Fin de comédie amère pour l’examen du budget au Sénat

La droite et la macronie s’accordent en matière budgétaire sur deux mantras : il faut baisser les impôts de production ; il faut réduire la dépense publique…

Peu importe l’absence totale de résultats en matière économique du premier verset – voilà près de 30 ans que cotisations sociales et impôts sont baissés sans jamais améliorer notre compétitivité et notre balance commerciale – les cadeaux fiscaux aux dirigeants d’entreprises, aux actionnaires, aux plus aisés de nos concitoyens (le premier quinquennat Macron n’en a pas manqué, le second poursuit dans la lignée) continuent de s’empiler. Cette année, le projet de budget sort du Sénat comme il y était arrivé en matière de taxation du capital : refus d’ne nouvelle modalité d’imposition des multinationales fondées sur le chiffre d’affaires pour lutter contre l’évasion fiscale ; refus du rétablissement d’une véritable exit tax pour lutter contre les évadés fiscaux ; refus de la taxation des superprofits indispensable mesure de justice fiscale ; refus d’augmenter la taxe sur les transactions financières, la taxation des dividendes versés (44,3 Mds € pour le seul second trimestre de 2022, et ça n’est même pas un record !) ou la taxation des dividendes reçus.

Le deuxième verset implique dans la suite du premier de se priver des moyens nécessaires pour conduire des politiques publiques dignes des défis auxquels est confronté notre pays et des attentes des Français.

Après avoir refusé les propositions de recettes il fallait toute l’inventivité de la droite sénatoriale et du Gouvernement pour expliquer que nos concitoyennes et nos concitoyens allaient voir leurs factures d’électricité exploser cette année de 15%, après une augmentation de 4% l’année précédente, après une envolée de 50% sur les 10 dernières années. Les Français payaient, avant la guerre en Ukraine, les décisions coupables d’ouverture au marché de l’énergie et les sous-investissements chroniques dans l’énergie nucléaires. Le bouclier énergie n’y peut rien, même à 45 milliards d’euros… Si la France se dotait des moyens nécessaires nous pourrions répondre à ces défis dans l’urgence et même entamer la réparation nécessaire des erreurs structurelles qui se sont accumulées sous l’effet de 15 années de politiques néolibérales.

Une satisfaction cependant : les sénateurs n’ont pas poussé le vice jusqu’à cautionner le scandale budgétaire sur la mission “Cohésion des territoires”, qui préside aux crédits de la politique du logement de la la politique la ville. Peut-être que sur ce sujet, à propos duquel notre camarade Marie-Noëlle Lienemann (en vidéo ci-dessous) porte une parole respectée, les sénatrices et sénateurs perçoivent mieux que sur d’autres la “bombe sociale” en gestation ; c’est d’ailleurs la pire ironie de la situation : l’expression est du ministre du logement lui-même, Olivier Klein, dernier transfuge PS arrivé en macronie, quelques jours à peine avant que la Haute Assemblée ne vote contre cette mission budgétaire… un ministre qui avoue la catastrophe en devenir mais qui a abdiqué l’ambition d’obtenir les moyens nécessaires pour y remédier.

Un dernier mot sur les conditions du débat budgétaire.

La révision constitutionnelle a tendu à sacraliser les lois de programmations des finances publiques qui, sans aller jusqu’à une règle d’or intangible, a contribué à réduire le champ d’expression du Parlement. Le droit d’initiative des parlementaires est de plus en plus réduit à peau de chagrin par une interprétation toujours plus restrictive du “parlementarisme rationalisé” : en réalité, le seul qui peut amender le budget c’est le gouvernement. Par ailleurs, la fixation d’un calendrier contraint a débouché sur des situations ubuesques qui ont obligé les parlementaires des tous les bancs à retirer l’intégralité de leurs amendements dans le cadre de la mission « agriculture, alimentation et forêts ». Comprenez bien qu’il faut se dépêcher d’aller vers un huitième 49.3 à l’Assemblée Nationale ! La démocratie parlementaire en sort un peu plus abimée, on en vient presque à espérer que nos concitoyens ne regardent pas les débats parlementaires pour qu’ils n’aient pas envie de jeter le bébé avec l’eau du bain.

Plus que jamais, l’examen du budget 2023 aura démontré que l’urgence d’une bifurcation en matière de politiques publiques est inséparable d’une profonde refonde de notre démocratie républicaine.

