« L’élargissement de l’Europe sonnerait le glas du renforcement de son projet » – tribune dans Le Monde

tribune publiée par Emmanuel Maurel dans Le Monde, le jeudi 11 avril 2024

L’adhésion de l’Ukraine, de la Moldavie, de la Géorgie et des pays des Balkans occidentaux encouragera le dumping social intra-européen, regrette, dans une tribune au Monde, Emmanuel Maurel, député européen GRS de la Gauche unie. Si ce « grand basculement » était engagé, les Français devraient être consultés par référendum.

L’Europe est confrontée à des défis sans précédent. Une guerre est à ses portes depuis deux ans et une autre, dans son voisinage proche, depuis octobre 2023. Elle subit une concurrence féroce et déloyale de toutes parts. Elle paie la sortie de l’inflation d’une probable récession. Elle a un très gros problème énergétique et elle accumule les retards technologiques. Dans le même temps les écarts de richesse explosent et la cohésion sociale se délite.

C’est dans ce contexte que les dirigeants européens ont accéléré le processus d’adhésion de l’Ukraine, en ajoutant au passage la Moldavie et la Géorgie. Avec les pays des Balkans occidentaux (Albanie, Bosnie, Macédoine du Nord, Monténégro, Serbie), la liste des impétrants compte désormais huit pays, soit plus de… 60 millions d’habitants. « Nous allons parachever l’unité du continent », clament-ils en chœur – et c’est vrai que ça sonne bien.

Référons-nous à la devise européenne – « Unie dans la diversité ». Davantage d’unité sortira-t-elle de cette nouvelle couche de diversité ? Tout porte à croire que cet élargissement-là n’apportera que le contraire. Souvenons-nous que le précédent élargissement aux pays d’Europe centrale et orientale avait profondément modifié la structure d’un édifice pensé au départ pour la seule Europe de l’Ouest.

Démographie des pays de l’Est

Le centre de gravité de l’Union s’était déplacé vers l’est, au profit de l’Allemagne et au détriment de la France et de l’Europe du Sud. Menée en parallèle d’un euro dévalué pour l’Allemagne et surévalué pour la France et l’Italie, l’entrée de onze pays avait provoqué une vague de délocalisations sans précédent, dont nous avons, nous, Français, fait les frais. Notre voisin germanique avait littéralement raflé l’économie des nouveaux venus pour en faire des sous-traitants de son puissant appareil industriel.

Dans les pays de l’Est eux-mêmes, les résultats sont contrastés. Economiquement, la réussite est incontestable – leur PIB a grimpé au rythme des exportations allemandes –, mais les salaires et les conditions sociales restent médiocres. On y vit évidemment mieux que dans les années 1990, mais le salaire minimum hongrois ou tchèque dépasse péniblement les 600 euros, celui de la Bulgarie s’élève à 400 euros. En Roumanie, le revenu moyen est inférieur de 67% au revenu moyen français. Le dumping social fonctionne toujours à plein régime en Europe.

La démographie des pays de l’Est est le gros point noir de l’élargissement, qui n’a pas enrayé leur tendance à la dépopulation depuis la chute du Mur. Les raisons en sont multiples, mais parmi elles, on ne peut ignorer l’émigration massive vers les pays riches que l’élargissement a facilitée voire encouragée. Rappelons enfin que les élargissements se sont appuyés sur de vastes transferts budgétaires.

Dumping social intra-européen

La France est contributrice nette de 10 milliards par an, alors que la Pologne reçoit 13 milliards de plus que sa cotisation au budget européen, la Roumanie et la Hongrie 5 milliards… Les fonds de cohésion étant limités, ils favorisent les régions pauvres de l’Est au détriment des régions pauvres de l’Ouest. Quant à leur bonne utilisation, de récentes affaires de corruption ont jeté une ombre sur la Hongrie, la Slovaquie ou la Croatie.

On imagine ce qui pourrait arriver si l’Ukraine (tout juste moins corrompue que la Russie, c’est dire…), la Moldavie (où des oligarques ont volé l’équivalent de 15% du PIB en 2018) ou la Géorgie (dont les dirigeants sont à peu près tous éclaboussés par des scandales retentissants) accédaient aux financements européens.

Refaire un élargissement, cette fois dans un contexte de déclin de l’Occident en général et de l’Union européenne en particulier, c’est s’exposer à des résultats bien pires. Les niveaux économiques et sociaux de l’Ukraine, de la Moldavie ou de l’Albanie sont encore plus éloignés de l’Europe de l’Ouest que ceux de la Pologne ou de la République tchèque au début du siècle. Le dumping social intra-européen n’en sera que plus massif et les coûts de transferts seront vertigineux.

Coup de grâce pour notre ruralité

Quant à la politique agricole commune (PAC), ses aides seront aspirées par l’Ukraine, l’autre géant agricole du continent, mais qui n’a aucune capacité contributive au budget européen. Nos agriculteurs subiraient ainsi une double peine. En 2022 et 2023, les importations d’Ukraine ont déstabilisé des filières entières (volaille, sucre, céréales…).

Même ses plus proches alliés, au premier rang desquels la Pologne, n’ont pas supporté la pression. Si l’Ukraine bénéficiait de la PAC telle qu’elle est organisée et financée aujourd’hui, ce serait le coup de grâce pour notre ruralité.

Faire fonctionner une Europe à vingt-sept avec les règles actuelles, c’est très compliqué. A trente-six, ce serait impossible. Certains ont déjà trouvé la solution : une centralisation des décisions à Bruxelles, c’est-à-dire la suppression de la souveraineté des Etats membres et le passage au vote à la majorité sur tous les sujets, y compris la politique étrangère et la défense.

Au bénéfice des États-Unis

Or qui domine la politique étrangère et de défense de la majorité des États membres ? Les États-Unis. L’Europe hyper-élargie voulue par Ursula von der Leyen ne sera ni plus unie ni plus puissante : elle sera lestée par encore plus d’alliés de Washington. Il n’est guère étonnant que les citoyens européens soient dubitatifs à l’idée d’accueillir si vite tant de nouveaux pays et d’habitants.

Rétablir un semblant d’équilibre économique, social et politique entre pays membres devrait être une priorité pour redonner force au projet européen. Non seulement ce n’est pas dans l’agenda de la Commission, mais l’élargissement sonnerait le glas de cette perspective.

Il ne faut pas engager de faux procès : il n’est pas question de remettre en cause notre soutien massif à l’Ukraine – plus de 150 milliards à ce jour – face à l’agression russe. Mais cela n’emporte aucune automaticité de l’adhésion – sinon nous aurions intégré la Bosnie depuis bien longtemps. En tout état de cause, les Français devront être consultés par référendum sur ce grand basculement.

À Agen, le 27 mars 2024 : Reprendre la main sur les mécanismes de marché pour cultiver l’avenir

« Quel projet d’avenir pour l’agriculture et l’alimentation du pays ? »

C’est autour de cette question qu’Emmanuel Maurel a échangé avec Constance Renard, membre de la Commission Agriculture du Parti Communiste Français (PCF), ainsi que Raymond Girardi et Emmanuel Aze, syndicalistes agricoles représentant respectivement le Mouvement de défense des exploitants familiaux (MODEF) et la Confédération Paysanne, le mercredi 27 mars dernier au Passage d’Agen. Cette table-ronde, coorganisée par Vincent Arpoulet (référent départemental de la Gauche Républicaine et Socialiste du Lot-et-Garonne) et Guilhem Mirande (secrétaire départemental du PCF), s’est tenue dans un département dans lequel la colère des agriculteurs se voit récupérée par la Coordination Rurale, syndicat qui, en accordant la primauté à la suppression de toute entrave au libéralisme sauvage, n’est en réalité que le porte-voix des partisans du renforcement du modèle économique qui frappe nos agriculteurs de plein fouet.

Emmanuel Maurel, député européen GRS, intervenait mercredi 27 mars 2024 à Agen devant une salle pleine venue entendre les arguments de la liste de “gauche unie pour le monde du travail”

Dans ce contexte, cet événement visait à favoriser les échanges entre différentes organisations désireuses de proposer un débouché politique et syndical à toutes celles et ceux qui estiment qu’il est temps de sortir l’agriculture des mécanismes de marché qui étouffent tant les consommateurs que nos agriculteurs.

Et c’est ainsi que, prenant le contre-pied de la Coordination Rurale, nos quatre intervenants se sont rapidement entendus autour d’un constat partagé : « Nous ne sommes pas de ceux qui estiment que la crise agricole découlerait d’un excès de normes. Nous estimons au contraire qu’il est urgent de mieux encadrer ces mécanismes de marché pour sortir d’une agriculture productiviste prioritairement orientée vers la maximisation des profits générés par l’exportation au détriment de l’alimentation du pays, des conditions de vie des producteurs d’alimentation et de leurs salariés, ainsi que des conséquences environnementales générées par ce type d’activités ».

Devant près de 80 personnes, dont un certain nombre d’agricultures non syndiqués ni encartés dans aucun parti politique, Emmanuel Maurel est alors notamment revenu sur la manière dont l’ensemble des traités de libre-échange ratifiés par l’Union européenne (qu’il combat sans relâche depuis 2014, souvent dans l’indifférence générale, au sein de la Commission du Commerce International du Parlement européen) exposent nos agriculteurs à une féroce concurrence déloyale. Révélateurs du « double discours européen », des accords tels que ceux qui viennent d’être signés avec le Chili ou le Kenya visent à faciliter l’entrée au sein de l’UE de produits agricoles cultivés à l’aide de traitements qui contreviennent à la réglementation européenne contraignant nos agriculteurs en vue de respecter nos objectifs environnementaux et sanitaires. L’avantage de ces produits est qu’ils sont moins coûteux que leurs équivalents cultivés sur le sol européen dans la mesure où les législations des États dont ils proviennent ne tiennent nullement compte des conséquences environnementales générées par leurs modalités d’exploitation.

