L’école est elle accessible à tous ?

On nous aurait menti ?

Une rentrée en trompe l’œil. Le gouvernement avait promis une deuxième phase dans la réouverture des établissements scolaires ce mardi, il avait prévu une « montée en puissance » à partir du 2 juin pour accueillir tous les élèves dont les parents le souhaiteraient. Or, cet objectif sera-t-il vraiment atteint ? Et de quelle rentrée parle-t-on ? Selon quelles modalités et dans quel but pédagogique ? Est-il toujours question de l’école pour tous, d’une école républicaine ?

Il avait été annoncé par la communication institutionnelle et par grand nombre de médias qu’à partir du 2 juin 2020 les 4èmes et les 3èmes allaient revenir progressivement, ainsi que les lycéens. Or on se rend compte que, dans une très grande partie des établissements scolaires tout d’abord, cette reprise ne sera pas possible pour des questions d’organisation dès le 2 juin mais uniquement à partir du 8 juin (Concernant le 8 juin, certaines inspections ont indiqué à des communes leur décision d’accueillir à nouveau tous les niveaux des écoles élémentaires, mais sans prendre attache avec les services municipaux pour préparer cette date).

Comment en effet arriver à s’organiser avec un arbitrage du premier ministre et une annonce le jeudi soir pour un accueil des élèves concernés dès le mardi, avec un lundi jour férié au milieu ? De plus, le protocole sanitaire ne permet toujours pas d’accueillir tous les élèves : les groupes sont limité à 15 par classe, les contraintes de désinfection restent les mêmes ; en conséquence, seuls 60% des élèves pourront être accueillis au final, 40% dans certains établissements. En effet, le respect du protocole sanitaire demande du temps (pour la gestion des flux d’élèves, pour résoudre la question de l’hygiène des mains, de la désinfection des salles, etc.), et aussi de l’espace (dans les cars scolaires seule la moitié des places peuvent être occupées, la limite de 15 élèves par classe, la limitation du nombre d’élèves qui peuvent être reçus dans les restaurants scolaires, etc.). De fait, selon les établissements scolaires, les 6èmes et 5èmes auront cours une semaine sur deux en alternance avec les 4èmes/ 3èmes, parfois ce sera un jour sur deux, d’autres fois certains jours de la semaine seulement…

Quant à la continuité pédagogique, elle ne peut pas se poursuivre dans les mêmes conditions que pendant les semaines de confinement, dès lors que les enseignants reprennent physiquement sur un emploi du temps plein et ne peuvent à la fois faire cours à distance et en présence. Mais le discours sur la continuité pédagogique et le volontariat des familles est maintenu.

Au-delà des difficultés d’organisation inédites, bien compréhensibles, tout cela donne l’impression d’une politique de gribouille et c’est l’égal accès de tous les élèves à l’école républicaine qui en fait les frais.

Ouvrir les écoles à tout prix ?

Des réponses, Monsieur le ministre !

Le poids des mots, le choc du calendrier. La date du 11 mai a été lancée par le Président de la République lundi soir dans son allocution télévisée comme celle qu’il avait choisie de façon concomitante pour le déconfinement d’une partie de la population adulte et la reprise « progressive » des activités scolaires . Le 11 mai, donc, point de départ pour une réouverture des crèches, des écoles, des collèges et lycées. Une date donnée pour rassurer (la population ? Les milieux économiques ? ) , pour donner l’impression d’un cap maîtrisé . Mais derrière l’effet d’annonce, quelle est la réalité ? La vérité dans les déclarations gouvernementales semble avancer masquée , le plus grand flou règne encore tant sur les modalités de reprise que sur les motivations pour les dates retenues . Avec tout de même une spécificité française qui interroge : coupler au jour près fin du confinement et retour à l’école est en effet presque une exception mondiale. En Asie les écoles seront les dernières structures à reprendre leur activité , une fois que toute la population aura été déconfinée. Seul le Danemark, qui rouvre ses écoles maternelles et primaires dès le 15 avril, a une stratégie comparable à celle de la France. Seulement au Danemark, on compte en moyenne 10 élèves par enseignant en maternelle contre 21 en France (données de l’OCDE), ce qui change beaucoup de choses et qui facilite la distanciation sociale !

