Ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence relatives aux instances représentatives du personnel

Ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence relatives aux instances représentatives du personnel

ordonnance prise sur le fondement des articles 4 & 11 de la loi d’urgence et liée aux ordonnances du 25 mars 2020 sur le code du travail et les délais échus

L’ordonnance touche aux élections professionnelles, aux mandats des représentants du personnel et autorise de déroger à l’information et à la consultation des représentants du personnel.

Élections professionnelles

Suspension des processus électoraux (art. 1 et 2)

L’ordonnance entraîne sans surprise la suspension « immédiate » de l’ensemble des processus électoraux en cours dans les entreprises et des délais qui étaient impartis à l’employeur dans le cadre de ces processus à compter de sa date de publication.

Cette suspension prend effet au 12 mars 2020, à moins que le processus électoral ait donné lieu à l’accomplissement de certaines formalités après le 12 mars 2020. Dans ce cas, la suspension prend effet à compter de la date la plus tardive à laquelle l’une de ces formalités a été réalisée.

Les rédacteurs ont tenu à préciser que si la suspension intervient entre le 1er et le 2nd tour des élections, celle-ci n’entraînera aucune incidence sur la régularité du 1er tour, quelle que soit la durée de la suspension. Or la suspension ne pouvait d’elle-même invalider le 1er tour des élections, la Cour de cassation ayant déjà pu juger que le non-respect du délai maximum de 15 jours pour organiser le 2nd tour n’entraîne aucune conséquence sur la régularité du 1er tour (mai 2012). Par ailleurs, en raison de la suspension, il est indiqué que les conditions d’électorat et d’éligibilité s’apprécient à la date d’organisation de chacun des tours du scrutin.

Enfin, la suspension est ordonnée jusqu’à une date fixée à 3 mois après la date de fin de l’état d’urgence sanitaire. Les différents délais qui étaient impartis à l’employeur recommenceront donc à courir dès la fin des mesures d’urgence.

À ce titre, l’ordonnance indique que les employeurs qui n’ont pas encore engagé le processus électoral disposeront d’un délai supplémentaire de 3 mois à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire pour engager le processus.

Dérogation à l’obligation de procéder à des élections partielles (art. 4)

Conformément à l’article L. 2314-10 du code du travail, les élections partielles doivent être organisées par l’employeur dès lors qu’un collège électoral d’un comité social et économique (CSE) n’est plus représenté ou si le nombre des membres titulaires de la délégation du personnel du CSE est réduit de moitié ou plus, sauf si ces événements interviennent moins de 6 mois avant le terme du mandat des membres de la délégation du personnel du CSE.

Par dérogation à cette obligation, l’ordonnance énonce que, si les mandats des élus expirent moins de 6 mois après la date de fin de la suspension du processus électoral, l’employeur n’est pas tenu d’organiser les élections partielles, que le processus électoral ait été engagé ou non avant la suspension.

Le rapport lié à l’ordonnance précise que « l’article 4 a pour objet de dispenser l’employeur d’organiser des élections partielles lorsque la fin de la suspension du processus électoral intervient peu de temps avant le terme des mandats en cours ».

Prorogation des délais de contestation administrative et judiciaire (art. 1er et 5)

En conséquence, l’ensemble des délais de saisine de l’administration ou du tribunal judiciaire sont suspendus. Ils recommenceront à courir dès la fin de de la période de suspension des processus électoraux.

De même, si l’administration a été saisie à compter du 12 mars 2020, le délai dont elle dispose pour se prononcer commence à courir à la date de fin de la suspension du processus électoral.

Si une décision administrative était intervenue après le 12 mars 2020, le délai de recours contre sa décision commencerait à courir à la date de fin de la suspension du processus électoral.

L’ordonnance précise enfin que l’article 2 de l’ordonnance du 25 mars 2020 sur les délais échus n’est pas applicable afin d’éviter une concurrence de dispositions contradictoires : « Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d’office, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l’article 1er sera réputé avoir été fait à temps s’il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de 2 mois ».

Les mandats des représentants du personnel (art. 3)

L’ordonnance proroge les mandats en cours « des représentants élus des salariés » à la date du 12 mars 2020 jusqu’à la proclamation des résultats du 1er ou, le cas échéant, du 2nd tour des élections professionnelles. Le statut protecteur des représentants du personnel est maintenu durant toute la période de prorogation.

