Mettons fin à la complaisance à l’égard d’Elon Musk

La France s’est vue confiée par l’assemblée générale des Nations Unies l’organisation du « Sommet pour l’Action dans l’Intelligence Artificielle (IA) », faisant suite à l’adoption à sa 79ème session du « pacte numérique mondial », et aux sommets pionniers ayant déjà eu lieu en Grande Bretagne en 2023 et en Corée du Sud en 2024. Ce sommet aura lieu à Paris, au Grand Palais, les 10 et 11 février 2025, organisé par le palais de l’Élysée.

La feuille de route de ce sommet est à la fois ambitieuse en définissant des objectifs universels, et pusillanime quant aux moyens à mettre en place. Voici les 5 axes de travail :

  • L’IA au service de l’intérêt général,
  • Avenir du travail,
  • Innovation et culture,
  • IA de confiance,
  • Gouvernance mondiale de l’IA.

Son agenda, et la starisation choisie de personnalité controversées du capitalisme technologique libertarien, interrogent tous les démocrates sincères.

En octobre 2024 la mission de préparation annonce souhaiter « lutter contre le mésusage de l’IA », en « s’appuyant sur un consensus scientifique robuste », notamment pour « lutter contre la manipulation de l’information, notamment sur les réseaux sociaux. »

Elon Musk est pourtant annoncé comme l’une des stars de l’évènement qu’Emmanuel Macron souhaite utiliser pour redorer son blason, après ses échecs budgétaires, économiques et politiques, et ses deux défaites électorales consécutives.

Le loup est invité à cuisiner le chaperon rouge !

Nous devons, au nom de la décence et de la protection des libertés publiques, interpeller la présidence française, encore une fois.

Le nouveau ministre américain en charge de « la simplification administrative » a toujours été soigné par le président de la République Française, pensant ainsi attirer l’une des sociétés du magnat de la technologie, Tesla, dans notre pays.

Musk a choisi l’Allemagne, mais le président français Macron continue sa danse du paon.

Nous sommes persuadés que la France, par son histoire, son universalisme, les contributions essentielles de ses chercheurs et ses philosophes sur les concepts clés de l’IA, doit être le moteur en Europe des réflexions sur son déploiement, sa régulation : il s’agit d’un enjeu politique crucial, un enjeu de souveraineté, un enjeu vital pour garantir notre indépendance.

Ce que nous refusons avec force, c’est que soit à nouveau déroulé le tapis rouge pour Elon Musk et ses alliés libertariens ! Celui qui est aujourd’hui l’homme le plus riche du monde n’est pas seulement le premier allié de Donald Trump : il est devenu un acteur politique toxique, ennemi de toutes les lois limitant son pouvoir absolu, et chantre d’un libertarianisme aussi débridé qu’irrationnel, soutenant les néofascismes européens.

Après avoir déboursé 270 millions de dollars et mis son réseau x et son logiciel d’intelligence artificielle Grok au service de Donald Trump pendant la campagne électorale américaine, il a submergé l’espace médiatique de fausses informations.

Depuis le scrutin de novembre 2024, Elon Musk a insulté publiquement le Chancelier allemand et fait ouvertement campagne pour l’AfD, un parti d’extrême-droite allemand, dont les dirigeants assument leurs inspirations néo-nazies.

Il s’attaque également au gouvernement travailliste britannique, soutenant l’extrême droite anglaise, propageant fausses polémiques et accusations diffamatoires.

Il insulte le chef du gouvernement canadien démissionnaire, soutenant la campagne impérialiste de Trump visant à annexer ce pays, une partie du Danemark, et le Panama.

L’Europe a décidé, lâchement, de faire semblant de ne pas entendre les déclarations pourtant répétées du nouvel exécutif nord-américain.

Les dirigeants politiques attaqués, dont deux social-démocrates, sont seuls face à des campagnes de haine multipliés par les algorithmes trafiqués.

Le patron de Meta Marc Zuckerberg (Facebook, Youtube, Instagram, WhatsApp, etc.) a annoncé se rallier lui aussi à l’alliance idéologique populiste pour inonder les réseaux de contenus manipulant les réseaux sociaux !

Comment inviter des patrons qui déclarent être opposés aux objectifs du sommet ? Ils ne serons là que pour les saboter.

Comme pourraient-ils être encore le bienvenu en France, alors qu’ils s’attaquent à nos intérêts et aux fondements de la démocratie républicaine ?

Elon Musk n’a jamais été un partenaire loyal mais une menace permanente. Aujourd’hui, il attaque ouvertement le principe même de l’égalité devant la loi, les fondements de notre démocratie. Sa prétendue défense de la liberté d’expression est d’une indécence absolue : quelle liberté d’expression reste-t-il quand des multimilliardaires disposent des outils médiatiques les plus puissants pour saturer le débat public de mensonges ?

Musk ne veut pas de liberté d’expression, il veut la liberté de mentir, de diffamer, de propager la haine, avec ses gigantesques moyens financiers comme seules limites.

Qui, une fois pris comme cible par ces hommes riches, opposés aux principes démocratiques, peut espérer faire corriger une accusation mensongère par sa propre voix, sans la protection des lois ?

Musk met toute sa puissance pour saper la démocratie issue de la philosophie des Lumières ; il est parmi nos ennemis.

Le président américain Donald Trump sera présent également. Il n’est pas possible de l’empêcher de participer vu le mandat de l’assemblée générale des Nations Unies. Mais sommes-nous obligés de dérouler le tapis rouge à ceux qui multiplient les déclarations hostiles à nos valeurs, notre démocratie, à l’Europe ?

La Gauche Républicaine et Socialiste demande à la présidence de la République et au gouvernement de tenir enfin un discours de fermeté en direction des principaux dirigeants des multinationales du numérique : les conditions d’exercice de la liberté d’expression ne sont pas marchandables, la protection des médias et de l’information et des citoyens français ne sont pas négociables. La GRS exige que l’Union Européenne consolide l’encadrement législatif des services numériques (DSA) pour protéger les citoyens et nos démocraties de l’incitation à la haine, à la violence et au terrorisme, des manipulation, des opérations de désinformation et des contrefaçons ; la GRS exige que les plateformes numériques soient enfin mises réellement et de manière concrète en face de leurs responsabilités et de leurs obligations en Europe et qu’elles soient sanctionnées quand elles ne les respectent pas.

Nous appelons les organisations démocratiques à faire des propositions communes en ce sens. Nous proposons à l’ensemble des organisations politiques et de défense des libertés à se joindre à elle dans cette exigence et à l’exprimer sur place lors du sommet.

