outil d’une triple libération : la libération du sujet accédant à l’indépendance intellectuelle et morale par l’exercice de la Raison ; la libération de l’État dégagé de la pression des religions et de leurs organisations ; la libération des religions échappant à la tutelle des autorités politiques qui voudraient en faire des instruments.

Reconquérir la République laïque est un combat social de tous les instants, en France et dans le monde. Nous voulons :

  • L’application de la loi de 1905 (rien que la loi mais toute la loi) ;
  • La suppression du Concordat en Alsace-Moselle et les dispositions contraires à la laïcité dans les départements et régions d’Outre-Mer ;
  • Le rétablissement et le renforcement des outils et moyens nécessaires pour combattre les dérives sectaires comme la MIVILUDES ;
  • L’interdiction des écoles privées hors contrat ;
  • La réorientation des financements publics vers l’école publique à l’issue d’un plan organisant le retour au principe « école publique : financement public ; école privée : financement privé » ;
  • La mise en œuvre d’un plan de relance de l’éducation populaire laïque dans l’ensemble de nos territoires ;
  • La formation de tous les agents de la fonction publique sur les questions de la Laïcité.

La Gauche Républicaine et Socialiste apporte son soutien aux événements qui ont lieu en France métropolitaine et outre mer. Elle appelle ses militants à s’y associer et à prendre toute leur part pour marquer cette journée nationale.

Fin de comédie amère pour l’examen du budget au Sénat

La droite et la macronie s’accordent en matière budgétaire sur deux mantras : il faut baisser les impôts de production ; il faut réduire la dépense publique…

Peu importe l’absence totale de résultats en matière économique du premier verset – voilà près de 30 ans que cotisations sociales et impôts sont baissés sans jamais améliorer notre compétitivité et notre balance commerciale – les cadeaux fiscaux aux dirigeants d’entreprises, aux actionnaires, aux plus aisés de nos concitoyens (le premier quinquennat Macron n’en a pas manqué, le second poursuit dans la lignée) continuent de s’empiler. Cette année, le projet de budget sort du Sénat comme il y était arrivé en matière de taxation du capital : refus d’ne nouvelle modalité d’imposition des multinationales fondées sur le chiffre d’affaires pour lutter contre l’évasion fiscale ; refus du rétablissement d’une véritable exit tax pour lutter contre les évadés fiscaux ; refus de la taxation des superprofits indispensable mesure de justice fiscale ; refus d’augmenter la taxe sur les transactions financières, la taxation des dividendes versés (44,3 Mds € pour le seul second trimestre de 2022, et ça n’est même pas un record !) ou la taxation des dividendes reçus.

Le deuxième verset implique dans la suite du premier de se priver des moyens nécessaires pour conduire des politiques publiques dignes des défis auxquels est confronté notre pays et des attentes des Français.

Après avoir refusé les propositions de recettes il fallait toute l’inventivité de la droite sénatoriale et du Gouvernement pour expliquer que nos concitoyennes et nos concitoyens allaient voir leurs factures d’électricité exploser cette année de 15%, après une augmentation de 4% l’année précédente, après une envolée de 50% sur les 10 dernières années. Les Français payaient, avant la guerre en Ukraine, les décisions coupables d’ouverture au marché de l’énergie et les sous-investissements chroniques dans l’énergie nucléaires. Le bouclier énergie n’y peut rien, même à 45 milliards d’euros… Si la France se dotait des moyens nécessaires nous pourrions répondre à ces défis dans l’urgence et même entamer la réparation nécessaire des erreurs structurelles qui se sont accumulées sous l’effet de 15 années de politiques néolibérales.

Une satisfaction cependant : les sénateurs n’ont pas poussé le vice jusqu’à cautionner le scandale budgétaire sur la mission « Cohésion des territoires », qui préside aux crédits de la politique du logement de la la politique la ville. Peut-être que sur ce sujet, à propos duquel notre camarade Marie-Noëlle Lienemann (en vidéo ci-dessous) porte une parole respectée, les sénatrices et sénateurs perçoivent mieux que sur d’autres la « bombe sociale » en gestation ; c’est d’ailleurs la pire ironie de la situation : l’expression est du ministre du logement lui-même, Olivier Klein, dernier transfuge PS arrivé en macronie, quelques jours à peine avant que la Haute Assemblée ne vote contre cette mission budgétaire… un ministre qui avoue la catastrophe en devenir mais qui a abdiqué l’ambition d’obtenir les moyens nécessaires pour y remédier.