Durant ses deux mandats de député européen, Emmanuel Maurel s’est taillé une réputation de bosseur, reconnu comme spécialiste des questions de commerce international, particulièrement en pointe contre le dogme du libre-échange généralisé qui domine au sein de la Commission européenne et dans la majorité de droite du Parlement européen…

De tels traités sacrifient donc nos agriculteurs au nom d’une délocalisation de la pollution et ce, d’autant plus que l’octroi de préférences commerciales en matière agricole au Chili vise en contrepartie à assurer notre approvisionnement en ressources minières stratégiques pour la conception des technologies nécessaires à la transition énergétique, à l’image du lithium ou du cuivre. En d’autres termes, nos agriculteurs sont les variables d’ajustement de notre approvisionnement en ressources minières. Emmanuel Maurel a par ailleurs rappelé que, pour couronner le tout, les éventuels différends entre États et investisseurs privés susceptibles de découler de ce type d’accords sont tranchés devant des tribunaux internationaux composés d’arbitres particulièrement partiaux dont les sentences se révèlent, dans bon nombre de cas, favorables aux multinationales. Pour ne citer qu’un seul exemple, rappelons le cas de l’Équateur, condamné à de nombreuses reprises pour avoir cherché à nationaliser les ressources pétrolières à la suite de l’élection de Rafael Correa en 2007.

Si les États désireux de reprendre la main sur ces logiques de marchés risquent ainsi de se confronter à cette architecture juridique internationale, il est nécessaire de rappeler que ces mécanismes de dumping sont par ailleurs institués à l’échelle même du continent européen. Et c’est la raison pour laquelle Emmanuel Maurel a, tout en réaffirmant sans ambiguïté la nécessité de soutenir l’Ukraine face à l’agression russe, alerté sur les dangers que représenterait l’intégration de cet État au sein de l’UE, en particulier d’un point de vue économique. En effet, un abaissement des droits de douane pour des produits agricoles tels que le blé, le sucre, les œufs ou encore, la volaille, ne conduirait qu’à accroître ces mécanismes de concurrence déloyale au sein même de l’UE, la main d’œuvre agricole étant notamment moins rémunérée en Ukraine et les prix, par conséquent plus avantageux.

Emmanuel Aze, responsable de la Confédération Paysanne dans le Lot-et-Garonne

Ces mécanismes sont en effet inhérents à la construction européenne qui, comme l’a rappelé Emmanuel Maurel, repose sur une sainte trinité dont les trois piliers sont l’austérité budgétaire, la libéralisation des échanges et la concurrence libre et non faussée. Un constat largement partagé par la salle, ainsi que les différents intervenants, en particulier Emmanuel Aze qui a rappelé que le premier traité de libre-échange auquel nous sommes exposés est le marché unique européen.

Il est donc urgent que la puissance publique encadre ces mécanismes de marché, desquels la fixation des prix des produits agricoles doit être extraite, en vue de protéger nos agriculteurs face à la volonté permanente de la grande distribution de rogner sur leur rémunération afin de rester compétitive sans avoir à toucher aux marges de ses intermédiaires.

Vincent Arpoulet, référent départemental de la Gauche Républicaine et Socialiste en Lot-et-Garonne (et grand spécialiste de l’Amérique latine, atout précieux au moment se débattent les accord avec le Mercosur et le Chili) et Constance Renard, membre de la Commission Agriculture du Parti Communiste Français (PCF), sont également intervenus dans les débats

Un certain nombre de propositions ont été avancées en vue de rompre avec ces mécanismes iniques de fixation des prix, qu’il s’agisse des “prix plancher” rémunérateurs défendus par le PCF ou du coefficient multiplicateur proposé par le MODEF, suivant lequel les augmentations des marges intermédiaires (qui sont plafonnées en vue d’éviter une explosion des prix à la consommation) se traduisent obligatoirement par des hausses des prix d’achat aux producteurs. Autant de mécanismes visant à assurer une juste rémunération à nos agriculteurs tout en préservant le pouvoir d’achat des consommateurs.

Rendre accessible à tous une alimentation de qualité, c’est en effet tout l’enjeu de la réorientation de notre modèle agricole. Cela suppose de rompre avec la double dynamique sur laquelle repose le développement de l’agriculture productiviste, à savoir la concentration des terres entre les mains d’un faible nombre d’agriculteurs d’une part, et d’autre part, l’uniformisation des cultures visant à privilégier celles qui sont les plus à même d’être exportées en grande quantité, au détriment de toutes celles qui sont susceptibles d’assurer notre autosuffisance alimentaire. C’est ainsi que nous importons un certain nombre de produits agricoles ne respectant pas nos normes sociales et environnementales qui pourraient pourtant être cultivés localement sur notre territoire.

Raymond Girardi, représentant du Mouvement de défense des exploitants familiaux (MODEF), dans le Lot-et-Garonne

Face à ce constat, deux objectifs s’imposent : redistribuer les terres et rediversifier les productions, ce qui suppose, dans les faits, une augmentation significative du nombre d’agriculteurs. Or, « les vocations existent, les lycées agricoles sont remplis », affirme Raymond Girardi. Si ces vocations ne se concrétisent pas, si bon nombre de tentatives d’installation échouent par ailleurs rapidement, c’est parce que les agriculteurs ne peuvent pas vivre de leur travail. Par conséquent, pas de souveraineté alimentaire sans revalorisation des revenus agricoles, constat là encore largement partagé par la salle, qui a largement contribué à alimenter ces échanges constructifs.

De riches échanges conclus par Emmanuel Maurel sur une note d’espoir : le récent rejet du CETA par une institution réputée aussi conservatrice que le Sénat, sous l’impulsion du groupe communiste l’ayant inscrit à l’ordre du jour de sa niche parlementaire, démontre que nous disposons de leviers institutionnels en vue de rompre avec le cadre économique néfaste à l’origine de la crise agricole. Répondant ainsi aux interrogations d’Emmanuel Aze qui s’est notamment demandé comment réformer démocratiquement un système européen qui ne l’est pas, Emmanuel Maurel a rappelé que le Parlement européen peut avoir un réel poids sur les orientations de la Commission. D’où la nécessité de voter massivement, à l’occasion des élections européennes à venir, pour des élus de combat qui pourront faire primer l’intérêt général sur les logiques de marché. C’est précisément l’objectif porté par la liste d’Union de la Gauche conduite par Léon Deffontaines.

Le Passage d’Agen était plein le mercredi 27 mars 2024… ici lors de la prise de parole de Guilhem Mirande, secrétaire départemental du Lot-et-Garonne du PCF

Alertes sur le climat : pour l’agriculture, des solutions existent !

Fin mars, coup sur coup 2 rapports confirment les effets alarmant du dérèglement climatique :

  • Hausse exponentielle des catastrophes et sinistres climatiques dont le coût annuel est estimé par « France Assureurs » ce 27 mars à 6,5 milliards d’euros pour 2023 ;
  • Hausse des températures et des vagues de sécheresse qui frappe les régions viticoles (revue scientifique Nature du 26 mars) au point que le climatologue Serge Zaka peut envisager de voir le bordelais et la bourgogne déménager en Bretagne ou en Normandie, le champagne dans des pays du nord et l’Occitanie accueillir vins andalous et cépages marocains.

Ces rapports nous alertent sur le dérèglement climatique accéléré dû aux activités humaines qui menacent l’avenir de nos sociétés et la biodiversité.

Toutefois, ils portent aussi des propositions proches des recommandations du Haut Conseil pour le Climat de janvier 2024 avec, notamment, l’adoption par le Parlement français d’un plan d’action permettant la mise en place d’un système agricole et alimentaire bas carbone, résilient et juste ainsi que de réelles propositions pour un nouveau « new deal européen ».

Pour les régions viticoles qui doivent se recomposer cela peut passer par un changement de cépages (grenache au lieu de chardonnay ou sauvignon) et la réimplantation de cépages anciens (Clinton et isabelle en Lozère). Pour la viticulture, comme pour l’agriculture méditerranéenne, la clé réside dans la diversification mais aussi dans l’adoption de nouvelles pratiques telles que la culture en buisson, la mise en culture de grenades et agrumes, l’implantation de panneaux photovoltaïques protégeant les cultures, l’agroforesterie faisant se côtoyer arbres fruitiers et autres cultures, les filets protecteurs de la grêle et autres ravageurs.

Dans le secteur des assurances « l’initiative sécheresse » propose de prévenir la menace des fissures par retrait-gonflement qui menace près de 11 millions de maisons en France avec une approche liée à l’habitat durable.

Cela nécessite courage, volonté, engagement collectif et soutien des pouvoirs publics, loin de ce que la droite française au gouvernement et la Commission européenne opèrent avec le soutien de l’extrême droite dans une union mortifère des climato-sceptiques et des ultralibéraux.

Contrairement au gouvernement, nous aurions maintenu les 2,2 milliards d’euros initialement prévus pour l’écologie, le développement et les mobilités qui participent à la lutte contre le dérèglement climatique et bénéficient à l’emploi et aux entreprises.

Nous proposons de renverser la table pour assurer la souveraineté alimentaire de la France avec l’harmonisation de règles européennes pour l’environnement et les droits sociaux et en s’attaquant aux pays peu regardant en ces domaines qu’ils soient intra ou extra européens. Avec la Politique Agricole Commune (PAC), nous pourrions faire face aux crises structurelles de l’agriculture (sécheresse désormais endémique dans les Pyrénées-Orientales, par exemple) et nous pourrions financer les investissements durables ; nous voulons aider sur la base de projets par filière et non plus à l’hectare des grands céréaliers.

Nous voulons mettre un terme aux accords multilatéraux qui broient l’agriculture française en la mettant en concurrence avec des agricultures aux coûts moins élevés, sans « clauses miroir » sur les normes écologiques et fiscales. Dans ce domaine, contrairement à ce que semble envisager le gouvernement (comme Valérie Hayer le laisse entendre), nous notifierions à la Commission européenne le vote de désapprobation du CETA (Canada) par le Parlement français afin de le rendre inapplicable sur notre territoire.