Frédéric Faravel et Mathieu Pouydesseau

La France et l’Europe face aux bouleversements mondiaux – UGR24 – samedi 12 octobre 2024

L’état du monde en 2025 : L’empire Américain sur le déclin – L’extension de la puissance chinoise – l’avènement d’un « sud global » ? – La désoccidentalisation du monde – l’impotence européenne – et la France ? et l’UE ? Comment éviter à la France et à ses partenaires européens d’être politiquement et économiquement marginalisés ?

pour en débattre :

  • Anne-Cécile ROBERT
    journaliste – enseignante à l’université Paris 2 et à l’IRIS – auteur de Le défi de la paix – Remodeler les organisations internationales (2024)
  • Max-Erwann GASTINEAU
    Directeur des relations institutionnelles dans le secteur de la transition énergétique – spécialiste de la Chine – chroniqueur pour différents médias (Le Figaro, Marianne) – auteur de L’ère de l’affirmation : répondre au défi de la désoccidentalisation (2024)
  • Danai KOLTSIDA
    Politologue grecque – ancienne Vice-Présidente de la fondation Transform! Europe.
  • Gaëtan GORCE
    Membre honoraire du parlement – ancien membre de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale et du Sénat
  • Laure PALLEZ co-fondatrice du think tank « La France et le Monde en commun » – ancienne élue des Français de l’étranger en Chine et aux Etats-Unis d’Amérique
  • Présidence/Animation : Samia JABER Conseillère départementale du territoire de Belfort

Les droites de l’amer

C’est bien connu : À Bruxelles, personne ne t’entend crier.

C’est donc dans une indifférence quasi générale que la nouvelle Commission Européenne se met en place, sous la houlette d’une présidente pourtant largement discréditée. Il y aurait pourtant fort à dire sur les nouvelles orientations de l’exécutif communautaire, et sur la disparition des préoccupations écologiques et sociales de sa feuille de route : le poste de commissaire à l’emploi et aux affaires sociales a d’ailleurs….disparu.

Mais Madame Von Der Leyen ne se contente pas de supprimer les intitulés. Elle se réserve aussi le droit de choisir les titulaires des postes subsistants. Ainsi a-t-elle refusé, purement et simplement, la reconduction du commissaire français, Thierry Breton. Il s’agit là d’une affaire bien plus grave qu’il n’y paraît, et cela quoiqu’on pense du bilan de Monsieur Breton.

C’est la première fois que la France se voit ainsi retoquer un candidat avant même de passer devant des eurodéputés (on se souvient  que Madame Sylvie Goulard, après une audition catastrophique, avait été justement rejetée par la majorité des parlementaires). Et c’est surtout la première fois qu’un chef de l’État français s’exécute !

Au point de remplacer immédiatement l’impétrant par un de ses plus proches en échange d’une promesse (l’élargissement du portefeuille) finalement non tenue. 

On pourra toujours gloser sur les raisons (personnelles, mais aussi politiques) qui ont conduit Von der Leyen à ce coup d’éclat. On pourra toujours rappeler que l’atlantisme échevelé de l’ancienne ministre allemande était peu compatible avec le volontarisme (souvent de façade pourtant) du Français, il n’en reste pas moins que Macron n’a même pas résisté ! Et c’est cela qui est grave. 

Au fond, cet épisode traduit une forme de « macronisation » de la présidente de la Commission, qui implique de s’entourer des plus dociles, des plus malléables, et des plus conformes à l’idéologie néo-libérale mainstream.

L’interminable feuilleton de la nomination du gouvernement français l’illustre parfaitement.   Non seulement Macron prend sept semaines (!) pour nommer un Premier ministre issu d’un parti de droite très minoritaire à l’Assemblée Nationale, non seulement il le fait après avoir obtenu l’assentiment du RN, mais il met un point d’honneur à valider une équipe pléthorique, droitière et politiquement faible, à l’instar de l’exécutif européen. 

Cette coalition des perdants fleure bon le gouvernement RPR-UDF de fin de règne, à la merci du RN.  Les millions d’électeurs qui se sont mobilisés entre les deux tours pour contrer l’extrême droite ne doivent pas désespérer. Nous porterons leurs voix et leurs aspirations au Parlement et dans la rue.

Un budget français « cadenassé » par les traités européens ?

L’arrivée à Matignon de l’ancien commissaire européen Michel Barnier coïncide avec une surveillance accrue du budget français par la Commission européenne, qui a initié en juillet une procédure concernant le déficit public excessif de la France. Afin de comprendre l’influence de l’Union européenne (UE) sur le budget de notre pays, nous avons interviewé l’économiste David Cayla, qui vient de publier La gauche peut-elle combattre le néolibéralisme ? Propos recueillis par Fabien Rives et publiés dans Off Investigation le jeudi 19 septembre 2024

Annoncé par la Commission européenne au début de l’été, le retour de la France dans une procédure pour déficit excessif rappelle que la gestion du budget fait partie des domaines où, de droite comme de gauche, le pouvoir français s’est, depuis des décennies, volontairement engagé à rendre des comptes à Bruxelles. Imprégnée d’une constante néolibérale, cette complicité entre notre gouvernement et l’exécutif européen est à l’origine d’orientations politiques massivement rejetées par la population.

Michel Barnier, c’est la garantie du respect scrupuleux des règles européennes par la France

Dans ce contexte, comment interpréter l’arrivée à Matignon de Michel Barnier, notamment connu pour avoir exprimé sa volonté de contourner la souveraineté populaire après le référendum de 2005, lors duquel les Français s’étaient majoritairement opposés à la ratification d’un traité constitutionnel européen ? Alors que le Premier ministre tarde à communiquer au Parlement des documents cruciaux concernant les futures dépenses du gouvernement, quelle est aujourd’hui la véritable marge de manœuvre de la France en matière budgétaire ? A quelles politiques économiques peuvent s’attendre les Français qui ont récemment été appelés aux urnes après la dissolution de l’Assemblée nationale, le 9 juin dernier, par Emmanuel Macron ?

Autant de questions autour desquelles Off-investigation a souhaité s’entretenir avec l’économiste David Cayla, auteur d’un récent ouvrage aux éditions Le Bord de l’eau : La gauche peut-elle combattre le néolibéralisme ?

Dans le contexte politique actuel, comment interprétez vous l’arrivée à Matignon de Michel Barnier, qui a servi pendant plus d’une décennie et demie l’exécutif européen ?

David Cayla : Clairement, Emmanuel Macron entend donner des gages. Il a choisi un Premier ministre qui ne risquait pas de remettre en cause ses réformes, notamment la réforme des retraites, mais il a aussi désigné un Européen convaincu qui a été membre de la Commission et a conduit les négociations du Brexit. Michel Barnier, c’est la garantie du respect scrupuleux des règles européennes par la France, notamment des règles budgétaires. Comme, en même temps, le RN menace de censurer le gouvernement en cas de hausse d’impôt, le Premier ministre sera contraint d’engager une politique d’austérité dans la droite ligne de ce qu’a fait Macron depuis 2017. La précarité de l’assise parlementaire du gouvernement est la garantie que ce dernier s’inscrira davantage dans la continuité que dans la rupture.

Lors de sa dernière audition à l’Assemblée nationale, Bruno Le Maire a expliqué avoir observé sur les recettes de 2023 un décalage de 20 milliards d’euros qu’il résume comme un « accident ». Que pensez-vous de cette formule dans la bouche de celui qui vient de quitter ses fonctions ? Et comment résumeriez-vous son mandat au regard de la procédure dont la France fait désormais l’objet ?

