Emmanuel Maurel était mardi 4 juin 2024l’invité de La Midinale dans Regards. Il aborde tous les sujets majeurs de la politique européenne : la montée de l’extrême droite et la manière de la combattre, les alliances qui favorisent le néo-libéralisme et l’austérité, la nécessité de ramener les classes populaires au cœur de la politique concrète, la reconstruction de la gauche, la réindustrialisation, le libre-échange, la planification écologique, l’énergie et le pouvoir d’achat…
Dans la chaleur et l’enthousiasme de Marseille – Gauche Unie, dimanche 2 juin 2024
Emmanuel Maurel a sonné l’appel au rassemblement et à la mobilisation à une semaine du scrutin des élections européennes. Faire élire de nouveaux députés européens avec la Gauche Unie pour le monde du travail, c’est l’assurance de voir ce travail amplifié. C’est la certitude d’envoyer au Parlement des femmes et des hommes qui ont dit NON au traité constitutionnel européen de 2005. C’est la garantie de disposer de représentants sur qui compter pour défendre notre souveraineté démocratique et promouvoir les principes universalistes et laïques si chers à notre histoire républicaine. Donner plus de 5% des suffrages à la Gauche Unie, c’est renforcer et amplifier le travail conduit par Emmanuel Maurel depuis 2024 au cœur de la machine européenne ! Le 9 juin prochain, soyons au rendez-vous en votant pour la liste de la Gauche Unie !
L’Europe néolibérale contre les intérêts fondamentaux des Français
La France s’effondre en Europe ! Deux régions sont même passées sous le seuil des 75% à la moyenne UE.
Nos territoires régressent et rejoignent les régions les plus pauvres d’Europe de l’Est et du Sud qui … elles progressent mais sont dépossédées de leurs souverainetés économiques par des investissements étrangers (UE et non UE) via l’optimisation des fonds européens dont elles disposent.
Il y a 10-15 ans (bien après les derniers élargissements en Europe de l’Est en 2007), plus des deux-tiers des régions françaises étaient au-dessus de la moyenne européenne. Faute de croissance significative des PIB, ces données traduisent même un appauvrissement en France.
La France dispose de grandes qualités et pourrait être compétitive en Europe, notamment en raison de sa productivité du travail supérieure à la moyenne européenne.
Le réarmement économique du pays commande de sortir des discours mièvres sur l’Europe pour construire des stratégies nationales et territoriales conquérantes, secteurs public et privé, dans le marché intérieur européen comme à l’appui des accords conclus par l’UE avec des pays.



Emmanuel Maurel au meeting de la Gauche Unie à Avion (Pas-de-Calais) le 22 mai 2024
Nous sommes la Gauche Unie pour le Monde du Travail ! Ce qui nous rassemble, c’est notre mission historique : redistribuer les richesses et améliorer les conditions de vie des travailleurs. Notre idéal : la République laïque face à tous les obscurantismes ! C’était le message porté le mercredi 22 mai 2024 lors du meeting de la Gauche Unie par Emmanuel Maurel auprès des électeurs du Nord et du Pas-de-Calais…
Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann le 15 mai 2024 au meeting de la Gauche Unie à Paris
La Gauche Républicaine et Socialiste défend la République démocratique, laïque et sociale contre tous ceux qui veulent dissoudre la France dans une Europe fédérale, atlantiste et libérale !
C’est le message de la liste de Gauche Unie pour le monde du travail rassemblée derrière Léon Deffontaines, avec Fabien Roussel, pour les élections européennes. Retrouvez ci-dessous les interventions fortes d’Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann lors du chaleureux meeting du 15 mai 2024 au Gymnase Japy à Paris.
Nouvelle-Calédonie, seule la voie du dialogue et de la consultation offre une issue
L’explosion de violence en Nouvelle-Calédonie ces derniers jours laisse à craindre une répétition macabre des émeutes des années 1980.
Le gouvernement et Emmanuel Macron, en rouvrant le débat sur le dégel du corps électoral, sans consulter les parties prenantes, tout comme en maintenant le référendum de 2021 dans le contexte de la pandémie contre l’avis du camp indépendantiste, s’est mis en porte-à-faux de l’esprit de conciliation des accords de Matignon et de Nouméa, qui avaient permis de maintenir la paix dans l’archipel pendant 35 ans.