On le voit en matière d’adaptation au changement climatique, tant pour l’agriculture que l’habitat, les propositions, que la Gauche Républicaine et Socialiste porte et met dans le programme de la liste de Gauche Unie pour le monde du Travail, font la différence dans le débat politique atone et caricatural de ce début de campagne pour les élections européennes du 9 juin 2024.

Alain Fabre-Pujol

Emmanuel Maurel et Violette Folgado ouvrent la campagne en Bergeracois

Les 25 et 26 mars derniers à Bergerac, les camarades du Parti Communiste Français et de la Gauche Républicaine et Socialiste de Dordogne ont eu le plaisir d’accueillir Emmanuel Maurel, député européen GRS, et Violette Folgado, candidate PCF de Dordogne, dans le cadre de la campagne des élections européennes du 9 juin prochain.

Liste de rassemblement conduite par Léon Deffontaines, membre du PCF avec La Gauche Républicaine et Socialiste, l’Engagement et les Radicaux de Gauche, “La Gauche unie pour le monde du travail” réunit syndicalistes, et militants des partis autour du slogan “Reprenons la main en France et en Europe”.

Emmanuel Maurel, député européen GRS, aux côtés de sa colistière communiste de Bergerac, Violette Folgado…

Le premier temps fort de cette campagne a été ouvert par Julie Tejerizo, membre du PCF Bergerac et élue municipale d’opposition lors d’une réunion publique rassemblant une centaine de participants dont de nombreuses personnes hors des partis. Ils se sont montrés très intéressées par les propos des candidats, les interpellant sur la défiance que suscite le fonctionnement de l’Union Européenne parmi nos concitoyens, et l’éloignement ressenti concernant les décisions prises à Bruxelles.

Cette défiance s’est traduite par une abstention forte lors des derniers scrutins et explique pour partie la montée des votes en faveur des partis d’extrême droite.

Les candidats de la Gauche Unie font salle pleine à Bergerac

Emmanuel Maurel a explicité et illustré cette défiance en rappelant les “erreurs” démocratiques commises par les dirigeants européens depuis le traité de Maastricht, mais il a tenu à rappeler le rôle de chaque député européen qui doit représenter les intérêts de son pays au Parlement, insistant sur un des thèmes de la campagne, à savoir la souveraineté. Il a également affirmé avec force le pouvoir et les leviers d’action de chaque élu au Parlement Européen, à travers ses amendements, son travail en commission et ses votes en plénière. Il a convaincu l’auditoire qu’aujourd’hui un député européen possède plus de poids qu’un député l’Assemblée Nationale. Il a pu donner nombre d’exemples de répercussions des décisions prises par l’Europe dans la vie quotidienne des Français, que ce soit concernant le commerce, la santé, l’énergie ou encore l’agriculture.

Parmi le public, Karine Mazot – co-référente départementale de la GRS de Corrèze -, Dominique Ragot et Hélène Lehmann (conseillère municipale de Bergerac et membre du collectif d’animation national de la GRS) – co-référents départementaux de la GRS en Dordogne.

D’agriculture il en a été question le lendemain lors d’une rencontre organisée et introduite par Hélène Lehmann, membre de la GRS Dordogne et élue municipale d’opposition, avec des éleveurs d’Agrobio , dans les locaux de l’abattoir public de Bergerac en présence de son directeur et du personnel de la structure. Les traités de libre-échange, passés et à venir, ont été dénoncés tant par les professionnels présents que par les candidats, en raison de leurs effets catastrophiques sur le climat, la sante, la souveraineté alimentaire et les revenus des agriculteurs. La question d’une organisation territoriale des services publics comme celui rendu par l’abattoir de proximité de Bergerac a aussi fait consensus.

Rencontre du député européen avec les éleveurs d’Agrobio , dans les locaux de l’abattoir public de Bergerac en présence de son directeur et du personnel de la structure, le 26 mars 2024

Les candidats ont été très sensibles aux problématiques du coût de l’énergie pour la structure, rappelant une des propositions de la liste qui est de sortir du marché européen de l’énergie pour baisser les factures. Emmanuel Maurel a appelé à envoyer au Parlement Européen le plus possible de députés de la “Gauche Unie pour le monde du travail “, pour que l’Europe cesse d’être “l’idiot utile du commerce mondial”.

Compte-rendu effectué par
Hélène Lehmann et Dominique Ragot

Une visite d’agrobio qui rentre dans le concret
Des référents départementaux de la Gauche Républicaine et Socialiste heureux

Face à l’incompétence économique des néolibéraux, reprenons la main !

Une journaliste, Manon Romain, s’est penchée dans Le Monde sur les évolutions à long terme des questions de dette, déficit, recettes et dépenses en France. Cet article1 est censé « décrypter les faits » pour permettre d’analyser les récentes communications du gouvernement français de monsieur Attal, surpris par un énorme dérapage du déficit en 2023.

Madame Romain a bien soupçonné que des évolutions de long terme se jouent, mais n’a pas dit B après avoir dit A. Dans un premier tableau, elle constate que depuis 1980 le déficit et la dette dérapent toujours suite à des crises exogènes de dimension mondiale.

1https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/03/26/visualisez-l-evolution-de-la-dette-et-du-deficit-francais-depuis-1980_6224326_4355770.html?


L’article du Monde souligne bien que ce sont des crises exogènes, mondiales, qui accélèrent le ratio de dépenses publiques par rapport au PIB. La part des recettes publiques rapportée au PIB progresse aussi, reflet de la croissance démographique.

C’est un phénomène que nous avons souvent décrit, c’est une réalité que les technocrates des ministères des finances documentent depuis les années 1970, et que nous constatons au moins depuis 1905. Nous l’évoquions dans un article intitulé A propos de la part des dépenses publiques dans le PIB en 20191.

Dans les commentaires de l’article du Monde, un conservateur s’interroge : “Sarkozy n’est quand même pas à l’origine de la crise des subprimes de 2008” – et bien indirectement, lui et ses alliés idéologiques, tant aux États-Unis qu’en Europe, ont facilité par leur idéologie de privatisation et de dérégulation de la finance les conditions d’apparition de la crise financière de 2007-2008… Crise qui rappelle des mécanismes déjà vus à l’œuvre en 1987, mais qui surviens sans les outils de contrôle et d’action disponibles encore en 1987.

Pire : c’est la politique de l’alliance Cameron-Merkel-Sarkozy-Rutte qui aggrave encore la crise financière mondiale en la laissant contaminer sans aucune raison la dette publique européenne, puis, par une politique de rigueur menée trop tôt avec le traité Merkozy en zone Euro, une récession européenne en 2012-2013, entièrement fabriquée par les européens en pleine reprise de la croissance mondiale.

Seule l’Allemagne, grâce au maintien de son industrie orientée vers l’exportation, et la subvention du maintien des emplois qualifiés de ses filières industrielles, s’en tirera un peu mieux que le reste de l’Europe, les Pays Bas choisissant de se transformer en paradis fiscal européen, le Royaume Uni de quitter l’Union.

1https://librechronique.net/2019/04/08/a-propos-de-la-part-des-depenses-publiques-dans-le-pib/


La croissance des pays européens connaît après le rebond de 2009/2010 une nouvelle plongée en 2012 et 2013, décrochant des États-Unis et du reste du monde. L’Allemagne en sort plus vite, et sauve son niveau d’emploi quand les autres pays connaissent un fort chômage

Il faudra la chute des prix du pétrole et du gaz en 2015, due à la concurrence entre Russie et OPEC d’une part, et États Unis avec les gaz de schiste d’autre part, pour relancer l’économie européenne, et notamment française. Nous défendions déjà en 2017 l’idée que les tenants de la baisse du ratio des dépenses publiques par rapport au PIB devraient d’abord se concentrer sur la prévention de crises mondiales exogènes telles que guerre mondiale, crise financière ou autres type de crise mondiale, pour empêcher de brutales accélération de ce taux.

Madame Romain, dans son article « décrypteur », s’accroche à une explication classique et non vérifiée de l’explosion de la dépense publique en point de PIB sans s’interroger sur l’évolution du PIB lui même.

Avec la baisse des taux, un taux d’endettement à 100% du PIB est plus soutenable en 2023 qu’un taux d’endettement à 60% en 1981.

De plus, elle sous estime un fait majeur du quart de siècle depuis 1997 : la baisse continue des taux d’intérêts en Europe qui a presque divisé par deux le poids de la charge de la dette en point de PIB, alors même que la dette doublait presque en points de PIB. La réalité, c’est que même avec un taux de dette à 110%, et un déficit qui a dérapé à 5,5% du PIB, les comptes publics et la dette sont PLUS soutenables en 2024 qu’en 1997 (ou en 1981). Les critère dits de Maastricht ont été définis à une époque où la charge de la dette, c’est à dire son prix, était supérieur à 3% du PIB. Aujourd’hui, elle est de 2% seulement. C’est tout à fait raisonnable, et plutôt dans la moyenne européenne. C’est pourquoi les marchés financiers n’ont pas du tout réagi aux annonces du dérapage, comme Le Monde le constate par ailleurs, et au grand désespoir des Ifrap et autres Coe Rexecode qui appellent de leurs vœux des cataclysmes prophétiques autoréalisateurs1.

1https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/03/26/malgre-le-derapage-du-deficit-francais-aucune-tension-sur-les-marches-financiers_6224257_823448.html?


C’est ce qu’illustre cette statistique : le coût de la dette s’est effondrée alors que son montant a presque doublé. La remontée de 2022-2023 s’explique par la légère remontée des taux, mais en même temps, l’inflation baisse la part de la dette rapportée au PIB en 2023 (-1 point de PIB).

La France a fait moins bien que l’Allemagne ou d’autres pays dans l’amélioration de la charge de la dette. L’Allemagne, en 1997, suite à la réunification, fait face à une charge de la dette supérieure à la France en points de PIB. Aujourd’hui, cette charge est même inférieure à 1,5%.