Tous les mandats syndicaux (délégué syndical, représentant syndical au comité, représentant de section syndicale) sont « prorogés » tant que les élections n’ont pas été organisées.

Modalités d’organisation des réunions des instances représentatives du personnel (art. 6)

L’ordonnance autorise le recours sans limitation à la visio-conférence et aux conférences téléphoniques pour les réunions des CSE. Un décret doit cependant encore préciser les conditions dans lesquelles le recours aux conférences téléphoniques peut intervenir.

L’ordonnance permet également, à titre subsidiaire, le recours aux messageries instantanées en cas d’impossibilité d’organiser une visio-conférence ou une conférence téléphonique mais renvoie également à un décret la fixation des conditions d’utilisation de la messagerie instantanée.

Ces dispositions dérogatoires ne sont évidemment applicables qu’aux seules réunions convoquées pendant l’état d’urgence sanitaire.

Il faudra donc être vigilant sur la célérité de publication de ces décrets, pour que cela ne serve pas de prétexte à l’absence de consultation des représentants du personnel.

Dérogations à la procédure d’information-consultation du CSE (art. 7)

C’est la mesure la plus scandaleuse de cette ordonnance !

L’ordonnance sur les congés payés, la durée du travail et les jours de repos n’ayant pas apporté de modification à la procédure d’information et de consultation du CSE, celle-ci restait nécessaire avant d’imposer aux salariés la prise de jours de repos.

Sous la pression des dirigeants d’entreprises et des DRH, le gouvernement a réajusté la procédure. Désormais, l’employeur peut immédiatement imposer des jours de repos aux salariés hors forfait, aux salariés au forfait ou des jours placés sur un CET, mais il doit :

  • informer le CSE sans délai et par tout moyen ;
  • recueillir l’avis du CSE dans le délai d’un mois à compter de sa première information.

Enfin, de la même manière, les dérogations aux durées maximales de travail et minimales de repos ainsi qu’au repos dominical ouvertes aux entreprises relevant de secteurs d’activité particulièrement nécessaires à la sécurité de la nation et à la continuité de la vie économique et sociale pourront être mises en œuvre sans attendre l’avis du CSE qui doit être recueilli dans le délai d’un mois à compter de son information.

Ordonnance n° 2020-309 du 25 mars 2020 relative à la garantie de financement des établissements de santé et aux régimes complémentaires obligatoires de sécurité sociale

Ordonnance n° 2020-309 du 25 mars 2020 relative à la garantie de financement des établissements de santé et aux régimes complémentaires obligatoires de sécurité sociale

ordonnance prise sur le fondement de l’article 11 de la loi d’urgence

L’ordonnance instaure une garantie de financement pour les établissements de santé. Paradoxalement, il ne s’agit pas de leur assurer un financement complémentaire pour la prise en charge des malades atteints par le covid-19 – ce qui serait assuré « quoi qu’il en coûte » comme l’a psalmodié le chef de l’État –, mais de les prémunir contre la baisse de leurs recettes. En effet, alors que leurs charges s’accroissent pour faire face à la prise en charge des malades, leurs recettes peuvent décroître, notamment en raison de la déprogrammation de certaines activités demandée par le gouvernement.

Cette garantie est instaurée pour une durée d’au moins 3 mois, qui ne peut toutefois excéder un an. L’ordonnance précise que « le niveau mensuel de cette garantie est déterminé en tenant compte du volume d’activité et des recettes perçues antérieurement par l’établissement, notamment au titre de ses activités ». Si les recettes perçues se révèlent inférieures à ce niveau garanti pour une période d’un mois, un versement de l’assurance maladie vient compléter ce montant pour permettre à l’établissement d’atteindre le niveau garanti. Un arrêté viendra préciser les modalités de calcul, de mise en œuvre et de versement de cette garantie.