Si nous tenons au principe d’égalité républicaine, d’universalité du droit de vote, et si nous sommes attachés à la présence de la Nouvelle-Calédonie au sein de la République, ce qui a été confirmé par les habitants de l’île à trois reprises, la méthode et le moment choisis par le gouvernement ont abouti au pire.
La situation économique et sociale et l’archipel, avec des richesses accaparées par une minorité, des services publics absents de nombreux territoires, notamment les plus reculés, et la réponse brutale du gouvernement, ne peuvent que renforcer l’idée, que nous combattons fermement, qu’il existe une citoyenneté à deux vitesses. Pour que tous les habitants de Nouvelle-Calédonie se sentent pleinement citoyens, il est grand temps que la République sociale mène sa mission de redistribution des richesses.
Elle devra aussi riposter contre l’ingérence de l’Azerbaïdjan, qui a commis il y a moins d’un an une épuration ethnique sans pitié contre les Arméniens du Haut-Karabagh, et qui prétend désormais lutter contre le colonialisme.
Pour que la paix revienne, nous appelons à la reprise du dialogue avec toutes les parties, au report de la réforme constitutionnelle, ainsi qu’au désarmement de tous les groupes armés, quel que soit leur camp.
La République des courtisans
Il y a sept ans, Emmanuel Macron accédait au pouvoir suprême. Ses partisans chantaient l’avènement d’un monde nouveau. En même temps de droite et de gauche, le temps était venu de l’agilité de la start-up nation, d’un libéralisme 2.0 articulant harmonieusement liberté économique et libertés publiques.
Sept ans et vingt 49.3 plus tard, le néolibéralisme économique ne s’est sans doute jamais si bien porté – mais la France et les Français, rarement aussi mal. Sept ans après la première élection d’Emmanuel Macron, France Inter est en grève pour défendre la liberté d’expression. La direction de Radio France se défend d’avoir subi des pressions. Elle a sans doute raison…
Dans le brave new world d’Emmanuel Macron, il n’est pas besoin d’intervention ; comme à la Cour, il suffit de précéder les désirs du Prince et surtout d’avoir l’obsession de ne pas déplaire.
Le patron de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, n’a pas su être aussi prudent. Il a osé négocier un accord avec les syndicats sur les fins de carrière et contourner ainsi la très sainte réforme des retraites, tout en défendant l’avenir de l’entreprise. L’équivalent d’une trahison pour Macron. Pour avoir déplu, il sera donc déchu et quittera ses fonctions dès septembre.
Au temps pour la promesse de renaissance ; du Macronisme, il ne reste que la défense d’un clan.
Damien Vandembroucq
L’Inde votera t-elle pour l’intégrisme hindou ?
« La fin du rêve laïque » (India Times) : dans la plus grande démocratie du monde commence un cauchemar pour les minorités religieuses.
Narendra Modi a compris une règle essentielle du capitalisme post-guerre froide : tant que la politique économique promet libéralisations, privatisations et fiscalité allégée sur les revenus financiers, le capitalisme se désintéresse des libertés publiques et religieuses, des droits des minorités et de la dignité humaine.
C’est sur ce constat que le monde se réorganise depuis le début des années 1990. Partout l’on fait face à une terrifiante montée des intégristes, qui progressent dans toutes les religions et qui sapent toutes les démocraties.
L’Inde, démocratie la plus peuplée de la Terre, est traversée des mêmes débats avec les mêmes mécanismes à l’œuvre.
Par consensus sur l’abandon de l’analyse des rapports de force économiques et la défiance de l’État comme acteur d’un contrat social universel, tant les progressistes néolibéraux que les conservateurs ultra religieux ont crée les cadres d’un retour à des systèmes absolutistes.
Le scrutin pourrait donner à Modi, un intégriste religieux nationaliste, une majorité des deux tiers lui permettant de modifier la constitution pour proclamer l’hindouisme Religion nationale et exclure de la communauté nationale les minorités religieuses, notamment les musulmans, mais aussi les sikhs, les chrétiens, les juifs. Dans cette vision, il n’y a pas de liberté de conversion, ni celle de ne pas croire.
L’individu est réduit à sa communauté, et ceci est la pire des oppressions possibles.
Le parti séculier d’opposition de Rahul Gandhi s’est vu geler ses fonds en février, l’empêchant de faire campagne, et plusieurs dirigeants soumis à des procédures baillons.