Ce qui a sauvé l’Allemagne, ce n’est pas la baisse des dépenses, elles n’ont pas baissées, mais une politique orientée sur l’exportation par le maintien des bassins industriels, en utilisant l’avantage monétaire de l’euro et l’abondance d’énergie fossile pas chère russe ou allemande (charbon), dans un marché européen de l’énergie structuré à l’avantage de l’industrie allemande et au désavantage de l’industrie française.

Entre 1997 et 2023, la principale évolution négative pour la France, c’est qu’alors que le pays étant toujours en démographie positive, les besoins en infrastructures publiques augmentent, son taux d’industrialisation passe de 18% à 8%, et sa balance commerciale, d’un excédent de 39 milliards à un déficit de 100 milliards ! C’est ce qu’illustre cette statistique : le coût de la dette s’est effondrée alors que son montant a presque doublé. La remontée de 2022-2023 s’explique par la légère remontée des taux, mais en même temps, l’inflation baisse la part de la dette rapportée au PIB en 2023 (-1 point de PIB). Ainsi, la croissance de la dépense publique est surtout tirée par les dépenses sociales, conséquences de la croissance démographique.

Le solde démographique des naissances et des décès reste en France largement positif entre 1975 et 2024. Il est négatif dès 1975 en Allemagne.

L’accroissement naturel de la population française reste supérieur à 3,5% tout ce quart de siècle ! Les dépenses augmentent au rythme de cette croissance démographique de 3,7% par an pendant 25 ans. Cette évolution remarquablement synchrone n’a pourtant JAMAIS été thématisée dans le débat public.

Rappelons le : la croissance démographique allemande sur la période est entièrement due à des migrations extérieures d’adultes déjà formés. Le poids social et en termes de finances publiques n’est pas porté par l’Allemagne, dont la population et le nombre d’enfants baissent sur la période, mais par les pays d’émigration. La France, elle, a du créer des écoles, des crèches, des cliniques pédiatriques, etc. pour près de 2000 milliards de plus que l’Allemagne entre 1975 – le solde démographique des naissances et des décès reste en France largement positif entre 1975 et 2024, il est négatif dès 1975 en Allemagne, les deux Allemagne passent en déficit démographique, il y meurt plus qu’il n’y nait – et 2024.

La pyramide des âges en France n’est pas ce sapin inversé que les démographes craignent depuis 1975, et que les bourgeoisies françaises appellent de leur cœur depuis 1990. Du coup, la France a trahit sa jeunesse, trahit l’énergie même de la Nation, en sous investissant dans l’éducation, la santé, les services publics, et en ne travaillant pas à créer des secteurs productifs hautement qualifiés pour absorber les jeunes actifs. La conséquence, c’est la persistance du chômage, et la dégradation de la démocratie.

Mais les élites françaises ont eu peur dès 1993 et une réforme des retraites portée par le ministre du budget de monsieur Balladur, un certain Nicolas Sarkozy, d’un effondrement démographique français à l’allemande. Depuis le début des années 1990, la politique française passe à un discours malthusien en complète contradiction avec la réalité des évolutions démographiques et des besoins économiques et sociaux du pays.

La première crise d’intégration, c’est que la France n’a pas voulu investir pour intégrer les nombreux enfants nés en France, de Français, entre 1990 et 2024. D’ailleurs, l’extrême droite dissimulera le sujet en faisant croire que tous les Français qui naissent en France seraient des étrangers, assimilant la jeunesse française à un obstacle pour démanteler l’Etat.

C’est le Grand Mensonge : le bilan démographique français rendait superflu l’immigration du travail, qui s’effondre dès les années 1990. Il n’y a pas eu de grand remplacement, mais un grande ignorance de la jeunesse de ce pays.


L’immigration n’est pas l’explication du solde démographique dynamique des
Français. Jusqu’en 2015, les français voulaient des enfants, voulaient investir dans l’avenir de la Nation et dans la vie. Depuis, la bourgeoisie libérale fait tout pour dégoûter les français de maintenir une démographie dynamique : ça coûte trop cher. La France a en effet dû investir, sur la base du calcul de l’Insee évaluant à 180 000 euros les dépenses sociales et privées pour éduquer un enfant et en faire un adulte citoyen et productif, 2000 milliards de plus que l’Allemagne entre 1975 et 2023. L’Allemagne, elle, est en déficit démographique depuis 1975, compensant par l’immigration, c’est à dire, en faisant porter le poids économique et social de l’éducation d’un enfant jusqu’à l’âge adulte à d’autres pays.

S’il y a eu un grand remplacement, c’est celui de l’industrie, délocalisée avec ses emplois hautement qualifiés bien rémunérés, mais souvent syndiqués, par des emplois de service à qualification interchangeable, faibles revenus et faiblement syndiqués. Le PIB voit un remplacement d’emplois dans des secteurs à forte augmentation de la productivité à des secteurs de service à faible augmentation de la productivité. De plus, le déficit commercial coûte chaque année 4 points de PIB à l’économie française.


Les privatisations, les aides aux entreprises, la libéralisation du droit du travail et la baisse des rémunérations du travail n’ont pas permis de rendre l’économie française plus compétitive, au contraire ! Le solde commercial s’effondre pour atteindre 100 milliards en 2023, et s’explique notamment par les choix économiques des années 1990-2010 favorisant la baisse des industries et activités de production, et le retrait de l’État comme architecte de l’économie.

Résultat : alors que les dépenses, poussées par la démographie, augmentent de 3,7% par an, le PIB connaît une progression moyenne de long terme de seulement 3%. C’est cela, l’explication de l’augmentation du poids des dépenses publiques dans le PIB, et non un “Etat communiste”. Si la démographie française avait été conforme à l’allemande, nous aurions 6 millions d’habitants en moins, c’est à dire le montant du nombre de chômeurs et de précaires, et des dépenses publiques inférieures de près de 12 points de PIB – comparable à la moyenne de l’Union. Toute la bourgeoisie libérale française a gouverné contre les enfants de la France. Les privatisations, les aides aux entreprises, la libéralisation du droit du travail et la baisse des rémunérations du travail n’ont pas permis de rendre l’économie française plus compétitive, au contraire ! Le solde commercial s’effondre pour atteindre 100 milliards en 2023, et s’explique notamment par les choix économiques des années 1990-2010 favorisant la baisse des industries et activités de production, et le retrait de l’État comme architecte de l’économie. L’évolution des dépenses publiques en période de croissance démographique ne pouvaient pas être le principal axe d’action pour contrôler le déficit et l’évolution de la dette. Et pourtant, c’est ce qui s’est passé ! Tout le discours politique, et on voit l’influence que cela a pris y compris sur la journaliste du Monde, s’est concentré sur la réduction des dépenses. Ajoutant que l’article, comme d’ailleurs beaucoup d’éditorialistes, n’interrogent pas l’explosion de la dépense publique à destination des entreprises.


C’est lorsque l’État possède des entreprises privées, lorsqu’il est interventionniste, que notre balance commerciale fut excédentaire. Depuis les recettes libérales, et les privatisations, notre solde s’effondre. L’économie française, la sphère privée, doit s’endetter chaque année de 100 milliards pour compenser ce déficit commercial.

Elle est passée, alors même que l’actionnariat public passait de plus de 20 % du PIB et à moins de 4%, de moins de 1% du PIB en 1979 à 5% du PIB en 2023 ! Dit autrement : on a vendu les entreprises publiques, mais le budget de l’Etat continue de refinancer les actionnaires privés à des montants largement supérieurs aux revenus que l’Etat ne perçoit plus de ses dividendes, ou, indirectement, par le soutien de l’activité, par l’augmentation des recettes fiscales.

Si monsieur Attal et monsieur Le Maire parlent de baisser les dépenses sociales, ils oublient que les français modestes ont été durement touchés par l’inflation. C’est une recette infaillible pour détruire la cohésion nationale, abîmer la démocratie, et favoriser l’arrivée au pouvoir de madame Le Pen. Macron et ses alliés n’ont rien appris de l’histoire, notamment de l’avant seconde guerre mondiale.

Pourtant, dans l’histoire de France, toute tentative dans le sens d’une baisse des déficits par la baisse de la dépense a toujours été déflationniste : les salaires dans leur ensemble ont perdu du pouvoir d’achat, le chômage augmenté, et l’activité économique en a été ralentie. La crise sociale a toujours favorisée des partis politiques non républicains, et la conscience démocratiques en est affaiblie. De plus, le ralliement des élites technocratiques françaises au consensus libéral européen les ont amené à privilégier les filières non productives dans l’économie, privant celle-ci de moteurs de croissance privée. La privatisation des activités privée en main publique est un très bon exemple de ce fiasco économique sur la création de valeur et de croissance du PIB. L’investissement privé d’ailleurs est bien loin d’augmenter au rythme des aides aux entreprises : au contraire, ce sont les dividendes et les rachats d’actions qui ont exploses, au profit d’un actionnariat que Nicolas Sarkozy, des 1993 sous Balladur, voulait voir s’internationaliser.

Le retour sur investissement des aides publiques aux entreprises est pour le moins tenu. Dans n’importe quelle entreprise privée, un tel résultat a un tel coût entraînerait le licenciement des dirigeants. Macron avec son CICE pérennisé, Le Maire et avant eux Sarkozy qui avait lancé les crédits d’impôts et exemptions fiscales, ne méritent que l’opprobre et la honte. Pierre Moscovici, en ne permettant que des audits très partiels des aides publiques aux entreprises par la cour des comptes qu’il préside, protège surtout sa propre réputation, lui qui en 2012-2013 mis en place l’un des pires plan en la matière, et qui en resta un adepte en tant que commissaire européen.

Nous rémunérons avec nos impôts des fonds d’investissement étrangers. Maintenant, l’histoire de France nous enseigne, qu’après des périodes de crise mondiale augmentant la dépense publique, c’est par l’action volontaire, souveraine, et industrielle publique que la France a stimulée sa croissance de telle manière qu’elle dépasse celle de ses dépenses, réduisant la part du public dans le PIB. C’est la leçon des années 1937-39, de 1944-1972, de 1997-2003.