Ce mécanisme vise tous les établissements de santé, publics ou privés. Mais, en pratique, le rapport au président de la République précise qu’il « concerne en réalité ceux dont le financement est ajusté en fonction de l’activité ». Cela vise la tarification à l’activité pour les soins aigus, l’activité financée en prix de journée pour les soins de suite et de réadaptation (SSR) et la psychiatrie (PSY) pour les établissements sous objectif quantifié national (OQN). Pour le reste des activités (SSR et PSY et unités de soins de longue durée sous dotations), « le financement par dotation permet déjà une adaptation aux circonstances exceptionnelles ».

On voit que la crise actuelle interroge donc profondément l’inopportune tarification à l’activité.

L’ordonnance instaure également, à titre exceptionnel, un mécanisme de prêts et d’avances de trésorerie d’une durée inférieure à 12 mois aux organismes gérant un régime complémentaire obligatoire de sécurité sociale (comme ceux de l’Agirc-Arrco). Ces financements, assurés par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), sont réservés aux régimes qui, « du fait des conséquences de l’épidémie de covid-19 sur la situation économique et financière, sont dans l’incapacité de couvrir par eux-mêmes l’intégralité de leur besoin de financement ».

Les conditions de rémunérations et de tirages de ces prêts et avances seront déterminées par une convention conclue entre l’agence et l’organisme concerné et approuvée dans un délai de 15 jours par les ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. La rémunération doit assurer au moins la couverture des charges constatées par l’ACOSS au titre de ces prêts et avances.

Ordonnance n° 2020-313 du 25 mars 2020 relative aux adaptations des règles d’organisation et de fonctionnement des établissements sociaux et médico-sociaux

Ordonnance n° 2020-313 du 25 mars 2020 relative aux adaptations des règles d’organisation et de fonctionnement des établissements sociaux et médico-sociaux

ordonnance prise sur le fondement des articles 4 & 11 de la loi d’urgence

L’ordonnance procède à une adaptation en profondeur des règles d’organisation et de fonctionnement de tous les établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) : services d’aide à domicile, établissements et services pour personnes handicapées… Cette même ordonnance prévoit un mécanisme de compensation financière en cas de sous-activité ou de fermeture temporaire d’un ESMS.

Elle assouplit les conditions d’autorisation, de fonctionnement et de financement de ces établissements et services. Elle garantit également le maintien de la rémunération pour les travailleurs accueillis en établissement et service d’aide par le travail, en cas de réduction de l’activité ou de fermeture de l’établissement.

Dérogations tous azimuts pour assurer la continuité de l’accompagnement

L’ordonnance couvre l’ensemble des ESMS visés à l’article L.312-1 du Code de l’action sociale et des familles, autrement dit la quasi-totalité des structures. Elle procède à un véritable bouleversement des règles d’organisation et de fonctionnement. Il s’agit en effet « d’assurer la continuité de l’accompagnement et la protection des personnes âgées, des personnes en situation de handicap, des majeurs et mineurs protégés et des personnes en situation de pauvreté ».

Pour cela – et tout « en veillant à maintenir des conditions de sécurité suffisantes dans le contexte de l’épidémie de covid-19 » –, les ESMS peuvent notamment « dispenser des prestations non prévues dans leur acte d’autorisation, en dérogeant aux conditions minimales techniques d’organisation et de fonctionnement ». Ils peuvent aussi recourir à un lieu d’exercice différent ou à une répartition différente des activités et des personnes prises en charge. Ils peuvent même déroger aux qualifications de professionnels requis applicables, et, lorsque la structure y est soumise, aux taux d’encadrement prévus par la réglementation. Mais, là aussi, en veillant à maintenir des conditions de sécurité suffisantes dans le contexte de l’épidémie de covid-19.

Certaines dispositions de l’ordonnance visent des catégories particulières d’ESMS. Ainsi les services d’aide à domicile (Saad) peuvent intervenir auprès de bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) ou de la prestation de compensation du handicap (PCH), même s’ils ne relèvent pas de leur zone d’intervention autorisée, « pour une prise en charge temporaire ou permanente, dans la limite de 120% de leur capacité autorisée ».

De même, les établissements et services pour personnes handicapées peuvent accueillir des adolescents de 16 ans et plus, ainsi que des mineurs et des majeurs de moins de 21 ans lorsque les établissements de l’ASE ne sont plus en mesure de les accueillir dans des conditions de sécurité suffisantes dans le contexte de l’épidémie de covid-19. Cette seconde possibilité d’accueil vaut aussi pour les établissements ou services d’enseignement pour mineurs ou jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d’adaptation (IME, IMPro…).