Une impression de grande impréparation et d’incohérence a très rapidement accompagné cette annonce présidentielle, créant de l’inquiétude et beaucoup d’interrogations tant chez les enseignants que chez les parents d’élèves. À juste titre. Avec même un doute sur la sincérité des motivations de cette reprise. S’agit-il de chercher à éviter de creuser les difficultés scolaires

des élèves les plus fragiles, dans une préoccupation sociale, comme l’a annoncé JM Blanquer ? S’agit-il d’un retour en classe précipité pour des motifs avant tout économiques (garder les enfants pour permettre aux parents d’aller travailler ) ?

Alors même que les lieux sociaux, les cinema, les salles de spectacles, les restaurants ou les cafés restent fermés, ouvrir dès le 11 mai les écoles, les cantines, soulève légitimement de nombreuses questions.. Depuis le début de la crise le gouvernement a indiqué appuyer ses décisions sur l’avis du conseil scientifique ou du moins sur l’avis de scientifiques. On aimerait que le pouvoir , alors même que le conseil national de l’ordre des médecins vient de rendre un avis défavorable pour l’ouverture des écoles dès le 11 mai , explique sur quelles bases il fonde sa décision ? Il semblerait, d’après ce que nous disent les médecins, que les enfants et les jeunes adolescents soient des porteurs asymptomatiques du Covid 19, ne développent pas forcément donc la maladie mais par contre soient des vecteurs importants qui peuvent ensuite la transmettre aux adultes. Il est de plus particulièrement difficile de faire respecter les gestes barrière et la distanciation sociale en milieu scolaire, beaucoup plus que dans un milieu professionnel adulte. C’est bien pour cela que de nombreux pays ont choisi de rouvrir les écoles en dernier. Le docteur Patrick Bouet, Président de l’Ordre Narional des médecins explique qu’ « il n’y a pas d’explication médicale, infectieuse ou épidémiologique à déconfiner dans le milieu scolaire en premier », dénonçant même « un manque absolu de logique ».

L’INSERM indique que sans une politique de tests sérologiques à grande échelle de la population, et donc des élèves et des enseignants, qui permettrait de savoir qui est immunisé, on ne peut pas envisager une reprise sereine.

Quelles tranches d’âge seront concernées les premières par la reprise et selon quels critères ? Quels moyens en termes de masques, de solutions hydroalcooliques, par exemple, seront mis à disposition des établissements scolaires ? Quelles seront les modalités pour la désinfection des locaux ? Quelle sera la stratégie de tests ? Pour l’instant, toutes les réponses à ces questions ont été remises à dans 15 jours, semblant, elles aussi confinées !

Pourtant, sans réponses rapides s’appuyant sur des avis scientifiques fiables le gouvernement ne fera que donner l’impression aux enseignants , pour filer la métaphore guerrière employée par Emmanuel Macron lors de son discours de lundi, qu’ils sont envoyés aux côtés des personnels soignants en première ligne du front pour de mauvaises raisons …eux dont on gèle le point d’indice depuis 10 ans, eux dont la revalorisation de la carrière devient une arlésienne !

Retraite, rémunération des enseignants… Le gouvernement entre désinvolture et mépris.

La réforme des retraites envisagée par le gouvernement se traduira par une détérioration de la situation sociale des françaises et ses français, contrairement à ce que la propagande gouvernementale cherche à faire croire ; elle aura pour conséquence un recul social sans précédent.

Les enseignants font partie de ceux qui ont le plus à perdre avec cette réforme.

La baisse inouïe de la pension des professeurs prévue par le gouvernement sur la base du rapport Delevoye, un tiers en moins en moyenne par rapport à aujourd’hui , entre -300 et -900 € selon les personnes, aurait un impact important à plusieurs niveaux.

D’une part sur le niveau de vie des enseignants. Ces derniers, déjà parmi les moins bien payés en Europe, toucheraient désormais des retraites absolument dévaluées .

Les professeurs, qui sont censés être des cadres A de la fonction publique n’en touchent pas le salaire ; cette situation était jusque-là compensée notamment par des pensions correctes . Or, avec le nouveau système, les enseignants , qui font des études longues et qui commencent à exercer leur métier après un niveau bac+5 validé et la passation d’un concours, qui débutent donc entre 23 ans pour les plus jeunes et 27 ou 28 ans, devront travailler, sur la base des 43 annuités annoncées, jusqu’à l’âge de 66 ans minimum voire 69, 70, 71 ans, pour espérer toucher une retraite à taux plein qui serait désormais bien inférieure à 2000€ par mois. Pour ceux qui « craqueraient » vers 65 ans, la perspective serait de toucher une pension bien inférieure à 1500€. Face à des classes de 30 enfants ou adolescents , dont la gestion est loin d’être de tout repos, comment à de tels âges envisager de continuer à exercer ces métiers dans de bonnes conditions ? Le gouvernement et le président de la république, un peu gênés, ont bien conscience du problème…mais n’annoncent rien de concret ! Monsieur Macron a juste indiqué très vaguement lors de son discours de Rodez que peut-être les enseignants pourraient finir leur carrière dans les rectorats par exemple… Est-ce vraiment sérieux ?… M. Macron envisage que des dizaines de milliers d’enseignants atterrissent dans les rectorats pour leurs dernières années de vie professionnelle, pour faire quoi ? Mystère…L’improvisation de ces réponses tient vraiment de l’amateurisme !