Modi est sur un agenda de réformes néolibérales de l’économie qui plaît beaucoup au FMI. Mais il est aussi extrémistes que les intégristes évangéliques trumpistes, ceux soutenant le libertaire nationaliste Milei ou les messianiques ministres de Netanyahu en Israël.
C’est une tendance globale à l’alliance d’agendas économiques anti-État et d’agendas ultra religieux quel que soit la structure de la religion (polythéiste/monothéiste, islam, judaïsme, christianisme, hindouisme, bouddhisme en Malaisie, etc.).
Rappelons que le gouvernement canadien soupçonne le gouvernement indien d’être derrière des tentatives d’assassinat de dirigeants sikhs en exil.
La communauté chrétienne indienne, notamment à Goa, est également dans le collimateur avec des pogroms réguliers, comme en 2008 (38 morts) ou 2015. L’État de Goa, dominé par le BJP, a ainsi hindouisé ses forces de police pour en exclure les chrétiens.
Et en plein mouvement des suicides des paysans indiens, le BJP avait favorisé les structure claniques pour empêcher les paysans sans classe de passer a l’islam, ceux-ci espérant ainsi … échapper à la réincarnation en se suicidant. Depuis, une loi est passée interdisant l’apostasie, c’est-à-dire la conversion à une autre religion que la religion de naissance. Bien évidemment, il n’y a pas de place pour l’athéisme dans l’Inde hindoue de Modi.
Pourtant, tous les sondages des démocraties du monde, en Occident comme en Asie, montrent les mêmes préoccupations des classes nombreuses, et ce n’est ni l’intégrisme religieux, ni l’agenda nationaliste.
62% des électeurs indiens sont inquiets de l’inflation et des difficultés croissantes à trouver un emploi, alors que l’économie croit de 6% en moyenne, mais favorise une classe moyenne urbaine seulement.
Les musulmans, les sans castes et les membres de castes tribales trouvent qu’il est plus difficile de trouver un emploi à 65-67%, les membres des hautes castes brahmaniques s’inquiètent également à 55%.
Si 48% des Indiens estiment que leur situation s’est améliorée, 35% disent qu’elle s’est dégradée et seulement 22% disent qu’ils gagnent assez pour épargner : les préoccupations économiques et sociales sont bien plus importantes que les questions communautaires et sociétales.
Enfin, l’idée que la corruption sous Modi augmente est partagée par 55% des Indiens (contre 40% en 2019). Malgré un paysage médiatique mis au ordres du pouvoir tant dans le secteur public que par la concentration industrielle de magnats proches du pouvoir, les Indiens se rendent compte que ce régime ne favorise qu’une minorité et le népotisme.
L’Inde, témoin d’une évolution globale
L’islamisme intégriste fut fortement favorisé pendant la guerre froide par les services américains et les partis des droites occidentales pour contrecarrer l’influence des partis laïcs et séculiers des pays de religion majoritairement musulmane, car la sécularisation s’accompagnait d’une montée des idées socialistes.
L’islamisme « libéral » fut également instrumentalisé par les puissances économiques, promettant à Erdoğan l’intégration dans l’Union Européenne, s’il mettait au pas le syndicalisme, les lois de protection des travailleurs, et au nom d’un « progressisme » capitulard, les lois laïques et séculières protégeant l’Université et l’enseignement public.
L’histoire de la résurgence des mouvements fondamentalistes évangéliques est inséparable de la victoire du discours néolibéral anti-État en Amérique du Nord. Si les États-Unis d’Amérique n’ont jamais été un pays séculier – Dieu y est omniprésent dans toutes ses variantes possibles –, le Canada devint un champ de luttes multipolaire, entre « progressisme » contre la laïcité, néolibéralisme contre l’État providence, et finalement, libération par la foi contre « l’oppression du public ».
Mais les États-Unis sont aussi la terre de naissance du confusionnisme révisionniste le plus extrême au sein même des « progressistes ». Dans les années 1990 encore identifiés au social-libéralisme du couple Clinton, qui influera sur Tony Blair, Gerhardt Schröder, François Hollande et Manuel Valls, ce progressisme entraîne le divorce des classes populaires et des partis de centre gauche.