Revenons un moment sur les privatisations. En 1983, après les nationalisations qui répondaient à un moment de crise profonde de l’économie privée française et visait à recapitaliser en l’adossant à l’actionnaire immortel qu’est l’état, le poids du secteur public concurrentiel représentait 20% du secteur privé, 25% de l’industrie, mines, chimie, 70% de l’énergie, et 35% des exportations. Le poids de l’état passe ainsi de 1985 à 2023 de 25% de la valeur ajoutée, 12% des effectifs salariés totaux, à moins de 5% de la valeur ajoutée et des effectifs salariaux.

Il ne reste plus que trois grands secteurs où l’Etat est encore présent : la Poste et les transports publics, l’électricité avec EDF. Les privatisations ont rapportées entre 1986 et 2020 près de 130 milliards d’euros à l’Etat. C’est en moyenne 4 milliards par an, mais avec de gros pics, et surtout, ces revenus ne sont pas renouvelables. Elles l’ont privé cependant du revenu généré par ces activités qui s’établissait en 2005 encore à plus de 4 milliards de dividendes par an. Enfin, l’Etat s’est privé d’un levier sur l’économie réelle.

La chute de l’industrie et la chute du commerce extérieur sont ainsi directement liés aux privatisations et au retrait de l’Etat de la sphère productive.

En conclusion : l’article du Monde est partial. La journaliste a bien trouvé des informations pertinentes, mais n’a pas su contextualiser l’élément le plus important de sa démonstration : l’évolution du PIB.

Comment en effet construire une argumentation sur le ratio de dépenses, de dette ou de déficit au PIB sans se pencher sur le PIB lui même ? Enfin, un point n’aura été traité ni dans l’article du Monde, ni ici, ou seulement par allusion: le facteur récessif de la baisse des dépenses, notamment des dépenses sociales. En effet, on sait que l’une des erreurs gravissimes du FMI et des organisations internationales au moment des attaques sur les dettes publiques européennes en 2010, ce fut de sous estimer combien la baisse des dépenses, en accélérant la baisse du PIB, fera s’effondrer encore plus vite les recettes.

Olivier Blanchard, chef économiste du FMI, en publiera même une note demandant pardon. L’exemple de cette erreur gravissime est la Grèce : la dette représentait 110% du PIB en 2010 quand la crise de son refinancement commence. En 2023, la dette, après 13 ans de baisse des dépenses, de privatisation forcées, et de saccage social avec des conséquences humaines tragiques, est à … 200% du PIB. Les politiques menées de baisse des dépenses ont été contre productives. Il aurait été de meilleur conseil d’investir en Grèce. Par ailleurs, la démocratie grecque en est ressortie profondément affaiblie.

Revenons maintenant à nos affaires françaises :

1. Le dérapage du budget était prévisible. Certains avaient mis en garde dès Juillet, notamment dans une note de la direction du Trésor. Des économistes, le FMO, l’OCDE s’étaient inquiétés de la baisse des recettes dès la fin de l’été. Le refus du gouvernement et de la majorité relative de se saisir du sujet renforce le soupçon, terrible, qu’ils savaient avoir forcé de faire voter un budget insincère à coup de 49.3, se privant d’ailleurs des amendements adoptés par une majorité transpartisanne en commission des finances. Non seulement ils sont nuls sur leur principal argument de compétence, mais en plus, ils le font sciemment.

2. La cour des comptes a évalué très partiellement le principal facteur d’explosion des dépenses et de réduction des recettes depuis 2013, c’est à dire les aides aux entreprises et les crédits d’impôts aux entreprises. Si la cour des comptes considère comme « efficaces » les aides exceptionnelles de 2020-2022, sans préciser les critères d’efficacité, elle regrette l’absence de contrôles et de ciblage. Elle note que la loi, qui interdisait d’utiliser les aides pour payer des dividendes ou faire des rachats d’actions, n’a pas été suffisamment mise en œuvre. Mais c’est depuis 2013 en cumulé 600 milliards de dépenses et d’abandon de recettes à destination des entreprises que l’on ne voit ni dans l’investissement, ni dans l’emploi, ni dans la ré-industrialisation, ni dans la compétitivité, ni dans le commerce extérieur. On retrouve l’essentiel de ces montants par contre dans l’augmentation des dividendes – 10 milliards de plus que ce que l’Allemagne distribue chaque année – et des rachats d’actions.

3. Contrairement aux cris austéritaires de LR et du RN – qui prévoient la même politique en plus dure, le RN prévoyant un volume pour une petite partie de sa clientèle électorale qui est différente de celle des macronistes – contrairement donc aux Cassandre de la réduction des dépenses publiques, le coût de la dette et la réaction des marchés est … neutre. Les marchés avaient déjà intériorisé cette possibilité et ont confiance dans les capacités du pays d’honorer sa dette à court et long terme. Les taux sont restés stables, et en dessous de la moyenne européenne, l’écart avec l’Allemagne (le spread) l’un des plus faibles de l’eurozone1. C’est l’avantage de la réduction du poids de la charge de la dette depuis 25 ans.

Les conséquences : La compétence du « Mozart de la Finance » est révélée : le roi est nu. Comme le disait Ian Brossat ce matin du 28 mars : « il a fallu un président banquier pour ruiner la France ! » Bien sûr, il y a exagération : la France n’est pas ruinée, pas encore.

1https://www.mtsmarkets.com/european-bond-spreads

Helen Stratton (1899)

Par contre, tant Attal, ministre du budget au moment du vote par 49.3, Le Maire et Cazenave, responsables de l’exécution de ce budget, que Macron ont prouvé leur incompétence. On pourrait encore penser que, s’ils étaient pragmatiques et compétents, ils apprendraient de leurs erreurs répétées. Mais les premières mesures annoncées, 20 milliards de baisse des dépenses, une nouvelle réforme de l’assurance chômage, prouvent qu’ils n’ont tiré AUCUNE leçon de 40 ans d’erreurs économiques.

On l’a démontré plus haut : Pierre Moscovici est juge et partie et ne peut donc engager depuis la cour des comptes la révision de ces politiques désastreuses sans remettre en compte sa propre politique ministre de l’économie de François Hollande.

On peut même voir dans le tournant libéral initié trois fois par Laurent Fabius, depuis président du conseil constitutionnel, les prémices des corrections vers l’erreur de politiques de relance en cours de réussite. Ce sont des décennies de fausse route économique, industrielle, sociale, et finalement également législative qu’il va falloir corriger. Cela suppose de Reprendre la main !

L’alliance du CNR se retrouve dans la liste des Européennes de la Gauche Unie, avec les socialistes de la GRS, les radicaux de LRDG, les syndicalistes, les communistes du PCF et les républicains souverainistes de l’engagement

Si l’histoire ne se répète pas, il apparaît évident que les facteurs et les principes régissant le programme du conseil national de la résistance ont façonné à la fois la période de croissance justement partagée la plus longue de l’histoire de France, et construit les institutions, notamment l’Unédic et la sécurité sociale, expliquant la bonne résilience de l’économie française malgré le régime incompétent des libéraux.

C’est pourquoi nous envisageons de reprendre la main en alliance avec ceux qui avaient participé au CNR – les radicaux socialistes, les communistes, et que ce rassemblement initial a vocation à grandir.

Mathias Weidenberg

Emmanuel Maurel et Céline Piot pour la Gauche Unie à Mont-de-Marsan le 26 mars 2024

C’est mardi 26 mars 2024 que la campagne pour les élections européennes de la liste « La Gauche Unie pour le monde du travail » a été officiellement lancée dans le département des Landes avec la réunion publique à Mont-de-Marsan animée par Emmanuel Maurel et portant sur « L’Europe dans notre quotidien ».

Ayant réuni une centaine de participants, ce premier événement a été ouvert par Alain Baché (secrétaire départemental du PCF), Vincent Guibert (référent départemental de L’Engagement et 79e sur la liste) et Céline Piot (co-animatrice départementale de la GRS et 36e sur la liste). Ces derniers ont rappelé que cette liste, conduite par Léon Deffontaines (PCF), est une vraie liste de rassemblement de la Gauche républicaine et laïque (PCF, GRS, L’Engagement, Les Radicaux de Gauche) et du monde du travail (c’est la seule liste de Gauche composée d’un tiers de militants syndicaux) afin de remettre la question sociale au centre des préoccupations. Cette liste est une voix particulière à Gauche qui correspond à des attentes fortes. Le scrutin du 9 juin 2024 permet un vote de conviction. Il s’agit de reprendre la main !

Emmanuel Maurel (député européen sortant, animateur national de la GRS et 3e sur la liste) a ensuite développé cet élément central du programme.

Il a d’abord commencé son propos en rappelant les pièges dans lequel on veut nous enfermer : le débat sur la guerre en Ukraine tourne à un débat binaire « pro-guerre/anti-guerre » et se réduit à une dialectique « anti-Poutine/pro-Poutine » ; le débat sur la dette devient « dépenser ou diminuer le déficit ».

Puis il a brossé la situation actuelle de l’Europe qui connaît de nombreuses crises :

– la guerre en Ukraine : aider l’Ukraine ne signifie pas être cobelligérant.

– la crise énergétique. Mais si on remet en cause le marché de l’électricité européen, dont le prix est indexé sur celui du gaz, on est immédiatement soupçonné d’être un « frexiteur ». Pourtant, et à raison, l’Espagne et la Portugal sont sortis de ce marché.

– la crise agricole. Plusieurs groupes parlementaires ont voté en faveur des traités de libre-échange (que ce soit avec le Canada, le Vietnam, la Nouvelle-Zélande…). Il ne faut pas oublier que le TAFTA avait été défendu par Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie, qui accusait les opposants à ce traité d’être des « partisans de l’économie albanaise ». Or tous les grands pays sont protectionnistes, mêmes les États-Unis. Seule l’Union européenne ne l’est pas. Dès lors, nos produits sont concurrencés, de surcroît de façon inéquitable puisque les normes environnementales ne sont pas les mêmes selon les pays. André Chassaigne (député PCF) avait proposé l’idée des prix planchers il y a plus de dix ans, mais il n’a pas été écouté.