L’effondrement des recettes publiques qu’on a constaté dans les derniers budgets est un phénomène inédit et inquiétant. C’est inédit parce que, même si les budgets votés à l’automne sont rarement exécutés comme prévu, les écarts sont dû en général à des différences entre la croissance économique anticipée et la croissance réelle. Ainsi, on peut avoir des écarts dans les deux sens en fonction de la conjoncture économique. Là, c’est différent.

Le Parlement a, intentionnellement ou non, été trompé. Il a voté un budget en trompe-l’œil

La croissance française était en ligne avec les prévisions et si les recettes se sont effondrées c’est clairement parce que les rendements de certains prélèvements ont été très mal évalués par les services de Bercy. Cela pose deux questions inquiétantes. La première est démocratique. Le Parlement a, intentionnellement ou non, été trompé. Il a voté un budget en trompe-l’œil en comptant sur des ressources fiscales qui ne se sont jamais réalisées. L’exemple de la taxe sur les énergéticiens est symptomatique.

Comment peut-on se tromper à ce point sur les recettes attendues ? Est-ce de l’incompétence ou de la malhonnêteté ? La seconde question est liée à la source de ces pertes. Ce n’est pas l’impôt sur le revenu ou la TVA qui ne rentrent pas, ce sont les recettes fiscales des entreprises qui s’effondrent. Il y a donc sans doute derrière ce phénomène des stratégies d’optimisation ou de fraude. Comment savoir ce qu’il en est réellement ? Il faudrait une enquête des services du ministère des finances, mais ces derniers la mènent-elle ? On n’en a aucune idée.

Et ce ne sont pas les paroles lénifiantes de l’ancien ministre de l’Économie qui peuvent nous rassurent. Evoquer un « accident » comme il le fait est proprement irresponsable.

Votre livre pose la question de la capacité de la gauche à s’opposer au néolibéralisme inscrit dans les traités européens. Vous rappelez qu’au pouvoir, elle s’est volontairement soumise aux injonctions du marché et de la finance. Pourriez-vous résumer en quoi la « gauche de pouvoir » a contribué à façonner le néolibéralisme au sein de l’UE, et quelle en a été la conséquence pour la France ?

Dans les années 1980, le Parti socialiste a dû choisir entre son projet de transformation économique et son appartenance à la CEE et au respect de ses traités. Comme on le sait, il a fait le choix de l’Europe.

Pour éviter toute dévaluation et réduire l’inflation, le gouvernement arrime le franc au mark. Cette politique du franc fort coûte très cher à l’industrie française et au budget de l’État. Les taux d’intérêt explosent et les usines ferment, notamment la sidérurgie. Face à cette catastrophe, les socialistes font un pari : celui de réorganiser l’économie européenne et mondiale autour de nouvelles règles collectives pour rendre ce tournant néolibéral irréversible. Ils vont alors investir des organismes internationaux influents : la Commission européenne, le FMI et l’OCDE, et engager le monde dans un processus de mondialisation financière et commerciale.

Les mouvements de capitaux sont libéralisés, ce qui accentue la concurrence entre les économies et alimente les paradis fiscaux. En Europe, la Commission Delors engage la création du marché unique, acté en 1986, dont l’objectif est de créer et d’organiser les marchés européens du travail, du capital et des services publics. Quelques années plus tard, c’est encore un socialiste Pascal Lamy, ancien directeur de cabinet de Jacques Delors, qui prend la tête de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et accompagne la grande vague de libéralisation commerciale des années 1990-2000.

Vous évoquez dans votre ouvrage « l’impuissance économique d’Emmanuel Macron, prisonnier d’un carcan idéologique dans lequel il a enfermé la France ». Pour illustrer ce propos, quelles postures et/ou décisions de notre actuel président vous viennent à l’esprit ?

Toute la stratégie d’Emmanuel Macron est fondée sur le principe de l’attractivité territoriale. En économie ouverte, si l’on n’agit pas de manière interventionniste et si l’on ne mène pas de politique industrielle et commerciale, on en est réduit à attirer les investissements productifs privés pour se développer. Mais on est alors confronté à la concurrence des autres économies.

Pour gagner ce genre de concours de beauté il faut apparaître « attractif », c’est-à-dire promettre des avantages fiscaux et autres en assurant aux industriels un taux de profit supérieur à celui qu’ils pourraient obtenir dans un pays voisin. C’est la raison pour laquelle Macron a diminué la fiscalité des entreprises, réformé le code du travail et allégé les cotisations sociales.

Emmanuel Macron essaie, sans succès, de faire de la France la meilleure élève de la mondialisation

On retrouve cette même philosophie lorsqu’il organise chaque année le forum « Choose France » qui s’adresse aux capitalistes internationaux pour les convaincre d’investir en France. Il a ainsi dressé le tapis rouge à Elon Musk en 2023 et a accordé la nationalité française au fondateur russe de la messagerie Telegram. Sans succès dans les deux cas. L’usine géante de Tesla a été construite en Allemagne, près de Berlin, et Pavel Durov n’a jamais rapatrié ses locaux opérationnels de Dubaï.

En créant le marché unique, on a dû transférer à Bruxelles des pans entiers de la souveraineté nationale

Le Président essaie, sans succès, de faire de la France la meilleure élève de la mondialisation au lieu d’user de son influence politique pour la transformer ou en contourner la logique. Il mène finalement la même politique que ses prédécesseurs ; une politique dogmatique qui a plombé les ressources fiscales du pays et qui explique en grande partie les problèmes budgétaires actuels. Quant à la réindustrialisation promise, elle n’arrive jamais. Les nouvelles usines s’installent en Pologne, en Espagne ou au Vietnam, mais très peu en France. Et celles qui le font sont gavées de subventions publiques.

Vous notez dans votre livre qu’au sein de l’Union européenne, « les gouvernements nationaux perdent les capacités d’orienter leurs économies nationales ». Vous utilisez le terme d’« impuissantisation des politiques économiques ». Vous estimez encore que « les traités européens cadenassent toute politique économique ambitieuse ». Pourriez-vous synthétiser ce processus qui, comme vous le décrivez dans votre livre, éloigne les citoyens de décisions qui les concernent directement ?

En créant le marché unique on a dû transférer à Bruxelles des pans entiers de la souveraineté nationale. Un marché unique signifie des règles uniques et uniformément appliquées. Cette uniformisation aurait dû faciliter le commerce et libéraliser les flux pour rendre l’économie européenne plus productive. Mais ce n’est pas vraiment ce qui s’est passé. Le rapport Draghi publié récemment montre le décrochage économique de l’UE par rapport aux États-Unis.

Les politiques monétaires et de concurrence sont décidées à l’échelle de l’UE et non pas par les États

En pratique, le marché unique conduit à une concentration des pouvoirs à l’échelle communautaire. C’est au niveau de l’Union que sont négociés et ratifiés les traités commerciaux ; c’est à cette échelle que se décident les normes sur les moteurs thermiques, par exemple, ou le cadre réglementaire de l’industrie numérique. De même, les politiques monétaires et de concurrence sont décidées à l’échelle de l’UE et non pas par les États. Il ne reste en fin de compte aux États que les politiques budgétaires et fiscales. Mais, comme on l’a vu plus haut, en économie ouverte la politique fiscale peut difficilement se départir de la stratégie d’attractivité qui consiste à déplacer la charge fiscale des entreprises (qui peuvent investir partout dans le monde) vers les ménages (qui eux sont attachés à leur territoire). Quant à la politique budgétaire, elle est elle-même très contrôlée par les autorités européennes qui surveillent de près tout déficit.