Depuis, le progressisme tente de reconquérir les classes populaires, non en tant que classes soumises aux mêmes pressions économiques et sociales quel que soit leur religion ou lieu de vie, mais en tant que communautés de luttes parcellaires. Incapable de repenser le mépris de l’État au cœur des idéologies libertaires, néolibérales, social-libérales, et ultranationalistes religieuses, le néo-progressisme, que ses adversaires appellent « wokisme », refuse trois siècles de critiques du capitalisme et de l’absolutisme, critiques émises au nom de l’universalisme, pour le rendre lui-même complice des systèmes d’oppressions. Ce faisant, il se résout à n’avoir aucun discours économique cohérent, ni aucune perspective de classe, universel.
Quant au Trumpisme, il pose en ce moment même, avec la question de constitutionnalité sur l’immunité du président, la question de l’absolutisme de l’exécutif, transformant la démocratie en un bonapartisme plébiscitaire.
C’était déjà ce que prévoyait – sans la dimension religieuse – le philosophe italien Losurdo dans un essai en 1993 sur les dérives des manipulations du suffrage universel dans les démocraties occidentales1.
En Europe, le véhicule du rejet des politiques migratoires – rendues nécessaires par des compromis politiques et sociaux défavorables à l’enfance et la maternité active dans les pays d’Europe centrale autour de l’Allemagne, mais aussi en Italie et en Espagne – a permis la résurgence des idéologies millénaires de l’extrême droite : antisémitisme, ultra-christianisme, racisme suprémaciste, nationalisme et guerres de frontières (la Yougoslavie est souvent oubliée dans la pensée de l’Europe depuis la chute du communisme, Russie-Géorgie, Russie-Ukraine depuis 2014, Arménie-Azerbaïdjan, Moldavie-Transnistrie-Russie). Cette résurgence est également rendue possible par la pusillanimité des progressistes, néolibéraux et sociaux-libéraux, dans la lutte pour la neutralité religieuse de l’État contre des groupes, salafistes ou autres, soucieux de saper l’universalisme et de faire prévaloir les règles communautaires sur le droit commun.
Les attentats islamistes comme les attentats des néofascistes ont fait des centaines de morts en Europe depuis le début des années 2000, ciblant en premier lieu les classes séculières attachées aux libertés publiques.
En Israël, après l’assassinat du dirigeant travailliste Yitzhak Rabin en 1995, la société se divise de plus en plus entre une minorité séculière attachée à la démocratie laïque du sionisme politique, et les religieux de plus en plus convaincus par une lecture néo-messianique et raciste. Les néolibéraux israéliens se rallieront aux alliances politiques et électorales avec les ultra religieux, notamment sous l’impulsion de Netanyahu, sans doute le pire premier ministre de l’histoire de ce pays. Il a fait voter en 2018 une révision constitutionnelle mettant fin au caractère séculier de l’État, qui reconnaît une religion officielle, le judaïsme.
La répression contre les syndicats et les forces travaillistes est indissociable de la complaisance au Hamas à Gaza, exploitant une main d’œuvre corvéable palestinienne, et la colonisation des territoires occupés.
Après une dure lutte des citoyens israéliens contre la volonté de Netanyahu de renverser l’ordre démocratique en faisant de l’exécutif un absolutisme plébiscitaire, l’attaque terroriste et criminelle du Hamas du 7 octobre 2024 a fait exploser toutes les contradictions au grand jour. La crise existentielle qui en découle condamne les extrémistes religieux et leurs alliés néolibéraux à la fuite en avant criminelle vis-à-vis des populations civiles tant à Gaza que dans les mouvements d’opposition israéliens au gouvernement actuel. Depuis le 7 octobre, 58% des israéliens souhaitent la démission du cabinet Netanyahu et de nouvelles élections.
L’universalisme est la condition pour défendre la démocratie, la laïcité, les libertés publiques et individuelles, et l’État comme intercesseur du contrat social.
Sans cela, nos démocraties se transforment en modèle autoritaire de « bonapartisme plébiscitaire » où l’exécutif s’affranchit des contrôles parlementaires et juridiques, tout en remplaçant l’État par le prophétisme religieux et les intérêts privés, les libertés individuelles par le communautarisme d’enfermement et la solidarité par la concurrence entre groupes, communautés et religions.
La conclusion de cet abandon, dont malheureusement un partie des classes favorables historiquement à la gauche sont également responsables, c’est la guerre civile ou entre Nations, communautés religieuses.
Mathias Weidenberg
1 Democrazia o bonapartismo. Trionfo e decadenza del suffragio universale, Bollati Boringhieri, Turin, 1993, 2001
Emmanuel Maurel : la diplomatie et la défense doivent rester des prérogatives des Etats !