Des solutions en cas de fermeture d’un ESMS

S’ils ne sont plus en mesure d’accueillir dans des conditions de sécurité suffisantes, les établissements pour adultes handicapés, les établissements d’éducation pour enfants handicapés et les établissements et services d’aide par le travail (ESAT) peuvent adapter leurs prestations afin de les accompagner à domicile, en recourant à leurs personnels ou à des professionnels libéraux ou à des services spécialisés.

Autre assouplissement apporté par l’ordonnance : les admissions prononcées dans les conditions ci-dessus peuvent être prononcées en l’absence d’une décision préalable d’orientation par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH). De même, il peut être dérogé à la limitation à 90 jours de la durée annuelle de l’accueil temporaire dans une structure médico-sociale pour personnes handicapées.

Toutes ces mesures dérogatoires sont prises par le directeur de l’établissement ou du service, après consultation du président du conseil de la vie sociale et, le cas échéant, du comité social et économique. Le directeur en informe sans délai la ou les autorités de contrôle et de tarification compétentes (dont le président du conseil départemental) et, le cas échéant, la CDAPH. L’ordonnance précise que « si la sécurité des personnes n’est plus garantie ou si les adaptations proposées ne répondent pas aux besoins identifiés sur le territoire, l’autorité compétente peut à tout moment s’opposer à leur mise en œuvre ou les adapter ».

Un mécanisme de compensation financière pour les ESMS

Enfin, l’ordonnance prévoit un mécanisme de compensation financière en cas de sous-activité ou de fermeture temporaire d’un ESMS. Ainsi, pour la part du financement qui ne relève pas d’une dotation ou d’un forfait global (qui sont maintenus quoi qu’il arrive), « la facturation est établie à terme mensuel échu sur la base de l’activité prévisionnelle, sans tenir compte de la sous-activité ou des fermetures temporaires résultant de l’épidémie de covid-19 ». Dans le même esprit, les délais prévus dans les procédures administratives, budgétaires ou comptables des ESMS sont prolongés de 4 mois et il ne sera pas procédé, en 2021, à la modulation des financements en fonction de l’activité constatée en 2020.

Toutes les mesures sur les ESMS prévues par cette ordonnance s’appliquent à compter du 12 mars 2020 et jusqu’à la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. Les mesures prises en application de ces mêmes dispositions prennent fin 3 mois au plus tard après la même date.

Ordonnance n° 2020-388 du 1er avril 2020 relative au report du scrutin de mesure de l’audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés et à la prorogation des mandats des conseillers prud’hommes et membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles

Ordonnance n° 2020-388 du 1er avril 2020 relative au report du scrutin de mesure de l’audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés et à la prorogation des mandats des conseillers prud’hommes et membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles

ordonnance prise sur le fondement de l’article 11 de la loi d’urgence

Le scrutin organisé pour mesurer l’audience des organisations syndicales auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés devait initialement avoir lieu du 23 novembre au 6 décembre 2020. La crise sanitaire affecte l’ensemble du processus permettant la mise en œuvre de ce scrutin qui ne pourra pas se tenir aux dates prévues.

L’article 1er de l’ordonnance permet le report du prochain scrutin qui pourra ainsi se tenir au cours du premier semestre 2021.

L’article 2 a pour objet de décaler la date du prochain renouvellement général des conseillers prud’hommes à une date fixée par arrêté et au plus tard le 31 décembre 2022.

Le mandat en cours des conseillers prud’hommes est donc prorogé jusqu’à cette date. Pour les besoins de la formation continue, des autorisations d’absence sont prévues dans la limite de six jours par an à ce titre.

Enfin, l’article 3 décale le prochain renouvellement des membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles à une date qui sera fixée par arrêté ultérieur du ministre chargé du travail, et au plus tard le 31 décembre 2021.