La pandémie du COVID-19 a révélé que la France n’a plus de souveraineté : elle ne produit plus de médicaments, de masques… Elle est devenue totalement dépendante. Reprendre la main, c’est donc retrouver la souveraineté, et, ce, dans de nombreux domaines :

– la souveraineté industrielle : grâce aux relocalisations.

– le souveraineté énergétique : grâce au mix énergique (nucléaire et énergies renouvelables).

– la souveraineté économique : redonner du pouvoir d’achat passe par le refus du dumping social et par la défense du service public, remis en cause par la concurrence privée.

– la souveraineté alimentaire : il faut arrêter d’importer ce que l’on produit.

– la souveraineté culturelle : l’exception culturelle française est constamment menacée (par exemple, tous les ans, les libéraux veulent remettre en cause le prix unique du livre qui, pourtant, sauve les libraires indépendants).

– la souveraineté numérique : comment accepter que l’entretien et la sécurité des centrales nucléaires françaises vont être harmonisés par un logiciel Amazon, que l’Éducation nationale ait passé un contrat avec Microsoft, que les données de santé soient sur un cloud américain ?

– la souveraineté démocratique (c’est-à-dire la souveraineté des peuples) : les décisions parlementaires ou référendaires sont souvent bafouées. Ainsi, concernant le MERCOSUR, la Commission européenne a laissé entendre que ce traité sera de toute façon signé par la France après le scrutin du 9 juin. Valérie Hayer (tête de liste Renaissance) a, quant à elle, déclaré que le CETA s’appliquera malgré le vote « contre » du Sénat français. Reprendre la main, cela veut dire aussi que, à chaque étape de la construction de l’Europe, il faut demander l’avis des peuples et le respecter.

L’UE n’est hélas ni un espace de coopération ni un espace harmonisé (en particulier dans le domaine fiscal). Il faut donc moins d’Europe sur certains sujets (nouvelles normes du permis de conduire, interdiction du foie gras…) et il en faut plus sur d’autres (l’immigration, l’investissement notamment dans le domaine du fret ferroviaire).

La majorité présidentielle macroniste veut imposer le duel RN/Renaissance. Mais les candidats de « La Gauche Unie pour le monde du travail » ne sont pas comptables des erreurs et errements des politiques néolibérales menées par l’Union européenne et appliquées en France (le marché dérégulé de l’énergie, la casse continuelle du service public, le dogme de la concurrence « libre et non faussée »…). Le Parlement européen a plus de pouvoirs que l’Assemblée nationale sous la Ve République. Nous pouvons reprendre la main, mais toutes les voix comptent !

“Non, nous ne laisserons pas tomber les Arméniennes et les Arméniens” – tribune dans Libération

Tribune de Léon Deffontaines, tête de liste de la Gauche unie pour les élections européennes, Emmanuel Maurel, député européen, en 3e position sur la liste de la Gauche unie et Pierre Ouzoulias, sénateur des Hauts-de-Seine, en 73e position sur la liste de la Gauche unie – publiée dans Libération le 20 mars 2024 à 19h48

A quelques mois des élections européennes, Léon Deffontaines, Emmanuel Maurel, Pierre Ouzoulias de la liste de la Gauche unie, dénoncent le contrat gazier signé entre l’UE et l’Azerbaïdjan en 2022. Celui-ci permet au pouvoir azéri de disposer d’une manne financière propice à la conduite d’une guerre inacceptable contre la République d’Arménie.

En juillet 2022, la Commission européenne s’est compromise aux yeux des soutiens de l’Arménie, en signant un contrat gazier avec l’Azerbaïdjan, valable jusqu’en 2027. Chacun a encore en mémoire cette sinistre photo d’Ursula von der Leyen, posant à Bakou, aux côtés du dictateur Aliev, au terme d’une conférence de presse dans laquelle elle plaida pour un renforcement du «partenariat existant» au nom d’un «approvisionnement stable et fiable» en gaz.

Justifié par la guerre en Ukraine et notre accoutumance au gaz russe, cet accord doit prémunir les pays européens d’une rupture d’approvisionnement, tout en pénalisant les rentrées d’argent de Moscou, indispensables à la poursuite des offensives militaires menées par Vladimir Poutine en Ukraine.

Ce dernier point est très contestable, tant de lourds soupçons pèsent sur l’origine russe du gaz fourni par l’Azerbaïdjan à l’Union européenne. Ils ont d’ailleurs été dénoncés par les auteurs de ce texte, mais la Commission européenne s’est bien gardée de donner suite à ces interrogations, estimant qu’il n’y avait pas de doute sur la provenance du gaz.

Prête à tout pour éviter l’effondrement énergétique, Bruxelles a donné vie à ce contrat, offrant à Bakou la charge de prodiguer 3,5 % du total des importations gazières de l’UE en 2022, contre un montant de 15,6 milliards d’euros. Ces proportions devraient être sensiblement les mêmes pour l’année 2023, comme l’a d’ores et déjà indiqué la Commission européenne.

Autant d’argent qui permet aujourd’hui au pouvoir azéri de disposer d’une manne financière propice à la conduite d’une guerre contre la République d’Arménie, dont l’existence est plus que jamais menacée.

Azerbaïdjan a une nouvelle fois violé le droit international

Ce fut le cas dès le 13 septembre 2022, quand l’Azerbaïdjan a une nouvelle fois violé le droit international, en procédant à une offensive militaire contre l’Arménie, causant la mort de près de 170 personnes.

Que dire ensuite de l’invasion du Haut-Karabakh par l’armée azerbaïdjanaise en septembre dernier, entraînant la fuite de plus de 100 000 Arméniens, soit quasiment la totalité de la population, vers l’Arménie. Cet exode forcé a généré des drames humains dont nous mesurons à peine les conséquences.

Pour Aliev, derrière lequel se trouve Erdogan, cette offensive réussie signifie que les velléités de rétablissement de l’Empire ottoman ont toutes leurs raisons d’être, même si elles impliquent une résurgence du génocide arménien.

Conscient de la gravité de la situation, le Sénat a voté à la quasi-unanimité une résolution condamnant explicitement les agissements de l’Azerbaïdjan, tout en demandant des sanctions au niveau européen et international.

Plus récemment, ce fut au tour de l’un des auteurs de cette tribune de déposer un amendement au Parlement européen, exigeant la suspension immédiate de l’accord gazier passé entre la Commission et l’Azerbaïdjan.

A dix-neuf voix près

Hélas, celui-ci fut rejeté, à 19 voix près. Dix-neuf voix contre, dont celle de madame Valérie Hayer, tête de liste Renaissance pour les élections européennes, laquelle n’hésite pas à qualifier de «Munichois» tous ceux qui auraient l’outrecuidance de parler de paix en Ukraine, mais qui, manifestement, n’applique pas les mêmes principes moraux dès lors qu’il s’agit de l’Arménie. Dix-neuf voix contre, dont celles d’une majorité présidentielle, toute à sa gloire de célébrer la panthéonisation de Missak Manouchian, mais qui refuse de rompre ce contrat qui permet à Bakou de mener une guerre infâme à ceux qui lui ont survécu.

Contre ces tergiversations, indignes des Droits de l’homme et du soutien que nous devons à l’Arménie, nous réaffirmons notre volonté de mettre fin à cet accord inique. Cette proposition vaut pour aujourd’hui et pour le 10 juin prochain, au lendemain d’une élection européenne que nous espérons triomphante pour ceux qui, comme nous, ne laisseront pas tomber les Arméniennes et les Arméniens.

Choisir la différence, choisir la gauche unie – Emmanuel Maurel, L’Humanité, 14 mars 2024

Au moment où la campagne pour les élections européennes entre dans le dur, le député européen GRS Emmanuel Maurel, troisième sur la liste menée par Léon Deffontaines pour le PCF, explique pourquoi les propositions défendues par sa liste se distinguent de toutes les autres offres politiques : relocalisation de la production industrielle, promotion du “Made in France”, lutte contre les traités de libre-échange qui ruinent l’agriculture française, défense des services publics, recherche de la paix comme seul objectif pour régler les conflits internationaux. Autant d’exigences où l’Union européenne a un rôle central à jouer.

Avec Jean-Jacques Régibier, journaliste.

L’Ukraine dans l’UE ? Le débat entre Chloé Ridel et Emmanuel Maurel dans Mediapart

entretien croisé – propos recueillis par Fabien Escalona et Ludovic Lamant – publié le 13 mars 2024 à 14h57 dans Mediapart

L’Union européenne doit-elle s’élargir à l’Ukraine ? Alors que la question constitue l’un des clivages de la campagne électorale, Mediapart a organisé un débat entre deux candidats de gauche : Chloé Ridel (PS), favorable à cet élargissement, et Emmanuel Maurel (GRS, liste de la gauche unie pour le monde du travail), qui y est opposé.

Faut-il intégrer l’Ukraine à l’Union européenne (UE) ? Le pays a formulé une demande d’adhésion dans la foulée de son invasion par les troupes russes en février 2022. En décembre 2023, les dirigeants européens ont officiellement ouvert des négociations avec Kyiv.

Pour en débattre, Mediapart a organisé un échange au long cours entre deux candidats de gauche au scrutin européen du 9 juin prochain, en désaccord sur cet enjeu clivant de la campagne. 

Chloé Ridel, porte-parole du Parti socialiste (PS) et dixième sur la liste PS-Place publique emmenée par Raphaël Glucksmann, autrice du livre D’une guerre à l’autre : L’Europe face à son destin (L’Aube, 2022), a ainsi dialogué avec Emmanuel Maurel, élu depuis 2014 à Strasbourg, qui se présente en troisième position sur la liste portée par le communiste Léon Deffontaines au nom de la Gauche républicaine et socialiste (GRS), après avoir figuré sur des listes PS (2014) et LFI (2019).

Mediapart : L’Union européenne a décidé d’ouvrir des négociations d’adhésion avec l’Ukraine, un pays en guerre avec la Russie et partiellement occupé. Est-ce une bonne idée, et pourquoi ?