Emmanuel Maurel faisait face à François-Xavier Bellamy (LR) et Nathalie Loiseau (Renaissance) dans Le Talk de France Info sur Twitch, ce mercredi 24 avril 2024… La totalité de l’entretien est disponible ici.
Il débattait avec ses adversaires députés européens sur les questions de défense, de diplomatie, d’organisation des institutions européennes alors que plusieurs dirigeants européens de droite, soutenus par les Libéraux et de nombreux sociaux-démocrates, veulent accélérer sans débat avec les peuples l’élargissement et pratiquer un « saut fédéral », totalement inapproprié dans le carcan ordo-libéral qu’ils ont imposé depuis plusieurs décennies.
Emmanuel Maurel a donc rappelé plusieurs principes :
- la diplomatie et la défense sont des prérogatives des Etats nationaux et doivent le rester ;
- en conséquence, l’unanimité doit rester la règle absolue sur ces questions au sein du Conseil Européen ;
- un effort de défense supplémentaire est nécessaire, la France doit se mettre à niveau et si un besoin de plus grande coordination entre Européens existe, il n’est pas question d’une « armée européen » qui serait placée sous l’autorité de responsables soumis aux intérêts des USA ;
- nous devons aider l’Ukraine, lui envoyer des armes, empêcher que la Russie ne l’emporte, mais nous devons réaffirmer que nous ne sommes pas en guerre ;
- ainsi si la maxime « si vis pacem, para bellum » reste vraie, il n’est pas non plus interdit d’utiliser intelligemment ses ressources diplomatiques ;
- enfin, on parle beaucoup d’ingérences russe et chinoise, elles sont réelles et nuisibles à nos intérêts (l’ingérence américaine aussi), mais il y a une ingérence réelle dont on parle trop peu (et pour cause), c’est celle de l’Azerbaïdjan qui use de son gaz et de son pétrole pour « corrompre » les dirigeants européens : ces derniers font ainsi preuve d’une hypocrisie insupportable face au drame que subissent les Arméniens et leur pays que nous sommes censés soutenir.
L’appel de 50 personnalités pour un référendum sur « le tour de vis fédéraliste » de l’Union européenne
tribune collective publiée dans Le Figaro le 23 avril 2024 à 18h35
En novembre 2023, une résolution du Parlement européen a proposé de modifier les traités pour généraliser la règle de la majorité qualifiée, puis une résolution semblable a été adoptée à l’Assemblée nationale. 50 personnalités, dont Arnaud Montebourg et Marcel Gauchet, appellent à organiser un référendum sur ce sujet qui engage la souveraineté de la France. Par la signature de sa co-fondatrice, Marie-Noëlle Lienemann, la Gauche républicaine et Socialiste s’y associe.
L’Union européenne n’en finit plus de dériver vers une supranationalité écrasante. D’année en année, la devise « Unis dans la diversité » a cédé sous une centralisation uniformisatrice effaçant les identités et les souverainetés nationales. Tournant le dos à ce qui la fonde, l’Union devient un carcan normatif où l’État de droit n’est brandi que pour justifier l’extension sans limites d’un système autoritaire. Imaginée comme un espace de prospérité où le « doux commerce » et la coopération renforceraient la paix entre les nations, elle est devenue une « prison des peuples » reposant sur des dogmes aveugles qu’il est interdit d’interroger malgré leurs évidents et dramatiques échecs économiques, sociaux et géopolitiques.
Cette dérive est servie par les deux dynamiques sans frein de l’élargissement et de l’approfondissement, le second étant toujours présenté comme indispensable au premier, lui-même inéluctable.
L’extension illimitée du territoire de l’Union européenne, sans stratégie ni délibération démocratique, semble échapper à la raison et ne plus obéir qu’à un automatisme incontrôlé. Entre 2004 et 2007, l’Union a déjà accueilli des États qui n’adhéraient pas à l’idée d’une autonomie stratégique. Il en est résulté une soumission accrue à l’hégémonie américaine tandis que les travailleurs de l’Ouest étaient livrés à la concurrence de ceux de l’Est. L’entrée irréfléchie, récemment promise, de l’Ukraine et de la Moldavie risque encore de ruiner des pans entiers de l’économie française, sans parler des conflits avec la fédération de Russie ni des distorsions culturelles et sociologiques que l’on feint d’ignorer.