Un gouvernement élu n’a plus la main sur presque rien

En fin de compte, le citoyen a du mal à se faire entendre. Il peut s’amuser à voter à gauche ou à l’extrême droite en espérant « envoyer un message », mais le fait est qu’un gouvernement élu n’a plus la main sur presque rien et est condamné à réinventer sous une forme ou une autre des politiques de pure gestion incapables de répondre aux attentes populaires et d’inverser le cours des choses.

Vous évoquez à la page 118 le fait que « la France insoumise a proposé en 2022 un blocage des prix sans compensation ». Vous interrogez l’applicabilité d’une telle mesure puisque vous expliquez qu’elle serait sanctionnée à la fois par le Conseil constitutionnel, mais aussi par les autorités européennes. De façon générale, quelles sont les principaux moyens de pression de l’exécutif européen pour influencer les politiques nationales d’un Etat membre ? Avez-vous un exemple qui permette d’illustrer cette influence ?

La principale limite qui encadre les politiques économiques nationales est le droit. Les traités s’appliquent en France et la loi française leur est subordonnée. La France ne peut donc pas revenir sur la libéralisation du marché de l’électricité, par exemple ; ce serait renoncer à ses engagements européens. La justice administrative et le Conseil d’Etat rendraient une telle loi inapplicable dans le cas improbable où elle échapperait à la censure du Conseil constitutionnel. De même la France ne peut imposer qu’une partie de la commande publique soit réservée à ses entreprises nationales, comme cela existe aux États-Unis par exemple. Ce serait contraire aux règles du marché unique et une telle loi serait immédiatement considérée comme nulle, non pas par la justice européenne, mais par les tribunaux français.

A l’automne 2018, le projet de budget du gouvernement italien a été retoqué par la Commission européenne car il prévoyait un avancement de l’âge de départ en retraite. [L’Italie] à dû se soumettre alors même que le déficit prévu par son budget était inférieur à la barre des 3%.

En somme, la Commission européenne n’a pas besoin d’intervenir pour que les règles européennes les plus fondamentales soient respectées par les États. Elle doit juste vérifier que les principes d’indépendance de la justice soient garantis. Dans certains domaines néanmoins, les États gardent leurs prérogatives. C’est le cas de la politique budgétaire ou de la politique sociale, par exemple. Les gouvernements nationaux peuvent alors plus ou moins coopérer avec Bruxelles. Dans ces domaines, la Commission peut intervenir pour imposer la coopération des gouvernements récalcitrants. Si un pays est soumis à une procédure de déficit excessif, il peut être sanctionné financièrement. S’il ne respecte pas les principes de l’État de droit, ses aides peuvent être bloquées.

C’est ainsi que la Hongrie n’a pu bénéficier dans l’immédiat des fonds européens qu’elle était censée recevoir dans le cadre du Grand emprunt. De même, à l’automne 2018, le projet de budget du gouvernement italien, soutenu par des partis dits populistes, a été retoqué par la Commission européenne car il prévoyait un avancement de l’âge de départ en retraite. Le gouvernement de Giuseppe Conte à dû se soumettre alors même que le déficit prévu par son budget était inférieur à la barre des 3%.

Page 158, vous expliquez : « Les traités garantissent à la BCE une totale indépendance dans l’application d’un mandat dont l’élément principal est la stabilité des prix. Aucun pouvoir politique ne peut la contraindre à agir contre sa volonté. » Pourriez-vous expliciter ce que cela peut induire pour la France ?

Cela signifie que la France ne peut imposer quoi que ce soit à la Banque centrale européenne. Au cours de la crise Covid, la BCE a mis en place une politique monétaire qui a permis aux États d’emprunter sans coût ou presque. Cela a sauvé l’économie européenne en permettant aux gouvernements nationaux de compenser les pertes liées aux mesures sanitaires.

En vertu de son indépendance garantie par les traités européens, personne en Europe ne peut imposer quoi que ce soit à Christine Lagarde

Aujourd’hui, alors que tous les économistes insistent pour que l’Europe engage une politique d’investissement massive afin de rattraper son retard sur les États-Unis et d’accélérer la transition écologique, la BCE maintient des taux d’intérêt élevés et renonce à aider les États à investir. Or, en vertu de son indépendance garantie par les traités, personne en Europe ne peut imposer quoi que ce soit à Christine Lagarde, même pas la Commission. De fait, la BCE est limitée dans son action par un mandat très restrictif centré sur la stabilité des prix. Ainsi, tant que l’inflation reste supérieure à 2% elle ne peut rien faire d’autre que d’appuyer sur le frein pour espérer limiter la hausse des prix. Pendant ce temps, l’économie européenne prend du retard et n’investit plus, notamment dans la construction immobilière, car le coût de l’argent est trop élevé.

« L’élargissement de l’Europe sonnerait le glas du renforcement de son projet » – tribune dans Le Monde

tribune publiée par Emmanuel Maurel dans Le Monde, le jeudi 11 avril 2024

L’adhésion de l’Ukraine, de la Moldavie, de la Géorgie et des pays des Balkans occidentaux encouragera le dumping social intra-européen, regrette, dans une tribune au Monde, Emmanuel Maurel, député européen GRS de la Gauche unie. Si ce « grand basculement » était engagé, les Français devraient être consultés par référendum.

L’Europe est confrontée à des défis sans précédent. Une guerre est à ses portes depuis deux ans et une autre, dans son voisinage proche, depuis octobre 2023. Elle subit une concurrence féroce et déloyale de toutes parts. Elle paie la sortie de l’inflation d’une probable récession. Elle a un très gros problème énergétique et elle accumule les retards technologiques. Dans le même temps les écarts de richesse explosent et la cohésion sociale se délite.

C’est dans ce contexte que les dirigeants européens ont accéléré le processus d’adhésion de l’Ukraine, en ajoutant au passage la Moldavie et la Géorgie. Avec les pays des Balkans occidentaux (Albanie, Bosnie, Macédoine du Nord, Monténégro, Serbie), la liste des impétrants compte désormais huit pays, soit plus de… 60 millions d’habitants. « Nous allons parachever l’unité du continent », clament-ils en chœur – et c’est vrai que ça sonne bien.

Référons-nous à la devise européenne – « Unie dans la diversité ». Davantage d’unité sortira-t-elle de cette nouvelle couche de diversité ? Tout porte à croire que cet élargissement-là n’apportera que le contraire. Souvenons-nous que le précédent élargissement aux pays d’Europe centrale et orientale avait profondément modifié la structure d’un édifice pensé au départ pour la seule Europe de l’Ouest.

Démographie des pays de l’Est

Le centre de gravité de l’Union s’était déplacé vers l’est, au profit de l’Allemagne et au détriment de la France et de l’Europe du Sud. Menée en parallèle d’un euro dévalué pour l’Allemagne et surévalué pour la France et l’Italie, l’entrée de onze pays avait provoqué une vague de délocalisations sans précédent, dont nous avons, nous, Français, fait les frais. Notre voisin germanique avait littéralement raflé l’économie des nouveaux venus pour en faire des sous-traitants de son puissant appareil industriel.