La baisse des pensions des professeurs, d’autre part, conjuguée à ce recul de l’âge de départ à la retraite, ne va pas améliorer le problème d’attractivité du métier qui est une réalité grandissante à l’heure où les concours de recrutement des enseignants n’arrivent plus déjà à faire le plein dans plusieurs disciplines. Ce qui a pour effet une hausse importante du nombre de contractuels qui ne sont pas formés avant de se retrouver devant des classes. Cela a donc un impact sur la qualité même du système scolaire français. Embêtant à l’heure où les chiffres du classement PISA sont abondamment commentés.

Face à cette situation, les enseignants attendaient des déclarations de la part de leur ministre, Jean-Michel Blanquer. Ils peuvent encore attendre. Celui-ci, sur France Inter, mardi matin, n’a fait que botter en touche.

Il a commencé par annoncer une revalorisation pour les enseignants et par s’engager sur le fait que les professeurs ne seraient pas perdants avec cette réforme.

Pour éviter une perte moyenne de 500 € par mois sur les retraites des enseignants, que propose donc le ministre ? :

« On ne peut pas annoncer un chiffre comme cela… » a-t-il d’abord prétendu. Cela fait pourtant deux ans qu’il se dit « conscient » du problème du pouvoir d’achat des enseignants dont le point d’indice est gelé depuis une dizaine d’années comme celui de tous les fonctionnaires …mais pour l’instant s’avancer sur un chiffre est encore trop tôt…les enseignants apprécieront.

Mais finalement au fil de l’interview le chiffre de 400 millions d’€ de revalorisation à partir de l’année 2021 finit par sortir…

400 millions. Par an. Pour 900 000 enseignants. Ce qui fait 444 euros par an pour chaque enseignant. Soit 37 euros par mois. Cela change tout en effet. Mais les enseignants ne doivent surtout pas céder à l’euphorie de cette annonce… Le ministre corrige en effet tout de suite : ce ne sera pas vraiment une revalorisation salariale mais plutôt une revalorisation de primes que ne toucheront donc pas tous les enseignants… !

Cerise sur le gâteau qui demandera confirmation, BFM TV affirme avoir eu vent de ce qui serait proposé aux enseignants par leur ministre : pas de revalorisation envisagée sans contreparties. La piste envisagée serait bien celle de primes distribuées par exemple à ceux des enseignants qui accepteraient de muter très fréquemment ou seraient versées en récompense de missions supplémentaires… quant au président de la république, il envisagerait notamment toujours comme levier la réduction du nombre de jours de vacances des enseignants ainsi que l’allongement de leur nombre d’heures de service… Bref, c’est ce qui s’appelle jouer au pompier pyromane !

Le premier ministre Édouard Philippe , enfin, a pris la parole aujourd’hui mercredi : beaucoup de flou encore ! Le niveau des pensions des enseignants serait «sanctuarisé». Qu’est-ce à dire ? Va-t-on vers une revalorisation de 500€ ? «Nous engagerons avant la fin du quinquennat les revalorisations nécessaires pour maintenir le niveau des pensions» des enseignants, ajoute le premier ministre, «nous le ferons progressivement et nous commencerons dès 2021», a-t-il également assuré. Pour garantir les retraites des enseignants des annonces sur des primes accordées à une partie d’entre eux seulement, à la marge, ou une augmentation de 37€ par mois évidemment non seulement ne suffiraient pas mais seraient perçus comme des provocations.

La Gauche Républicaine et Socialiste est solidaire des enseignants qui méritent considération et juste rémunération pour leur travail et leur niveau de qualification. Nous demandons solennellement au Président de la république de ne pas sacrifier l’école publique et ses enseignants à l’hôtel de cette réforme des retraites qui ne serait qu’un recul social de plus.

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