Le 1er mai 2020, pendant et après le confinement
Ce 1er mai 2020 va se dérouler dans une configuration inédite. La traditionnelle Fête du Travail se célébrera sous confinement, sans rassemblements ni manifestations. Il serait impensable que cette journée si particulière passe sans rappeler les exigences du monde du travail ; celles qui précédaient l’épidémie et qui ont été exacerbées par celle-ci ; celles qui se sont faits jour à l’occasion de l’état d’urgence sanitaire ; celles qui prennent une importance renouvelée au regard des leçons qu’il faudra tirer de la période.
30 avril 2020 | COMMUNIQUÉ
Il y a d’abord un triste constat : les ordonnances prises par le gouvernement pour mettre en œuvre l’état d’urgence sanitaire ont acté la mise en sommeil de pans entiers du code du travail pourtant essentiels (encadrement de la durée du travail, droits aux congés, médecine et inspection du travail…) sans que l’on ait apporté aux salariés des garanties sur leur protection sanitaire lorsqu’ils poursuivaient leur travail sur site malgré le confinement. Le terme prévisionnel de cette suspension partielle du code du travail est fixé au 31 décembre 2020, bien au-delà de la fin probable de l’état d’urgence sanitaire (même s’il était prolongé au-delà du 23 mai 2020). Les salariés ont ici bon dos, et des situations de travail dégradées, durablement et volontairement installées, pourraient à la fois épuiser les salariés et ne pas empêcher la propagation du virus dans des secteurs économiques essentiels. Il aurait pourtant fallu plus que jamais protéger les salariés, parce que l’on n’a jamais eu autant besoin de ceux qui sont en première ligne. La condamnation (légère au demeurant) d’Amazon par le tribunal de Nanterre puis la Cour d’Appel de Versailles ne doit pas être l’arbre de l’exemple médiatisé qui cache la forêt du non droit qui s’est généralisé.
Défendre le code du travail
Plus que jamais nous sommes convaincus que la logique qui prévaut depuis 10 ans de réduire les droits et protection des salariés, notamment après la loi Valls-El Khomri et les ordonnances Macron-Pénicaud, est profondément délétère. Notre pays, son économie et ses entreprises ne se porteront pas mieux parce que l’on aura démantelé le code du travail. Nous appelons donc à mettre un terme aux ordonnances de mars et avril 2020 qui concernent le code du travail au plus vite. Nous appelons également à revenir sur les démantèlements décidés sous les quinquennats Hollande et Macron.
Le confinement aura mis en exergue l’inadaptation de la législation sur le travail face aux évolutions économiques contemporaines. Chacun aura constaté que les plateformes numériques auront continué à abuser de l’exploitation de livreurs qui ne peuvent prétendre en France à bénéficier de la protection due aux salariés, puisqu’ils sont hypocritement considérés comme des autoentrepreneurs. Nous ne pouvons pas nous contenter d’attendre que la jurisprudence rétablisse peu à peu le bon sens : notre droit doit être corrigé pour que les travailleurs ubérisés soient enfin reconnus comme des salariés. Le télétravail a été aussi une solution plébiscitée pour assurer la continuité de l’activité dans de nombreuses entreprises de services et administrations publiques ; il a évidemment de nombreux avantages, mais même les salariés et fonctionnaires qui apprécient cette méthode, même les cadres et dirigeants d’entreprises qui imaginent faire évoluer grâce à lui leur cadre de vie, tous ont constaté les abus en termes d’horaires, d’intensification et de sollicitations. Le droit à la déconnexion qui nous a été vendu comme l’un des points positifs de la loi El Khomri ne concerne que les entreprises de plus de 50 salariés et ne fonctionne pas réellement là où il a fait l’objet d’un accord d’entreprise. Il faudra remettre en discussion cette question car il est probable que ces situations de travail continuent de se développer.
“Le confinement aura mis en exergue l’inadaptation de la législation sur le travail face aux évolutions économiques contemporaines. Chacun aura constaté que les plateformes numériques auront continué à abuser de l’exploitation de livreurs qui ne peuvent prétendre en France à bénéficier de la protection due aux salariés”
“Il serait indigne de notre pays que les soignants ne reçoivent pour solde de tout compte que nos applaudissements et notre reconnaissance la main sur le cœur.”
Réviser la hierarchie sociale des métierS
Plus que jamais nous sommes convaincus que la logique qui prévaut depuis 10 ans de réduire les droits et protection des salariés, notamment après la loi Valls-El Khomri et les ordonnances Macron-Pénicaud, est profondément délétère. Notre pays, son économie et ses entreprises ne se porteront pas mieux parce que l’on aura démantelé le code du travail. Nous appelons donc à mettre un terme aux ordonnances de mars et avril 2020 qui concernent le code du travail au plus vite. Nous appelons également à revenir sur les démantèlements décidés sous les quinquennats Hollande et Macron.