Dans les pays de l’Est eux-mêmes, les résultats sont contrastés. Economiquement, la réussite est incontestable – leur PIB a grimpé au rythme des exportations allemandes –, mais les salaires et les conditions sociales restent médiocres. On y vit évidemment mieux que dans les années 1990, mais le salaire minimum hongrois ou tchèque dépasse péniblement les 600 euros, celui de la Bulgarie s’élève à 400 euros. En Roumanie, le revenu moyen est inférieur de 67% au revenu moyen français. Le dumping social fonctionne toujours à plein régime en Europe.

La démographie des pays de l’Est est le gros point noir de l’élargissement, qui n’a pas enrayé leur tendance à la dépopulation depuis la chute du Mur. Les raisons en sont multiples, mais parmi elles, on ne peut ignorer l’émigration massive vers les pays riches que l’élargissement a facilitée voire encouragée. Rappelons enfin que les élargissements se sont appuyés sur de vastes transferts budgétaires.

Dumping social intra-européen

La France est contributrice nette de 10 milliards par an, alors que la Pologne reçoit 13 milliards de plus que sa cotisation au budget européen, la Roumanie et la Hongrie 5 milliards… Les fonds de cohésion étant limités, ils favorisent les régions pauvres de l’Est au détriment des régions pauvres de l’Ouest. Quant à leur bonne utilisation, de récentes affaires de corruption ont jeté une ombre sur la Hongrie, la Slovaquie ou la Croatie.

On imagine ce qui pourrait arriver si l’Ukraine (tout juste moins corrompue que la Russie, c’est dire…), la Moldavie (où des oligarques ont volé l’équivalent de 15% du PIB en 2018) ou la Géorgie (dont les dirigeants sont à peu près tous éclaboussés par des scandales retentissants) accédaient aux financements européens.

Refaire un élargissement, cette fois dans un contexte de déclin de l’Occident en général et de l’Union européenne en particulier, c’est s’exposer à des résultats bien pires. Les niveaux économiques et sociaux de l’Ukraine, de la Moldavie ou de l’Albanie sont encore plus éloignés de l’Europe de l’Ouest que ceux de la Pologne ou de la République tchèque au début du siècle. Le dumping social intra-européen n’en sera que plus massif et les coûts de transferts seront vertigineux.

Coup de grâce pour notre ruralité

Quant à la politique agricole commune (PAC), ses aides seront aspirées par l’Ukraine, l’autre géant agricole du continent, mais qui n’a aucune capacité contributive au budget européen. Nos agriculteurs subiraient ainsi une double peine. En 2022 et 2023, les importations d’Ukraine ont déstabilisé des filières entières (volaille, sucre, céréales…).

Même ses plus proches alliés, au premier rang desquels la Pologne, n’ont pas supporté la pression. Si l’Ukraine bénéficiait de la PAC telle qu’elle est organisée et financée aujourd’hui, ce serait le coup de grâce pour notre ruralité.

Faire fonctionner une Europe à vingt-sept avec les règles actuelles, c’est très compliqué. A trente-six, ce serait impossible. Certains ont déjà trouvé la solution : une centralisation des décisions à Bruxelles, c’est-à-dire la suppression de la souveraineté des Etats membres et le passage au vote à la majorité sur tous les sujets, y compris la politique étrangère et la défense.

Au bénéfice des États-Unis

Or qui domine la politique étrangère et de défense de la majorité des États membres ? Les États-Unis. L’Europe hyper-élargie voulue par Ursula von der Leyen ne sera ni plus unie ni plus puissante : elle sera lestée par encore plus d’alliés de Washington. Il n’est guère étonnant que les citoyens européens soient dubitatifs à l’idée d’accueillir si vite tant de nouveaux pays et d’habitants.

Rétablir un semblant d’équilibre économique, social et politique entre pays membres devrait être une priorité pour redonner force au projet européen. Non seulement ce n’est pas dans l’agenda de la Commission, mais l’élargissement sonnerait le glas de cette perspective.

Il ne faut pas engager de faux procès : il n’est pas question de remettre en cause notre soutien massif à l’Ukraine – plus de 150 milliards à ce jour – face à l’agression russe. Mais cela n’emporte aucune automaticité de l’adhésion – sinon nous aurions intégré la Bosnie depuis bien longtemps. En tout état de cause, les Français devront être consultés par référendum sur ce grand basculement.

Emmanuel Maurel met les points sur les « i », lors de la présentation de la liste de la gauche unie pour le monde du travail

La conférence de presse de présentation de la liste de gauche unie pour le monde du travail se tenait en début d’après-midi du lundi 11 mars 2024.

L’occasion pour Emmanuel Maurel de revenir aux côtés de Léon Deffontaines sur plusieurs points essentiels que nous défendrons dans la campagne des élections européennes du 9 juin 2024. Face à la confusion générale, notre liste défendra la nécessité de mettre en avant vraiment la souveraineté (industrielle, alimentaire, numérique, culturelle) : nous défendons les intérêts de la France et les besoins de nos compatriotes. Les électeurs ne sont pas des marchandises !

Enfin, le discours de la liste macroniste conduite par Valérie Hayer est insupportable de vacuité. Son seul programme ? Faire barrage au RN, quand leur politique favorise l’extrême droite. Il est temps qu’ils rendent des comptes et nous nous emploierons à les obliger à faire face à leurs responsabilités dans la crise ! Nous proposerons donc un chemin d’espoir : on peut reprendre la main en France et en Europe, à gauche avec la liste conduite par Léon Deffontaines !

Les Gilets verts reprennent le chemin des Gilets jaunes

L’agriculture française meurt du libéralisme de la commission européenne relayé par les gouvernements français depuis 20 ans qui impose un modèle de production inadapté à notre pays, tout comme il l’est aux pays du sud et de l’est de l’Europe.

Le constat est clair, avec la baisse des surfaces cultivées et celle du rendement, le retrait du nombre d’élevages, la production agricole baisse depuis des années en France. Notre pays est de plus en plus dépendant des importations pour son alimentation : 80% de l’alimentation du bétail, la majorité des fruits sont importés. Et cette baisse de production s’accompagne d’une baisse des revenus et des retraites qui doivent être revalorisés avec l’instauration d’un prix plancher pour la vente des produits (coût de production et revenu minimum). Ceci conforterait la position des producteurs face aux industriels et à la distribution. Il faut reprendre les réflexions sur les retraites agricoles qui ont conduit à l’adoption de la Loi Chassaigne et leur donner leur pleine portée.