Chloé Ridel : Opposer un refus a priori d’entrer en négociation, ce serait d’abord renoncer à une ambition internationaliste. Notre rôle ne doit pas être d’opposer les peuples et les travailleurs, mais de réconcilier des ambitions : d’un côté, aider l’Ukraine à rentrer dans l’UE, car c’est son souhait ; de l’autre, réunir les conditions qui permettent de ne pas fragiliser notre industrie, notre agriculture, et l’architecture institutionnelle de l’Union.

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Emmanuel Maurel et Chloé Ridel. © Photos Laurent Hazgui pour Mediapart

S’opposer a priori à une perspective d’adhésion, comme le font aujourd’hui l’extrême droite, La France Insoumise et le Parti communiste, c’est aussi se priver d’un levier de transformation de l’UE. Dans tous les cas, le processus devra en effet être conclu à l’unanimité des États membres. Cela signifie la possibilité d’un veto, et donc d’un moyen de pression pour obtenir des améliorations progressistes. On doit profiter de ce processus pour demander une augmentation du budget européen, une réforme de la politique agricole commune (PAC) et une réforme des traités.

Les Ukrainiens ne meurent pas pour nous rejoindre. Ils défendent surtout leur intégrité territoriale et leur patrie.

Emmanuel Maurel

Emmanuel Maurel : Le problème, c’est qu’on nous présente la chose comme allant de soi. La position de Chloé n’est pas la même que celle des principaux responsables des institutions européennes. Quand on entend Charles Michel [président du Conseil européen – ndlr]Ursula von der Leyen [présidente de la Commission européenne – ndlr] ou Roberta Metsola [présidente du Parlement européen – ndlr], c’est comme si l’élargissement était déjà fait. C’est une logique de fait accompli, contre laquelle je m’insurge depuis dix ans. Car oui, l’élargissement fait débat.

Dans l’esprit de ses promoteurs, il s’agit d’une décision symbolique par rapport à un pays agressé. L’UE le soutient humanitairement, financièrement et militairement, mais elle a le sentiment, parfois justifié, qu’elle n’en fait pas assez. Elle cherche donc une réponse politique pour montrer qu’elle est « vraiment » du côté de l’Ukraine. Mais il s’agit d’une fuite en avant.

L’UE ne va pas bien, est confrontée à des crises dans tous les sens – énergétique, écologique, économique, etc. Or ses dirigeants sont incapables de tracer des perspectives pour conforter l’Union. Ils cherchent une sorte de grand projet qui permettrait d’unifier les opinions et les gouvernements. Le problème, c’est que l’élargissement, c’est quelque chose de concret.

À travers leur résistance, les Ukrainiens nous ont rappelé la raison d’être du projet européen.

Chloé Ridel

D’abord, l’Ukraine ne respecte aujourd’hui aucun des critères pour être intégré à l’UE. Ensuite, il y a déjà des gens dans la salle d’attente depuis de longues années, dans les Balkans notamment, qui n’ont pas encore ouvert tous les chapitres de négociation. Enfin et surtout, on ne nous explique pas le projet. Unifier le continent davantage, mais pour aller où ? Mon refus n’est pas seulement technique, il est d’abord politique.

Est-ce qu’avec cet élargissement, l’UE ne retrouve pas une raison d’être plus vitale que la construction d’un grand marché, à savoir la défense d’un modèle politique ?

Chloé Ridel : La dimension symbolique est évidemment présente. Dès la révolution Euromaïdan de 2014, l’Ukraine a exprimé une volonté de se tourner vers l’Europe. Et c’est parce qu’elle s’est tournée vers l’Europe que Vladimir Poutine a attaqué l’Ukraine. En termes de coût net pour le budget européen, l’Institut Delors a calculé que son adhésion représenterait 0,10% du PIB européen. Si cette somme nous amenait à laisser sur le bord du chemin l’Ukraine, et en son sein des gens prêts à mourir pour nous rejoindre, que penseraient de nous les États-Unis, la Chine, les pays africains… ? Que nous abandonnons les nôtres pour si peu.

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© Photos Laurent Hazgui pour Mediapart

À travers leur résistance, les Ukrainiens nous ont rappelé la raison d’être du projet européen. Nous avions raté notre entrée dans le XXIe siècle, nous nous étions divisés vis-à-vis des grandes puissances de l’argent et des puissance étrangères. Mais depuis la pandémie et la guerre en Ukraine, le projet européen reprend du sens. C’est celui de la solidarité des peuples autour d’un modèle qui repose sur des institutions démocratiques, ainsi qu’une certaine idée de la justice sociale et de l’écologie.

Je rejoins Emmanuel Maurel pour dire qu’il ne s’agit pas d’aligner de grandes phrases creuses. L’élargissement, c’est un immense défi. Mais il vaut la peine et rencontre nos intérêts. Regardons les Balkans : avoir laissé ces pays à nos portes pendant si longtemps a permis à la Chine et à la Russie de les infiltrer. Le Monténégro s’est ainsi retrouvé piégé par un prêt de la Chine pour une autoroute, que nous avons dû racheter au dernier moment. 

Emmanuel Maurel : Que l’on ressente une émotion intense quand on voit l’Ukraine se faire attaquer par la Russie, je l’entends bien. Mais on ne fait pas de la politique uniquement avec des émotions. Par ailleurs je ne dirais pas que les Ukrainiens meurent pour nous rejoindre, ils défendent surtout leur intégrité territoriale et leur patrie. Et enfin, je ne peux pas laisser dire qu’on laisserait l’Ukraine au bord du chemin en n’ouvrant pas des négociations pour l’adhésion. On ne l’a jamais autant aidée qu’aujourd’hui !

Chloé Ridel : Tu penses vraiment qu’ils ne vivraient pas une fin de non-recevoir comme un abandon ?

Emmanuel Maurel : Je ne réagis pas par rapport à ce qu’ils veulent. C’est le risque de dislocation de l’Europe qui m’angoisse le plus.

Je répète qu’on n’en a jamais fait autant, en termes d’aide humanitaire et militaire, pour un pays hors de l’UE. On ne l’a pas fait pour la Bosnie dans les années 1990, et on ne l’a pas fait non plus pour les pays du Maghreb au moment des révolutions arabes dans les années 2010. Je me souviens qu’on ergotait sur des sommes très insuffisantes pour permettre leur développement économique. Au passage, c’est un des effets de l’élargissement toujours plus à l’Est : l’espace méditerranéen n’est plus dans l’agenda de la Commission et du Conseil.

Il faut transformer l’Europe pour accueillir l’Ukraine, parce qu’il est faux de dire que, en l’état, on pourrait l’accueillir.

Chloé Ridel

Quant à l’influence de la Chine, elle ne s’exerce pas qu’auprès des pays non-membres de l’UE, mais aussi en Grèce, au Portugal, en Italie, et même en France. Et pourquoi ? À cause de l’obsession du laissez-faire, et de la concurrence libre et non faussée. Cela me rappelle l’exemple des panneaux solaires. On avait des entreprises européennes qui se constituaient péniblement sur ce marché, on a discuté des moyens de faire face à une concurrence chinoise déloyale, et l’Allemagne d’Angela Merkel a tout bloqué, de sorte que la filière a été détruite.

Chloé Ridel : Tu t’éloignes du sujet. J’alerte moi aussi sur le fait que depuis la crise économique de 2008, la Chine possède 15 % des capacité portuaires européennes. Mais c’est parce qu’on a laissé faire. En quoi est-ce un argument pour nous empêcher de faire bloc, tout en nous élargissant ?

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Emmanuel Maurel : Là où je veux en venir, c’est que je pense que tu as tort sur la communauté intellectuelle qui existerait à propos du modèle européen. À l’Est, nos partenaires envisagent l’UE sous l’angle de leur avantage comparatif dans un grand marché. Je le déplore, car j’ai été élevé dans l’admiration de grandes figures comme Vaclav Havel, avec l’impression que l’unification du continent se ferait autour de la culture, de la démocratie, mais ça ne s’est pas passé comme ça.

La France fait partie des pays qui ont le plus payé l’élargissement de 2004, à travers des délocalisations massives à l’Est.

Emmanuel Maurel

Chloé Ridel : Je te le dis en toute amitié : tu es resté coincé dans les années 1990. J’ai lu les mémoires de l’ambassadeur Claude Martin, qui a conduit au Quai d’Orsay toutes les négociation d’adhésion de ces pays d’Europe centrale et orientale. La seule chose qu’ils souhaitaient à cette époque, effectivement, c’était l’économie de marché et l’Otan. Mais nous sommes 25 ans plus tard. Une partie importante de la jeunesse de ces pays est profondément pro-européenne, et elle tient à l’UE car elle la perçoit comme une façon de lutter contre la corruption, en faveur d’institutions démocratiques.

Les choses évoluent et notre responsabilité n’est pas de dire que “de toute façon, on n’a rien en commun”, mais de donner du sens au projet européen, de rassembler autour d’un modèle qui ressort dès que l’on voyage dans le reste du monde. Il y a trois façons de le définir : le libéralisme politique, une certaine vision de la justice sociale, et demain une certaine écologie européenne qui passe par la sobriété.

Quel bilan tirer du précédent élargissement ? On voit bien, avec le récent malaise agricole, comment l’extrême droite pourrait se nourrir d’un nouvel élargissement vécu comme une menace sur les conditions de vie ?

Emmanuel Maurel : Chloé me renvoyait aux années 1990, mais si je peux me permettre, c’est elle qui y est restée bloquée. J’étais moi aussi dans cet espèce d’idéalisme européen, et je me souviens des socialistes qui faisaient campagne sur l’Europe sociale. Mais cet idéalisme s’est fracassé sur la réalité de l’UE, à savoir la compétition et la concurrence érigées comme fondamentaux absolus.