Hausse des péages d’autoroute : non à l’inflation par la rente !

Au 1er février 2023, les péages augmenteront à nouveau de près de 5% en moyenne.

La Gauche Républicaine et Socialiste s’oppose fermement à cette décision inflationniste qui ne profitera qu’aux actionnaires et aux dirigeants des sociétés délégataires et va accroître la rente confiscatoire liée à la privatisation des autoroutes.

Alors que le prix du carburant a explosé et que, pour de nombreux Français parmi les moins favorisés, l’utilisation de la voiture comme moyen de transport ne connaît pas d’alternative, cette décision du gouvernement vient un peu plus contribuer à l’appauvrissement de nos concitoyens résidant en zone rurale et périurbaine. Ces territoires ont été les victimes de 30 ans de déflation des salaires et de désindustrialisation massive. Aujourd’hui, leurs habitants subissent de plein fouet l’inflation. Contribuer à l’augmentation générale des prix pour favoriser les revenus du capital est inacceptable.

Nous réaffirmons la nécessité de renationaliser les autoroutes, afin que les revenus issus des péages ne soient plus accaparés par quelques sociétés et leurs actionnaires, mais qu’ils profitent au contraire au développement de moyens de transport décarbonés.

Le rapport parlementaire de M. Jean-Paul Chanteguet sur les concessions autoroutières (2014)

Le gouvernement disjoncte sur l’énergie

La communication gouvernementale tourne en boucle sur les différents scénarios susceptibles d’éviter les black-out cet hiver.

Les Français ne sont sans doute pas assez économes en énergie, et c’est donc à eux que la communication publique s’adresse en exigeant que « tout le monde » fasse un effort : « mettre le thermostat à 19°C et mettre un pull, c’est quand même pas la mer à boire »… autant de petites phrases suggérées qui font passer les habitants de notre pays pour des irresponsables.

Le Président en appelle donc à une sobriété collective, la Première Ministre monte au créneau et assure le service après-vente tandis qu’Agnès Pannier-Runacher garantit qu’il n’y aura pas de « police des températures ».

Pendant ce temps, face au prix de l’énergie et faute de chauffage, des écoles accueillent des enfants avec des températures à 10 °C.

En même temps, pas besoin de police des températures quand on n’allume pas le chauffage et quand cela fait plusieurs années que nombre de nos concitoyens baissent déjà le chauffage à 19°c , non pour sauver la planète ou éviter la surtension du système, mais parce qu’ils n’en ont plus les moyens ou quand d’autres encore doivent parfois surconsommer pour atteindre les 19°c car vivant dans une « passoire thermique » qui n’est jamais rénovée.

Une situation surréaliste !

Tout ça paraît quand même surréaliste, même si on peut comprendre ce qu’engendre le conflit déclenché par la Russie, on peut raisonnablement se poser la question de notre capacité à être autosuffisants, et même produire pour nos voisins européens une énergie, qui plus est, décarbonée, en tant que 2e puissance nucléaire civile au monde.

Nous possédons aujourd’hui 54 réacteurs pour une capacité de production de 61 GW. Mais 32 réacteurs sont aujourd’hui à l’arrêt pour des opérations de maintenance, ramenant ainsi notre capacité de production à moins de 50 %, soit à peine 30 GW.

Sur l’âge du parc nucléaire français, pas de surprise, on le connaît depuis sa création, mais c’est sur son état qu’il faut se poser les questions…

Cette filière, qui était d’excellence voici encore quelques années, a été mise à la diète politiquement sans qu’une alternative ambitieuse vienne la compenser.

Et c’est tout juste à deux mois de l’élection présidentielle que le chef de l’État annonce une volte-face sur sa politique énergétique. Pour atteindre la neutralité carbone, il veut construire 14 réacteurs EPR et prolonger au-delà de cinquante ans la durée de vie des réacteurs existants.
Encore un exercice de communication à l’heure où les acteurs nucléaires français n’ont pas été capables de mettre en service un seul réacteur EPR.

De même, prolonger au-delà de cinquante ans la vie des réacteurs existants nécessite une maintenance poussée et planifiée.

On a besoin d’énergie, on a une appli!

À la place, on a une nouvelle application, ECOWATT, pour nous prévenir 48 heures avant que nous allons être coupés, mais il n’y aura rien pour nous dire quand ce sera rétabli, les communications ayant de grandes chances d’être à ce moment là elles aussi coupées.
Emmanuel Macron agit en communiquant, en stratège électoral (quoique sur ce point son acuité se soit un peu émoussée), agitant ses dossiers et ses tableurs sans jamais faire la connexion avec le terrain, la logistique, les hommes formés, mais jamais il n’agit en Président.