Avec la multiplication des traités de libre échange le modèle agricole Européen est mis en concurrence avec des modèles très différents : l’usage et le coût de la terre sont plus élevés en Europe que dans d’autres régions du monde où la population est moins dense (Amérique du Nord et du Sud, Nouvelle Zélande, Australie). Par ailleurs le cout de la main d’œuvre est moins élevé dans les pays du “nouveau monde” où l’on cherche à économiser du temps de travail en exploitant de très grandes surfaces avec des rendements à l’hectare médiocres et des salaires de misère. Cette agriculture est très rentable et peut vendre à faible prix comme le montre l’exemple du mouton néo-zélandais au faible cout de production car élevé en quasi-liberté. Enfin il n’y a pas de clauses miroir dans les traités de libre-échange sur les normes écologiques et fiscales ce qui se rend les importations extrêmement compétitives par rapport aux productions locales.

Sur ce point, depuis sa création, la GRS souhaite l’arrêt des accords de libre-échange, leur renégociation, la mise en place de mesures de soutien ou la possible instauration de barrières douanières portant sur les normes écologiques, sanitaires, fiscales et sociales.

C’est une première étape nécessaire pour que nos agriculteurs redeviennent compétitifs en s’éloignant d’un modèle qui induit une stagnation des rendements, une baisse globale de production et de revenus.

Il nous faut aussi assurer la souveraineté alimentaire de la France face à d’autres pays de l’Union Européenne qui n’ayant pas les mêmes normes sociales et écologiques, ni les mêmes contrôles, pratiquent un « dumping agricole » au sein de l’UE ou à ses frontières que ce soit l’Irlande pour les ovins ou L’Espagne et l’Italie dans le maraichage et l’arboriculture, nos voisins d’Ukraine pour le blé (et ce bien avant la guerre en Ukraine). Là encore nous proposons une harmonisation de règles minimales liées à l’immigration, aux normes sociales et écologiques. Pour l’élevage, un moratoire sur la baisse du nombre de têtes doit être imposé car il est ridicule de décompter l’émission de gaz à effets de serre sur les seules terres européennes sans tenir compte des GES importés en raison de l’augmentation de la consommation européennes de viande.

Dans l’impossibilité il faudra renverser la table pour privilégier les productions locales ou nationales.

En attendant l’urgence est à un soutien des gouvernants aux agriculteurs. 

Nos agriculteurs sont confrontés aux aléas des cours agricole mondiaux en baisse cette année alors que les prix des carburants et des engrais ne baissent pas, que celui de l’électricité explose et que la grande distribution étrangle le commerce agricole. Le gouvernement doit agir urgemment pour assurer un revenu minimal (prix plancher ou revenu de base agricole) et mettre en place de nouvelles règles de relation entre agriculteurs, fournisseurs et distributeurs.

Dans l’urgence une enveloppe conséquente doit être débloquée pour combattre les effets de la maladie hémorragique épizootique dans les élevages et pour assurer un fonds de trésorerie aux exploitations touchées tout à la fois par l’inflation et le dérèglement climatique, particulièrement en Occitanie mais pas que. Dans cette catégorie on peut estimer que la TVA sur le diésel agricole (et marin) doit rester inchangé.

L’enveloppe de la PAC doit être revue à la hausse et sa distribution réformée.

Elle a diminué globalement représentant près du tiers du budget européen, contre 50% il y a quelques décennies et connait pour la période actuelle une baisse annuelle de 15% en euros constant en raison de l’inflation et de la baisse globale du budget européen. Et elle est distribuée de manière très inégale, au bénéfice des pays influents comme l’Allemagne ou des gros exploitants au développement capitalistique avec le soutien des grands syndicats tels la FNSEA en France.

Nous souhaitons qu’elle soit déployée pour faire face aux crises structurelles de l’agriculture, gommer les règlementations inégalitaires, privilégier les investissements durables, aider sur la base de projets par filière et non plus à l’hectare.

Alors que la ruralité est en deuil, que la crise est profonde, nous invitons les agriculteurs à ne pas se tromper de colère. Si au Parlement européen le groupe des amis de M. Macron soutient la commission européenne, le groupe de l’extrême droite (dont M. Bardella est vice-président) a voté POUR la PAC et pour le traité de libre-échange avec la Nouvelle Zélande. « Bardella au parlement et Bardella aux champs » ce n’est pas la même chanson !

Le seul groupe à avoir voté contre ces deux mesures est le celui de la Gauche Européenne dans lequel siège Emmanuel Maurel, eurodéputé de la Gauche Républicaine et Socialiste : il faudra s’en souvenir en temps utile.

Alain Fabre-Pujol

Assumer le bras-de-fer avec le gouvernement allemand

Déjà absurde à l’origine et inefficace – la dette des États européens s’est maintenue à un niveau élevé et la croissance a été poussive durant les années 2010 –, le Pacte de stabilité et de croissance s’est fracassé sur le mur du Covid en 2020 et 2021. L’éclatement de la guerre en Ukraine, les besoins de la transition écologique et numérique ainsi que la réindustrialisation (notamment l’effort de défense) auraient dû signer sa fin, mais c’est le contraire qui va se passer : les règles du traité budgétaire de 2011 seront rétablies le 1er janvier 2024.

À côté de l’irréalisme des objectifs (3% de déficit, 60% de dette publique, obligation de dégager un excédent primaire, « réformes structurelles »), la quasi impossibilité politique d’infliger des amendes aux États déficitaires commandait pourtant de mettre à jour les lignes directrices de la politique budgétaire.

Timide proposition de la Commission

En avril dernier, la Commission semblait avoir pris (un peu) conscience de la nouvelle donne en proposant une (timide) modification du Pacte : les totems des 3% et 60% demeuraient, mais en privilégiant une approche « au cas par cas » censée tenir compte des spécificités nationales.

À chaque État hors les clous d’un ou plusieurs critères de Maastricht, la Commission souhaitait proposer une « trajectoire budgétaire de référence » sur quatre ans (renouvelable trois ans) si des « réformes structurelles » ou, nouveauté, des investissements de nature à alimenter la croissance, étaient engagés. Le mécanisme du Semestre européen (aux termes duquel les États soumettent leurs orientations budgétaires à la Commission, qui leur répond par des « recommandations ») et les injonctions à conduire des réformes néolibérales étaient maintenues. La Commission pouvait toujours ouvrir une procédure pour déficit excessif, mais avec des amendes moins lourdes.

Nouveau refus germanique

Ces aménagements, pourtant très modérés (pour ne pas dire cosmétiques), n’ont pas fait varier Berlin d’un iota : Scholz, sous la contrainte de Lindner, son très libéral et austéritaire ministre FDP des finances, n’avalise pas cette idée « d’individualisation des parcours » budgétaires, car cela nuirait à la « discipline » et donnerait à la Commission un pouvoir de négociation – et de décision – trop discrétionnaire à leurs yeux. Le gouvernement de la coalition des « feux tricolores » (rouge pour le SPD, jaune pour le FDP et vert pour les Grünen) demande le maintien des règles actuelles, sans changement.

Élisabeth Borne et Bruno Le Maire, qui trouvaient le projet de la Commission à leur goût, ont d’abord répondu « inenvisageable ». Mais comme d’habitude (à l’exception notable de l’inclusion du nucléaire dans la catégorie des énergies soutenues au titre de la transition écologique), Paris a fini par reculer.