In fine, dès qu’on débat d’harmonisation sociale, les pays de l’Est mettent en avant leur avantage comparatif, qui passe par des salaires très bas. L’élargissement de 2004 s’est d’ailleurs traduit par un accroissement du PIB des pays qui nous ont rejoint, c’est clair, mais les salaires sont restés très bas car c’est leur avantage comparatif.

Je cherche toujours l’intérêt général européen, mais quand on représente la France au Parlement, on défend aussi l’intérêt français. Or notre pays fait partie de ceux qui ont le plus payé l’élargissement de 2004, à travers des délocalisations massives à l’Est, tandis que l’Allemagne en a été la principale bénéficiaire. En raison de la mauvaise stratégie de nos dirigeants mais aussi de la nature de la construction européenne, la France a été la grande perdante des élargissements successifs.

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Prenons un exemple concret. Il y a un an, on a dit qu’on ferait des facilités d’exportation pour certains produits agricoles ukrainiens. Les pays de l’Est y étaient les plus favorables. Six mois après, les mêmes exprimaient le fait que ça ne leur convenait plus, que leur marché était déstabilisé, et ont demandé une exemption que l’UE leur a accordée. Depuis, les Français, les Espagnols, les Italiens et les Allemands demandent la même chose. Imaginez, en cas d’adhésion, ce qui se passera sur des plus gros volumes !

Notre responsabilité, en tant qu’internationalistes de gauche, c’est de montrer un chemin.

Chloé Ridel

Chloé Ridel : Je partage ton pessimisme de l’intelligence. Mais sans optimisme de la volonté, ce n’est que de la servitude volontaire. Sur la question des salaires, par exemple, rappelons qu’on a obtenu un smic européen. Et dans cette élection, notre liste propose un serpent salarial européen, comme jadis on avait eu un système monétaire européen, pour faire converger les salaires à travers l’UE.

Il faut faire attention à ne pas tout mettre sur le dos des élargissements. La destruction de l’industrie française est en partie liée à des choix politiques néfastes imputables à nos dirigeants, car d’autres pays de l’Ouest ont mieux protégé leur industrie. Elle est aussi liée à la concurrence internationale. C’est pourquoi je suis favorable à ce que l’Europe protège ses frontières, en ajoutant une jambe industrielle au Pacte vert. Pour résumer, je suis pour l’intégration de l’Ukraine à l’UE, mais aussi pour que l’UE se protège vis-à-vis de la Chine.

En ce qui concerne les produits agricoles ukrainiens, Raphaël Glucksmann reconnaît que les choses ont été mal faites et posent problème, pas tant chez nous qu’en Pologne ou en Roumanie. L’Ukraine est une grande puissance agricole, qui exporte d’ailleurs plus en dehors de l’UE qu’à l’intérieur. Il ne s’agit pas de l’empêcher de se développer. Simplement, cela ne doit pas se faire au détriment de l’agriculture française. Une nouvelle PAC, orientée vers une plus juste répartition des revenus en faveur des petites exploitations et la transition écologique, irait dans ce sens.

On partage un constat sur les problèmes à régler, mais de notre côté il y a une volonté, et de ton côté il n’y en a pas. C’est cela que je critique.

Emmanuel Maurel : Aucune volonté ? Ça fait dix ans que je me bats sur une question aussi essentielle que la souveraineté industrielle, sur le refus de certains accords de libre-échange, tout seul au sein du groupe socialiste qui me tapait dessus, car la majorité de ses membres était complètement convertie au libre-échange. Le serpent salarial européen, c’est une super idée, mais le PS la portait déjà en 1989, puis en 1994, puis en 1999… Quant au Smic européen, il n’existe pas ! C’est vrai qu’à force, j’ai développé une forme de lassitude.

Chloé Ridel : Tu ne peux pas ignorer que le contexte a changé depuis la pandémie en Europe…

Emmanuel Maurel : La pandémie, en effet, a été un moment de prise de conscience extraordinaire. Tout d’un coup, ce qui était absolument tabou à Bruxelles – par exemple les concepts de réciprocité commerciale ou de protectionnisme – devenait audible. Le problème, c’est qu’ensuite la politique menée est allée totalement à l’encontre de l’inflexion qu’il y a eu dans le discours. L’activisme libre-échangiste a repris de plus belle.

On est dans un moment décisif pour l’agriculture européenne, qui a été sacrifiée depuis les accords du GATT et de l’OMC. Or la concurrence de l’Ukraine dans ce domaine présente des risques considérables. Parce que ce n’est pas seulement la taille des exploitations qui pose problème, mais aussi les produits concernés, dont certains sont aujourd’hui interdits en Europe. Confortons déjà un certain nombre de secteurs, et après on verra.

Le risque, c’est qu’à force de faire n’importe quoi, de façon précipitée, non concertée, le projet européen se casse la gueule, purement et simplement.

Chloé Ridel : Pour moi, je le répète, il faut transformer l’Europe pour accueillir l’Ukraine, parce qu’il est faux de dire que, en l’état, on pourrait l’accueillir. Ce qui signifie que l’Europe doit devenir une vraie puissance politique et de protection. Il faudrait pour cela doubler le budget européen, et nous avons des idées de nouvelles ressources propres pour atteindre cet objectif. Si l’on ne prend pas ce chemin-là, alors là, oui, je suis d’accord, l’Union se disloquera lentement.

On a beaucoup parlé des défis socioéconomiques de l’élargissement, mais ils seraient aussi institutionnels. Quelle est votre position à cet égard ?

Emmanuel Maurel : Si on élargit à de nombreux pays et que l’UE finit par compter 36 membres, l’ensemble deviendrait ingouvernable et ce serait donc la fin de l’unanimité sur certains votes. C’est un saut fédéral. Et je pense que s’il y a des gens qui décident de ce saut fédéral, il va falloir demander l’avis aux Français, par référendum.

Chloé Ridel : Nous souhaitons faire sauter l’unanimité au Conseil sur les questions fiscales, parce que c’est ce qui empêche tout progrès en la matière. On a aujourd’hui des paradis fiscaux au sein de l’UE qui mettent leur veto à toute initiative d’harmonisation.

Sur les questions de sécurité et de défense, nous proposons aussi le passage à la majorité qualifiée, parce qu’on n’a pas envie que demain, l’Ukraine puisse mettre son veto à des décisions en la matière. Pour autant, nous sommes pour un système d’« opt out », car personne ne peut obliger une nation souveraine à appliquer des décisions de défense ou de politique étrangère avec lesquelles elle serait en désaccord.

En attendant l’adhésion ou son échec, que propose-t-on à l’Ukraine ? Plus largement, quelle politique de voisinage peut-on envisager en dehors du simple libre-échange ?

Emmanuel Maurel : Il y a déjà un accord d’association qui existe avec l’Ukraine. On ne part pas de rien. Ensuite, je pense qu’il y a d’autres solutions politiques pour affirmer sa solidarité avec des pays autour de l’Europe. Le principe d’une communauté politique européenne est intéressant.

Sur la politique de voisinage, on fait du surplace depuis presque dix ans. C’est pourtant un sujet qui mériterait un budget beaucoup plus important et une réflexion stratégique beaucoup plus conséquente. Ceci afin de réintégrer dans le jeu le Royaume-Uni, mais aussi le Sud méditerranéen, pour que les relations avec ces pays ne se résument pas à des accords sur la question migratoire. Parce qu’aujourd’hui, malheureusement, c’est le cas.

Chloé Ridel : Je trouve aussi que l’idée d’une Communauté politique européenne est intéressante. Il s’agit d’un cénacle alternatif permettant de rassembler les pays qui ne sont pas membres de l’Union européenne, pour des coopérations qui n’impliquent pas d’adhésion totale. Le problème, c’est qu’Emmanuel Macron l’a vidée de son sens en ne clarifiant pas le périmètre de cette communauté, d’où la participation d’un régime dictatorial comme celui de l’Azerbaïdjan.

Maintenant, comment doit-on se comporter vis-à-vis de l’Ukraine ? Pour nous, il faut davantage être au rendez-vous du soutien à la résistance ukrainienne. Si on s’arrête là, l’histoire retiendra que la France aura soutenu l’Ukraine à la hauteur de seulement 0,6 % de notre PIB. On a perdu deux ans depuis l’invasion totale à ergoter sur l’envoi d’armes, ce qui a conduit à donner la main à Vladimir Poutine, qui lui parie sur le fait de nous avoir à l’usure.

Nous avons l’occasion, à travers l’élargissement à l’Ukraine, de transformer l’Europe dans un sens progressiste. Notre responsabilité, en tant qu’internationalistes de gauche, c’est de montrer un chemin. Ne renonçons à rien, ni à l’accueil de l’Ukraine dans la famille européenne, ni au progrès social, ni à la protection de nos travailleurs et de notre agriculture.

L’entretien s’est déroulé lundi 11 mars dans les locaux de Mediapart. Emmanuel Maurel et Chloé Ridel ont relu et modifié des points de détail de cette retranscription.

Emmanuel Maurel met les points sur les “i”, lors de la présentation de la liste de la gauche unie pour le monde du travail

La conférence de presse de présentation de la liste de gauche unie pour le monde du travail se tenait en début d’après-midi du lundi 11 mars 2024.

L’occasion pour Emmanuel Maurel de revenir aux côtés de Léon Deffontaines sur plusieurs points essentiels que nous défendrons dans la campagne des élections européennes du 9 juin 2024. Face à la confusion générale, notre liste défendra la nécessité de mettre en avant vraiment la souveraineté (industrielle, alimentaire, numérique, culturelle) : nous défendons les intérêts de la France et les besoins de nos compatriotes. Les électeurs ne sont pas des marchandises !

Enfin, le discours de la liste macroniste conduite par Valérie Hayer est insupportable de vacuité. Son seul programme ? Faire barrage au RN, quand leur politique favorise l’extrême droite. Il est temps qu’ils rendent des comptes et nous nous emploierons à les obliger à faire face à leurs responsabilités dans la crise ! Nous proposerons donc un chemin d’espoir : on peut reprendre la main en France et en Europe, à gauche avec la liste conduite par Léon Deffontaines !

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