Ordonnance n° 2020-310 du 25 mars 2020 portant dispositions temporaires relatives aux assistants maternels et aux disponibilités d’accueil des jeunes enfants

Ordonnance n° 2020-310 du 25 mars 2020 portant dispositions temporaires relatives aux assistants maternels et aux disponibilités d’accueil des jeunes enfants

ordonnance prise sur le fondement de l’article 11 de la loi d’urgence

L’ordonnance a pour principal objectif de renforcer la capacité individuelle d’accueil des assistantes maternelles « afin de maintenir à un haut niveau leur capacité globale à contribuer à l’accueil des enfants de professionnels prioritaires et indispensables à la vie des Français ». Ces mesures sont temporaires, pour la durée de la crise sanitaire et au plus tard jusqu’au 31 juillet 2020.

Accueillir jusqu’à 6 enfants par assistante maternelle ?

Or si on peut comprendre cette logique au regard des besoins renforcés de gardes pour des salariés qui continuent de travailler en présentiel alors que leurs enfants n’ont plus accès aux crèches ou à l’école maternelle, mais il y a ici comme pour des dizaines de milliers d’autres salariés une injonction particulièrement contradictoire : s’il était si dangereux de conserver des établissements où des dizaines d’enfants étaient ensemble, comment justifier qu’on augmente les risques en augmentant les capacités d’accueil des assistantes maternelles avec des enfants venant de familles différentes qui sont donc ainsi mises en contact.

La principale mesure, qui était déjà annoncée, est la généralisation à toutes les assistantes maternelles agréées de la possibilité d’accueillir simultanément jusqu’à 6 enfants. Jusqu’à présent, cette extension n’était accessible qu’aux assistantes maternelles disposant déjà d’un agrément pour 4 enfants. Cet accueil dérogatoire est possible « sous réserve du respect de conditions de sécurité suffisantes ». Cette précision est nécessaire et limitera d’autant la réalité des capacités d’accueil et risque donc parallèlement de faire apparaître ces mesures comme essentiellement un effet de communication politique.

Le nombre de 6 enfants est également soumis à une double restriction. D’une part, il est diminué du nombre d’enfants de moins de 3 ans de l’assistante maternelle présents à son domicile. D’autre part, le nombre de mineurs de tous âges placés sous la responsabilité exclusive de l’assistante maternelle présents simultanément à son domicile ne pourra excéder 8. Par exemple, une assistante maternelle, mère de 3 enfants de 12 à 15 ans vivant à son domicile, ne pourra garder que 5 enfants.

Autre innovation : il ne sera pas nécessaire de solliciter une modification de l’agrément auprès du président du conseil départemental. L’assistante maternelle qui accueille un nombre d’enfants supérieur à celui prévu par son agrément initial doit simplement le signaler, sous 48h, au président du CD « en indiquant le nombre de mineurs qu’elle accueille en qualité d’assistante maternelle, les noms, adresses et numéros de téléphone de leurs représentants légaux, ainsi que le nombre et l’âge des autres mineurs présents à son domicile qui sont placés sous sa responsabilité exclusive ».

Améliorer l’information des parents prioritaires

Concernant les personnels exerçant des professions indispensables à la gestion de la crise sanitaire et qui sont parents de jeunes enfants, l’ordonnance prévoit la création d’un dispositif centralisant l’information sur l’offre disponible. Elle précise que les établissements d’accueil du jeune enfant (Eaje) assurant « l’accueil des enfants des personnels indispensables à la gestion de la crise sanitaire liée à l’épidémie de covid-19 communiquent leurs disponibilités d’accueil sur un site internet mis à disposition par la Caisse nationale des allocations familiales ». La CNAF a d’ailleurs déjà mis en place ce service sur son site monenfant.fr.

Concernant les assistantes maternelles – pour lesquelles le projet d’inscription obligatoire sur ce site a créé de vives tensions il y a quelques mois – l’ordonnance reste très prudente. Alors que l’article 11 de la loi d’urgence habilitait le gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure qui aurait pu leur imposer cela, l’ordonnance aujourd’hui publiée se contente d’une rédaction nettement moins péremptoire. Elle indique en effet que le site monenfant.fr « offre aux assistantes maternelles la possibilité de renseigner à cette même fin leurs nom, coordonnées et disponibilités ». Une formule qui n’a rien d’une injonction… On ne va pas s’en plaindre.