Et comme d’habitude, l’Allemagne veut une Europe à son image, sans se soucier des besoins d’investissement massifs auxquels se sont engagés les autres États membres. Pour notre chère moitié du « couple », la seule chose qui compte c’est respecter le verdict de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe du 15 novembre dernier, qui a censuré l’utilisation de 60 milliards d’un fonds spécial hors budget, initialement destiné à la relance post-Covid, pour financer d’autres politiques publiques (l’existence de tels véhicules, qu’en finance privée on appellerait du « shadow banking », n’est pas sans poser question sur le sérieux de la « rigueur » allemande…). Sans doute un peu honteux d’avoir été pris la main dans le sac, Christian Lindner a décidé que pour faire bonne figure et rentrer en grâce en son pays, mieux valait faire payer les autres.

Le gouvernement règle ses problèmes intérieurs sur le dos des Européens

Toujours est-il qu’à ce jour, l’Allemagne n’a toujours pas bouclé son budget 2024. Et la raideur de sa position sur le Pacte budgétaire ne l’aidera pas plus que les autres à trouver les dizaines de milliards d’euros nécessaires à la transition énergétique et à endiguer les délocalisations industrielles provoquées par l’explosion des prix de l’énergie.

Emprunter des dizaines de milliards d’euros sur les marchés financiers est un réflexe politique tout sauf naturel pour les Allemands, qui depuis 15 ans se sont imposés une règle ultra-stricte, qu’ils avaient même inscrite dans leur Constitution : quasi-interdiction de tout déficit public, sauf situation d’urgence. La crise sanitaire avait été considérée comme telle, mais pas la crise climatique. Le SPD et les Verts voudraient bien sortir de cette tenaille, mais ont besoin pour ce faire d’un vote des deux tiers du Bundestag, ce qui est arithmétiquement impossible. Et pour le FDP de Christian Lindner, sans lequel il n’y a plus de majorité, il n’en est pas question.

Au cœur du programme du FDP on trouve en effet le refus catégorique de toute hausse des impôts, particulièrement sur les riches. Comme pour ce parti, plus de dette = plus d’impôts et que tout investissement public (en friche complète depuis Merkel, notamment dans les infrastructures : routes, ponts et canaux sont dans un état lamentable) doit être gagé sur des économies, l’obstacle semble infranchissable. La rentrée en récession de l’Allemagne, dont le secteur privé n’investit plus et réduit ses dépenses de R&D, finit de noircir le tableau, sans que cela émeuve les libéraux. On en vient à se demander si une partie de la classe politique d’outre Rhin n’espère pas secrètement que la Russie gagne la guerre et que le business avec cet ex fournisseur d’énergie reprenne comme au bon vieux temps.

Pour sa part, l’opinion publique allemande n’apprécie guère ces tergiversations et encore moins l’absolutisme du FDP. Les sondages lui donnent moins de 5% en cas d’élections anticipées et la paralysie politique éclabousse aussi le SPD et les Grünen. En revanche, au sein de la CDU, des voix se font entendre pour plaider moins de contraintes, voire la remise en cause de la règle d’or budgétaire. Il se murmure qu’un expédient pourrait être trouvé en prolongeant « l’état d’urgence financier » en 2024. Mais rien de bien consistant à ce stade, alors que le temps presse.

Avoir le cran de l’affrontement

S’il venait à l’idée d’Emmanuel Macron d’essayer de réussir (pour une fois) une opération diplomatique, la « cible Lindner » est tentante. Après tout, celui-ci a toujours dit « non » à toutes les propositions européennes du Président français, et ce depuis 2017. L’Élysée, qui ne manque pas de relais dans la presse, pourrait échafauder un plan qui pour le coup, serait bien utile à la France, l’Allemagne et l’Europe. Lindner et le FDP forment le noyau dur de la coalition des « égoïstes », ils ont failli faire capoter le plan de relance de 2020, ce qui aurait proprement démoli nos économies, et se débarrasser d’un tel « ennemi de l’intérieur » n’attristerait sans doute pas grand monde (et pas davantage Scholz, ni le patron des Grünen, Robert Habeck). Mais Macron aura-t-il le cran d’aller à l’affrontement direct avec l’Allemagne en visant Lindner ? Il est permis d’en douter.

Or le temps ne presse pas seulement pour le budget allemand ; il presse aussi et surtout pour la cohésion de l’Europe. Les élections européennes approchent et la vague d’extrême-droite se profile à l’horizon. Il ne reste, au mieux, que quelques semaines pour trouver un compromis sur le nouveau cadre budgétaire si les Vingt-Sept veulent qu’il soit adopté avant la fin de la législature. Dans cette hypothèse, le nouveau Pacte de stabilité rentrerait en vigueur dès 2025. D’ici là, les règles existantes pourraient être aménagées de manière flexible voire constructive. Mais pour l’instant, tout cela relève de la politique fiction.

Il ne nous reste plus qu’à défendre notre programme de gauche et de souveraineté populaire et à le porter dans la campagne pour forcer un gouvernement français quel qu’il soit à assumer enfin la confrontation européenne nécessaire.

Mathias Weidenberg et Frédéric Faravel

« L’accord UE-Mercosur serait perdant-perdant des deux côtés de l’Atlantique » – tribune d’Emmanuel Maurel dans Marianne

tribune publiée dans Marianne le vendredi 8 décembre 2023

Après le constat d’échec acté lors du sommet du Mercosur le 8 décembre, l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le bloc sud-américain semble très mal parti.

L’activisme de la Commission, fortement appuyé par l’Espagne, qui préside le Conseil de l’Union européenne jusqu’au 31 décembre, et par l’Allemagne, qui a tenté d’arracher un compromis de dernière minute, n’a pas abouti et il faut s’en féliciter. Car s’il était finalement avalisé, cet accord serait perdant-perdant des deux côtés de l’Atlantique.

UNE MAUVAISE IDÉE

En termes géographique, démographique et économique, la relation entre l’Europe et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay – le Venezuela en est suspendu depuis 2017) est tout sauf anecdotique. Nous parlons là d’un ensemble de 15 millions de km², 780 millions d’habitants et 90 milliards d’euros annuels d’échanges bilatéraux.

« Le monde n’a pas besoin qu’on intensifie les échanges entre grands blocs « géopolitiques ». »

La Commission européenne, très friande du terme « géopolitique », n’a pas tort de souligner à quel point l’enjeu est important. Mais faire de la politique dans le « grand jeu » ne se distingue pas fondamentalement de la politique à plus petite échelle : c’est un art de contenu et d’exécution. Et si l’on exécutait le contenu de ce traité commercial, ce ne serait bon ni pour l’Europe, ni pour le Mercosur, ni pour le monde.

Le monde n’a pas besoin qu’on intensifie les échanges entre grands blocs « géopolitiques ». Au contraire : d’après une étude de la Banque de France publiée en 2020, l’accroissement de la circulation des flux de marchandises dans la mondialisation est responsable du quart des émissions supplémentaires de gaz à effet de serre. S’agissant du Mercosur, la donne s’aggrave des produits-phare inscrits dans le texte : il est prévu d’importer d’Amérique du Sud 99 000 tonnes de bœuf, 180 000 tonnes de volaille et 650 000 tonnes d’éthanol par an.