Gouverner, c’est prévoir, et c’est prévoir autre chose qu’une alternative entre Black Out et délestages en plein hiver !

Antoine Parrot

Soutien à la reprise de Scopelec par une nouvelle SCOP !

Une des plus grandes SCOP de France, Scopelec, est aujourd’hui en difficulté suite à la perte soudaine d’importants contrats avec Orange. L’entreprise est aujourd’hui en redressement judiciaire et son avenir, ainsi celui de ses salariés, se jouera le 8 décembre.

Alors que d’importants acteurs du BTP se sont positionnés pour reprendre l’entreprise avec une forte casse sociale à la clef, les salariés eux mêmes portent un projet pour reprendre leur SCOP … en SCOP.

Au côté des salariés de Scopelec et du mouvement coopératif dans son ensemble qui se mobilise fortement humainement et financièrement, nous apportons notre soutien à Newscope, le projet de reprise porté par les salariés de Scopelec. Ce projet, clair et solide, permet de préserver et pérenniser 1457 emplois dans la nouvelle coopérative. Beaucoup plus que pour les projets de reprise concurrents.

Au delà du cas particulier de Scopelec, cette mobilisation des salariés et la solidarité à l’oeuvre au sein du mouvement coopératif pour soutenir le projet démontrent la résilience, la solidarité, et la priorité portée au maintien de l’emploi et d’un projet économique durable au sein des coopératives.

Donc nous aussi, à la Gauche Républicaine et Socialiste, #NOUSsommesSCOPelec !

Grève des travailleurs sociaux

Face à la perte de sens des métiers du social, pourtant exercés avec sérieux par les professionnels en présence,  face au manque de moyens humains et financiers, face  à la paupérisation des usagers mais également des professionnels, face à la crise de la vocation alors que les départs à la retraite s’accélèrent, les travailleurs sociaux en lutte demandent expressément : 

● L’attribution immédiate et SANS EXCEPTION des 183 euros pour tous les oubliés du SEGUR et de LAFORCADE ;

● Une convention collective commune de haut niveau, y compris pour la branche de l’aide à domicile et sans individualisation des salaires ;

● Dans le public comme dans le privé, l’embauche de professionnels formés en nombre suffisant et des conditions de travail qui préservent le sens de leurs interventions ;

● L’abandon de SERAFIN-PH et de toute forme de tarification à l’acte du secteur de l’action sociale ;

● La création d’un véritable statut pour les étudiants en travail social.

La Gauche Républicaine et Socialiste, consciente des enjeux à venir en terme de prise en charge sociale, en opposition totale aux politiques de précarisation générale engagée par les gouvernements successifs d’Emmanuel Macron, soutient la lutte des travailleurs sociaux qui ont déposé un nouveau préavis de grève et de mobilisation pour ce mardi 29 novembre et se tiendra aux cotés des salariés et agents partout où cela sera possible.

Retour sur notre beau congrès de Pantin

Notre Congrès de Pantin, les samedi 19 et dimanche 20 novembre derniers, a été une réussite et un beau moment de débat et de fraternité militante. Notre parti a réaffirmé notre volonté déterminée de construire le front populaire qui doit permettre le rassemblement de toute la Gauche et de rétablir le lien civique et politique avec toutes les catégories populaires qui sont la majorité de nos concitoyens. C’est le chemin pour redonner à la gauche sa vocation majoritaire.

Dès samedi matin, nous avons étudié les contributions que vous trouverez dans les liens ci-joints (une contribution très intéressante sur les Océans servira de base pour un travail de réflexion collective qui sera ensuite publié). Le samedi après-midi et le dimanche matin, nous avons examiné la trentaine d’amendements reçus. Par les moments passés ensemble dans la convivialité et la camaraderie, le constat fait à Rochefort en septembre dernier est toujours aussi vivace, après plusieurs séquences d’éloignement forcé, nous avons plus que jamais besoin de moments forts pour nous retrouver ensemble.