Ordonnance n° 2020-324 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421 2 du code du travail

Ordonnance n° 2020-324 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421 2 du code du travail

ordonnance prise sur le fondement de la loi d’urgence

Cette Ordonnance modifie le régime :

  • De l’allocation d’assurance chômage ;
  • De l’allocation de solidarité spécifique ;
  • De l’allocation d’assurance chômage spécifique aux fonctionnaires et agents d’établissements publics administratifs ;
  • de l’indemnisation chômage des intermittents du spectacle.

Ainsi, cette Ordonnance prévoit pour les demandeurs d’emploi qui épuisent, à compter du 12 mars 2020 et jusqu’à une date fixée par arrêté du ministre chargé de l’emploi et au plus tard jusqu’au 31 juillet 2020 une prolongation déterminée par arrêté du ministre chargé de l’emploi.

Ordonnance n° 2020-315 du 25 mars 2020 relative aux conditions financières de résolution de certains contrats de voyages touristiques et de séjours

Ordonnance n° 2020-315 du 25 mars 2020 relative aux conditions financières de résolution de certains contrats de voyages touristiques et de séjours

Ordonnance prise sur le fondement de l’article 11 de la loi d’urgence

L’ordonnance prévoit que les opérateurs de voyage pourront faire à leurs clients une proposition de prestation identique ou équivalente, ou d’avoir valable pendant 18 mois. L’objectif est d’équilibrer le soutien aux entreprises du secteur du tourisme en cette période de crise avec le respect du droit des consommateurs.

Ces modalités s’appliqueront aux annulations de contrat notifiées soit par le client soit par le professionnel après le 1er mars et avant le 15 septembre 2020 inclus. Elles concernent :

  • Les contrats de vente de voyages et de séjours y compris les voyages des mineurs à caractère éducatif
  • Les contrats portant sur les services de voyage comme l’hébergement, la location de voiture ou autre service touristique

Sont exclues : les ventes des titres de transports (donc billets SNCF et billets d’avions ?).

Par dérogation aux dispositions en vigueur, à la place du remboursement de l’intégralité des paiements effectués, le professionnel pourra proposer un avoir. Le montant de l’avoir est égal à celui de l’intégralité des paiements effectués au titre du contrat résolu. Lorsque cet avoir est proposé, le client ne peut solliciter le remboursement de ces paiements pendant la période de validité de l’avoir (qui est de 18 mois).

Passé le délai de 18 mois, et à défaut de conclusion du contrat relatif à la nouvelle prestation, le professionnel procèdera au remboursement de l’intégralité des paiements effectués.

Contexte général :

Le Gouvernement indique que 7 100 opérateurs sont confrontés à un volume d’annulations d’ampleur jamais égalée et à des prises de commandes quasi nulles. Ce constat dépasse d’ailleurs le cadre de la France : la Commission européenne a publié, le 19 mars dernier, des lignes directrices ouvrant la possibilité que soit proposé au client un avoir.

Des difficultés similaires sont identifiées pour les séjours de jeunes à caractère éducatif.

Les modalités de remboursement ont pour objet de sauvegarder la trésorerie des opérateurs. Elles ont été définies après des échanges avec les services de la Commission européenne, les principales organisations professionnelles et les associations de consommateurs.

Ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé

Ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé

ordonnance prise sur le fondement des articles 4 & 11 de la loi d’urgence

Cette ordonnance intéresse particulièrement les SPL, SEM et les SEMOP puisqu’en ce qui concerne leurs structures, ce sont les règles de droit commun des sociétés commerciales qui s’appliquent (art. 1er). L’article 11 prévoit une application rétroactive de cette ordonnance à compter du 12 mars et jusqu’au 31 juillet 2020. De plus, un décret viendra préciser les conditions d’application de l’ordonnance.

Règles de convocation et d’information des assemblées

L’article 2 prévoit concernant les sociétés cotées, qu’aucune nullité des assemblées n’est encourue lorsqu’une convocation devant être réalisée par voie postale n’a pu l’être en raison de circonstances extérieures à la société.

L’article 3 étend et facilite l’exercice dématérialisé des demandes de communication de documents dont les membres des assemblées bénéficient préalablement aux réunions de ces dernières.

Règles de participation et de délibération des assemblées

L’article 4 autorise à tenir des assemblées hors la présence physique des membres. Pour cela il y a une condition : à la date de la convocation ou à celle de la réunion, l’assemblée devait se réunir dans un lieu, mais ce dernier a été affecté par une mesure administrative limitant ou interdisant les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires.