L’approfondissement consiste ensuite, au nom de l’efficacité décisionnelle menacée par les élargissements, à accentuer le tour de vis fédéraliste en confisquant toujours davantage la souveraineté des peuples au profit des institutions supranationales. Cette captation continue passe depuis l’origine par l’interprétation extensive des compétences de l’Union, toujours défendue par la Commission et systématiquement validée et accentuée par la Cour de justice de l’Union européenne qui a imposé brutalement d’elle-même, en marge des traités et même contre leur lettre, la primauté inconditionnelle du droit européen, y compris sur les constitutions nationales. L’augmentation considérable du budget de l’Union, soustrait au contrôle des peuples et même parfois utilisée contre eux pour sanctionner leurs choix électoraux, révèle un déficit démocratique considérable, particulièrement injuste pour les pays contributeurs nets comme la France. Enfin, l’abandon du vote à l’unanimité au Conseil de l’Union, remplacé progressivement par le vote à la majorité qualifiée, a déjà ôté aux États membres leur droit de veto sur des domaines essentiels. Le projet de réforme des traités en préparation propose de généraliser définitivement, en toutes matières, y compris la défense et la politique extérieure commune, la règle de la majorité, actant ainsi officiellement la disparition du droit de veto des États membres et donc de ce qu’il leur reste encore de souveraineté. C’est ainsi la fédéralisation complète d’une Union élargie à trente-sept qui se prépare à l’insu des Français.
L’adoption de cette réforme, qui transférera à l’Union les derniers éléments de ce que le Conseil constitutionnel français appelle les « conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale », réalisera le rêve de quelques-uns d’une Europe fédérale
Depuis des décennies déjà, une grande partie des lois nationales n’est plus que la transposition servile de directives communautaires, tandis que la Cour de justice étend l’empire de sa jurisprudence et de son interprétation abusive des traités. Jusqu’ici, grâce au droit de veto résiduel, chaque pays membre pouvait encore, en théorie, refuser de consentir à une politique qui lui serait préjudiciable. Mais depuis la Conférence « citoyenne » sur l’avenir de l’Europe, organisée en 2022 de façon parfaitement opaque et pseudo-démocratique, la suppression de ce droit est programmée.
En mai 2023, des dirigeants français et allemands élus mais non mandatés pour cela ont déclaré vouloir réformer l’UE dans ce sens. En septembre 2023, des experts franco-allemands ont déposé leur rapport. Le 22 novembre 2023, une résolution du Parlement européen a proposé de modifier les traités pour généraliser la règle de la majorité qualifiée à tous les domaines sans exception et prévoir davantage de sanctions contre les États membres récalcitrants. Le 29 novembre suivant ce fut le tour de l’Assemblée nationale française de voter une résolution en faveur d’un projet de traité reléguant notre souveraineté et prévoyant explicitement que les frontières extérieures, la protection civile, les affaires étrangères, la sécurité commune, la défense, l’industrie et l’éducation deviennent des « compétences partagées » de l’Union européenne, c’est-à-dire que les États n’y disposeront plus que d’une compétence résiduelle.
L’adoption de cette réforme, qui transférera à l’Union les derniers éléments de ce que le Conseil constitutionnel français appelle les « conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale », réalisera le rêve de quelques-uns d’une Europe fédérale, dirigée par une commission portant officiellement le titre d’« Exécutif », coiffé d’un « Président de l’Union européenne ». La fin des souverainetés nationales, et donc de nos démocraties, est ainsi clairement projetée.
Le peuple français presse depuis longtemps cette dépossession. Elle dissout la souveraineté nationale et populaire. Elle sape la République. Il s’est opposé en 2005 à une première tentative de fédéralisation qui scellait sa disparition politique et culturelle, mais ses réticences ont été balayées par des dirigeants convertis à l’idéologie de la « société ouverte ». Le verdict populaire a été bafoué et contourné par la ratification parlementaire du traité de Lisbonne, simple copier-coller du traité rejeté par les Français.
C’est la poursuite de ce processus qui est actuellement à l’œuvre. Nos dirigeants s’apprêtent à prendre, au nom du peuple français, une décision majeure engageant le destin de notre pays, son indépendance et son existence même en tant que nation. Exploitant l’angoisse suscitée par la guerre, ils précipitent la fédéralisation sans jamais la nommer et sans que les populations européennes puissent prendre la mesure de leur dépossession.