un des très nombreux moments de vote qui sanctionnent chacun de nos débats

Nous avons eu le plaisir de recevoir plusieurs invités de toute la gauche : les représentants d’EELV 93 sont venus nous saluer, le Maire PS Bertrand Kern nous a témoigné son amitié et ses encouragements à ce que nous poussions pour un élargissement à vocation majoritaire de la gauche, Christian Picquet de la direction nationale du PCF nous a fait le plaisir de sa présence et Fabien Roussel a envoyé un message fraternel très argumenté. Deux députés NUPES de Seine-Saint-Denis, Stéphane Peu (PCF) et Raquel Garrido (LFI) sont également intervenus pour saluer la qualité de notre texte et de notre réflexion sur la situation politique. Nos amis de la Fédération de la Gauche Républicaine et Socialiste était tous présents : NGS, L’Engagement, LRDG et MRC ont réaffirmé leur volonté d’approfondir notre collaboration.

Emmanuel Maurel, réélu Animateur national (à l’unanimité), et Marie-Noëlle Lienemann, qui restera notre coordinatrice nationale, ont défendu la nécessité de travailler à une grande bifurcation afin d’éviter un grand basculement vers l’inconnu et le déclin. Nos priorités sont connues : travail et salaires, production et relocalisation, éducation et universalisme, transition énergétique avec le soutien au nucléaire et aux énergies renouvelables pour une transformation écologique de nos sociétés. Notre parti prendra à bras le corps l’enjeu des élections européennes : la construction européenne est à la croisée des chemins et doit sortir de ses contradictions internes mortifères.

La GRS est également un parti internationaliste : nous avons été particulièrement heureux de l’intervention devant nos délégués de M. Mohand Arezki Hamdous, Secrétaire National aux Institutions et à la communauté algérienne établie à l’étranger du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie, parti progressiste et laïque algérien en lutte contre un pouvoir corrompu. Le pouvoir algérien tourne le dos à son peuple et nous adressons aux Algériens notre solidarité et notre fraternité. Nous aurons d’autres occasions de travail en commun. Plaisir aussi de rencontrer et d’écouter le témoignage de Chahla Chafiq, sociologue et écrivaine Iranienne (réfugiée en France suite à l’arrivée des islamistes au pouvoir, après la révolution de 1979 à laquelle elle participa activement, la contraignant à l’exil), venue nous parler de la Révolution en cours dans son pays. Le mouvement des femmes a impulsé le mouvement de tout le peuple iranien, c’est une force grandissante malgré la répression sanglante du régime théocratique.

Avant de conclure, rappelons que six résolutions fortes ont été adoptées pour adresser au pays des messages d’actualité de la GRS en plus de notre texte d’orientation :
👉 indexations des salaires sur les prix
👉 sortie du marché européen de l’énergie
👉 réindustrialisation de la France
👉 soutien au mouvement des femmes et du peuple iranien
👉 Hôpital public : urgence vitale !
👉 adhésion pleine au Parti de la Gauche Européenne

Vous trouverez ci le texte d’orientation définitif, les contributions thématiques et les résolutions du congrès.

Nous avons enfin adopté de nouveaux statuts qui nous permettront de renforcer et développer notre parti, en accroissant la participations des militants.

Au travail maintenant : le Collectif d’Animation National va rapidement mettre en place notre organisation et nos actions.

“Un nouvelle étape”, texte d’orientation adopté au congrès 2022

Les samedi 19 et 20 novembre 2022, les délégués des militants de la Gauche Républicaine et Socialiste et les membres du Collectif d’Animation National réunis à Pantin pour le congrès du parti ont débattu des amendements et des contributions thématiques adressés par les militants autour du texte d’orientation proposé par Emmanuel Maurel.

Après adoption des amendements (et des contributions thématiques qui y sont annexées), le congrès a adopté à l’unanimité le texte d’orientation de la GRS pour les trois prochaines années. Découvrez le ci-dessous.

Le congrès s’est également prononcés sur plusieurs résolutions, messages politiques d’actualité de la GRS adoptés le dimanche 20 novembre 2022, qui sont également disponibles ci-dessous.

“Mascotte des JO fabriquée en Chine : et en plus c’est la France qui finance !”

Billet d’Emmanuel Maurel, député européen et animateur national de la GRS dans Marianne, le mercredi 16 novembre 2022

La peluche de la mascotte « Phryge » des Jeux Olympiques 2024 à Paris sera fabriquée… en Chine. Emmanuel Maurel, député européen de Gauche Républicaine & Socialiste, ne voit dans cette affaire qu’incohérence et indécence.