COÛT ENVIRONNEMENTAL ET ÉCONOMIQUE

Or selon différentes ONG, cet accroissement inédit des importations agricoles (pour le bœuf, +63 % d’ici 2035) provoquera entre +5 % et +25 % de déforestation supplémentaire. Mais ce n’est pas tout. L’accord favoriserait également les exportations vers le Mercosur de substances actives fabriquées en Europe et… rentrant dans la composition de pesticides interdits sur notre territoire ! Cela accroîtra en retour l’importation de millions de tonnes de produits agricoles traités avec ces pesticides dangereux pour la santé et pour l’environnement. On mesure au passage la contradiction, pour ne pas dire l’hypocrisie de certains discours écologiquement corrects.

« L’arrivée sur le marché européen de produits agricoles à bas prix en provenance du Mercosur exercera une pression concurrentielle. »

Bruxelles et Berlin ne jurent que par le « green deal » et la décarbonation de l’économie, mais quand on passe aux travaux pratiques, les millions de tonnes de CO2 des voitures allemandes et les millions de tonnes de méthane des bovins argentins ne posent plus problème – à tel point que le Chancelier allemand et le Commissaire européen au commerce étaient prêts à retirer du texte toute clause contraignante sur le respect de l’accord de Paris et sur la lutte contre la déforestation…

Au coût environnemental s’ajoute le coût économique, particulièrement pour l’agriculture européenne et française. L’arrivée sur le marché européen de produits agricoles à bas prix en provenance du Mercosur exercera une pression concurrentielle d’autant plus irrésistible que nos agriculteurs doivent respecter les normes les plus strictes du monde.

DES AGRICULTEURS QUI SOUFFRENT

Les partisans de l’accord rétorquent que ces contingents d’importation ne représentent qu’une faible part de la production et de la consommation de viande en Europe. C’est exact, mais comme l’agriculture est la variable d’ajustement quasi systématique des accords commerciaux négociés par la Commission, à force d’empiler les « faibles parts » les unes sur les autres, ça finit par faire beaucoup.

« Même dans la société civile sud-américaine, nombreux sont ceux qui redoutent la passation d’un accord. »

Beaucoup trop pour des millions d’agriculteurs qui souffrent déjà des conditions actuelles du marché, comme l’a rappelé l’épisode rocambolesque du poulet ukrainien, bloqué à la frontière par les Polonais, les Slovaques et les Hongrois – et comme le rappellent les tendances de fond qui affectent la France. Historiquement grande puissance agricole, elle est passée en 20 ans du 2e au 5e rang des exportateurs mondiaux et ses importations alimentaires ont explosé. En 2022, nous avons importé 63 milliards d’euros de denrées alimentaires : deux fois plus qu’en 2000.

Même dans la société civile sud-américaine, nombreux sont ceux qui redoutent la passation d’un accord qui ferait disparaître les droits de douane sur 90 % des marchandises. Syndicalistes et économistes y voient à juste titre un deal « viande et minerais contre voitures et marchés publics » et s’inquiètent des retombées prévisibles.

DANGER SUR LE MODÈLE DE DÉVELOPPEMENT

Dans un texte commun des syndicats du Mercosur et de l’UE publié en juin, les représentants des travailleurs dénoncent « les dommages causés à la classe ouvrière » et « l’aggravation des inégalités sociales et du chômage », en raison notamment de la « mise en péril de l’industrialisation [du Mercosur] ».

Même son de cloche sous la plume de Paulo Nogueira Batista Jr, économiste et ancien membre du directoire du FMI qui estime, dans une tribune parue le 3 décembre dernier, que signer l’accord serait une « capitulation totale ». À ses yeux les droits de douane actuels sur les importations sont une « compensation partielle d’un ensemble de facteurs défavorables pour les entreprises brésiliennes » et l’« intérêt stratégique » des pays du Mercosur commande de les maintenir.

La sévérité – et la vérité – de ces analyses n’ont d’égales que la légèreté et la désinvolture des institutions européennes. Aux contradictions sur l’écologie s’ajoutent celles, tout aussi graves, sur le modèle de développement. La Commission a renié sa promesse d’une « nouvelle génération d’accords », censés mettre un terme à l’échange inégal entre le Sud et le Nord, où le premier est obligé d’exporter ses matières premières et des biens à faible valeur ajoutée pour pouvoir accéder aux produits sophistiqués du second.

CHANGEMENT DE CAP

À l’été dernier, les eurodéputés membres de la commission du commerce international votaient un texte appelant à partager la valeur entre les pays moins avancés ou émergents et les entreprises européennes, à mettre un terme au pillage de facto de leurs ressources et à promouvoir les plus hauts standards sociaux et environnementaux.

Quelques mois plus tard, la plupart ne trouvent rien à redire au très archaïque accord UE-Mercosur, qui contient exactement le contraire, et approuvent la liste interminable d’accords dans les tuyaux de la Commission : Chili, Philippines, Mexique, Indonésie, Inde…

Nouvelle illustration du « double langage occidental » qui nous est de plus en plus ouvertement reproché par le « Sud Global » ? Incapacité à s’extraire des exigences des grandes multinationales qui auraient, elles, certainement profité d’un tel accord ? L’Europe manque singulièrement de cohérence dans son approche de la nouvelle donne économique, sociale et environnementale.

Pour que sa voix porte à nouveau, elle devra faire son aggiornamento de la mondialisation et ne plus céder aux injonctions néolibérales de sa technostructure et de ses élites économiques et financières.

Résolution commune au parlement européen

Le Parlement européen condamne les attaques terroristes du Hamas et appelle au respect du droit international humanitaire

J’ai voté en faveur de la résolution commune du Parlement européen « sur les attaques terroristes odieuses du Hamas contre Israël, le droit d’Israël de se défendre conformément au droit humanitaire et international et la situation humanitaire à Gaza ».

Ce texte important condamne avec la plus grande fermeté les attentats et les meurtres abjects commis par le Hamas contre Israël et son peuple. Car ce n’est pas un acte de «résistance» qu’a commis le Hamas mais un acte de barbarie, un pogrom en terre d’Israël.

Cette résolution affirme en outre, et à raison, que le Hamas ne représente pas la population palestinienne qui subit depuis 2006 à Gaza sa dictature et sa répression féroces. Meilleur ennemi des Palestiniens, le Hamas prône la haine des Juifs et la destruction d’Israël, empêchant ainsi toute possibilité de progresser vers une solution négociée.

Ce texte rappelle enfin que chacune des parties doit respecter le droit international humanitaire. Dans cette guerre, la grande majorité des victimes sont des civils, des enfants et des personnes âgées. Elles se comptent déjà en milliers. Pris au piège par le blocus, les Gazaouis subissent la mort et la destruction des bombardements de représailles. Il faut d’urgence instaurer l’arrêt des combats et laisser passer la nourriture et les médicaments à la frontière égyptienne.

Les partisans de la paix et de la solution à deux États semblent aujourd’hui bien isolés. Palestiniens et Israéliens ont le droit à la sécurité et à la paix. Le rôle de la gauche est de porter cette voix.

Emmanuel MAUREL
Député européen
Co-fondateur de la Gauche Républicaine et Socialiste

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