Cette faculté de tenir l’assemblée à huis clos permettra d’éviter son report, ce qui était nécessaire pour permettre aux assemblées de statuer sur les décisions relevant de leur compétence, dont certaines sont essentielles au fonctionnement des groupements.

Ainsi, l’article 5 étend et assouplit le recours à la visio-conférence et aux moyens de télécommunication. La décision d’y recourir incombe à l’organe compétent pour convoquer l’assemblée ou, le cas échéant, à son délégataire.

L’article 6 assouplit le recours à la consultation écrite des assemblées pour lesquelles ce mode de participation alternatif est déjà prévu par la loi. Ces mesures concernent l’ensemble des décisions relevant de la compétence des assemblées des groupements, y compris, le cas échéant, celles relatives aux comptes.

Selon l’article 7, si l’organe compétent du groupement décide de faire application de la possibilité de tenir une assemblée hors la présence de ses membres à la séance ou de faire usage de l’un des modes alternatifs de participation, il en informe les associés :

  • soit par voie de communiqué dans les sociétés cotées ;
  • soit par tous moyens permettant d’informer effective ses membres dans les autres sociétés.

Organes collégiaux d’administration, de surveillance ou de direction

L’article 8 indique que les membres qui participent aux réunions des organes collégiaux d’administration, de surveillance ou de direction, au moyen d’une conférence téléphonique ou audiovisuelle permettant leur identification et garantissant leur participation effective, sont réputés présents. Il n’y a pas besoin de prévoir cette participation à distance dans les statuts ou dans le règlement intérieur.

Cette disposition est applicable quel que soit l’objet de la décision sur laquelle l’organe est appelé à statuer.

L’article 9 assouplit également le recours à la consultation écrite des organes collégiaux d’administration, de surveillance ou de direction.

Ordonnance n° 2020-386 du 1er avril 2020 adaptant les conditions d’exercice des missions des services de santé au travail à l’urgence sanitaire et modifiant le régime des demandes préalables d’autorisation d’activité partielle

Ordonnance n° 2020-386 du 1er avril 2020 adaptant les conditions d’exercice des missions des services de santé au travail à l’urgence sanitaire et modifiant le régime des demandes préalables d’autorisation d’activité partielle

ordonnance prise sur le fondement de l’article 11 de la loi d’urgence

Cette ordonnance vise à aménager les modalités de l’exercice par les services de santé au travail de leurs missions et notamment le suivi de l’état de santé des salariés.

Les services de santé au travail participent, pendant la durée de la crise sanitaire, à la lutte contre la propagation du covid-19, auprès des employeurs privés, des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC), des établissements publics administratifs (EPA) employant du personnel de droit privé et des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux. Cette participation s’effectue notamment par la diffusion de messages de prévention à l’attention des employeurs et des salariés, l’appui aux entreprises dans la mise en œuvre de mesures de prévention adéquates et l’accompagnement des entreprises amenées à accroître ou adapter leur activité.

Le médecin du travail peut prescrire et renouveler un arrêt de travail en cas d’infection ou de suspicion d’infection au covid-19 et procéder à des tests de dépistage du covid-19, selon un protocole défini par arrêté des ministres chargés de la santé et du travail et dans des conditions définies par décret (art. 2).

Les visites prévues dans le cadre du suivi de l’état de santé des travailleurs peuvent être reportées, sauf lorsque le médecin du travail les estimerait indispensables. Un décret en Conseil d’État précisera les modalités d’application de cet article, notamment pour les travailleurs faisant l’objet d’un suivi individuel renforcé car exposés à des risques particuliers, ou d’un suivi adapté : travailleurs de nuit, travailleurs handicapés ou titulaires d’une pension d’invalidité, mineurs, femmes enceintes, venant d’accoucher ou allaitantes (art. 3).

Les services de santé au travail peuvent reporter ou aménager leurs interventions auprès de l’entreprise autres que celles mentionnées à l’article 3 notamment les actions en milieu de travail, lorsqu’elles ne sont pas en rapport avec l’épidémie de covid-19 (études de poste, procédures d’inaptitude, réalisation de fiches d’entreprise, etc.), sauf si le médecin du travail estime que l’urgence ou la gravité des risques pour la santé des travailleurs justifient une intervention sans délai (art. 4).