Tony Estanguet, président du Comité Paris 2024, n’aurait pas pu mieux dire : la mascotte « Phryge » représente « un idéal choisi pour faire porter un message ». Que les Français ont reçu 5 sur 5. Non seulement 92 % de ces peluches seront fabriquées en Chine, mais elles rapporteront au Comité d’Organisation 16 euros de bénéfice sur un prix unitaire de 35 euros ! Une belle illustration de la mondialisation capitaliste, pas forcément raccord avec la symbolique révolutionnaire du bonnet phrygien.

Au lendemain du Salon du Made in France, où 1 000 exposants ont présenté des produits de très haute qualité, dans leur grande majorité à la portée de toutes les bourses, le « business » est reparti « as usual ». Les Jeux Olympiques de Pierre de Coubertin se sont noyés dans les eaux glacées du calcul égoïste. Certes, personne n’ignorait l’habitude du CIO de transformer le sport et les sportifs en marchandises. Mais il était difficile d’imaginer que l’écart entre le réel et « l’idéal » soit poussé si loin.

INCOHÉRENCE ET INDÉCENCE

Dans cette affaire des Phryges, il n’y a qu’incohérence et indécence. On ne peut pas se gargariser de « l’esprit français », arborer fièrement nos « valeurs », vanter nos « savoir-faire » et recourir à de tels expédients. L’industrie du jouet en Chine est en effet l’un des secteurs où les salaires sont les plus bas et les conditions de travail les pires. Dans son rapport de novembre 2019, l’ONG « China Labor Watch » nous apprenait que les rémunérations y sont sous le minimum vital, que les ouvriers sont à presque 100 % des ouvrières, souvent mineures, et que le temps de travail peut être quasiment doublé du jour au lendemain pour faire face aux pics de production. Après leur journée de huit heures (+ 6 heures supplémentaires), les travailleuses sont envoyées « dans des dortoirs collectifs bondés, infestés de punaises, sans eau chaude ni endroit où ranger leurs effets personnels ».

Il est pourtant possible d’échapper à la fatalité du low-cost et, quoiqu’en disent les cadres des entreprises prestataires Gipsy et Doudou & Cie, de fabriquer en France une part beaucoup plus importante des deux millions de Phryges commercialisées lors des JO. À condition bien sûr de prévoir, planifier et investir dans les capacités de production, d’élever un peu le prix et surtout de rogner sur les marges. Est-il vraiment indispensable à l’équilibre financier de Paris 2024 de réaliser 32 millions de bénéfices sur la vente des mascottes ? Vu son budget prévisionnel de 4 milliards, la réponse est dans la question.

« FRANCE RELANCE » ? OÙ ÇA ?

La relocalisation des industries est un enjeu auquel les Français sont très attachés, particulièrement concernant les jouets. Et cela n’avait pas échappé au Gouvernement : dans un communiqué du 9 novembre dernier, le ministre délégué à l’industrie Roland Lescure se félicitait d’un apport public de 4,4 millions d’euros dans le cadre de « France Relance », afin de soutenir 19 projets représentant 15 millions d’euros. Ironie de l’histoire, les projets retenus portaient sur la création de jeux fabriqués à partir de matériaux recyclés et de… jouets en peluches ! Le groupe Doudou & Cie fait d’ailleurs partie des heureux élus.

L’ampleur – justifiée – de la polémique nécessite une action rapide pour corriger le tir. La responsabilité que confère l’organisation des Jeux Olympiques implique de faire le maximum pour que le rayonnement soit à la hauteur de l’évènement. Le Comité d’Organisation peut donner un coup de pouce aux entreprises lauréates, qui pourront produire les Phryges en France et faire ainsi correspondre les discours, les symboles et les actes.

L’Europe risque la marginalisation

Lundi 14 novembre 2022 à 19h30, Emmanuel Maurel, député européen et animateur national de la Gauche Républicaine et Socialistes, débattait lors de l’émission “Votre instant politique” (animée par Gilles Bornstein sur France Info) avec Chloé Ridel, directrice adjointe de l’Institut Rousseau, et Alexandre Holroyd, député Renaissance (LREM) de la 3e circonscription des Français de l’étranger.