Un dernier mot sur les conditions du débat budgétaire.

La révision constitutionnelle a tendu à sacraliser les lois de programmations des finances publiques qui, sans aller jusqu’à une règle d’or intangible, a contribué à réduire le champ d’expression du Parlement. Le droit d’initiative des parlementaires est de plus en plus réduit à peau de chagrin par une interprétation toujours plus restrictive du « parlementarisme rationalisé » : en réalité, le seul qui peut amender le budget c’est le gouvernement. Par ailleurs, la fixation d’un calendrier contraint a débouché sur des situations ubuesques qui ont obligé les parlementaires des tous les bancs à retirer l’intégralité de leurs amendements dans le cadre de la mission « agriculture, alimentation et forêts ». Comprenez bien qu’il faut se dépêcher d’aller vers un huitième 49.3 à l’Assemblée Nationale ! La démocratie parlementaire en sort un peu plus abimée, on en vient presque à espérer que nos concitoyens ne regardent pas les débats parlementaires pour qu’ils n’aient pas envie de jeter le bébé avec l’eau du bain.

Plus que jamais, l’examen du budget 2023 aura démontré que l’urgence d’une bifurcation en matière de politiques publiques est inséparable d’une profonde refonde de notre démocratie républicaine.

Hausse des péages d’autoroute : non à l’inflation par la rente !

Au 1er février 2023, les péages augmenteront à nouveau de près de 5% en moyenne.

La Gauche Républicaine et Socialiste s’oppose fermement à cette décision inflationniste qui ne profitera qu’aux actionnaires et aux dirigeants des sociétés délégataires et va accroître la rente confiscatoire liée à la privatisation des autoroutes.

Alors que le prix du carburant a explosé et que, pour de nombreux Français parmi les moins favorisés, l’utilisation de la voiture comme moyen de transport ne connaît pas d’alternative, cette décision du gouvernement vient un peu plus contribuer à l’appauvrissement de nos concitoyens résidant en zone rurale et périurbaine. Ces territoires ont été les victimes de 30 ans de déflation des salaires et de désindustrialisation massive. Aujourd’hui, leurs habitants subissent de plein fouet l’inflation. Contribuer à l’augmentation générale des prix pour favoriser les revenus du capital est inacceptable.

Nous réaffirmons la nécessité de renationaliser les autoroutes, afin que les revenus issus des péages ne soient plus accaparés par quelques sociétés et leurs actionnaires, mais qu’ils profitent au contraire au développement de moyens de transport décarbonés.

Le rapport parlementaire de M. Jean-Paul Chanteguet sur les concessions autoroutières (2014)

Le gouvernement disjoncte sur l’énergie

La communication gouvernementale tourne en boucle sur les différents scénarios susceptibles d’éviter les black-out cet hiver.

Les Français ne sont sans doute pas assez économes en énergie, et c’est donc à eux que la communication publique s’adresse en exigeant que « tout le monde » fasse un effort : « mettre le thermostat à 19°C et mettre un pull, c’est quand même pas la mer à boire »… autant de petites phrases suggérées qui font passer les habitants de notre pays pour des irresponsables.

Le Président en appelle donc à une sobriété collective, la Première Ministre monte au créneau et assure le service après-vente tandis qu’Agnès Pannier-Runacher garantit qu’il n’y aura pas de « police des températures ».

Pendant ce temps, face au prix de l’énergie et faute de chauffage, des écoles accueillent des enfants avec des températures à 10 °C.

En même temps, pas besoin de police des températures quand on n’allume pas le chauffage et quand cela fait plusieurs années que nombre de nos concitoyens baissent déjà le chauffage à 19°c , non pour sauver la planète ou éviter la surtension du système, mais parce qu’ils n’en ont plus les moyens ou quand d’autres encore doivent parfois surconsommer pour atteindre les 19°c car vivant dans une « passoire thermique » qui n’est jamais rénovée.