Pour ce qui nous concerne, nous refusons cette dérive. Nous pensons, dans le sillage du général de Gaulle, qu’un système fédéral post-démocratique est contraire au génie de l’Europe et de la France et à l’imaginaire collectif qui, depuis mare nostrum, produit du commun à partir de la diversité de ses nations et de leur culture propre. La déconnexion définitive entre les peuples et la machinerie européenne achèvera la déresponsabilisation des dirigeants nationaux et décuplera les réactions nationalistes, au risque de nous conduire au chaos.
Quelle que soit notre vision de la France et de l’Europe, et l’avis que l’on porte sur la réforme et les élargissements en préparation, nous devons exiger qu’un pareil saut qualitatif dans l’inconnu d’un système supranational, qui minore l’identité des peuples, l’existence des nations et l’expérience des États d’Europe, soit soumis au référendum.
Il est urgent d’ouvrir le débat sur ce qui se prépare. Les élections de juin 2024 doivent être l’occasion de se prononcer en connaissance de cause sur le projet de fédéralisation en cours ainsi que sur les élargissements en vue.
Les signataires de cet appel et les citoyens qui s’y associent demandent aux candidats de chaque liste aux élections européennes de prendre clairement position sur ces projets et de s’engager à les faire soumettre à la ratification populaire.
Signataires :
Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de la « Revue politique et parlementaire » ;
Stéphane Rozès, politologue ;
Arnaud Montebourg, ancien ministre et entrepreneur ;
Marcel Gauchet, philosophe et historien ;
Michel Onfray, philosophe ;
Jean-Éric Schoettl, ancien secrétaire général du Conseil constitutionnel ;
Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel ;
Marie-Françoise Bechtel, ancienne députée ;
Anne-Marie Le Pourhiet, professeur émérite de droit public ;
Xavier Driencourt, ancien ambassadeur ;
Benjamin Morel, maître de conférences en droit public ;
Pierre-André Taguieff, philosophe et historien des idées, CNRS ;
Éric Anceau, historien ;
Georges Kuzmanovic, Analyste géopolitique, président de République souveraine ;
Julien Aubert, Ancien député ;
Jean-Yves Autexier, Ancien député ;
André Bellon, Ancien président de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale ;
Florence Bergeaud-Blacker, Docteur en anthropologie, CNRS ;
Marion Bierry, Metteuse en scène ;
Guillaume Bigot, Politologue, éditorialiste ;
Bernard Bourdin, Philosophe du politique et théologien ;
Christophe Boutin, Professeur de droit public ;
Gaël Brustier, Politologue et essayiste ;
David Cayla, Économiste et essayiste ;
François Cocq, Essayiste, auteur de « Alerte à la souveraineté européenne » ;
Denis Collin, Philosophe ;
David Desgouilles, Chroniqueur, romancier ;
Jean Dufourcq, Stratégiste et chercheur en affaires militaires ;
Nicolas Dupont-Aignan, Député ;
Frédéric Farah, Universitaire et économiste ;
Philippe Grégoire, Agriculteur, co-président du SAMU social agricole ;
Michel Guénaire, Avocat et écrivain ;
Philippe Guibert, Ancien directeur du Service d’information du gouvernement ;
Alexandre Jardin, Écrivain ;
Alain Juillet, Ancien directeur du renseignement à la DGSE, Ancien haut responsable chargé de l’intelligence économique auprès du Premier ministre ;
Catherine Kintzler, Philosophe, professeur des Universités honoraire ;
Florence Kuntz, Ancienne députée européenne ;
Maire-Noëlle Lienneman, Ancienne sénatrice ;
Jean-Claude Mailly, Ancien dirigeant syndical ;
Jean-Philippe Mallé, Ancien député ;
Jérôme Maucourant, Economiste ;
Nicolas Meilhan, Entrepreneur ;
Bruno Moysan, Musicologue ;
Joachim Murat, Expert en industrie de défense et sécurité ;
Olivier Petros, Ancien dirigeant dans l’industrie et la banque ;
Céline Pina, Journaliste ;
Bertrand Renouvin, Directeur de la revue Royaliste ;
Jérôme Sainte-Marie, Sondeur et essayiste ;
Jacques Sapir, Économiste ;
Maxime Tandonnet, Essayiste, ancien haut fonctionnaire ;
André Tiran, Professeur de sciences économiques émérite, ancien Président de l’Université Lyon.