Mise en scène des puissants de ce monde au G20 et de la domination Chine-USA, crise de l’Europe, guerre en Ukraine, Emmanuel Maurel a rappelé, au moment où le modèle allemand de développement et de puissance commence à connaître de profonde difficulté, qu’il était temps que la France comprenne enfin que le “couple franco-allemand” était un mythe et qu’il fallait penser avant tout à défendre les intérêts de notre pays. Malheureusement en plus de 60 ans, la construction européenne n’a pas débouché sur l’émergence d’un intérêt général européen ; il faut être conscient de ses limites et en tenir pour construire les coopérations qui nous permettront de ne pas être marginalisés par l’émergence ou la résurgence de nouveaux impérialismes.

Élections de mi-mandat aux États-Unis, un sursaut anti-trumpiste

Mardi se tenaient les élections de mi-mandat américaine, lors desquelles un tiers des sièges du Sénat, la moitié des postes de gouverneurs et la totalité de la Chambre des représentants étaient mis aux voix. À plusieurs raisons, ces élections étaient cruciales dans le rapport que tiennent les Américains à la démocratie.

En effet, deux ans après le déni démocratique de M. Donald Trump, qui n’a jamais reconnu sa défaite à l’élection présidentielle de 2020, le retour au pouvoir législatif du camp radicalisé et fanatisé était largement envisagé et prédit par les sondages. Pour la première fois depuis 2008, les démocrates contrôlaient les deux chambres et la présidence. L’inflation galopante et la montée de l’insécurité leur étaient ainsi reprochées, et la popularité de Joe Biden, qui apparaît affaibli physiquement et politiquement, était loin d’être reluisante. En temps politique normal, tout annonçait un raz-de-marée républicain.

Et pourtant, les démocrates semblent avoir bien résisté, et le contrôle de l’une et l’autre chambre est encore incertain. On se rappellera qu’en 2010 et en 2018, passages respectifs de la Chambre aux républicains et aux démocrates, l’information était connue le soir même.

C’est que le contexte politique de cette élection, qui en temps normal mobilise bien plus l’électorat d’opposition que l’électorat du camp présidentiel, est tout sauf habituel. La polarisation de la société américaine en deux camps idéologiques et même culturels est plus forte que jamais.

Le camp républicain, nous l’avons dit, est à la fois radicalisé et fanatisé. Lors des élections primaires, les partisans de Trump, ceux qui nient la défaite républicaine de 2020, les complotistes ultrareligieux et maximalistes, l’ont emporté quasiment partout sur des candidats plus modérés (quoiqu’un républicain modéré soit, en France, l’équivalent de la droite radicale). Or, si la popularité de Joe Biden n’est guère reluisante, celle de Donald Trump est encore plus faible. Le rejet, en dehors du cercle très soudé et très organisés des conservateurs tendance maxi, de ses outrances et de sa négation de la défaite est encore très puissant. Les démocrates ont ainsi pu compter sur l’électorat centriste, qui a encore une fois pu faire la différence dans des États et circonscriptions-clefs.

En outre, le partage des pouvoirs, en apparence clairement en faveur des démocrates, n’est pas si net. Les États-Unis sont un pays fortement décentralisé, avec un système judiciaire indépendant aux compétences très larges. Chaque État (hormis le Nebraska) dispose de son propre Sénat et de sa propre Chambre des représentants, qui ont une latitude politique très large. Dans les États-clefs, Michigan, Wisconsin, Pennsylvanie, etc., les républicains dominent les législatures locales depuis plus d’une décennie. La Cour suprême est dominée par des juges conservateurs anti-avortement depuis le mandat Trump. Ainsi, la décision récente de ne plus protéger l’avortement au niveau fédéral, en donnant aux États le pouvoir en la matière, entraînant des lois immédiates de limitation du droit à l’avortement dans les États à législature républicaine, a pu donner l’impression d’un fort contrôle républicain et conservateur sur la politique locale comme nationale.