Une situation surréaliste !

Tout ça paraît quand même surréaliste, même si on peut comprendre ce qu’engendre le conflit déclenché par la Russie, on peut raisonnablement se poser la question de notre capacité à être autosuffisants, et même produire pour nos voisins européens une énergie, qui plus est, décarbonée, en tant que 2e puissance nucléaire civile au monde.

Nous possédons aujourd’hui 54 réacteurs pour une capacité de production de 61 GW. Mais 32 réacteurs sont aujourd’hui à l’arrêt pour des opérations de maintenance, ramenant ainsi notre capacité de production à moins de 50 %, soit à peine 30 GW.

Sur l’âge du parc nucléaire français, pas de surprise, on le connaît depuis sa création, mais c’est sur son état qu’il faut se poser les questions…

Cette filière, qui était d’excellence voici encore quelques années, a été mise à la diète politiquement sans qu’une alternative ambitieuse vienne la compenser.

Et c’est tout juste à deux mois de l’élection présidentielle que le chef de l’État annonce une volte-face sur sa politique énergétique. Pour atteindre la neutralité carbone, il veut construire 14 réacteurs EPR et prolonger au-delà de cinquante ans la durée de vie des réacteurs existants.
Encore un exercice de communication à l’heure où les acteurs nucléaires français n’ont pas été capables de mettre en service un seul réacteur EPR.

De même, prolonger au-delà de cinquante ans la vie des réacteurs existants nécessite une maintenance poussée et planifiée.

On a besoin d’énergie, on a une appli!

À la place, on a une nouvelle application, ECOWATT, pour nous prévenir 48 heures avant que nous allons être coupés, mais il n’y aura rien pour nous dire quand ce sera rétabli, les communications ayant de grandes chances d’être à ce moment là elles aussi coupées.
Emmanuel Macron agit en communiquant, en stratège électoral (quoique sur ce point son acuité se soit un peu émoussée), agitant ses dossiers et ses tableurs sans jamais faire la connexion avec le terrain, la logistique, les hommes formés, mais jamais il n’agit en Président.

Gouverner, c’est prévoir, et c’est prévoir autre chose qu’une alternative entre Black Out et délestages en plein hiver !

Antoine Parrot

Soutien à la reprise de Scopelec par une nouvelle SCOP !

Une des plus grandes SCOP de France, Scopelec, est aujourd’hui en difficulté suite à la perte soudaine d’importants contrats avec Orange. L’entreprise est aujourd’hui en redressement judiciaire et son avenir, ainsi celui de ses salariés, se jouera le 8 décembre.

Alors que d’importants acteurs du BTP se sont positionnés pour reprendre l’entreprise avec une forte casse sociale à la clef, les salariés eux mêmes portent un projet pour reprendre leur SCOP … en SCOP.

Au côté des salariés de Scopelec et du mouvement coopératif dans son ensemble qui se mobilise fortement humainement et financièrement, nous apportons notre soutien à Newscope, le projet de reprise porté par les salariés de Scopelec. Ce projet, clair et solide, permet de préserver et pérenniser 1457 emplois dans la nouvelle coopérative. Beaucoup plus que pour les projets de reprise concurrents.

Au delà du cas particulier de Scopelec, cette mobilisation des salariés et la solidarité à l’oeuvre au sein du mouvement coopératif pour soutenir le projet démontrent la résilience, la solidarité, et la priorité portée au maintien de l’emploi et d’un projet économique durable au sein des coopératives.

Donc nous aussi, à la Gauche Républicaine et Socialiste, #NOUSsommesSCOPelec !

Nous avons besoin de vous !

Quelles que soient vos compétences, si vous touchez votre bille en droit, en bricolage, si vous aimez écrire, si vous êtes créatif… vous pouvez prendre part à des actions et ateliers près de chez vous ou encore nous envoyer vos vidéos, vos dessins pour des affiches etc.