Le confinement aura mis en exergue l’inadaptation de la législation sur le travail face aux évolutions économiques contemporaines. Chacun aura constaté que les plateformes numériques auront continué à abuser de l’exploitation de livreurs qui ne peuvent prétendre en France à bénéficier de la protection due aux salariés, puisqu’ils sont hypocritement considérés comme des autoentrepreneurs. Nous ne pouvons pas nous contenter d’attendre que la jurisprudence rétablisse peu à peu le bon sens : notre droit doit être corrigé pour que les travailleurs ubérisés soient enfin reconnus comme des salariés. Le télétravail a été aussi une solution plébiscitée pour assurer la continuité de l’activité dans de nombreuses entreprises de services et administrations publiques ; il a évidemment de nombreux avantages, mais même les salariés et fonctionnaires qui apprécient cette méthode, même les cadres et dirigeants d’entreprises qui imaginent faire évoluer grâce à lui leur cadre de vie, tous ont constaté les abus en termes d’horaires, d’intensification et de sollicitations. Le droit à la déconnexion qui nous a été vendu comme l’un des points positifs de la loi El Khomri ne concerne que les entreprises de plus de 50 salariés et ne fonctionne pas réellement là où il a fait l’objet d’un accord d’entreprise. Il faudra remettre en discussion cette question car il est probable que ces situations de travail continuent de se développer.
Revaloriser la fonction publique
Nous devons aussi mettre fin au mépris subis par les agents publics (fonctionnaires et contractuels) : leur engagement dans la crise sous diverses formes a démontré à nouveau à quel point ils étaient utiles et essentiels à notre République et à notre vie en société. Action des pompiers et force de l’ordre, capacité des enseignants à assurer la continuité pédagogique en période de confinement, mise en œuvre des plans de continuité de l’action publique dans les collectivités territoriales, agents des hôpitaux publics et des centres de santé… La fonction publique subit un dénigrement culturel permanent, du « mammouth à dégraisser » au non remplacement des départs en retraite ; les suppressions de poste dans les préfectures se font aujourd’hui sentir sur l’efficacité de l’État sur le terrain ; et depuis 12 ans, le point d’indice des fonctionnaires est gelé, affectant au premier chef la rémunération des salariés les moins gradés, sans parler des rémunérations des enseignants français qui sont les plus faibles d’Europe occidentale. La République française ne peut plus faire l’autruche sur la situation de ses premiers serviteurs.
La catastrophe sociale ne doit pas s’ajouter à la crise sanitaire
Ce 1er mai 2020 doit être l’occasion d’appeler de nos vœux un redressement de notre pays. Une fois l’état d’urgence sanitaire passé, nous ferons face à un chômage massif ; l’augmentation du nombre de demandeurs d’emploi en mars à hauteur de 7,1% risque de nous paraître un moindre mal. D’ores-et-déjà la réforme de l’assurance chômage imposée par décret, déjà injuste avant la crise, apparaît parfaitement indécente au regard des conséquences de celle-ci. Face à ce qui s’annonce comme une avalanche de faillites, nous devrons bâtir une stratégie anti-chômage qui ne peut se contenter de mesures macro-économiques mêmes marquantes ou radicales. L’État – la restauration de sa capacité de planification de l’action – doit avoir un rôle essentiel ; or à bien des égards, nous craignons que la crise du CoVid-19 sous la présidence Macron illustre non pas son retour mais la fuite en avant d’un système déresponsabilisant dans lequel l’État se met au service du secteur privé en abandonnant son rôle de producteur de biens communs.
C’est aussi pour cette raison que nous en appelons au plus vite – dès l’été – à la réunion d’une conférence sociale où les organisations syndicales doivent pouvoir jouer pleinement leur rôle, avec pour sommaire, les sujets suivants :
- Droits et protections des travailleurs ;
- Indemnisations du chômage ;
- Stratégie de redressement productif, associant relocalisation des activités, autonomie productive nationale dans les secteurs stratégiques (avec une stratégie offensive de capital public) et transition écologique, avec des salariés plus intégrés dans le pilotage économique des entreprises ;
- Égalité réelle entre les femmes et les hommes dans le monde du travail ;
- Négociation sur les salaires et l’échelle des salaires, alors que certains dirigeants d’entreprise appellent déjà leurs salariés à accepter une baisse de leur rémunération au prétexte qu’ils auraient réduits la leur et celles des cadres dirigeants.
La crise du CoVid-19 a plus que jamais mis à jour les erreurs et les dégâts du néolibéralisme sur nos sociétés ; elle a révélé que les plus modestes des travailleurs étaient souvent les plus nécessaires à notre vie collective. Sa résolution doit être l’occasion une forme de « décence commune » après des années d’hubris capitaliste débridé. Le 1er mai 2020 sera confiné, il ne doit pas être silencieux et inutile pour les travailleurs. La Gauche Républicaine & Socialiste prendra contact avec les acteurs politiques et sociaux du pays pour promouvoir ces propositions.