Ainsi, deux campagnes ont été menées en parallèle, presque hermétiquement l’une par rapport à l’autre. Les républicains expliquaient que les démocrates au pouvoir aggravaient l’inflation et l’insécurité. Leur frange radicale ajoutait qu’ils avaient volé l’élection de 2020. Les démocrates expliquaient de leur côté que les républicains menaçaient la démocratie et les libertés individuelles. Sur ce dernier registre, la désignation des secrétaires d’État des États fédérés représentait cette année un enjeu déterminant : cette fonction est stratégique car les titulaires du poste sont chargés de l’organisation des scrutins (notamment les limitations possibles au droit de vote ou du vote par correspondance) et de leur contrôle. Selon les États, une partie est désignée par les gouverneurs et les autres sont élus directement par les électeurs. Or plusieurs candidats républicains appartenaient au camp des « négateurs », c’est-à-dire cette branche radicalisée des républicains qui prétend encore que l’élection de Joe Biden à la présidence des États-Unis d’Amérique est frauduleuse : donner le contrôle des élections par ce courant politique (soit en élisant un gouverneur négateur, soit en élisant un secrétaire d’État négateur) aurait pu avoir des conséquences désastreuses pour le prochain scrutin présidentiel, et l’on a vu dans les débats nombre d’électeurs ou de candidats républicains expliquer tranquillement qu’ils n’accepteraient pas le verdict des urnes, prétendant qu’un résultat défavorable ne pourrait qu’être le signe d’une manipulation du scrutin. Dans les grandes lignes, l’outrance des positions politiques de ces candidats leur a été défavorable ce qui est en soi une bonne nouvelle.

Force est de constater que les démocrates ont échappé au triomphe républicain annoncé. Dans plusieurs États, des référendums se tenaient soit pour interdire l’avortement, soit pour le protéger dans la constitution locale. Partout où les votes avaient lieu, même dans le très conservateur Kentucky, les anti-avortement ont perdu.

Au Sénat, tout semble indiquer que les démocrates garderont le contrôle de la chambre haute. Ils ont remporté le siège très contesté et jusqu’alors républicain de Pennsylvanie, et ont sauvé leur poste en Arizona. Au Nevada, les républicains n’ont plus que 800 voix d’avance, et les derniers bulletins à dépouiller viennent de bureaux de vote très démocrates. En Géorgie, où un second tour devra se tenir, le sortant démocrate est en ballottage favorable. Cela donne un Sénat avec 49 démocrates et 49 républicains, en attente de ces deux résultats. Les démocrates n’ont besoin que d’une victoire pour conserver leur majorité, les républicains ont besoin de l’emporter dans les deux États, car en cas d’égalité de vote, c’est le vice-président, en l’occurrence la démocrate Kamala Harris, qui départage le scrutin.

consolidation des résultats pour le Sénat selon l’Associated Press ce matin à 5h52

À la Chambre des représentants, une victoire républicaine reste plus probable, mais n’est pas encore acquise. En l’état actuel du dépouillement, les républicains ont une avance de quatre sièges, mais 21 circonscriptions sont encore incertaines, et parmi elles, il n’est pas exclu que les démocrates repassent devant les républicains dans quatre d’entre elles. Les démocrates l’ont emporté dans des circonscriptions difficiles, qui parfois ont voté pour Donald Trump aux élections présidentielles.

consolidation des résultats pour la Chambre des représentants selon l’Associated Press ce matin à 5h52

Si les résultats nationaux semblent ainsi montrer une résistance démocrate nationale plus importante que prévue, il ne faut pas perdre de vue le caractère essentiellement local de l’élection de mi-mandat dans certains États. En effet, le système électoral américain fait que l’on vote en même temps pour tous les scrutins, quand il y en a plusieurs. La majorité des États élisaient ainsi le même jour leur gouverneur et leur législature locale. Avec la remise en cause du droit à l’avortement au niveau fédéral, et le transfert de cette compétence au niveau local, ce sujet a mené de nombreux électeurs démocrates aux urnes pour défendre, localement, le droit à l’avortement, leur permettant par la même occasion de voter démocrate à l’élection du sénateur fédéral et du représentant. Ainsi, en Arizona et en Pennsylvanie, où l’élection du gouverneur a déchaîné les passions, voyant l’affrontement entre républicains trumpistes radicalisés et démocrates battant campagne sur le thème de la défense du droit à l’avortement et de la démocratie, la victoire, assez nette, des démocrates, a eu un effet levier sur les autres élections. A l’inverse, la forte performance des républicains en Floride pour la réélection du gouverneur entraîne le basculement de 4 circonscriptions de représentants dans le camp républicain. Dans l’État de New York, la campagne catastrophique de la gouverneure démocrate sortante, qui ne l’emporte que de 5 points sur son opposant républicain, fait perdre aux démocrates 4 représentants, et peut-être un cinquième, le dépouillement n’étant pas encore achevé.