Les dispositions permettant les reports de visites ou d’interventions sont applicables jusqu’à une date fixée par décret, et au plus tard le 31 août 2020. Les visites qui se seraient vues reportées après cette date en application de l’article 3 doivent être organisées avant une date fixée par décret, et au plus tard le 31 décembre 2020 (art. 5).

L’article 6 prévoit que les dispositions de l’article 7 de l’ordonnance sur les délais échus ne s’appliquent pas aux délais implicites d’acceptation des demandes préalables d’autorisation d’activité partielle (art. 6).

Remarque générale :

Cette ordonnance a pour unique « utilité » de maquiller l’état de faiblesse de la médecine du travail, l’insuffisance de ses effectifs ne permettant déjà pas en temps normal d’assurer ses missions principales (les délais n’ont cessé d’être allongés ses dernières années et ne sont en général pas tenus).

Nous faisons face aux conséquences de plus de 15 ans de politiques publiques malthusiennes en la matière et les médecins du travail sont de fait mis devant l’obligation de ne pas vérifier les conditions de santé au travail pendant la période de crise. C’est un élément de précarité sanitaire supplémentaire pour les salariés qui sont contraints de rester en première ligne pour maintenir le pays à flot tant que les pouvoirs publics ne sont pas capables de définir ce que sont des activités essentielles.

Ordonnance n° 2020-316 du 25 mars 2020 relative au paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises

Ordonnance n° 2020-316 du 25 mars 2020 relative au paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises

Ordonnance prise sur le fondement des articles 4 et 11 de la loi d’urgence, en lien avec l’ordonnance n° 2020-317 créant le fonds de solidarité pour les entreprises

Cette ordonnance interdit dès son entrée en vigueur l’interruption ou la suspension de la fourniture d’électricité, de gaz et d’eau pour les entreprises affectées par l’épidémie jusqu’à la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire (article 2).

Elle permet à ces entreprises de demander l’échelonnement du paiement de leurs factures d’eau, d’électricité ou de gaz, exigibles au cours de la même période, sans aucune pénalité, auprès des fournisseurs et services distributeurs d’eau potable ainsi qu’auprès des fournisseurs d’énergie (article 3).

Elle interdit enfin toutes les pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, etc., en cas défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents aux locaux professionnels et commerciaux (article 4).

C’est l’article 1er qui définit le champ d’application de l’ordonnance.

Si au départ seules les micro-entreprises (moins de 10 personnes et chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas 2 millions d’euros) devaient être concernées[1], l’article 1er de l’ordonnance précise que les entreprises qui pourront bénéficier de ces dispositions sont celles qui seront éligibles au Fonds de solidarité créé par ordonnance.

Il s’agirait dès lors des micro-entreprises, des très petites entreprises et des indépendants « particulièrement touchés par les conséquences économiques et financières de la propagation du virus Covid-19 », dont les critères d’éligibilité seront précisés par décret. Je vous renvoie aux considérations sur le fonds de solidarité dans la note précédente et ce qu’on peut attendre des mesures attendues dans le décret.

Remarques :

Le champ des entreprises concernées est donc assez restreint.

Il est fort probable que certaines micro-entreprises dont le CA est supérieur à 1 M€ et certaines PME connaissent également de graves difficultés et soient momentanément dans l’incapacité de payer leurs factures.

Il serait donc légitime qu’elles puissent aussi bénéficier de ces dispositions de reports ou étalement de factures, sans subir de pénalités. Il n’y a aucune raison que les fournisseurs profitent des difficultés actuelles que subissent ces entreprises pour engranger des pénalités financières.

Par ailleurs, il serait pertinent que la période d’application de cette ordonnance aille au-delà de la fin de l’état d’urgence sanitaire. Il faudra du temps avant que la production ne reprenne normalement et que les entreprises concernées puissent reconstituer leur trésorerie.


[1]     Le préambule de l’ordonnance fait toujours référence ,cependant ,aux seules micro-entreprises alors que l’article 1er est donc plus large.

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