Les républicains, s’ils l’emportent à la Chambre des représentants, ne devront peut-être leur victoire qu’à un phénomène déjà observé depuis 2020, le basculement d’une partie des hispanophones dans le camp républicain. La Floride, jadis un Etat pivot votant alternativement démocrate et républicain, est désormais clairement passée dans le camp républicain. Le sud du Texas, une des rares zones rurales votant traditionnellement pour les démocrates, a élu cette année un représentant républicain, et le gouverneur démocrate sortant du Nevada a été battu par un républicain. Ce basculement, pas encore pris en compte par les démocrates mais au cœur de la stratégie républicaine, on se souvient des pubs de campagnes en espagnol diffusée par Donald Trump la dernière semaine de campagne en 2020, doit nous interroger. Un électorat populaire, issu des minorités et de l’immigration, très conservateur sur les questions de société, bascule à droite malgré un camp progressiste qui ne parle que d’intégration des minorités.

Six ans après le retour de la question sociale dans la vie politique américaine, avec la campagne très suivie de Bernie Sanders, quatre ans après les victoires tonitruantes de « democratic socialists » comme Alexandria Ocasio-Cortez à la chambre des représentants, la gauche du parti démocrate semble faire grise mine. Elle n’est plus au centre de l’attention, et ne progresse plus, l’électorat modéré passé au parti démocrate influençant plus qu’avant le résultat des primaires, et empêchant à la gauche progressiste de l’emporter dans de nouvelles circonscriptions.

Le bipartisme américain cache en effet de véritables factions organisées au sein des démocrates et des républicains. Le caucus progressiste, organisation de l’aile gauche démocrate à la Chambre des représentants, était le plus nombreux à la chambre en 2020, devant les New Democrats, au centre du parti, et les Blue Dogs, incarnant l’aile droite, centriste et ultra-libérale. La première moitié du mandat Biden a été marquée par l’obstruction politique constante de la droite du parti démocrate, menaçant de voter avec les républicains au Sénat et à la Chambre des représentants si les réformes sociales étaient poussées « trop loin ». La radicalité républicaine a ainsi renforcé les démocrates modérés, paralysant l’action politique, empêchant Joe Biden, pourtant New Democrat, de mener à bien certaines de ses réformes. Même en cas de victoire démocrate à la Chambre des représentants, il est peu probable que cela se traduise par des avancées politiques, les Blue dogs étant prêts à tout bloquer si les intérêts financiers de leurs riches sponsors sont mis en danger. Dans l’État de l’Oregon, le fondateur de Nike a créé de toutes pièces une candidature démocrate dissidente au poste de gouverneur, car la vainqueure des primaires était issue de l’aile gauche, et avait un programme social développé d’augmentation des salaires. Cette dissidence a failli faire passer cet État, un des plus démocrates du pays, sous un mandat républicain.

Chez les républicains, le problème Trump commence à être évoqué. Les opposants à Trump, décimés dans les primaires, manquent cependant de leaders pour incarner cette contestation. Ron DeSantis, galvanisé par sa réélection écrasante comme gouverneur de Floride, apparaît comme un recours pour les républicains trumposceptiques (bien que pas moins à droite). Reste à savoir s’il osera affronter l’ancien président, toute opposition interne à Donald Trump ayant été synonyme de fin de carrière politique depuis 2016. La prise en main du parti par l’extrême droite ultrareligieuse est un sable mouvant dont les républicains ne peuvent pas sortir et qui cause leur perte à répétition. La question de l’avortement, qui dépasse d’ailleurs le camp Trump et est combattu par l’ensemble du parti, ne cesse de les marginaliser, les Américains montrant sans relâche leur attachement à cette liberté fondamentale, combattu par une minorité cléricale très organisée.

Le cycle électoral de 2022 n’est pas encore terminé, on ne sait pas encore qui aura la majorité à la Chambre, et comment ces majorités seront utilisées. Les réformes sociales, tant attendues, n’auront probablement pas lieu, même en cas de victoire démocrate. La coalition démocrate, alliant catégories populaires, électorat féminin, minorités sexuelles et ethniques, et riches centristes modérés effrayés par les excès républicains, risque fort de se déliter. Elle n’est soudée que par la détestation commune de Donald Trump et la défense du droit à l’avortement. En cas de remise en cause du primat trumpiste au parti républicain, les contradictions démocrates risquent fort de s’ouvrir à vif. Un choix devra être fait, entre les catégories populaires et les intérêts financiers. Les uns comme les autres pourraient basculer dans le camp républicain. Reste à espérer que les intérêts populaires primeront.

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